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L’enseignement dans le curriculum Waldorf en tant qu’expression artistique :

CHAPITRE 2 : APPROCHE MÉTHODOLOGIQUE

2.1. L’enseignement dans le curriculum Waldorf en tant qu’expression artistique :

Nous pensons que ni la vision technologique de l’enseignement, dans le sens

instrumental, ni la vision de la praxis dans l’enseignement, si elles sont

considérées de manière absolue, ne peuvent être les voies qui conduisent à la

compréhension de la dimension artistique de l’enseignement en tant qu’objet de

recherche.

Une telle dimension cherche à inclure une multitude d’aspects qui jusqu’alors

n’ont pas obtenu une explication dans les deux schèmes déjà mentionnés.

Nous avons cherché des traces de cette dimension artistique au sein de la

propre pensée pédagogique afin d’établir ainsi des associations qui pourraient

situer les éléments artistiques, qui se distinguent dans l’enseignement, en

suivant les auteurs qui ont soutenu la thèse que l’enseignement est un art ou

qui perçoivent en lui quelque chose d’artistique.

Dans le vaste réseau de représentations ici exposées, concernant les champs

fondamentaux de notre recherche, nous avons essayé de délimiter des

concepts dans le domaine de l’enseignement, pour rendre plus évident ce que

nous entendons par enseignement en tant qu’art, il en sera de même pour les

autres concepts qui lui seront associés dans cette recherche : curriculum,

éducation formelle, pédagogie, instruction et didactique, tout cela dans le but de

minimiser les doutes que pourrait avoir le lecteur lorsqu’il se trouve en présence

de cette terminologie.

Nous avons également exposé le fait qu’il existe des idées très vagues quand

nous avons parlé de l’enseignement en tant qu’art. Il s’agit le plus souvent

d’associations qui sont peut être à l’origine des concepts classiques de

« l’art” »du « beau », de « l’expression », de « l’autonomie de l’artiste », etc.

Mais, à aucun moment, nous n’avons trouvé des antécédents de recherche

ayant eu pour objet d’étude le domaine artistique de l’enseignement

21

. De

même nous avons essayé de montrer le réseau de significations qui peuvent

surgir dans le langage de l’art, lors de l’interprétation ultérieure de notre objet

de recherche.

C’est pour nous un fait singulier qu’il existe un curriculum dans lequel,

vraisemblablement, d’après les réflexions pédagogiques qui lui servent de

soutien, il devienne possible d’interpréter la dimension artistique de

l’enseignement, ainsi que ses conséquences sur l’éducation formelle.

Dans ce sens, notre recherche est axée sur l’observation de situations

d’enseignement du Curriculum Waldorf. C’est la piste qui nous a semblé la plus

intéressante pour notre recherche du fait que cette pédagogie assume

ouvertement l’idée de l’enseignement en tant qu’art et l’idée que l’enseignant

est un artiste.

En plus d’être un curriculum vivant, il est facilement identifiable comme

référence, ce qui n’est en rien négligeable, dans le contexte éducatif actuel.

On réclame actuellement une plus grande autonomie pour les écoles, un plus grand pouvoir de décision pour les maîtres et les professeurs, un plus grand engagement des parents dans les projets qu’on entreprend au sein des écoles. Aujourd’hui, on conteste également la vision technologique de l’éducation qui voit l’enseignement comme le champ d’application des Sciences de l’éducation au sein duquel le maître devient un agent d’application de règles sans qu’il existe un dialogue, une information “aller-retour” entre les planificateurs du curriculum et les praticiens. Enfin on reconnaît que l’enseignement pourrait plutôt être un art et la pédagogie une théorie qui le traduit et que, par conséquent, le maître peut apprendre sur la nature de l’éducation davantage

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Luzuriaga (1991) souligne que Ernst Weber a écrit un livre : L’esthétique comme science fondamentale de la pédagogie/ Nassif (1978) mentionne aussi l’œuvre de Ernst Weber. Nous avons trouvé le nom de Ernst Weber comme l’auteur de l’œuvre Ästhetik als pädagogische Grundwissenschaft (1926) mais, malheureusement, nous n’avons pas trouvé le livre ni en anglais, ni en espagnol, ni en français. Selon Nassif, Weber donne une importance particulière au style personnel de l’enseignant et à la partie créative chez celui-ci dans le processus d’enseignement.

grâce à son discours qu’à celui des autres, en vérifiant ses propres idées dans la pratique.

