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CHAPITRE 3 : Etude biologique

2. Etude de la croissance

2.4. Etude de la croissance annuelle des adultes

2.4.2.5. Indice de mortalité

L’indice de mortalité naturel estimé à partir de l’équation de Pauly (1980) pour le merlu de Nord de la Tunisie est 0,300. Selon le sexe, le coefficient de mortalité, est respectivement de 0,246 et 0,835 pour les femelles et les mâles..

D’après l’équation de Taylor (1960), L’indice de mortalité naturele est 0,198. Selon le sexe, l’indice de mortalité pour les mâles est de 0,26. Il est de 0,22 pour les femelles.

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2.4.3. Discussion et conclusion

L’analyse de la croissance et l’estimation de l’âge forment une étape cruciale pour l’évaluation du stock des ressources halieutiques. En effet, la validation indirecte à partir de l’analyse journalière des microstructures sur l’otolithe (Arneri et Nin, 2000; Morales-Nin et Moranta, 2004; Belcari et al., 2006) et direct à partir des expériences de marquage (de Pontual et al., 2003, 2006 ; Mellon-Duval et al., 2010) ont montré une sur-estimation de l’âge traduisant une sous-estimation de la croissance somatique. Ceci induit un biais important sur la gestion de stock de merlu (Bertignac et de Pontual, 2007).

L’analyse de la relation taille-poids pour le merlu de la côte Nord de la Tunisie montre une différence entre les mâles et les femelles. De même en Tunisie, deux études antérieures ont déjà montré une différence de croissance en fonction des sexes en confirmant la croissance rapide pour les femelles par rapport aux mâles dans le golfe de Tunis (Bouhlal, 1975 ; Chérif et al., 2007) (Tableau 26). Toutes les études réalisées en Tunisie ont aussi mis en évidence une croissance pondérale majorante (b>3) pour les mâles et les femelles (Tableau 26).

Tableau 26. Résumé de la relation taille-poids des travaux réalisés sur le merlu en Tunisie.

Source Lieu Femelles Mâles Sexe confondu

Présente étude Nord de la Tunisie W = 0,003*Lt3,134 W = 0,004*Lt3,072 W = 0,003*Lt3,115 Mourad et al., 2007 Golfe de Tunis W = 0,005*Lt3,110 W = 0,004*Lt3,170 W = 0,004*Lt3,130 Bouhlal, 1975 Golfe de Tunis W = 0,004*Lt3,20 W = 0,003*Lt3,20 W = 0,004*Lt3,20

En Méditerranée, l’analyse de la relation taille-poids du merlu (sexe confondu) montre une différence entre les régions étudiées. A l’inverse, en Atlantique Nord-Est, il n’existe pas de différence importante entre le golfe de Gascogne, la mer Celtique et la mer du Nord (Kacher et Amara, 2005; Tableau 27).

Tableau 27. Résumé de la relation taille-poids de quelques travaux réalisés en Méditerranée et en Atlantique (sexe confondu).

Auteurs a b Lieu

Lleonart et al, 2003 6,9. 10-3 3,030 Méditerranée Golfe du Lion

Kacher et Amara, 2005 5,6. 10-3 3,067 Atlantique Nord-Est Golfe de Gascogne et mer Celtique Coull et al., 1989 4,7. 10-3 3,099 Atlantique Nord-Est Mer Nord et de l'Ouest de l'Ecosse

Présente étude 3,6. 10-3 3,115 Méditerranée Côte Nord de la Tunisie

91 La relation taille-poids montre bien une variabilité en fonction des sexes et en fonction des zones géographiques. Ceci est expliqué par la variation du coefficient d’allométrie (b), qui représente la forme du corps. Ce facteur est directement liée au poids, qui à son tour dépend de l’habitat et donc des facteurs écologiques (température, disponibilité de la nourriture), physiologiques (période de reproduction) et halieutiques (zone de pêche, période de pêche…).

