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Cette technique d’iontophorèse, utilisée dans le cas d’hyperhydrose (Wang, Thakur et al. 2005) ou pour injecter de l’insuline à des rats et des hommes diabétiques, va être adaptée dans le cadre de la démangeaison. Les premières études débutent en 1947 et commencent à utiliser l’iontophorèse pour délivrer de l’histamine et ainsi étudier l’effet d’anti-histaminique ou d’autres substances. Margerl s’intéressera à son tour à cette méthode et validera cette technique d’iontophorèse comme un modèle fiable pour des études quantitatives en dermatologie ou pharmacologie de la peau (Magerl, Westerman et

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al. 1990). L’iontophorèse à l’histamine devient alors une technique souvent utilisée pour étudier au niveau comportemental la sensation prurigineuse et les réactions cutanées associées mais aussi pour tester l’effet d’antagonistes ou agonistes (lidocaine, menthol, température ...). Elle est aussi utilisée comme modèle inducteur d’une sensation de démangeaison pour les études en neuro imagerie (Mochizuki, Tashiro et al. 2003; Mochizuki, Sadato et al. 2007). En effet il est intéressant de pouvoir faire pénétrer à travers la peau des molécules pruritogènes, par d’autres méthodes que le prick-test ou l’injection intradermique qui sont agressives pour le tissu cutané. Ces deux dernières techniques peuvent engendrer des traumatismes au niveau cutané ou être accompagnées de sensations de douleur. Utiliser l’iontophorèse permet d’avoir une technique non invasive, ne provoquant pas de sensation douloureuse et non traumatique pour la peau. Elle va être aussi un bon déclencheur des réactions cutanées qui accompagnent la démangeaison induite par l’histamine.

e - 1 - Médiateur : l’histamine

Le médiateur naturel principal de la démangeaison est l’histamine. Elle est incapable de pénétrer une barrière cutanée intacte de façon passive. Pour évoquer un prurit elle doit alors être introduite dans la peau. Nous avons vu que l’injection d’histamine, en plus de la sensation de démangeaison, va entrainer au niveau cutané une triple réponse (Darsow, Ring et al. 1996). Lors de l’iontophorèse l’histamine n’est pas injectée telle quelle mais c’est une solution de dihydrochlorure d’histamine qui est utilisée, mélangée à du méthylcellulose formant ainsi un hydrogel (Heyer, Hornstein et al. 1989; Magerl, Westerman et al. 1990; Darsow, Ring et al. 1996; Ward, Wright et al. 1996; Yosipovitch, Duque et al. 2007). C’est la pénétration de l’histamine qui sera responsable du prurit et c’est donc elle qui va nous intéresser. C’est une molécule chargée positivement. Par rapport à ce que nous venons de décrire sur le principe de l’iontophorèse, pour qu’elle pénètre au niveau de la peau il faut qu’elle soit placée au niveau de l’électrode positive donc de l’anode. A l’arrivée du courant elle sera attirée par la cathode, facilitant ainsi sa pénétration à travers l’épiderme. Les études de Magerl (Magerl, Westerman et al. 1990) confirment ces constatations. Lorsque l’histamine est placée au niveau de la cathode les sujets ne ressentent aucune sensation de démangeaison, elle apparait seulement quand l’histamine est placée à l’anode. Il montre aussi que ni le courant électrique servant à la stimulation, ni l’électrode d’hydrogel ne peuvent être responsables de la sensation de démangeaison ressentie (Magerl, Westerman

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et al. 1990). Sans courant électrique le seul contact de l’histamine sur la peau n’induit pas de démangeaison chez les sujets (Thysman, Van Neste et al. 1995).

