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D ISTINGUER UNE INFLUENCE MORPHOLOGIQUE PRELEXICALE D ' UNE INFLUENCE POST LEXICALE :

MOTS CHOISIS

II. LES EFFETS OBSERVES GRACE AU PARADIGME D E DETECTION DE SEQUENCES La tâche de détection de séquences en début de mots parlés a été utilisée par de nombreu

5. U N EFFET DE LA STRUCTURE MORPHOLOGIQUE DES MOTS ?

3.4. D ISTINGUER UNE INFLUENCE MORPHOLOGIQUE PRELEXICALE D ' UNE INFLUENCE POST LEXICALE :

MANIPULATION DE LA VITESSE DE REPONSE DES SUJETS

Nous l'avons vu dans l'introduction, il est possible de manipuler l'environnement expérimental de sorte d'évaluer plutôt l'existence d'une influence des informations prélexicales ou plutôt celle d'une influence des informations post-lexicales. Certains auteurs ont en effet choisi de

28 Afin d'évaluer la pertinence de cette hypothèse, nous comparerons les temps de réponses pour chaque catégorie de mots-porteur – suffixés et pseudo-suffixés, lorsque la cible à détecter correspond à la syllabe initiale et lorsqu'elle

porteurs pseudo- suffixés porteurs suffixés TR CV CVC porteurs pseudo- suffixés porteurs suffixés TR CV CVC porteurs pseudo- suffixés porteurs suffixés TR CV CVC

varier le nombre de foils29 (pièges) présentés en cours d'expérience afin de manipuler la

rapidité avec laquelle les sujets répondent. Plus précisément, la présence de foils diminue la probabilité que les sujets ne réalisent qu'une analyse superficielle des stimuli avant de répondre, puisqu'ils ne peuvent pas baser leurs réponses sur le ou les premiers phonèmes du mot qu'ils entendent mais doivent se baser sur l'entièreté du segment-cible pour répondre (voir recherche de Sánchez-Casas, 1988, cité par Sebastian-Galles et al., 1992). Cette manipulation implique une augmentation du temps de réponse des sujets et privilégie par conséquent l'apparition d'un effet post-lexical.

Dans notre cas, l'aspect séquentiel de la parole nous permet de supposer que selon la vitesse à laquelle les sujets répondent, les informations morphologiques seront plus ou moins susceptibles d'influer leurs performances. Par exemple, si l'identification d'un mot parlé nécessite plusieurs étapes de traitement, un mot suffixé pourrait n'être segmenté en morphèmes qu'après avoir été représenté sous un ou plusieurs autres formats, tels qu'un format phonémique ou syllabique. Dans ce cas, l'effet des informations morphologiques dans les tâches de détection de séquences pourrait alors disparaître si on incite les sujets à répondre rapidement, i.e. sur la base d'un format phonologique ou syllabique ou, au contraire, apparaître si on les force à répondre lentement.

Plus précisément, nous avons réalisé trois expériences, la première pour laquelle la proportion de foils est nulle (expérience 0% de foil30), la deuxième contenant 33% de foils (= la moitié des distracteurs sont des foils) (expérience 33% de foils) et la troisième composée de 100% de

29Un foil est composé d'une cible et d'un porteur qui partagent un ou plusieurs phonèmes, tels que /bOl/ dans /bOnE/ (bonnet), /kOl/ dans /mOlOs/ (molosse). La cible n'est toutefois pas entièrement contenue dans le porteur.

foils (=tous les distracteurs sont des foils) (expérience 100% de foils). Nous nous attendons à

ce que la probabilité d'apparition de l'effet morphologique post-lexical (Hypothèse 3, Figure 14) augmente en fonction de l'augmentation du pourcentage de foils (cf. Tableau 11). A l'opposé, si les informations morphologiques interviennent de manière pré-lexicale (Hypothèse 2, Figure 13), leur influence devrait être observée lorsque les sujets répondent rapidement. Autrement dit, lorsque le nombre de foils est trop important, l'effet prélexical des informations morphologiques devrait disparaître (cf. Tableau 11). Finalement la probabilité que l'effet phonologique/syllabique (Hypothèse 1, Figure 12) apparaisse ne devrait être fonction du pourcentage de foils que dans une moindre mesure, puisque cet effet peut apparaître de manière post-lexicale (Content et al., 1996) (cf. Tableau 11).

Tableau 11 : Apparition des effets phonologique/syllabique, morphologique prélexical et morphologique post-lexical en fonction du nombre de foils présents dans l'expérience

Hypothèse phonologique/syllabiq ue Hypothèse morpho prélexicale Hypothèse morpho post-lexicale 0% foil ++ ++ - 33% foils ++ + + 100% foils + - ++

Les caractéristiques des items de remplissage : foils et distracteurs

Deux catégories d'items de remplissage ont été utilisées lors de nos expériences de détection de séquences, les foils et les distracteurs.