Les paramètres de croissance (L, K, t 0) sont estimés à partir de la clé taille-âge selon le sexe et ce à partir de l’interprétation des otolithes du merlu des eaux tunisiennes. En se basant sur les résultats obtenus par le suivi de la croissance journalière et les expériences de marquage réalisées en Atlantique Nord-Est et dans le Nord de la Méditerranée occidentale, la courbe de croissance est obtenue en fixant la longueur infinie (L) à 110 cm et la longueur totale du merlu à la fin de sa première année à 28 cm. De plus la courbe a été ajustée avec le modèle puissance pour la phase juvénile, traduisant la différence de croissance entre les phases pélagique et démersale des juvéniles, pour le merlu de la côte Nord tunisienne (Fig.

40).

La courbe de croissance que nous avons déterminée est significativement différente de celle obtenue par Bouhlal (1975) (p > 0,05). En effet, pour un même âge, la taille de merlu est beaucoup plus importante à celle estimée par Bouhlal (1975) dans le golfe de Tunis. La longueur infinie (L) a été sous-estimée par Bouhlal (1975) avec une valeur à 69,5 cm (Tableau 28). Ceci est expliqué par l’absence de grands individus échantillonnés (le plus grand individu échantillonné à 56 cm). Lors de notre étude, le plus grand merlu mesure 93,5 cm. De même, la validation de la longueur totale à 28 cm pour des individus âgés de 1 an est très différente de celle calculée par Bouhlal (1975), à savoir 17cm.

L’indice de croissance calculé (K = 0,198) est supérieur à celui obtenu par Bouhlal (1975 ; K

= 0,176). Ainsi, au cours de la vie du poisson, la différence de croissance entre ces 2 études s’accentue (Fig. 63).

Tableau 28. Paramètres de croissance du merlu en Tunisie.

Paramètres de croissance Présente étude Bouhlal (1975)

L (cm) 110 69,5

K (année-1) 0,198 0,176

t0 (année) 0,500 0,600

92 Figure 63. Courbe de croissance linéaire selon le modèle de Von Bertalanffy pour le merlu de

la côte Nord de la Tunisie.

Les indices de performance pour le merlu de la côte Nord de la Tunisie en fonction du sexe sont très proches. Dans notre étude, cet indice pour les femelles est supérieur à celui des mâles. Ceci est corroboré par toutes les études antérieures à l’exception de Bouhlal (1975) (Tableau 29). Cette différence entre les 2 sexes traduit à un âge donné, le poids et la taille d’une femelle sont plus élevés que ceux d’un mâle (Decamps et Labastie, 1978 ; Iglesias et Dery, 1981 ; Lucio et al., 2000).

Une valeur importante de l’indice de performance de croissance reflète une croissance rapide. La variabilité de cet indice pour le merlu entre les différentes zones géographiques peut être due à la différence d’habitat ou à l’incertitude de l’estimation de l’âge à partir d’otolithes. Cette dernière est la conséquence des difficultés d’interprétation des structures présentes sur l’otolithe du merlu. Deux études de marquage (de Pontual et al., 2006 ; Mellon-Duval et al., 2010) ont permis de valider l’âge et donc de modifier l’interprétation des structures observables sur l’otolithe. Ainsi, pour minimiser le biais dû à l’interprétation des otolithes, les valeurs de notre étude sont comparées à celles obtenues après les études de marquage.

93 Tableau 29. Indices de performance de croissance selon le sexe pour le merlu.

Auteurs Lieu  pour les mâles

Les études de marquage étant très récentes, les valeurs de notre étude sont comparées à celles de Pontual et al. (2006) et Mellon-Duval et al. (2010). Lors de ces 3 études, la taille maximale (L) a été fixée à 110 cm. Ainsi, l’indice de performance de croissance est directement lié au taux de croissance K. La valeur de K des merlus de l’Atlantique Nord (golfe de Gascogne ; de Pontual et al., 2006) est plus importante que celle des merlus provenant de Méditerranée (Mellon-Duval et al., 2010 ; Khoufi et al., 2014). Cependant, la valeur de K au Sud de bassin Méditerranéen (Nord tunisien, cette étude) est proche de celle au Nord de ce dernier (golfe de Lion) (Fig. 64).

