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Soit donc P = M N un sous-groupe parabolique de G et soit (σ, W ) une représentation lisse de M . On peut étendre cette représentation en une repré-sentation de P (en imposant que l’action de N soit triviale) puis construire l’espace :

IndGPσ = {f ∈ C(G, W )|f (pg) = σ(p)f (g), ∀p ∈ P, ∀g ∈ G} ,

où C(G, W ) désigne l’ensemble des fonctions lisses de G dans W , i.e. in-variantes par translation pour un certain sous-groupe ouvert (compact si l’on veut). Puisque G/P est compact, il est équivalent de parler de fonctions lo-calement constantes. L’action de G par translations à droite fait de IndGPσ une G-représentation, dite représentation induite. On énonce désormais sans démonstration certaines propriétés de l’induction pour lesquelles on renvoie à [Ren10] III.2.

La première est que IndGP, ainsi défini, est un foncteur de Rep(M ) dans Rep(G), exact. Par ailleurs, on a une propriété naturelle de transitivité : étant donnés P1= M1N1et P2= M2N2deux sous-groupes paraboliques avec P1⊂ P2

et M1⊂ M2, et une représentation lisse σ de M1, on a un isomorphisme naturel : IndGP

1σ ' IndGP

2(IndM2

P1∩M2σ).

De plus, si σ est admissible, IndGPσ l’est également (ceci est lié au fait qu’on a des sous-groupes paraboliques et que l’espace G/P est compact). Enfin, si σ est de longueur finie (comme M -représentation), IndGPσ l’est également (comme G-représentation) – par exactitude, il suffit de le montrer quand σ est irréductible. On définit également (en reprenant les notations précédentes) le foncteur d’induction normalisée par :

iGPσ =nf ∈ C(G, W )

f (pg) = δP(p)1/2σ(p)f (g), ∀p ∈ P, ∀g ∈ Go, où δP désigne la fonction modulaire du groupe P définie au paragraphe 1.2.1. On a donc iGPσ = IndGP(σ ⊗ δP1/2). Le foncteur d’induction normalisée est encore transitif (pour des rasions de compatibilité de fonctions modulaires) ; avec les notations ci-dessus, on a un isomorphisme naturel :

iGP1σ ' iGP2(iM2

P1∩M2σ).

L’intérêt de cette normalisation est que le foncteur iG

Pa de meilleures propriétés. Proposition 1.5.1. Soit σ une représentation lisse de M , alors

— si σ est unitaire, iG

Pσ l’est également ; — (iG

Pσ)' iG

P).

Démonstration. On renvoie aux Propositions 3.1.2, 3.1.3 et 3.1.4 de [Cas74].

1.5.2 Foncteur de Jacquet

Donnons-nous à nouveau P = M N un sous-groupe parabolique de G et (π, V ) une représentation lisse de G. On peut alors considérer l’espace

V (N ) = VectC{π(n)v − v | v ∈ V, n ∈ N }

et on définit VN = V /V (N ) l’espace des coïnvariants sous N : c’est le plus grand quotient de V sur lequel N agit trivialement. Puisque N est distingué dans P , V (N ) est laissé stable par P et VN est donc une représentation de P sur laquelle N agit trivialement, soit finalement une représentation de P/N = M , notée (πN, VN).

On a ainsi défini un foncteur de la catégorie Rep(G) dans la catégorie Rep(M ), qui est exact, on parle du foncteur de Jacquet, que l’on note tem-porairement F .

Soient (σ, W ) une représentation lisse de M et (π, V ) une représentation lisse de G. On a les égalités :

HomG(π, IndGPσ) = HomP(ResGPπ, σ) = HomM(F (π), σ).

La première égalité est la réciprocité de Frobenius « classique » pour l’induction, où l’on voit – de même que ci-dessus – σ comme une représentation de P grâce à la factorisation P = M N (l’action de N étant triviale). La deuxième égalité vient justement de ce que l’action de N est triviale : on peut donc prendre les coïnvariants et obtenir un morphisme entre M -représentations.