Lorsque la cible des paires expérimentales correspond à la (pseudo-)racine des mots (pseudo- )suffixés expérimentaux, la cible des foils partage avec la séquence porteuse :

• la première consonne (ou les premières consonnes, si le mot commence par un cluster de consonnes) (/lãg/ --> lainage) ;

• la première consonne (ou le cluster de consonnes initiales) et la première voyelle (/baR/ --> baveux) ;

ou la première voyelle et la (ou le cluster de consonnes) qui lui succède (/val/ --> balise).

Lorsque la cible correspond à la syllabe initiale des mots des paires expérimentales, la cible des foils partage avec la séquence porteuse :

• soit la première consonne (ou les premières consonnes, si le mot commence par un cluster de consonnes) (/fRE/ --> franchise) ;

• soit la première voyelle (ou la première voyelle et le cluster de consonnes qui succède à la consonne initiale, si la syllabe est de type CVC) (/la/ --> massage). Dans les deux cas, la cible des distracteurs ne partage aucun phonème avec le mot porteur (/fov/ --> lunette) et /ny/ --> mouchard).

A chaque mot expérimental sont associés deux mots de remplissage en termes de structure syllabique et de catégorie morphologique (cf. annexe IX). L'expérience contient donc autant de mots monomorphémiques que de mots morphologiquement complexes. Si la partie finale du mot expérimental monomorphémique correspond à un pseudo-suffixe, elle l'est également dans les mots de remplissage.

A chaque cible expérimentale sont associées deux cibles de remplissage en terme de structure syllabique. De plus, comme certaines cibles expérimentales ne correspondent pas à un mot attesté du lexique sur le plan phonologique [tra, vE qui apparaissent chacune deux fois (n=4)],

nous avons choisi un nombre quasi équivalent de cibles liées aux mots de remplissage ne pouvant pas être considérées comme un mot du lexique (n=5).

Dans l'expérience 0% foil, tous les items de remplissage sont des distracteurs (n=144). Dans l'expérience 33% foils, la proportion des mots composant les paires expérimentales (n=72), celle des foils (n=72) et des distracteurs (n=72) est équivalente (1/3 dans chaque cas). Finalement, dans l'expérience 100% foils, les items de remplissage correspondent tous à des

foils (n=144).

4. PROCEDURE

Pour passer l'une des trois expériences, les sujets s'installent à l'intérieur d'une chambre insonorisée. Les stimuli, cibles et porteurs, sont présentés auditivement, à l'aide d'un casque. Chaque sujet entend tous les stimuli31 (within-subject design) d'une des expériences (0% foil,

33% de foils, 100% foils). Que ce soit pour les essais d'entraînement (n=10) ou de test (n=216), la présentation de la cible est séparée de celle du porteur par 400 ms. Un "bip" est émis 200 ms avant que le porteur ne devienne audible. 1400 ms séparent la production de deux items expérimentaux successifs (SOA).

La voix produisant la cible est différente de celle produisant la séquence porteuse, ce qui prévient une stratégie d'appariement purement acoustique. Les deux locuteurs viennent toutefois de la même région de Suisse, ceci afin d'éviter un changement d'accent trop important. Chaque item a été enregistré avec une fréquence d'échantillonnage de 16 kHz.

31 car les différences intra-individuelles observées dans un paradigme de détection de fragments se sont en général révélées moins importantes que les différences interindividuelles.

Deux blocs expérimentaux (12 minutes chacun), séparés de quelques minutes de pause, ont été proposés aux sujets. A l'intérieur de chacun d'entre eux, un porteur particulier ne peut apparaître plus d'une fois. Les deux occurrences de chaque mot, pseudo-suffixé ou suffixé, sont distantes d'au moins 64 stimuli.

L'ordre d'apparition des items expérimentaux a été contrebalancé. Pour une paire de stimuli déterminée, la moitié des sujets entend le mot pseudo-suffixé puis le mot suffixé, alors que l’ordre inverse est présenté à l'autre moitié des sujets. Le même principe a été utilisé pour la présentation des cibles. Après avoir réparti les items expérimentaux dans le premier ou le deuxième bloc, ils ont été randomisés.

5. CONSIGNES

Avant que les sujets n'entrent dans la chambre insonorisée, nous leur présentions une feuille sur laquelle les consignes étaient écrites. (voir annexe VI). Après que les sujets les ont lues de façon attentive, nous attirions encore leur attention sur :

le fait que toute la cible doive apparaître en début de séquence porteuse ;

• l'importance de répondre le plus rapidement possible, tout en faisant le moins d'erreurs possibles ;

• le fait que l'on s'intéresse aux sons et non aux lettres orthographiques (/be/ ne correspond pas à la lettre B, mais bien au son /be/ contenu dans béquille).

IV. RESULTATS