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L’équilibre du marché en cas d’asymétrie de l’information

Chapitre 6 : Le phénomène de sélection adverse

6.2.   L’équilibre du marché en cas d’asymétrie de l’information

p p

dq p q p dq p q q f q p q q E

0 0 2

/ 1 μ /

6.2. L’équilibre du marché en cas d’asymétrie de l’information

Le fonctionnement d’un marché où existe une asymétrie de l’information est donc caractérisé par les trois équations suivantes :

(

p

)

D D=

( )

p S S=

( )

p μ μ =

108 Il n’est pas nécessaire de donner des symboles différents à la qualité moyenne initiale de l’ensemble des voitures et à la qualité moyenne conditionnelle.

109 est la distribution de probabilité conditionnelle de la qualité q offerte pour un prix p.

( )

p S S = 2

p

p 1

1/2

p 2 q

( )q f

Figure 6.2

Proportion des voitures offertes pour lesquelles q<p

L’équilibre du marché résulte de la confrontation entre l’offre et la demande. Comme le montre la première équation, la demande est le produit de la comparaison par les acheteurs entre le prix p et la qualité moyenne μ. Pour l’offre (seconde équation), la comparaison porte sur le prix p et la qualité de la voiture proposée q. Enfin, la troisième équation montre que la qualité moyenne des voitures offertes sur le marché dépend du prix de marché.

Dans ces conditions, il n’existe aucun prix d’équilibre permettant la réalisation de l’échange.

En effet, pour un prix quelconque p, la qualité moyenne μ est égale à 2

p. Comme dans ce

cas, on a p p p

<

⎟=

⎜ ⎞

= ⎛

4 3 2 2 3 2

3μ , alors la demande D=D

(

p

)

est égale à 0, bien que à ce prix p, la quantité offerte est égale à

2

N p. Cette conclusion ressort bien dans la figure 6.3 :

Dans la zone I de la figure 6.3, on a p<μ et qui est la condition pour avoir une demande égale à

p Y D YA + B

= . Mais le côté offre est tel que 2

= p

μ . La condition pour que

p Y

D=YA + B n’est donc pas réalisée. Le même résultat est obtenu dans la zone II de la figure 6.3 où on a μ μ

2

< 3

p et qui est la condition pour avoir une demande égale à

p

D=YB . Mais ici également, le côté offre est tel que

2

= p

μ . La condition pour que

p

D =YB n’est donc pas réalisée.

Nous obtenons ainsi le résultat fondamental mis en avant par Akerlof : En cas d’asymétrie d’information, l’équilibre du marché peut être tel que les quantités échangées soient nulles. En d’autres termes, l’existence de l’asymétrie de l’information peut impliquer la disparition du marché. L’hypothèse de l’information parfaite dans les modèles économiques standards ne peut plus être considérée comme neutre.

Le processus conduisant à ce résultat est le produit du comportement des acheteurs et des vendeurs. La situation initiale est caractérisée par l’existence de voitures d’occasion de

μ

p

=p μ

2

= p p μ 3

=2 μ Zone I Zone II

Figure 6.3

différentes qualités de moyenne μ . Les acheteurs ne sont pas en mesure de faire la différence de qualité des voitures. Le prix qu’ils sont disposés à payer est donc identique pour toutes les qualités de voiture et se base, en général, sur la qualité moyenne. A un prix quelconque p, les vendeurs ayant une voiture de qualité qpse retirent du marché.110 Seules demeurent sur le marché les voitures de qualité q< p. De ce fait, au prix p, la qualité moyenne des voitures offertes baisse de 1 à 1

2p <

. Anticipant cette nouvelle qualité moyenne, les acheteurs n’acceptent pas de payer plus de

( )( )

3 2 p 2 , soit

( )

3 4 p.111 A leur tour, les vendeurs ayant une voiture de qualité supérieure ou égale à (3/4)p se retirent du marché. La qualité moyenne des voitures restant dans le marché baissera de nouveau à

( ( )

3 4 p

)

2, soit

( )

38 p. La poursuite de ce processus a pour corollaire la baisse continuelle de la qualité. A l’équilibre, le prix tendra vers 0 et aucune voiture ne sera échangée. Cet exemple montre comment le risque de sélection adverse est une source d’inefficience économique et sociale.

Le caractère extrême de cette conclusion, soit l’exclusion totale du marché de toutes les voitures d’occasion, est en fait du à l’hypothèse de continuité de la qualité q. On peut obtenir les mêmes résultats, moins extrêmes et plus intéressants du point de vue intuitif, en considérant que la qualité est une variable discrète. Supposons par exemple que la qualité des voitures d’occasion peut prendre 5 modalités différentes : très mauvaise (q=1), mauvaise (q=2), moyenne (q =3), bonne (q=4) et très bonne (q=5). Le vendeur connaît la qualité de la voiture qu’il propose à la vente. L’acheteur par contre, ne peut observer cette qualité mais dispose de croyances sur la qualité, croyances acquises par exemple à partir de l’observation des échanges passées. Supposons que pour l’acheteur, ces croyances sont telles que chaque modalité a la même probabilité d’occurrence, ce qui donne : probabilité (très mauvaise) = probabilité (mauvaise) = probabilité (moyenne) = probabilité (bonne) = probabilité (très bonne) = 1/5. Supposons également à titre de simplification, que le vendeur et l’acheteur ont le même prix subjectif et qu’il est de 1 pour la très mauvaise qualité, de 2 pour la mauvaise qualité, de 3 pour la qualité moyenne, de 4 pour la bonne qualité et de 5 pour la très bonne qualité.

Etant données ces croyances de l’acheteur, sa disposition à payer initiale est égale au prix moyen et est égale à

(

1+2+3+4+5

)

5=3. Mais à ce prix, les vendeurs ayant des voitures de très bonne qualité et de bonne qualité se retirent du marché car ils exigent un prix (respectivement 5 et 4) plus élevé. De ce fait, ne restent sur le marché que les voitures de qualités très mauvaise, mauvaise et moyenne. La nouvelle qualité moyenne μ est de ce fait, égale à

(

1+2+3

)

3=2 et la nouvelle disposition à payer est maintenant de 2, ce qui incite les propriétaires de voitures de qualité moyenne à se retirer du marché car ils exigent un prix (3) supérieur. De nouveau, la qualité moyenne baisse et devient 1,5 et les propriétaires de voitures de mauvaise qualité se retirent du marché. Ce processus s’arrête lorsque ne restent sur le marché que les voitures de très mauvaise qualité et le prix d’équilibre du marché est de 1. Ce résultat est un équilibre de sélection adverse, c'est-à-dire un équilibre du marché où ne s’échange que les biens de mauvaise qualité.

110 Rappelons que pour une qualité q, la disposition à payer des individus du groupe A est 1q.

111 On ne considère ici que les acheteurs du groupe B car ce sont ces individus qui ne possèdent pas de voitures d’occasion