Le foncteur F de Rep(G) dans Rep(M ) est ainsi adjoint à gauche du foncteur IndGP. Enfin, si π est admissible, F (π) l’est également ([Cas74] Theorem 3.3.1) ; si π est de plus de longueur finie, alors F (π) l’est également ([Cas74] Corollary 6.3.8).

On peut également définir un foncteur de Jacquet normalisé (adjoint à gauche de l’induction parabolique normalisée) : rG

Pπ = F (π)⊗δP−1/2. Ce foncteur préserve bien sûr l’admissibilité et la longueur finie et on a :

HomG(π, iGPσ) = HomM(rGPπ, σ). (1.1) Par adjonction, le foncteur de Jacquet normalisé est aussi transitif. Étant donnés P1= M1N1et P2= M2N2deux sous-groupes paraboliques avec P1⊂ P2

et M1⊂ M2, et une représentation lisse π de G, on a un isomorphisme naturel : rGP1π ' rM2

P1∩M2(rGP2π).

1.5.3 Lien avec les représentations supercuspidales

Nous avons défini en 1.3.3 les représentations supercuspidales par les pro-priétés de leurs coefficients matriciels. Il existe une autre caractérisation par le fait de n’apparaître dans aucune induite parabolique et d’être en quelque sorte la brique la plus élémentaire possible en termes de représentations.

Théorème 1.5.2. Soit (π, V ) une représentation lisse irréductible de G. Alors les propriétés suivantes sont équivalentes :

1. (π, V ) est supercuspidale (au sens de la Définition 1.3.3) ;

2. pour tout sous-groupe de Levi strict M et pour toute représentation σ de M , HomG(π, iGPσ) = 0 ;

3. pour tout sous-groupe parabolique strict P , on a rG Pπ = 0.

4. pour tout sous-groupe de Levi standard strict M et pour toute représenta-tion σ de M , HomG(π, iG

Pσ) = 0 ;

5. pour tout sous-groupe parabolique standard strict P , on a rG Pπ = 0. Démonstration. L’équivalence entre 2. et 4. d’une part et entre 3. et 5. d’autre part vient du fait que l’on peut modulo conjugaison se ramener à considérer des sous-groupes standard. L’équivalence de 4. et 5. provient de (1.1), pour l’équivalence avec 1. on renvoie à [Ren10] VI.2.1.

Chapitre 2

Paramétrisation de Langlands

2.1 Le groupe de Weil

Comme précédemment, F est un corps local non-archimédien de caractéris-tique nulle, k son corps résiduel (fini), de caractériscaractéris-tique p. Afin d’éviter toute ambiguïté, nous écrirons dans cette partie kF au lieu de k quand cela paraîtra nécessaire.

Il s’agit de rappeler ici comment on définit le groupe de Weil de F , substitut du groupe de Galois absolu Gal(F /F ), où F désigne une clôture algébrique de F . Nous suivons [Tat79] et [Kna97].

Soit donc K une extension galoisienne finie de F . On désigne par OK l’an-neau des entiers de K et par pK son unique idéal maximal. Le corps résiduel kK = OK/pK est une extension finie de kF. Un élément du groupe de Galois de K/F stabilise OK et pK et induit donc un automorphisme du quotient kK qui fixe point par point kF.

On obtient ainsi un morphisme Gal(K/F ) → Gal(kK/kF) dont on montre qu’il est surjectif, le groupe d’arrivée étant cyclique, engendré par le morphisme de Frobenius x 7→ xqF où qF = #kF.

En prenant la limite projective sur K, on obtient un morphisme surjectif Gal(F /F ) → Gal(kF/kF) dont le noyau est, par définition, le groupe d’inertie de F , noté IF.

Proposition 2.1.1. On a : Gal(kF/kF) ' bZ ' QpZp.

Démonstration. Pour chaque entier naturel non nul n, il existe une extension de kF de degré n, unique à isomorphisme près. Elle est de groupe de Galois cyclique Z/nZ, et le corps kF est l’union de ces extensions finies, qui forment un système projectif pour la divisibilité du degré.

