1 HISTORIQUE
1.4 LES RESSOURCES EDUCATIVES DANS L’EDUCATION
1.4.1.1 Le jeu dans l’éducation de l’enfant
Des éducateurs de toutes les époques se sont servis de l’intérêt que l’enfant porte au
jeu et au jouet pour essayer, à travers des activités plaisantes, de lui faire acquérir et
de développer des apprentissages. Ces activités plaisantes peuvent être de toute
sorte, comme la danse, le dessin, la chanson, le conte.
Platon est le premier à avoir proposé le jeu organisé comme méthode pédagogique
où l’adulte peut continuer à exercer une maîtrise sur l’enfant.
Au XVI e siècle, M. de Montaigne voit dans le jeu une arme à double tranchant.
D’une part, il reconnaît que les exercices comme la course, la lutte, la musique,
forment une bonne partie de l’éducation de l’enfant, d’autre part, il insiste sur le fait
que le jeu encourage les penchants profonds de l’être, lesquels doivent être réprimés
dès le jeune âge (M. F. Pinaud - Daeschner, cité par J. GUILLEMAUT [78]).
Au siècle suivant, des pédagogues des Lumières, tels Comenius et Locke,
réfléchissent sur la place du jeu et par conséquent du jouet dans l’éducation de
l’enfant. A travers ces débats entre l’utilité et les méfaits du jeu et du jouet
didactiques sur l’âme de l’enfant, naît un désir de mieux le connaître en observant
son comportement face à ces éléments ce qui, selon M. MANSON [86], annonce les
débuts de la psychologie de l’enfant.
Le philosophe J. J. Rousseau au XVIII e siècle, relève aussi dans le jeu une
importance pédagogique. Il est convaincu, qu’en dépit du fait que quelques jeux et
jouets puissent être considérés comme dangereux pour la nature de l’enfant (la
poupée par exemple, qu’il qualifie de jouet frivole), le jeu, activité qualifiée
d’occupation naturelle enfantine, intelligemment utilisé chez l’enfant puisse devenir
un allié pour l’éducateur, notamment dans le développement physique de l’enfant.
A la même époque, d’autres personnages illustres comme Diderot, accordent au jeu
de l’enfant un rôle principalement de révélateur de son caractère et conseillent de
laisser l’enfant s’y absorber.
C’est dans ce contexte de controverses que le jeu prend une place dans l’éducation
de l’enfant, essentiellement dans le développement physique de son corps. Au
XVIIIe siècle, l’enfant est toujours considéré comme un être imparfait et incomplet
qu’il faut façonner physiquement et moralement. Des travaux sur l’importance d’une
éducation du corps constateront plus tard que les jeux physiques apportent à
l’éducation de l’enfant un complément dans le développement de sa santé physique
et mentale
9.
Ce n’est qu’au siècle suivant, en 1869, que l’enseignement de la gymnastique où
intervient déjà la pratique de quelques jeux traditionnels s’institutionnalise dans la vie
scolaire de l’enfant. Selon E. SOLAL [87], cet enseignement devient obligatoire en
premier lieu pour les garçons, plus tard pour les filles, sous certaines conditions et
dans tous les niveaux scolaires, alors qu’il n’était que facultatif depuis 1850.
La Loi de 1880 (Loi du 27 janvier, Bulletin des lois, N°490) introduit l’obligation
généralisée d’une vérification annuelle de cet enseignement. Ainsi, plusieurs jeux et
jouets traditionnels repérés pour l’éducation physique de l’enfant sont répertoriés dès
1891 et publiés dans le Manuel d’exercices gymnastiques et de jeux scolaires.
Le tableau suivant présente quelques jeux et jouets traditionnels pratiqués à l’école
dès le XIX e siècle lors des cours de gymnastique.
9
Notamment les travaux de : (1707-1782) L’abbé Coyer, (1712- 1778) J.J. Rousseau et sa pédagogie
sur l’activité physique, (1726- 1774) J. Ballesxerd « Les jeux d’exercice. », (1741) Andry de
Boisregard et l’orthopédie à l’origine de la « rééducation physique scolaire. » et (1750 - 1826) J - C
Tissot, d’après E. SOLAL [87].
Tableau 4. Jeux traditionnels à l’école du XIX e siècle
(Manuel d’exercices gymnastiques et de jeux scolaires, 1891 sous le ministère de A.
FALLIERES)
Garçons Filles
Jeux récréatifs
Cache - tampon, les osselets, la main - chaude, le bilboquet.
La toupie Le furet
Le palet Colin - maillard
Les billes Pigeon - vole
Jeux gymnastiques
Les rondes, le sabot, la pomme au filet, le cerceau, la poursuite, saut à la corde,
quatre coins
Cochonnet Le javelot
Jeux du jongleur Chat et souris
Echasses Balle au mur
Prisonniers Tir à l’arc
La balle cavalière Le croquet
La rosse au but La marelle
Aujourd’hui, même si l’école accepte pleinement la contribution des jeux physiques
dans l’épanouissement de l’enfant, elle ne leur cède pas l’importance qui leur revient
de droit.
D’après M. F. Pineaud – Daeschner, cité par J. GUILLEMAUT et al. [78], dans
l’œuvre des pédagogues et des philosophes, on distingue toujours une confusion
entre activité intellectuelle et activité physique. Selon cet auteur, ceci semble
provenir d’une opposition culturelle entre les activités intellectuelles valorisées,
approuvées socialement et moralement appréciées et les activités physiques, elles,
dévalorisées par rapport aux premières. Il semble que cette dichotomie culturelle sur
laquelle l’auteur attire l’attention, provient de la séparation de l’esprit et du corps. Le
corps est dévalorisé, peut - être parce qu’on l’assimile à la source des pulsions
culpabilisées et refoulées.
Alors que nous persévérons à maintenir valable cette opposition entre l’activité
intellectuelle et l’activité physique, des études sur le jeu, montrent que dans celui - ci
ces deux activités sont présentes et indissociables. Le jeu en tant qu’activité
physique est incontestablement pour l’enfant un exercice psycho - moteur qui
contribue à l’organisation de la personnalité et de l’apprentissage. Les deux activités
participent à l’épanouissement de l’enfant.
Chez l’enfant, le développement se fait de façon simultanée sur le plan moteur,
cognitif et affectif. Des physiologistes, dont J. Piaget, ont démontré que, parce qu’il
permet la répétition des acquisitions sensori - motrices dans un contexte de jubilation
et de plaisir, le jeu chez l’enfant concourt à l’apprentissage, à la découverte et facilite
les nouvelles expériences [78].
Il est fortement probable que sans le jeu, l’homme ne puisse s’investir entièrement
dans des situations d’apprentissage et passerait sans doute à côté de nombreuses
expériences.
Dans le document
Ressorces éducatives dans l'éducation thérapeutique du jeune patient atteint de maladie chronique
(Page 94-98)