Face à ces critiques et demandes on ne peut pas éviter de penser à la pédagogie Waldorf et on ne peut pas ne pas s’intéresser à ce qu’elle propose aux maîtres et aux élèves, à son organisation, ses principes et ses inspirations, d’autant plus que la pédagogie Waldorf a mis en pratique au cours des quatre vingt dernières années des méthodes et des idées qui sont en relation avec les besoins actuels de l’éducation (Ramírez, 1999, p. 4).

La Pédagogie Waldorf est aujourd’hui une expérience qui a pris vie dans plus

de 50 pays du monde entier et qui accueillent 180.000 élèves dans près de 900

écoles sans compter les 1.600 jardins d’enfants.

Des études réalisées en France, ont donné comme résultats 85% de succès au

baccalauréat pour les élèves qui se sont présentés un an après avoir terminé

leurs études de première et 91% si l’on y inclut les élèves ayant passé le bac

deux ans après leur sortie de première.

Si l’on considère que la moyenne enregistrée par l’Education Nationale, durant

les quatre années prises en compte dans ces études, a été de 77%, la réussite

des Ecoles Waldorf est bien au-dessus de la moyenne

22

.

De même il existe une enquête réalisée en Espagne dans laquelle figure

l’estimation de plusieurs facteurs dont les résultats on été positifs

23

par rapport

à :

-Evaluation du niveau de connaissances reçues à l’école,

-Relation entre les professeurs et les élèves de l’école en comparaison

entre les centres dans lesquels ils ont fait leurs études,

-Evaluation de la Pédagogie Waldorf en comparaison avec d’autres

méthodes d’enseignement,

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-Valeurs, autant en connaissances générales qu’humaines, qu’ils considèrent

avoir obtenues à l’Ecole Waldorf.

Si nous tenons compte de ces résultats, il serait intéressant d’inclure les Ecoles

Waldorf dans le projet concernant l’amélioration de l’école (Hopkins et

Lagerweij, 1997), qui est en cours en Europe et en Amérique Latine, étant

donné que les résultats obtenus dans ces écoles pourraient beaucoup aider à

l’émergence de nouvelles catégories jusqu’alors ignorées.

La première Ecole inspirée par cette pédagogie est née en septembre 1919 à

Stuttgart (Allemagne) dont le responsable était Rudolf Steiner

24

.

C’est, en conséquence, dans ses origines, une expression du mouvement

anthroposophique

25

, celle-ci se développe, plus précisément, durant une étape

avancée de ce mouvement et se caractérise par le développement des idées

sur l’éducation, l’enseignement, le travail du maître avec les enfants, enfin tout

ce qui concerne le curriculum.

24

Rudolf Steiner, d’origine autrichienne, est né à Kraljevec (aujourd’hui partie de la Croatie) le 27 février 1861. Il est mort le 31 mars 1925 en Suisse. Il a fait ses études à l’Ecole Polytechnique de Vienne. A l’âge de 28 ans (1889) il a voyagé pour la première fois à Weimar (Allemagne) pour collaborer dans l’édition des oeuvres scientifiques de Goethe. Déjà en 1882, grâce à sa relation avec l’éminent germaniste Karl Julios Schröer, il avait été invité par Julios Kürschner à publier une introduction et des commentaires des oeuvres scientifiques de Goethe dans sa collection de la Littérature Allemande. Après cette première rencontre avec Goethe, il a écrit un petit livre intitulé : Epistémologie de la Pensée Goethéene, publié en 1886. Durant sept ans il a travaillé dans les archives de Goethe et Schiller, dont il était responsable pour l’édition d’une partie des oeuvres scientifiques de Goethe.

En 1891, R. Steiner obtenait son doctorat à l’Université de Rostock avec la thèse Essai d’uneExplication de la Conscience Humaine avec elle-même.

