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L’épreuve de génographie projective familiale (Cuynet, 1999)

L’épreuve de génographie projective familiale est une épreuve projective groupale familiale,

qui se démarque de l’outil de génogramme d’approche systémique, à qui il revient d’avoir pensé la groupalité et essayé de traduire cette complexité par une forme visible et compréhensible pour le thérapeute à travers des signes codifiés. La liberté de la consigne du test de génographie projective familiale (« dessiner votre arbre généalogique comme vous voulez ») sans consignes techniques, ni conseils, favorise par l’étude de la trace figurative du dessin, l’étude des liens conscients et inconscients des membres vivants de la famille entre eux, mais aussi de ceux qui les ont précédés. Le dessin libre invite à la spatialisation des places, des statuts, des fonctions qui structurent l’organisation pulsionnelle familiale (Cuynet, 2005, Cuynet et al. 2006). Il n’est pas une représentation intellectuelle de savoir sur ses lignées familiales. Ce n’est pas le contenu qui prime, mais la manière de le construire. L’invitation par la consigne à dessiner, par la situation de régression qu’elle implique, en analogie à l’approche de Winnicott, mettrait les participants dans un « holding onirique » (Ruffiot, 1981, cité par Cuynet, p33), et offrirait une aire de jeu à la famille, « une zone transitionnelle » entre le monde interne groupal et externe. Il permettrait la constitution « d’un objet trouvé-créé », où la famille se découvrirait ensuite dans la visualisation de son auto-portrait réalisé. En effet, selon Patrice Cuynet : « la surface de

la feuille fonctionne comme un miroir qui révèle un visage familial produit par le groupe qui « prend corps », et s’étonne tout en se rassurant sur la configuration singulière de son unité » (p 35). « L’arbre généalogique devient un Moi-peau groupal qui contient tous ses membres dans un corps commun » (p 30). Cet « autoportrait de la famille » renvoyant une forme unitaire

du groupe rappelle selon l’auteur le « stade du miroir » de Jacques Lacan (1966). P 33 « la

famille se donne forme et définit dans ce « miroir généalogique » son désir inconscient producteur de sens ». « Nous proposons la métaphore d’un outil à remonter le temps pour y capter des traces de « vécus non vécu » et qui seraient à revivre tous ensemble dans la séance, pour en faire des relations de liens intersubjectifs »167 (p 25). La fonction de la feuille est à voir

non seulement dans sa fonction contenante mais aussi « dans sa fonction vivante d’inscriptions

signifiantes » (p 26) ce que nomme Kaës « la fonction conteneur » (1994).

166 CUYNET, P. (2015). L’arbre généalogique en famille. Médium projectif groupal. Paris : Editions In Press. Collection psycho

Cet auto-portrait familial, réfléchi par le miroir pensant des thérapeutes en situation de psychothérapie, aurait pour but thérapeutique d’activer la fonction d’interfantasmatisation et de relancer la fonction de mythopoïèse dans la famille (p 35).

D’un point de vue évaluatif, c’est la manière de construire l’arbre généalogique, sa structuration, son aspect formel et la constitution du discours autour de la réalisation qui seront analysés. L’agencement de l’arbre généalogique traduit la dynamique conflictuelle ou non, par laquelle la famille traite son héritage psychique, ses relations intersubjectives et la représentation d’un soi identitaire familial (vision diachronique).

L’arbre généalogique constituerait un outil diagnostique qui permettrait une « radiographie de la structure inconsciente familiale » : « l’arbre généalogique serait une

topographie projective du monde interne du groupe familial et il permettrait selon son organisation formelle et son contenu (signifié), une interprétation du vécu inconscient de la groupalité inclue de chaque membre (…) la souffrance psychique pourra s’illustrer par une structure dysfonctionnelle de l’image du corps groupal familial » (Cuynet, p 51).

Cet épreuve projective dispose d’une grille de lecture et d’interprétation pour parvenir à cet objectif, où les différentes configurations psychopathologiques sont étudiées selon différents critères : l’image du corps avec l’étude de la qualité et de l’organisation interne de l’enveloppe ; l’évaluation des défenses et angoisses groupales : l’équilibre entre pôle isomorphique et homomorphique ; l’axe diachronique et synchronique ; la qualité de l’interfantasmatisation ; l’investissement pulsionnel (liens narcissiques et objectaux), la dimension structurale, les signes psychopathologiques familiaux.

L’image inconsciente du corps familial se traduit ici notamment par l’étude de la constitution de « l’enveloppe». Elle est illustrée par le schéma suivant (diffusé avec l’autorisation de Patrice Cuynet).

L’enveloppe du moi-peau familial (Cuynet)

Selon Patrice Cuynet :

« N°1. Une enveloppe trop étirée sur l’axe diachronique (N°1) suggère une prédominance de l’impact

généalogique et du passé (qui dessèche les corps et la sexualité) pour privilégier le transgénérationnel et le règne des fantômes. La censure intergénérationnelle trop poreuse ne joue plus assez son rôle de pare-excitation contre des « éléments bruts ou bêta » (W. Bion, 1983) venant du passé. Les fantômes vampirisent le corps des vivants, et continuent leur existence par procuration.

N°2. À l’inverse, un tassement trop intense de la diachronie, ce que nous pouvons remarquer à chaque

perturbation de l’équilibre familial, produit une déformation de l’enveloppe psychique groupale. L’aplatissement de l’axe de filiation, ou des perturbations de la transmission générationnelle, déclenche un étalement sur l’axe synchronique (N°2). C’est l’image magmatique qui informe d’une cellule familiale où règne l’inceste, les corps sexués sont indifférenciés et les sujets vivent l’instant présent des pulsions ».

a.2 Méthodologie 1. Les consignes de la passation :

« Dessinez ensemble l’arbre généalogique de votre famille. Vous pouvez le faire comme vous

voulez selon votre imagination. Vous êtes totalement libre de lui donner la forme que vous voulez dans cette feuille. Nous vous demanderons de faire vos commentaires à voix haute, afin que nous comprenions votre dessin le mieux possible (exemples ; dates de naissance, décès, évènements) ».

La question s’adresse donc au groupe familial réuni, avec la règle de la présence bi- générationnelle.

2. Question post passation : enquête

Question 1 : Que pensez-vous de votre dessin ? (exploration de la souplesse du Moi familial). Question 2 : A qui ressemblez-vous ? (étude de la dynamique des identifications inconscientes, importance de la transmission inter et trans-générationnelle).

Question 3 : Quel est le personnage le plus important pour votre famille, pourquoi ? (étude de l’impact surmoïque ou de l’idéal d’une figure ancestrale)

Question 4 : Quelles caractéristiques physiques ou de caractères personnalisent votre famille

? (sollicitation du fantasme de corps commun et des fantasmes originaires, socle de l’identité

familial)

Question 5 : Quels sont les principes et les valeurs auxquels la famille est attachée ? (Etude des éléments idéologiques et des mythes inter et trans-générationnels soutenant les idéaux du moi familial)

3. Matériel utilisé :

- Un crayon feutre noir, pointe moyenne

- Pour cette recherche, feuilles A3 en gardant la proportion du dessin.

B. L’épreuve du dessin de la maison de rêve