La différence du taux de croissance entre l’océan Atlantique et le bassin de la Méditerranée est peut-être due à des facteurs génétiques, confirmant l’existence de deux populations distinctes de merlu (Cimmaruta et al., 2005). De même, les facteurs biotiques comme la disponibilité de nourriture jouent un rôle important dans la croissance et peuvent contribuer à expliquer une telle différence. En effet, l’Atlantique est plus riche en nutriment que le bassin Méditerranée qui est oligotrophe (Béthoux et al., 1998). Les facteurs environnementaux (température, salinité, profondeur, up-welling…) sont aussi déterminants pour expliquer aussi la différence du taux de croissance. Les températures en Atlantique sont plus faibles qu’en Méditerranée, elle est de 8 à 9,5 °C (Puillat et al., 2004) dans le golfe de Gascogne alors qu’elle n’est pas inférieure à 13 °C dans le golfe du Lion (Lefevre et al., 1997) et elle est entre 13,85 et 14,2 °C (Bou Ismail et al., 2012) dans le Nord Tunisien.

De la même façon, Steves et Cowen (2000) ont montré, chez une autre espèce de la famille des Merluccidae (Merluccius bilinearis), qu’une abondance importante, mais aussi un

94 taux de croissance rapide étaient caractéristiques d’eaux présentant des températures faibles allant de 8 à 10 °C.

Figure 64. Courbes de croissance linéaire du merlu selon le modèle de Von Bertalanffy dans le golfe de Gascogne (L= 110 cm ; K = 0,250 année-1 ; n = 15) et dans le

golfe de Lion (L= 110 cm ; K = 0,178 année-1 ; n = 200) à partir des re-capture de merlus marqués et sur la côte Nord de la Tunisie (L= 110 cm ; K = 0,198 année-1 ; n = 1599).

Il est généralement difficile d’estimer directement la mortalité naturelle (M).

Cependant, plusieurs méthodes d’estimation indirecte de M sont utilisées. Ainsi, le paramètre (K) de la courbure de Von Bertalanffy, est sans doute lié à la longévité des poissons (Beverton

& Holt, 1959), elle-même liée à la mortalité naturelle (Tanaka, 1960 ; Holt, 1965 ; Saville, 1977). D’une manière générale plus K est grand plus M est élevé. La mortalité naturelle serait également liée à la taille et au poids asymptotiques (L et W) (Taylor, 1960 ; Peterson et Wroblewski, 1984 ; Roff, 1984). D’autres études suggèrent que M est corrélé à la reproduction, les espèces de poissons arrivant précocement à maturité ayant une forte mortalité (Rikhter et Efanov, 1976). C’est dans le même ordre d’idées que Gunderson et Dygert (1988) relient M au rapport gonado-somatique.

Deux méthodes ont été utilisées pour prédire l’indice de mortalité M. Selon Pauly (1980), la mortalité s’avère corrélée à la température en plus de la valeur de K et de la taille

95 asymptotique L. Cependant, le paramètre K est celui qui influence le plus la mortalité naturelle (Pauly et Moreau, 1997). Ainsi, le modèle de Taylor (1960) se base uniquement sur K pour estimer la mortalité.

Les valeurs estimées de M sont très différentes selon les 2 modèles avec 0,198 selon le modèle de Taylor et 1,016 selon le modèle de Pauly (1980) pour le merlu (sexe confondu) de la côte Nord de la Tunisie.

La valeur du modèle de Taylor est proche de 0,2, valeur calculée par Bouhlal (1975) selon une autre méthode. Selon l’équation de Taylor (1960), la mortalité chez les femelles du merlu de la côte Nord tunisienne est plus faible que celle chez les mâles. Ce qui a été confirmé par Piñeiro et Saínza (2003) dans les eaux Ibériques. La valeur du modèle de Pauly (1980) est considérée forte pour la famille de gadidae. La valeur de 0,2 est la mortalité utilisée pour la morue (Gadus morhua) dans les évaluations de stock. La morue étant un gadidé comme le merlu, il semblerait qu’il serait plus judicieux d’utiliser la valeur du modèle de Taylor (M = 0,198).

CHAPITRE 4 : Etude dynamique du stock et