De 1887 à 1900, il a été â Berlin le Directeur du «Das Magazin für Literatur» et professeur à l’Université Libre de Berlin. Steiner commença sa tâche de conférencier orienté vers des tendances spirituelles, lors d’une invitation faite par des membres de la section allemande de la Société Théosophique à Berlin en 1900. Il fût conférencier indépendant et non pas un membre inscrit dans cette société. A partir de 1902 il prend en charge la responsabilité de la section allemande jusqu’à1912, date de la séparation définitive d’avec le mouvement théosophique. Cette même année, la Société Anthroposophique est fondée. Son immense oeuvre compte environ 30 livres, 8 volumes d’articles et d’essais et 6.000 conférences. Parmi ses oeuvres les plus connues figurent : Epistémologie de la Pensée Goethéene (1886), Vérité et Science (1891), Philosophie de la Liberté (1894), Goethe et sa Conception du Monde (1897), Théosophie (1904), L’éducation de l’Enfant à la lumière de la Science Spirituelle (1907), La Science de l’Occulte (1909) et Les Enigmes de la Philosophie (1914).

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L’anthroposophie est un savoir au moyen duquel une personne peut aspirer à la connaissance suprasensible par une méthode particulière. L’homme est entendu comme une partie d’un cosmos ayant la même origine (spirituelle); par conséquent, cette connaissance développe une conception de l’homme (anthropos) et une conception de l’univers (cosmogonie). Les fondements (les bases) de l’anthroposophie ont été mis en pratique dans divers domaines : l’architecture, l’agriculture, l’éducation et la médecine.

Parmi les concepts développés dans la vision pédagogique de ce mouvement,

on constatera l’importance donnée à l’art comme axe d’expression des

situations didactiques.

Nous avons pensé que le curriculum Waldorf était un espace privilégié pour le

développement de notre thèse. Cela a donc impliqué une approche des écoles

qui le mettent en pratique, en observant des situations d’enseignement dans

lesquelles nous avons donné la priorité à l’observation du travail du maître, à

l’organisation du contenu qu’il se propose d’enseigner, à l’organisation des

tâches et activités qui se déroulent en classe, à l’évaluation qu’il réalise au

cours de l’enseignement.

Cela suppose, tout d’abord, de se servir des connaissances provenant de

différents domaines disciplinaires, entre autres, ceux qui ont contribué à

dévoiler la nature de l’art et des éléments propres à celui-ci, reconnaissant qu’il

s’agit d’un domaine complexe, où il n’existe pas une seule vision.

Ce domaine nous conduit également à nous enrichir de connaissances

pédagogiques, riches aussi en visions distinctes, nous incluons ici bien sûr la

vision propre à la pédagogie Waldorf. La nature ouverte du curriculum et de l’art

permet le concours des dissimilitudes, des regards différents.

C’est la raison pour laquelle la multiréférentialité devient un concept-clé pour

aborder notre travail. L’analyse multiréférentielle des situations sociales

suppose «une lecture plurielle, sous différents angles et en fonction de

référents distincts, non supposés réductibles les uns aux autres, face à des

objets qu’elle veut appréhender » (Ardoino, 1978, p. 247). La multiréférentialité

est associée aux différents registres d’interprétation que le chercheur peut avoir

d’une même situation.

Nous aborderons le curriculum Waldorf dans les situations propres à

l’enseignement et nous essayerons d’entrevoir dans celles-ci, des qualités,

dans le sens donné par Eisner (1998) lorsqu’il décrit une enquête, c'est-à-dire,

lorsqu’il s’agit de révéler des attributs, des caractères, des propriétés des

signification que les maîtres eux-mêmes accordent à leurs actes en tant que

co-formateurs de ces processus, sans laisser de côté la partie de la

signification due au fondateur lui-même et à son imaginaire.

Il s’agit donc, non seulement d’observer en décrivant, mais aussi d’écouter les

récits que les maîtres ont de leur propre pratique, dans un échange où n’est

pas exclue une profonde conversation. Il ne s’agit pas d’aller à la rencontre de

notre objet de recherche avec des catégories prédéterminées pour savoir dans

quelle mesure ce qui est observé est l’expression de ces dites catégories.

Ce qui compte, dans notre cas, c’est d’enquêter sur ce que cet objet a à nous

montrer, ce qu’il a à dire de ses particularités et ce qui fait de lui ce qu’il est et

pas autre chose.

