• Aucun résultat trouvé

Influence de la taille des agr´egats sur la courbe d’hyst´er´esis

Chapitre 3 Propri´et´es magn´etiques d’un ensemble de nanoagr´egats ferromagn´etiques

3.3 R´eponse quasi-statique de l’aimantation

3.3.2 Influence de la taille des agr´egats sur la courbe d’hyst´er´esis

Comme nous l’avons vu `a la sect. 3.2, les fluctuations thermiques peuvent permettre `a l’aimantation de passer d’un minimum local `a un autre sur la surface d’´energie magn´etique, ce qui peut avoir pour effet de diminuer la valeur du champ coercitif d’un nanoagr´egat fer- romagn´etique. Pour un nanoagr´egat suffisamment petit, alors la coercivit´e devient nulle et

le nanoagr´egat est consid´er´e comme ´etant superparamagn´etique. Nous allons tout d’abord consid´erer l’effet de la temp´erature sur la valeur du champ coercitif de nanoagr´egats ferro- magn´etiques. Ensuite, nous discuterons de la d´ependance de l’aimantation avec le champ magn´etique lorsque les nanoagr´egats deviennent superparamagn´etiques.

Nanoagr´egats ferromagn´etiques

Dans l’hypoth`ese d’un renversement coh´erent de l’aimantation, le champ coercitif se calcule `a partir de l’´energie magn´etique. Prenons le cas simple d’un agr´egat monodomaine uniaxial o`u le champ magn´etique H0 est appliqu´e dans la direction de l’axe facile. Pour

trouver la valeur du champ coercitif, il faut tout d’abord d´eterminer les minimums de la courbe d’´energie magn´etique en fonction du champ magn´etique appliqu´e. `A T = 0 K et pour un champ magn´etique appliqu´e nul, il y a deux minimums pr´esents et ceux-ci correspondent `a deux ´etats (ou deux directions) possibles de l’aimantation. Pour une intensit´e grandissante du champ magn´etique appliqu´e, nous aurons une valeur du champ magn´etique `a partir de laquelle il n’y aura plus qu’un seul minimum possible. Cette valeur du champ magn´etique correspond au champ coercitif Hc0 `a T = 0 K.

Figure 3.8 Repr´esentation sch´ematique de l’´energie magn´etique d’un monodomaine ferro- magn´etique uniaxial lorsqu’un champ magn´etique H0 est appliqu´e dans la direction de l’axe

facile et de l’´energie thermique. Deux situations sont repr´esent´ees o`u Hc0> H0 : (a) l’´energie

thermique ut n’est pas suffisamment ´elev´ee pour permettre `a l’aimantation de changer d’´etat

(Hc > H0), et (b) ut est suffisamment ´elev´ee (Hc < H0).

Toutefois, pour une temp´erature non nulle, il faut tenir compte de l’´energie thermique ut= kBT . L’´energie thermique permet `a l’aimantation de franchir plus facilement la barri`ere

d’´energie ∆u = ∆U V pour passer d’un minimum `a un autre. D’apr`es l’´eq. (3.15), la barri`ere d’´energie `a surmonter devient ≈ ∆u (H0) − ln (τ/τ0) ut [voir la fig. 3.8(a)]. Si l’´energie ther-

mique augmente suffisamment, alors ∆u (H0) − ln (τ/τ0) ut < 0 et l’aimantation se renverse

[fig. 3.8(b)]. Inversement, si la temp´erature est constante, le champ coercitif Hc du na-

noagr´egat est alors ´egal `a la valeur de H0 lorsque ∆u (H0) − ln (τ/τ0) ut= 0.

Dans le cas d’un nanoagr´egat de MnP, qui poss`ede une anisotropie magn´etocristalline triaxiale, nous avons une surface d’´energie (fig. 3.9) o`u les valeurs de H1 et H2 utilis´ees pour

calculer la surface d’´energie sont 1.25×106et 4.7×105A/m respectivement, qui correspondent aux valeurs d´etermin´ees par r´esonance ferromagn´etique `a T = 292 K (voir le chap. 5), et o`u H0 = 300 kA/m. L’aimantation, pour passer d’un minimum `a un autre, utilisera

vraisemblablement le chemin qui offre la plus petite barri`ere d’´energie ∆u `a surmonter, dont la direction correspond approximativement `a la direction de l’axe interm´ediaire du MnP (axe-b).

Figure 3.9 Surface de la densit´e d’´energie magn´etique U (θ cos ϕ, θ sin ϕ) calcul´ee pour ϕc = θc = ψc = 0˚, θH = ϕH = 45˚ et H0 = 300 kA/m. Les param`etres du MnP massif `a T

= 180 K sont utilis´es, soit Ms = 385 kA/m, K1 = 884 kJ/m3, K2 = 273 kJ/m3 et K3 =

0 kJ/m3 (voir fig. 2.3). La ligne noire fl´ech´ee indique le chemin le plus probable par lequel

l’aimantation passe du minimum `a un autre `a cause des fluctuations thermiques. Les angles θ et ϕ d´ecrivent la direction de l’aimantation Ms [voir la fig. 3.2(b)]

`

A titre d’exemple, la densit´e d’´energie de la barri`ere ∆U a ´et´e calcul´ee en fonction du champ magn´etique H0 pour un nanoagr´egat de MnP ayant un volume infini `a T = 180 K

[ligne pleine sur la fig. 3.10(a)]. Les param`etres suivants ont ´et´e utilis´es pour les calculs, soit ϕc = 0˚, θc = 55˚, ψc = 60˚, ϕH = θH = 0˚, H1 = 3.6 × 106 A/m, H2 = 1.1 × 106 A/m et Ms

