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Depuis plusieurs années, la population se dit « préoccupée » par le problème de la pollution de l’air. Les sondages récurrents sur le sujet en témoignent :

- En décembre 1995 (sondage SOFRES), 57 % des Français estimaient que le problème de la qualité de l’air était le plus important des problèmes environnementaux (juste devant la qualité de l’eau potable : 51 %), 93 % trouvaient que la qualité de l’air dans les villes n’était pas satisfaisante, et 89 % qu’elle s’était dégradée.

- En février 1998 (sondage SOFRES), la pollution atmosphérique et le bruit étaient les problèmes les plus importants aux yeux des parisiens devant le nombre de sans-abri, la circulation et le stationnement (un autre thème lié au problème)... ; en avril 2000 (sondage IFOP), un sondage similaire donnait ces préoccupations dans le même ordre.

- En mars 2002 (sondage Ifop-Préfecture de Police de Paris) : « L’insécurité et la pollution atmosphérique arrivent à égalité (59 %) en tête des préoccupations des Parisiens ».

L’inquiétude de la population par rapport à la pollution de l’air est à rapprocher des craintes exprimées vis-à-vis d’autres risques « environnementaux » comme l’effet de serre ou la pollution de l’eau mais aussi vis-à-vis de problèmes de société comme l’insécurité et le chômage. Le baromètre de l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire100 nous renseigne chaque année sur ces inquiétudes. Les deux diagrammes ci-après illustrent les préoccupations de société et d’environnement en France en 2002.

La figure 5 montre que l’insécurité reste en 2002 le problème de société le plus préoccupant en France (pour 39% des personnes interrogées). Le chômage (27%) arrive en second, suivi par la misère et l’exclusion, le terrorisme, la dégradation de l’environnement et les accidents de la route, cités chacun par environ 20% des personnes.

Pour l’environnement (figure 6), les problèmes jugés préoccupants sont d’abord la pollution de l’air (38% des personnes interrogées) et l’effet de serre (36%) puis la destruction des forêts (29%), la pollution des lacs, des rivières et des mers (27%).

100 CHARRON Sylvie, MILOCHEVITCH A., Perception des risques et de la sécurité: résultats du sondage de

51 39,4 26,9 22,1 21,9 21,3 19,8 11,6 10,6 10,3 9,2 3,9 3,0 0,2 0 10 20 30 40 L'insécurité Le chômage La misère et l'exclusion Le terrorisme La dégradation de l'environnement Les accidents de la route Les risques nucléaires Les toxicomanies (drogue, alcoolisme, tabagisme) Le SIDA Les conséquences de la mondialisation Les risques chimiques Les risques alimentaires

Ne sait pas Somme des premier et second choix (%)

Figure 5 – Préoccupations de société en France (source : baromètre IRSN 2002)

« En France, parmi les problèmes actuels suivants, lequel est pour vous le plus préoccupant ? »

38,0 36,1 29,5 26,9 23,5 19,0 13,6 7,3 5,2 0,4 0,5 0 10 20 30 40 La pollution de l'air L'effet de serre (réchauffement de l'atmosphère) La destruction des forêts La pollution des lacs, des rivières et des mers La diminution de la couche d'ozone La pollution des sols La disparition d'espèces animales La dégradation du paysage Les nuisances sonores Les nuisances apportées par l'éclairage nocturne

Ne sait pas Somme des premier et second choix (%)

Figure 6 – Préoccupations environnementales en France (source : baromètre IRSN 2002)

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L’inquiétude de la population s’accompagne naturellement d’une volonté de s’impliquer personnellement dans la lutte contre la pollution. Là encore, les sondages et résultats d’études et de recherches nous fournissent des précisions :

- En octobre 2001, le manufacturier de pneus Goodyear a mené une enquête auprès de 2615 conducteurs dans 13 pays d’Europe. L’enquête montre que 70 % des interviewés consentent à sacrifier le confort au profit de l'environnement et 54 % acceptent l'idée de conduire une voiture de moindre performance si cela améliore l'environnement.

- En décembre 1997, BVA a réalisé un sondage pour BFM et Paris-Match sur le thème « Automobile et civisme écologique ». À la question « Pour améliorer la qualité de l’air, seriez-vous prêt à payer une voiture moins polluante ? », 74% des français interrogés répondent oui (contre 21 % de non et 5 % de non-réponse).

- Les résultats d’une recherche menée en 1998 dans l’agglomération grenobloise montrent que les sommes supplémentaires qui pourraient être ajoutées par ceux qui seraient d’accord pour acheter une voiture plus chère mais moins polluante se situent en majorité dans une fourchette de 2100 à 5000 francs (320 à 760 euros)101.

- Selon une enquête de l’IRSN102, en 1997, 83 % des français seraient prêts à « utiliser davantage les transports en commun », 79 % à « utiliser le vélo », 73 % à « utiliser le covoiturage », 68 % à « acheter une voiture fonctionnant au GPL » et 58 % à « acheter un véhicule électrique »…

Cette volonté manifeste de s’investir personnellement et d’agir pour améliorer la qualité de l’air ne se traduit pourtant pas dans les chiffres :

- À Paris, en 1999, moins de 1,5 % des déplacements quotidiens se faisaient en vélo contre 10,7 % en autobus et 69 % en voiture…103

- En 1999, le parc français des véhicules propres comprenait 150 000 véhicules fonctionnant au GPL, 3 000 au GNV et 5 000 à l’électrique (sur 30 millions)104. Alors que

101 Centre Rhône-Alpes d’Épidémiologie et de Prévention Sanitaire – Agence de l’Environnement et de la

Maîtrise de l’Énergie, Pollution atmosphérique d’origine automobile : perception des risques pour la santé et

attitudes et pratiques de la population en matière de déplacements. Document Ademe, novembre 2000, 84 p.

102 BONNEFOUS S., EGOUY R et BRENOT J., Les Français et la pollution de l’air : résultats du sondage de

août 1997, IRSN, Laboratoire de statistiques et d’études économiques et sociales, SEGR 97/79, Septembre 1997,

52 p.

103 INSEE-Direction Régionale de l’Équipement Île-de-France, réf ???

104 Comité Interministériel pour les Véhicules Propres, Véhicules propres fonctionnant au GPL, GNV et à

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les véhicules GPL sont utilisés par un large public effectuant un kilométrage annuel important (entreprises, professionnels…), les véhicules fonctionnant au GNV et à l’électricité appartiennent essentiellement aux flottes de GDF, de collectivités locales et de service public.

- La Toyota Prius, le premier véhicule hybride (essence + électricité) fabriqué en série, est diffusé à 17 500 unités par an dans le monde mais seulement 79 exemplaires ont été vendus en France en 2001105.

- Selon le Syndicat des transports d’Île-de-France106, le covoiturage représente seulement 5 % des déplacements en région parisienne (11 % pendant les grèves de décembre 1995).

Cette contradiction entre l’inquiétude, l’intention et les actes soulève quelques questions relatives aux perceptions de la population francilienne et au traitement par les médias de l’information relative à la lutte contre la pollution :

- sur quels éléments reposent les inquiétudes de la population ? les effets de la pollution sont-ils très fortement ressentis ? en cas de pic seulement ou au quotidien ? quels sont les signes, les symptômes, les gênes de la pollution ?

- est-il possible d’identifier les freins et les moteurs de l’action ? quelle méthodologie peut-on mettre en œuvre pour cela ?

- la communication médiatique sur la pollution de l’air participe-t-elle à l’inquiétude et à la

déresponsabilisation de l’automobiliste ?