En ce sens, une implication périphérique avec la connotation que lui concède

Lapassade (1996) nous semble adéquate pour observer les situations

d’enseignement :

Les chercheurs qui choisissent ce rôle –ou cette identité- considèrent qu’un certain degré d’implication est nécessaire, indispensable pour qui veut saisir de l’intérieur les activités des gens, leur vision du monde. Ils participent suffisamment à ce qui se passe pour être admis au «centre» des activités. Ils n’assument pas de rôle important dans la situation étudiée (p. 47).

Ce qui vient d’être exposé ne signifie pas que nous arrivions à l’investigation

vierge de toutes influences, bien au contraire, il y a trois aspects visibles

d’influences antérieures dans cette recherche que d’aucuns pourraient

envisager comme des préconceptions.

La première est due à la formation et à l’expérience professionnelle même du

chercheur dans le domaine du curriculum, dont le vécu ne peut se nier.

La deuxième est due à la recherche documentaire sur l’art que nous avons déjà

longuement exposé dans le premier chapitre.

La troisième est due aux connaissances théoriques au sujet de la pédagogie

développée par R. Steiner que le chercheur a consultée et étudiée avant de se

décider à enquêter sur le terrain de la pratique. Ces influences ou

préconceptions ne peuvent être écartées, elles ont leur utilité et serviront tout

d’abord de sujet d’échange, de discussion avec les maîtres durant les

rencontres personnelles, puis par la suite, il deviendra comme un support de

référence au moment de l’interprétation théorique des données obtenues.

En ce sens, avant toute interprétation de la part du chercheur, ce qui nous

intéresse c’est que l’information obtenue soit utilisée, comme le font les

ethnographes, pour structurer la recherche. Il y a ici, une dimension inductive

dans notre travail, à partir de laquelle, par condensations successives de

l’information recueillie sur le terrain, nous prétendons élaborer des catégories

qui expliquent les données.

Comme nous l’avons dit, nous ne disposons pas d’une théorie préalable de l’art

de l’enseignement, et bien plus, nous ne disposons même pas d’un discours

cohérent qui l’explique, au contraire, nous sommes à la recherche de sa

construction à partir du Curriculum Waldorf, sans avoir l’intention de généraliser

mais seulement de présenter une interprétation de celui-ci. Il s’agit donc d’une

méthode de construction de catégories «qui peuvent s’obtenir à partir de la

continuité du comportement; dans un procédé d’abstraction, dans lequel les

unités d’analyse sont révélées au cours de l’observation et de la description»

(Goetz et Lecompte, 1988, p. 31).

Nous pensons que le processus qui permet de connaître ce qui se passe dans

les situations d’enseignement ne peut pas être interprété sans établir les

relations avec le « tout » où elles ont lieu. Ce processus n’est pas

unidirectionnel mais dialectique, dans le sens que : « nous passons à nous

saisir du tout, puis à nous concentrer sur les parties et de celles-ci nous

passons à nouveau au tout. De cette façon, et grâce à des approximations

successives, nous donnons un sens et une signification aux processus

observés » (Martínez, 1989, p. 99). Quoique ceci soit la base de notre méthode

notre recherche n’ait pas été intentionnelle et n’ait pas obéi à un paradigme de

recherche centré avant tout sur le maître.

Il est certain qu’aujourd’hui beaucoup d’auteurs considèrent la classe comme

un écosystème et beaucoup des recherches menées dans les trente dernières

années, selon une perspective ethnographique, ont essayé de comprendre la

vie dans la salle de classe dans toute sa complexité (Hammersley et Atkinson,

1983 ; Hargreaves, 1977 ; Jackson, 1994 ; Woods, 1987, 1997, 1998).

Le modèle écologique dans l’enseignement (Doyle, 1977 a,b) a été revitalisé

par l’interprétation des apports des études ethnographiques mentionnées. De

ces études, nous considérons fondamental, non seulement les situations

d’enseignement mais aussi le contexte dans lequel celles-ci sont données, c’est

à dire, l’école. Les caractéristiques de ce milieu ambiant sont d’une importance

fondamentale ; ceci nous aidera à comprendre les conditions curriculaires dans

lesquelles se déroulent les processus d’instruction.