= 385 kA/m. La densit´e de l’´energie thermique Ut = 30kBT /V est calcul´ee pour V = 525

nm3, ce qui correspond `a un diam`etre de 10 nm dans le cas d’une sph`ere [ligne pointill´ee sur

la fig. 3.10(a)]. Le facteur 30 correspond `a ln (τ /τ0) [voir l’´eq. (3.15)]. La courbe d’hyst´er´esis

a ´et´e calcul´ee avec les param`etres ϕc = 0˚, θc = 55˚, χc = 60˚, ϕH = θH = 0˚, H1 = 3.6 × 106

A/m, H2 = 1.1 × 106 A/m et Ms = 385 kA/m, `a partir de la m´ethode num´erique expliqu´ee

plus tˆot en supposant que le monodomaine ferromagn´etique poss`ede un volume infini [ligne pleine sur la fig. 3.10(b)]. Le champ coercitif Hc0 d’un agr´egat de volume infini est alors de

600 kA/m (7.5 kOe).

Si le volume du monodomaine ferromagn´etique est de 525 nm3, alors selon la fig. 3.10(a),

l’´energie thermique permet `a l’aimantation de passer la barri`ere d’´energie ∆u lorsqu’un champ magn´etique H0 = 210 kA/m (2.6 kOe) est appliqu´e. La ligne en pointill´e sur la

fig. 3.10(b) repr´esente donc la courbe d’hyst´er´esis pour un volume fini de 525 nm3. Le champ

coercitif est alors de 210 kA/m (2.6 kOe).

0 100 200 300 400 500 600 0.00 0.05 0.10 0.15 0.20 0.25 0.30 -2000 -1000 0 1000 2000 -1.0 -0.5 0.0 0.5 1.0 D e n si t é d ' é n e r g i e d e l a b a r r i è r e U ( M J/ m 3 )

Champ magnétique appliqué H 0 (k A/m) (1 k A/m = 12.6 Oe) U t = 30k B T /V (a) H c0 H c pour V = 525 nm 3 (b) Volum e infini Volum e fini (525 nm 3 ) A i m a n t a t i o n n o r m a l i sé e m ( s. d . )

Champ magnétique appliqué H 0

(k A/m) (1 k A/m = 12.6 Oe)

Figure 3.10 (a) Densit´e d’´energie de la barri`ere ∆U (ligne pleine) en fonction du champ appliqu´e H0 o`u les param`etres suivants ont ´et´e utilis´es pour les calculs : ϕc = 0˚, θc = 55˚,

ψc = 60˚, ϕH = θH = 0˚, H1 = 3.6 × 106 A/m, H2 = 1.1 × 106 A/m et Ms = 385 kA/m. La

densit´e de l’´energie thermique Ut = 30kBT /V est calcul´ee pour V = 525 nm3 et T = 180 K

(ligne pointill´ee). (b) Courbe d’hyst´er´esis calcul´ee avec les mˆemes param`etre qu’en (a) pour un volume infini (ligne pleine) et un volume de 525 nm3 (ligne pointill´ee).

Nanoagr´egats superparamagn´etiques

Nous avons vu plus tˆot qu’un agr´egat ferromagn´etique peut devenir superparamagn´etique lorsque les fluctuations thermiques sont suffisamment ´elev´ees. Le comportement magn´etique

quasi-statique d’un nanoagr´egat superparamagn´etique est alors similaire `a celui d’un ion paramagn´etique sauf que le moment magn´etique de l’agr´egat compte plusieurs milliers de fois plus de magn´etons de Bohr que le moment magn´etique de l’ion.

La valeur moyenne du moment magn´etique µm d’un ion paramagn´etique en fonction du

champ magn´etique appliqu´e s’´ecrit [30]

hµmi = µmBJ(x) , (3.33)

o`u J est le nombre quantique du moment angulaire total de l’ion et x = µmµ0H0/kBT .

Notons que B1

2 (x) est ´egal `a tanh x, tandis que B∞(x) est ´egal `a la fonction de Langevin

L (x) = cot (x) − 1/x.

Dans le cas d’un agr´egat superparamagn´etique, µm correspond au moment magn´etique

de l’agr´egat. Supposons maintenant que l’agr´egat superparamagn´etique poss`ede un axe magn´etique facile qui est orient´e dans la direction du champ magn´etique appliqu´e. Le nombre de directions possibles du moment magn´etique est alors quantifi´e (deux directions possibles), ce qui est l’´equivalent d’avoir J = 1/2. Dans ce cas, la valeur moyenne de l’aimantation du nanoagr´egat superparamagn´etique s’´ecrit [30]

hMi = Mstanh (x) , (3.34)

o`u x = µmB0/kBT et µm = MsV est le moment magn´etique du nanoagr´egat.

D’apr`es l’´eq. (3.34), l’aimantation moyenne hMi d’un nanoagr´egat superparamagn´e- tique est plus faible que Ms sauf si x tend vers l’infini. Similairement, notons qu’une autre

cons´equence de l’effet des fluctuations thermiques est que la valeur moyenne du champ d’anisotropie per¸cu par un nanoagr´egat superparamagn´etique, soit hHani = 2 hKi/µ0hMi,

o`u hKi est la moyenne de la constante d’anisotropie effective Keff du nanoagr´egat, est plus

faible que le champ d’anisotropie d’un nanoagr´egat stable magn´etiquement (non superpara- magn´etique). Ceci aura des cons´equences importantes lors de l’analyse du champ d’anisotro- pie obtenu avec la spectroscopie de r´esonance ferromagn´etique.