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L’État, acteur incontournable de l’aménagement francilien

1.1. Les outils étatiques d’aménagement de l’agglomération parisienne au XX e siècle

1.1.5. L’État, acteur incontournable de l’aménagement francilien

Ainsi, au cours du XXe siècle, l’État a toujours piloté les réflexions sur l’aménagement en Île-de-France, en constituant des commissions ad hoc (commission d’extension de Paris de 1911, le CSAORP de 1928) en mobilisant des professionnels, soit par le biais de concours - pour l’extension de Paris de 1919 -, soit par le biais de services de l’État - avec l’IAURP par exemple. Plusieurs documents sont produits, tels que le rapport de la commission d’extension de Paris, mais aussi des plans, le PARP, le SDAURP ou encore le SDRIF. Ces documents trouvent leurs cadres légaux grâce à plusieurs lois : la loi du 14 mai 1932 fixant les objectifs du PARP, ou encore

121 Le Livre blanc de l’Île-de-France, 1990, est rédigé par l’État, la Région et

la Ville de Paris. Le Livre bleu, réflexions sur le livre blanc de l’Île -de- France, 1990, est cosigné par le Président de Région, les Présidents des Conseils Généraux et le Maire de Paris. Le département des Hauts -de-Seine rédige une charte d’aménagement, approuvée en février 1991. La Ville de

la loi d’orientation foncière de 1967. Ces textes sont rédigés en même temps, voire après la production des plans et schémas d’aménagement, et fournissent le cadre légal aux actions déjà engagées par l’État. En parallèle, l’État modifie à plusieurs reprises l’organisation de la gouvernance en Île-de- France, une première fois en 1964 en dissolvant le département, puis en 1983 et en 1995 en transférant progressivement la compétence pour rédiger un document d’urbanisme à l’échelle régionale à la Région Île-de-France.

Ce retour historique montre que l’État a toujours engagé et piloté les réflexions sur l’aménagement de la région parisienne. Ainsi, l’initiative de la Région de rédiger un nouveau SDRIF en 2004 fait figure de cas particulier dans l’histoire de l’aménagement de l’agglomération parisienne. Ce moment est en effet la première fois qu’un document d’urbanisme à l’échelle de l’Île- de-France est rédigé par un organe autre que l’État. Cette position inédite n’est pas assumée sans difficulté puisqu’en 2003, lorsque Estèbe et Le Gallès écrivent l’article « La métropole parisienne : à la recherche du pilote ? »122, ils font le constat que la Région en tant que collectivité rencontre des difficultés pour s’affirmer face à l’État. Cette initiative régionale n’est d'ailleurs que de courte durée puisque Nicolas Sarkozy entame dès 2007 une série d’actions interférant avec les travaux de la Région. Cette prolifération d’interventions étatiques ces cent dernières années en Île-de-France indique que ce territoire reste un espace stratégique pour le pouvoir central, par son rôle dans l’économie nationale mais aussi pour inscrire dans l’espace l’ambition portée par l’État. Pour ce faire, ce dernier met en place des actions et des outils de nature hétérogène. Dès lors, il est clair que la démarche engagée par Nicolas Sarkozy en 2007 n’est pas aussi inédite que ce dernier semble le soutenir dans son discours du 29 avril 2009 prononcé à l’occasion de l’inauguration de l’exposition des travaux des dix équipes à la Cité de l’Architecture et du Patrimoine. On peut même considérer qu’elle rentre dans une tradition d’implication de l’État particulièrement importante et singulière à l’Île-de- France. Le retour historique montre que les actions engagées par l’État à

122 Estèbe Philippe, Le Gallès Patrick, « La métropole parisienne : à la

recherche du pilote ? », in Paris revue française d’administration publique, n° 107, 2003, p. 345-356.

partir de 2008 rentrent dans une continuité historique. D’une part, au début du XXe siècle, des architectes-urbanistes123 emploient des approches d’objectivation afin de réaliser un diagnostic préalable à la réalisation de propositions d’aménagement. Cette démarche n’est pas sans rappeler le souhait du BRAUP de solliciter des équipes composées d’architectes et de chercheurs en 2008. Le contexte du début du XXe siècle où l’Urbanisme se constitue en tant que discipline scientifique à travers la mise en place d’outils techniques, à l’instar de la carte statistique ou de la cartographie par photo aérienne, peut également faire écho à la situation des années 2000 qui voient se jouer un débat sur les caractéristiques d’une recherche en Architecture124. Ce pan de l’histoire de l’aménagement de la région parisienne voit une implication d’architectes-urbanistes sollicités par l’État, soit via un concours international soit via une mission directe. Les plans qui sont ainsi produits ont tendance à être fortement associés à leurs concepteurs. D’autre part, la création du Secrétariat d’État chargé de Développement de la Région Capitale peut apparaître comme une réminiscence de la mise en place, dans les années soixante, d’instruments dédiés à la mise en place du SDAURP. Cet autre aspect de l’histoire de l’aménagement francilien voit plus une tendance à produire des formes d’expertise dans des structures techniques servant la prise de décisions politiques. Dans ce second cas, ce sont des hommes d’État qui se trouvent davantage sur le devant de la scène, à l’instar de de Gaulle et Delouvrier. En 2008, ces deux tendances semblent cohabiter, tout en servant le même objectif, la mise en place en Île-de-France d’un projet porté par le Président de la République au détriment de celui porté par la Région.

123 Nous utilisons ce terme bien qu’anachronique pour le cas de Léon Jausselly,

mais décrivant bien son profil a posteriori.