Même si nous comprenons la complexité des situations éducatives, la

complexité de leurs interactions ainsi que l’importance d’un regard écologique,

nous orienterons notre observation vers le maître, bien que cela ne signifie pas

que notre registre d’observation soit limité ou ne comporte pas d’autres

aspects.

Il s’ensuit ainsi que notre but dans cette recherche consiste à caractériser

l’enseignement et l’enseignant Waldorf dans les huit premières classes, étape

durant laquelle il est attendu du maître qu’il soit en rapport avec la nature et les

besoins de l’enfant. Cette nature est définie par Steiner comme artistique,

plastique. L’enfant apprend car il est spécialement sensible aux images et, en

conséquence, le maître doit réaliser un travail artistique dans l’éducation afin

d’être en rapport avec la nature de l’enfant, telle qu’elle est perçue dans la

pédagogie Waldorf.

Depuis le moment de la deuxième dentition jusqu’à l’âge de la puberté, l’enfant est un artiste puéril (…) Puisque l’enfant exige à présent que tout lui est donné sous une forme artistique imagée, il faut que l’éducateur donne une forme artistique à son enseignement (...) il faut que l’éducation se pénètre d’art et qu’un rapport artistique s’établisse entre l’enfant et l’adulte durant cette seconde période du développement (Steiner, 1988 b, pp. 37-38).

A l’âge artistique l’influence du milieu est très forte, l’être se fortifie

intérieurement et ne laisse pas diffuser cette influence des impressions. Sa

perception sensible se situe à la périphérie, ses sens s’émancipent. Une

relation s’établit entre l’enfant et le monde. Cette relation n’est pas intellectuelle,

elle ressemble au sentiment artistique.

Les choses du monde ne sont pas reçues passivement, laissant transmettre

ses vibrations jusqu’à notre organisme, mais il y a une nécessité intérieure de

les transformer en images. Il ne faut pas en arriver à l’extrême de

l’intellectualisme, « Il est nécessaire, au contraire de donner à celui-ci des

images, des sentiments, des représentations plastiques, mobiles, artistiques qui

grandissent avec lui, se métamorphosent et croissent du seul fait que l’âme se

développe » (op. cit., p. 40).

Ainsi nous constatons que cette pédagogie concède une importance décisive

au maître et le caractérise comme un artiste dans cette étape de la vie scolaire

de l’enfant (7-14 ans), d’où notre observation se dirige, fondamentalement, vers

l’enseignement et vers le maître.

Il existe la possibilité que, dans le cadre de cette pédagogie, les maîtres

s’éloignent d’actuations automatiques et qu’ils fassent un effort pour créer et

produire des choses nouvelles dans un « défi permanent à la capacité d’innover

et de reconstruire » (Gimeno et Pérez, 1985), surtout si les circonstances du

milieu scolaire leur sont favorables.

C’est ainsi que, nous avons cru qu’il convenait de nous demander ce que nous

pouvions apprendre à partir d’une recherche de cet art d’enseigner, en

observant des situations réelles d’enseignement, surtout parce que nous

partageons l’hypothèse qu’ :«inhérent à la pratique des professionnels que

nous reconnaissons comme spécialement compétents, il existe un fondement

artistique» (Schön, 1992).

S’il est bien vrai qu’il existe dans cette pédagogie, une conception de l’homme

qui est la base de ce que pratiquent les enseignants dans leurs classes, il n’en

est pas moins vrai que, dans la pratique, cette conception s’enrichit. En fin de

compte un curriculum ne se réduit pas à ses fondements théoriques mais la

pratique fait de lui ce qu’il est, sinon il n’existerait pas de connaissance

pédagogique. En conséquence nous pensons que la source à laquelle nous

devons avoir recours c’est le maître, vu que c’est lui qui la possède dans sa

pratique.

En ce sens, il est bon de se rappeler que « l’essentiel de l’éducation,

correspond au rapport même qui va s’établir entre (...) l’enfant et l’adulte, et à

l’évolution de ce rapport, qui dépend de ce que l’un et l’autre feront. Ni au

pédagogue, ni au médecin on ne demande de théorie complète de leur activité,

qu’ils seraient du reste bien incapables de fournir » (Castoriadis, 1975, p. 100).

Dans notre cas particulier, il est possible que cette connaissance pratique