Les études confirment les hypothèses sur le trajet des molécules pénétrant via l’iontophorèse. On observe un œdème folliculaire suite à l’iontophorèse d’histamine montrant que la molécule semble pénétrer via les canaux folliculaires (Magerl, Westerman et al. 1990).

e - 2 - Facteurs influençant l’iontophorèse

 La charge de courant

Comme nous l’avons vu de nombreux paramètres sont capables d’influencer sur le flux de la solution. Le paramètre le plus parlant pour corréler avec les sensations ressenties dans le cas de la démangeaison est la charge de courant transférée. Le nombre de molécules qui pénètrent est proportionnel à la charge de courant (Heyer, Hornstein et al. 1989) définie selon la loi de Coulomb comme:

Q (charge en mC) = I (courant en milliampère) x t (temps d’application en seconde).

Suivant les études les paramètres de stimulation vont beaucoup changer entrainant des différences dans la sensation de démangeaison percue (10 mC (Magerl, Westerman et al. 1990) ; 1.3 mC (0.13 mA ; 10sec) (Darsow, Ring et al. 1996), 20 mC (2.0 mA ; 10s) (Darsow, Ring et al. 1996) ; 12 mC (Thysman, Hanchard et al. 1994), 6 mC (200µA ; 30s) (Yosipovitch, Fast et al. 2005; Yosipovitch, Duque et al. 2007), 0.16mC, 0.62mC, 1.25mC, 2.5mC, 10mC (Heyer, Hornstein et al. 1989)). Il faut faire attention car des temps de stimulation trop longs avec des intensités trop fortes peuvent entrainer des dommages au niveau de la peau. Magerl a testé plusieurs charges de courant et pour lui il ne faut pas aller au-delà d’une densité de charge de 15 mA/cm2 pour ne pas entrainer des sensations de douleur (Magerl, Westerman et al. 1990). Darsow fixe cette limite à 2mA (Darsow, Ring et al. 1996). Si on veut jouer sur la charge de courant il vaut mieux diminuer l’intensité et augmenter le temps de stimulation (Magerl, Westerman et al. 1990). Les études montrent que la perception de la démangeaison dépend plus de la charge de courant que de la variabilité intra individuelle (Magerl, Westerman et al. 1990).

 La concentration

Elle peut aussi influencer sur la sensation de démangeaison. Des concentrations allant de 0.001% d’histamine à 1% sont testées en utilisant toujours le même temps et la

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même intensité de stimulation (Thysman, Van Neste et al. 1995). La concentration de 1% est préconisée car elle induit les meilleures réactions prurigineuses et c’est donc la concentration la plus fréquemment utilisée (Magerl, Westerman et al. 1990; Thysman, Van Neste et al. 1995; Darsow, Ring et al. 1996; Yosipovitch, Duque et al. 2007).

 Les facteurs physiologiques

Plusieurs facteurs autres que la charge de courant et la concentration en ions semblent influencer la réponse. Ces sont des facteurs physiologiques comme l’épaisseur de la couche la plus superficielle de l’épiderme, le stratum corneum qui seront les principales barrières à la pénétration de l’histamine (Magerl, Westerman et al. 1990). En été l’œdème déclenché par l’iontophorèse à l’histamine est moins gros qu’en hiver dû à un épaississement de la peau par les rayons. Les hommes ont des réactions plus faibles que les femmes surement dûes à l’épaisseur du stratum corneum plus importante chez les hommes. L’épaisseur de cette couche varie suivant les endroits du corps, c’est pour ça qu’il existe des différences de réactions à la démangeaison suivant le lieu de la stimulation prurigineuse. La pénétration des molécules par l’iontophorèse quand elle ne se fait pas via les canaux cellulaires se fait de façon paracellulaire plutôt que transcellulaire. Les propriétés physico- chimiques des éléments intercellulaires seront alors plus importantes pour la pénétration que la taille des cornéocytes.

 Autres facteurs

La mobilité des ions dépend du gel dans lequel ils seront placés mais aussi du poids moléculaire de la molécule. On sait que la diffusion est libre s’il est inférieur à 10 000 g/mol, pour l’histamine ce poids moléculaire est de 111 g/mol (Magerl, Westerman et al. 1990). La quantité d’histamine que l’on met en solution ne va pas toute pénétrer, il n’y aura qu’un certain pourcentage qui va servir.

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