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Equilibre bayésien parfait et croyances hors sentier d’équilibre

Chapitre 5 : Jeux dynamiques à information incomplète

5.4.   Equilibre bayésien parfait et croyances hors sentier d’équilibre

Pour la définition de l’équilibre bayésien parfait au sens faible, l’exigence de cohérence des croyances n’a porté que sur les croyances au niveau des ensembles d’information situés sur le sentier d’équilibre (ensembles d’information atteints avec une probabilité non nulle). C’est d’ailleurs cette caractéristique qui a motivé le qualificatif « au sens faible ». Afin que l’équilibre soit une prédiction raisonnable (crédible), il est nécessaire de poser des exigences de cohérence, ceci pour les croyances en dehors du sentier d’équilibre.

Pour qu’un sentier (séquence d’actions) soit optimal, il faut qu’il soit une meilleure réponse par rapport aux actions hors sentier d’équilibre. Il faut donc connaître les paiements qu’on

78 Rappelons que p est la croyance du joueur 2 que le joueur 1 ait joué L.

79 En anticipant quelque peu sur la section suivante, relevons que dans cet équilibre, il n’existe pas d’ensemble d’information en dehors du sentier de l’équilibre. Il n’existe pas donc pas de croyances hors équilibre. De ce fait, (L, l si « non A », p=1) est un équilibre bayésien parfait (sans rajout de la notion « au sens faible »).

pourrait obtenir en cas de déviation vers les actions hors sentier d’équilibre. Or, ces paiements dépendent, entre autres, des croyances hors sentier d’équilibre. En conséquence, un équilibre bayésien parfait doit non seulement spécifier les actions et les croyances sur le sentier d’équilibre, mais également les croyances hors sentier d’équilibre. Ces dernières doivent de plus satisfaire certains critères, en ce sens qu’elles doivent être raisonnables.

L’exemple de la figure 5.4 montre bien la nécessité de spécifier des croyances raisonnables non seulement au niveau des ensembles d’information atteints à l’équilibre mais également au niveau des ensembles d’information non situées sur le sentier d’équilibre.

Dans ce jeu, l’issue

(

A,l si"non A",Prob

( )

L =1

)

est bien un équilibre bayésien parfait au sens faible80. En effet, étant données les croyances du joueur 2 (c'est-à-dire Prob

( )

L =1), le choix optimal du joueur 2 est l’action l. De même, étant donné ce choix du joueur 2, la meilleure réponse du joueur 1 est de joueur A. Les seules croyances de cet équilibre, soit

( )

1

Prob L = et Prob

( )

R =0 se rapportent à un ensemble d’information n’appartenant pas au sentier d’équilibre (atteint avec une probabilité nulle). Ces croyances ne sont pas en contradiction avec la définition de l’équilibre bayésien parfait au sens faible et donc l’issue

( )

(

A,lsi"non A",ProbL =1

)

est bien un équilibre bayésien parfait au sens faible. Mais un simple examen de cet équilibre tel que représenté dans la figure 5.4 montre que ces croyances hors sentier d’équilibre ne sont pas raisonnables. En effet, pour le joueur 1, l’action L est strictement dominée par l’action R. Raisonnablement, si le joueur 1 ne retient pas l’action A, son choix optimal devient l’action R. La croyance raisonnable à cet ensemble d’information est de ce fait Prob

( )

R =1. Etant donnée cette dernière croyance, le meilleur choix du joueur 2 est

(

rsi"non A"

)

et la meilleure réponse du joueur 1 est bien l’action R. L’équilibre bayésien parfait ainsi obtenu

(

R,rsi"non A",Prob

( )

R =1

)

est repris dans la figure 5.5. Notons qu’à cet équilibre, le qualificatif « au sens faible » n’a pas été repris car il ne comporte pas de croyances non raisonnables en dehors du sentier d’équilibre.

80 Les actions de cet équilibre sont mises en évidence par les traits gras et les croyances indiquées dans l’ensemble d’information du joueur 2.

