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b Les journaux pro Galandou Diouf

A l’instar de Blaise Diagne, des journaux se sont alignés sur la politique de Galandou Diouf qui lui a succédé au Palais Bourbon. Mais avant la mort du premier député noir, et avant leur brouille, les deux hommes entretenaient d’excellentes relations. Mais au fur et à mesure que Blaise Diagne faisait moins de place à Galandou Diouf au profit d’Amadou Dugay Clédor, leurs relations se sont détériorés. Pourtant, Galandou Diouf fut un des ses lieutenants les plus fidèles. Mais la préférence du député Sénégal à Amadou Dugay Clédor a ouvert les hostilités entre les deux grandes fortes personnalités de la colonie sénégalaise, et même de l’Afrique Occidentale Française. Estimant être injustement traité par Blaise Diagne, Galandou Diouf claque la porte pour se présenter comme candidat à la députation contre son ex mentor. Il sera battu à tous les scrutins auxquels il s’est présenté contre Blaise Diagne.

Dans ce combat, Galandou Diouf a été aidé par des journaux. Il s’agit de «L’Ouest africain» d'Oxoby et l’AOF de Lamine Guèye, autre personnalité politique sénégalais de cette époque. Le journal «Le Sénégal» créé en 1934 par Alfred Goux lui apporta aussi son concourt contre Blaise Diagne. Il en est de même du «Périscope africain», de «La

Sirène sénégalaise», de «l’Echo de Rufisque», ville où est originaire

Galandou Diouf. Quand Galandou Diouf est élu député du Sénégal en 1934 à la mort de Blaise Diagne, cette presse, qualifiée de dioufiste, va se

retourner contre le nouveau député du Sénégal. Ce fut le cas du

«Périscope africain». Comme si la presse a horreur des détenteurs de

pouvoir. Peut-être qu’elle n’était que le reflet des antagonismes des hommes politiques de l’époque. Cette presse ne portait pas forcément les préoccupations des populations, mais plutôt des ambitions des hommes politiques sénégalais. D’ailleurs ce sont eux qui traçaient leur ligne éditoriale. Ce qui expliquerait, en partie, leur implantation dans les villes où le bouillonnement politique fait partie du quotidien des populations.

Ces journaux se retrouvent majoritairement dans les quatre communes que sont Rufisque, Gorée, Dakar Saint-Louis. Non seulement ce sont les populations de ces villes qui étaient électrices et éligibles aux élections législatives et municipales, mais elles regorgent l’élite de la colonie composée de fonctionnaires, de négociants, d’enseignants, etc. C’est elle qui sait lire, comprend en français et dispose assez de revenus pour acheter un journal. D'ailleurs, c'est durant la campagne électorale, qui coïncide avec l'effervescence politique, que prolifère la création de journaux.

En tous les cas, dans le paysage médiatique sénégalais de cette époque, il existe plus d’une vingtaine d’organes de presse politiques. «Les

26 organes politiques compte : 2 pour le parti radical (Le Sénégal, tribune d’Afrique) ; 6 pour le parti socialiste (la Sirène sénégalaise, Clarté, l’AOF, Le Phare du Sénégal, L’Informateur dakarois, La résistance) ; 1 pour le MRP (Mouvement républicain populaire) ; 1 pour le RPF (Rassemblement du peuple français) : l’Eclair ; 3 pour le Rassemblement du peuple franco- africain : Réveil, Afrique noire, Réveil d’aujourd’hui ; 1 pour L’UNAC (Unité et action) : Bombolong : And Dieuf ‘Agir ensemble) : L’Action ; 2 pour le BDS (Bloc démocratique sénégalais) : Conditionne humaine, La Voix de Rufisque ; 2 pour l’UPS (Union progressiste sénégalais) : L’unité, le regroupement ; 2 pour le PAI (Parti africain de l’indépendance) : La lutte, Momsarew, 1 pour le PRA-Sénégal (Parti du regroupement africain) :

L’indépendance africaine ; 1 pour le PSS (Parti socialiste sénégalais) :

Solidarité»178.

Cette multitude de journaux suggère que chaque parti politique, chaque groupement à caractère politique disposait d’au moins un organe de presse qui supportait son idéologie et sa politique. Dans la catégorie de journaux d’information politique, il y en avait treize d’après le décompte d’Ariette Fontaine. «6 sont pro-gouvernementaux (dont un organe de

grande masse pour toute la période (1939-1960), 4 pour la guerre (1939- 1945) : Paris-Dakar, Jalons, Sénégal, Dakar-Jeunes et sa suite. Afrique en guerre, Lettre africaine; 2 nationaliste africains : Le Mali, la Communauté; 1 satirique : Les échos africains; 1 politique et religieux : Afrique Nouvelle; 1

progressiste modéré : Réalités africaines»179.

L'auteur résume en soulignant qu'il y a « en gros 10 (journaux) conservateurs, 3 progressistes (et sur) les 8, 7 dirigés par des Européens, 7 sont conservateurs et 2 nationalistes».

Dans le reste du pays, les journaux sont presque inexistants. Cela est non seulement dû à l’analphabétisme des populations – les journaux sont écrits en français comme aujourd’hui – mais également à cause du pouvoir d’achat des habitants. Il s’y ajoute que ceux-ci ne représentent pas encore un intérêt électoral puisqu’ils n’ont pas le droit de vote. Seuls les habitants des quatre communes votaient puisqu’ils étaient considérés comme des citoyens français. Il a fallu attendre l’érection des communes mixtes pour voir les populations des ces localités disposer d’un droit de vote. C'est ainsi que certaines villes comme Thiès, Louga, Ziguinchor, etc. sont érigées en communes mixtes et participent aux élections municipales.

C'est ainsi qu'entre 1885 et 1914, il y a 10 journaux à Saint-Louis, 15 à Dakar et aucun dans les autres localités du pays. Entre 1914 et 1945, il y en avait 14 à Saint-Louis et 47 à Dakar devenue entre temps la capitale de l'Afrique occidentale française alors que Saint-Louis n'était que la capitale

178 Ariette Fontaine : La presse Au Sénégal (1939-1960, thèse de doctorat de 3e cycle, Ucad, juin 1967, p.24 179 Ariette Fontaine, 1967, op.cit., p. 24-25

de la colonie sénégalaise. Les villes comme Mbour, Thiès et Ziguinchor étrennent leurs premiers journaux.

Ce bouillonnement médiatique montre que le Sénégal a tout le temps été un creuset de prolifération de journaux allant du mensuel au trimestriel en passant par l'hebdomadaire, même si la plupart d'entre eux paraissent d'une manière irrégulière et d'autres disparaissent pour naître sous d'autres noms et sous d'autres formats.

A côté de ces journaux politiques dont la grande majorité servait des intérêts politiques partisans, existaient d'autres journaux à caractères économique et syndical, religieux et même scientifiques.