On a donc :

Gal(kF/kF) ' lim

←− Z/nZ = bZ 'Y

p

On peut donc écrire la suite exacte

1 IF Gal(F /F ) Zb 0. (2.1) Le groupe bZ contient Z comme sous-groupe dense, et par l’isomorphisme de la Proposition 2.1.1,Z correspond au groupe engendré par le morphisme de Frobenius arithmétique, noté σF, qui envoie x ∈kF sur xqF. Nous choisissons de faire correspondre le morphisme de Frobenius arithmétique à l’élément −1 deZ et nous notons Fr un élément dont l’image est σ−1

F (i.e. qui correspond à l’élément +1 deZ).

On peut alors définir le groupe de Weil (abstrait) WF de F comme l’image inverse deZ dans le diagramme (2.1), i.e. WF est engendré par le morphisme Fr et par le groupe d’inertie IF.

On a donc la suite exacte

1 IF WF Z 0.

On munit alors WF de l’unique topologie de groupe localement compact telle que

— la projection WF → hσFi 'Z soit continue (Z étant muni de la topologie discrète),

— la topologie induite sur IF est la topologie profinie induite par la topologie de Gal(F /F ).

On remarque que cette topologie n’est pas celle induite par l’inclusion WF ⊂ Gal(F /F ), mais que l’injection topologique WF ,→ Gal(F /F ) est encore conti-nue et d’image dense.

La théorie du corps de classes local (nous renvoyons à [Ser62] Chapitre XIII) nous permet de définir, dans le langage de [Tat79], l’isomorphisme de groupes topologiques :

ArtF : F×−−→ W ab

F . (2.2) Cet isomorphisme envoie (surjectivement) les éléments de O× sur l’image du groupe d’inertie IF dans l’abélianisé et envoie une uniformisante sur un « Frobenius géométrique » i.e. sur un élément dont l’image dans Gal(kF/kF) est σF−1. Cela permet en outre de définir la norme d’un élément de WF comme étant la norme (p-adique) de l’élément de F×associé par (2.2), que l’on notera de la même façon.

Par construction de WF, on a l’injection WF ,→ Gal(F /F ), d’image dense, ce qui nous permet de voir la catégorie des représentations de Gal(F /F ) (com-plexes, continues, de dimension finie) comme une sous-catégorie pleine de la catégorie des représentations de WF (complexes, continues, de dimension finie). Une représentation de cette sous-catégorie est dite de type galoisien. Nous avons la proposition suivante :

Proposition 2.1.2. 1. Soit (ρ, V ) une représentation de WF. Alors ρ est de type galoisien si, et seulement si l’image ρ(WF) est finie.

2. Une représentation de type galoisien de WF est irréductible si, et seule-ment si elle l’est comme représentation de Gal(F /F ).

3. Toute représentation irréductible de WF est de la forme σ ⊗ | · |s avec σ de type galoisien, et s ∈C.

4. Une représentation irréductible ρ de WF est de type galoisien si, et seule-ment si det ◦ρ(WF) est un sous-groupe fini de C×.

Démonstration. On démontre le point 3. les autres s’en déduisent aisément. Soit (ρ, V ) une représentation irréductible de WF. La continuité de ρ im-plique que le noyau Ker ρ contient un sous-groupe ouvert de IF. En particulier, l’image ρ(IF) est un sous-groupe fini de GL(V ). Comme IF est distingué dans WF, ce sous-groupe est normalisé par ρ(WF).

Notons maintenant Fr un morphisme de Frobenius de WF. Alors, en particu-lier, ρ(Fr) induit une permutation de l’ensemble fini ρ(IF), si bien qu’en notant m = #ρ(IF), on a que ρ(Fr)m! induit la permutation identité, i.e. commute à tous les éléments de ρ(IF). Or WF est engendré par IF et par Fr, si bien que ρ(Fr)m! commute à tout ρ(WF).

Par le lemme de Schur, on a donc que ρ(Fr)m!est une homothétie, de rapport λ disons. On peut alors définir un caractère χ de WF par χ|IF = 1 et χ(Fr) = α1 où α est une racine m!-ème de λ. Le caractère χ est non ramifié et peut donc bien s’écrire comme une puissance (complexe) de la norme : χ = | · |s pour un certain s ∈ C. On voit alors de suite que ρ ⊗ χ est d’image finie et de type galoisien.