1 Joueur 2 0 Joueur 1

A L R

l r l r 2 3 3 5 4 2 3 4 4

0

Figure 5.4.

Raffinement sur la base du critère de domination

Dans l’équilibre décrit dans la figure 5.5, le caractère raisonnable des croyances en dehors du sentier d’équilibre est basé sur un raffinement des croyances obtenu par application du critère de domination.

Raffinement sur la base du critère de perfection en sous-jeux

Mas-Colell, Whinston & Green (1995) montrent à partir d’un exemple qu’un jeu dynamique en information imparfaite peut admettre un équilibre bayésien parfait au sens faible sans que ce dernier ne soit un équilibre de Nash dans tous les sous-jeux.81 La raison de cette incohérence est l’absence, dans la définition de l’équilibre bayésien parfait au sens faible, de restrictions portant sur les croyances hors équilibre. Il résulte de cet exemple, qu’une exigence immédiate à imposer aux croyances hors équilibre est un raffinement basé sur la perfection en sous-jeux. Pour qu’un équilibre bayésien parfait soit une prédiction raisonnable, il faut qu’il spécifie un équilibre de Nash dans tous les sous-jeux.

Raffinement sur la base du critère de domination par l’équilibre

Le critère de domination par l’équilibre permet d’obtenir un raffinement supplémentaire des croyances en dehors du sentier d’équilibre. Considérons pour cela le jeu de la figure 5.6.

81 A. Mas-Colell, M. Whinston & J. Green,1995. Page 290.

1 Joueur 2 0 Joueur 1

A L R

l r l r 2 3 1 5 4 2 3 4 4

0

Figure 5.6.

1 -1

a b

0 Joueur 2 1 Joueur 1

A L R

l r l r 2 3 3 5 4 2 3 4 4

0

Figure 5.5.

Dans ce jeu, l’issue

(

A,

(

bsiA,lsi"non A"

)

,Prob

( )

L =1

)

est bien un équilibre bayésien parfait au sens faible.82 Cependant et comme pour le jeu de la figure 5.4, cet équilibre est basé sur des croyances non raisonnables en dehors du sentier d’équilibre (c'est-à-dire au niveau de l’ensemble d’information du joueur 2). A la différence du jeu de la figure 5.4, l’action L n’est pas dominée par l’action R car le paiement du joueur 1 peut être supérieur ou inférieur à celui obtenu de par l’action L. En fait, pour le joueur 1, l’action L est dominée par l’équilibre

( ) ( )

(

A, bsiA,lsi"non A",ProbL =1

)

car à cet équilibre, l’action A procure au joueur 1 un paiement de 4, supérieur au paiement de 2 ou 3 permis par l’action L. Il n’est donc pas raisonnable que le joueur 2 puisse croire que Prob

( )

L =1 car si le joueur 1 venait à dévier de sa stratégie d’équilibre A, c’est pour obtenir un paiement plus élevé. Il choisira dans ce cas l’action R (obtenant ainsi un paiement de 5) et non l’action L. L’équilibre bayésien parfait au sens faible décrit dans la figure 5.6 ne peut être considéré comme une prédiction raisonnable car il est basé sur des croyances non raisonnables hors sentier d’équilibre.

D’autres raffinements sont proposés dans la littérature afin de rendre raisonnables les croyances en dehors du sentier d’équilibre. Parmi ces raffinements, citons le « critère intuitif » proposé par Cho et Kreps (1987) pour les jeux de signaux.83

Pour des modèles ou jeux donnés, on peut prévoir des raffinements spécifiques pour les croyances hors équilibre qui, combinés aux propriétés 1 à 3, permettent de définir le concept d’équilibre bayésien parfait.

Définition : Un équilibre bayésien parfait pour un jeu dynamique à information incomplète (ou imparfaite) consiste en un couple de stratégies et de croyances satisfaisant les propriétés 1 à 3 et les raffinements rendant raisonnables les croyances en dehors du sentier d’équilibre.