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CHAPITRE 3 : Etude biologique

1. Etude de la reproduction

1.4. Discussion et conclusion

Le potentiel reproductif d’un stock du poisson est lié aux interactions de plusieurs caractéristiques biologiques de la reproduction, comme l’âge et la taille des géniteurs, la maturation, et le cycle de reproduction (Trippel, 1999).

D’une façon générale, les études portant sur les mâles du merlu ou autres espèces sont rares (Tomkiewicz et al., 2003; Trippel, 2003; Costa, 2013), tandis que les études présentant l’aspect reproductif chez les femelles semblent être plus pertinentes pour la définition du potentiel reproductif (Marshall et al., 1999, 2000; Lambert et al., 2000, 2003).

La disponibilité et la qualité des réserves énergétiques ainsi que l'assimilation des aliments influent énormément sur les caractéristiques de la reproduction (fécondité individuelle et la taille des œufs) (Tyler et Colow, 1985), et donc les conditions des géniteurs et détermine, donc, la maturation des individus (Saborido-Rey et Kjesbu, 2009). C’est pourquoi il est recommandé d'évaluer la variabilité saisonnière des conditions soma-gonadiques afin de comprendre la stratégie de reproduction en termes d’investissement énergétique.

L’utilisation de l’indice gonado-somatique et le facteur de condition doivent répondre à des hypothèses avant de les considérer comme étant des estimateurs des conditions de reproduction (De Vlamming et al., 1982). L’IGS devant être indépendant de la taille (West, 1990) et la relation entre les gonades et de la masse du poisson doit être isométrique (De Vlamming et al, 1982; Somarakis et al, 2004). Ces hypothèses ont été respectées dans le cas du merlu (Murua, 2006).

La variabilité saisonnière de la croissance corporelle a montré des tendances similaires de l’évolution du poids et de la taille, ce qui suggère une période de croissance durant l'automne-hiver (novembre-avril) et une période d'épuisement au printemps-été (mai-octobre).

De même, l’évolution mensuelle de FC confirme les précédentes tendances du novembre à mai, alors qu'il n'a pas montré de tendance claire pendant l'été présentant des fluctuations de faibles valeurs (< 0,3). Ce dernier aspect de tendance de variation de FC pourrait être expliqué par l’ingestion de la nourriture qui est disponible dans les lieux (Domínguez-Petit, 2007).

Durant, l'automne-hiver, la maturation gonadique semble influencer directement les réserves corporelles présentant une oscillation en opposition avec le développement gonadique. Tandis que pendant le printemps-été, les conditions corporelles semblent moins affectées par la maturation des gonades, ce qui suggère la présence d'autres sources d'énergie externes (nourriture) jouant un rôle dans le développement des gonades et la croissance somatique.

60 Toutes ces considérations conduisent à une utilisation différentielle saisonnière de la consommation énergétique, principalement durant l'automne-hiver, le merlu alloue de l’énergie à la croissance somatique et les réserves (graisse, muscle, foie) pour une utilisation ultérieure, alors que durant le printemps-été, l’énergie au lieu d’être stockée dans le foie, elle est convertie en poids des gonades comme il étais démontré par la relation directe entre l’IHS et l’IGS avant et après la saison de ponte (printemps-été). L'indice hépatique joue un rôle utile pour obtenir des informations sur l'état métabolique des poissons en emmagasinant des réserves énergétiques dans le foie (Shulman, 1974; Crupkin et al, 1988) comme c’est un bon indicateur pour la consommation alimentaire (Heidinger et Crawford, 1977; Rosenlund et al., 1984). En effet, le foie est responsable pour l’accumulation des lipides et la production de vitellus, qui à son tour joue le rôle d’un précurseur durant la vitellogenèse des ovocytes (Love, 1970; Bohemen et Lambert, 1981). Durant la maturation, les réserves accumulées dans le foie sont mobilisées pour l’ovogenèse (Lahaye, 1972; Billard, 1979). Pendant l'automne-hiver, le FC et l’IGS sont clairement corrélés, mais durant la principale saison de ponte (printemps-été), il n'y a pas de relation directe bien définie. La relation indirecte entre les conditions somatiques de l’espèce et l'indice gonadique est expliquée dans la littérature par un décalage dans le temps (Domínguez Petit, 2007; Murua, 2006; Costa, 2013). Ces observations sur le merlu habitant les eaux du Nord tunisien sont décrites par le terme d’un comportement intermédiaire de reproduction c’est un comportement permettant à l’animal d’utiliser deux stratégies à savoir les réserves corporelles (capital) et des proies récemment digérées (income). En général, les fortes fluctuations saisonnières de la disponibilité de la nourriture dans les hautes latitudes nécessitent une réponse de capital pour acquérir de l’énergie alors que les cycles saisonniers plus modérés ou prolongés à des faibles latitudes nécessitent une réponse income (Schultz et Conover 1997). Cependant, les conditions climatiques de latitude sont différentes de celles de la mer Méditerranée, où les petits poissons pélagiques qui se nourrissent de zooplanctons se reproduisent simultanément avec la production annuelle de la production de zooplancton (anchois européen) sont principalement des incomes, alors que les espèces qui fraient dans les périodes de faible production (sardine européenne) sont principalement des capitales (Somarakis et al., 2004; Ganias et al., 2007). En se basant sur la biologie reproductive (ponte fractionnée, fécondité indéterminée) le merlu des eaux tunisiennes est à comportement intermédiaire entre la stratégie d’income et de capital. A partir de nos données, durant l’hiver, le merlu emmagasine de l’énergie dans son corps (montré par FC et IHS) pour la principale période de ponte (printemps-été), mais durant l’été, la majeure partie de l'énergie stockée est utilisée pour la maturation des gonades, mais l’animal continue

61 à se nourrir afin d’augmenter leur énergie investie durant la période de ponte (income). La persistance de bonnes valeurs de FC devant la forte condition gonadique durant les saisons printemps-été peut être liée aux ressources alimentaires disponibles durant cette période qui seront utilisées pour la croissance somatique plus que la croissance gonadique. Pour les faibles valeurs de l’IHS durant la période de croissance des gonades peut refléter les dépenses énergétiques, mais après la ponte, l’IGS diminue et l’IHS reste élevé ce qui suggère que le merlu n’atteint pas l’état d’épuisement à la fin de la saison de ponte (Crupkin et al., 1988).

Le sex-ratio a montré la présence de mâles jusqu'à une taille de 40 cm (Lt). Bien que cette taille varie entre les régions, des résultats similaires ont été mis en évidence pour le merlu en Méditerranée (40 cm, Recasens et al., 1998) qu’en Atlantique (60 cm, Piñeiro et Sainza, 2003; 45 cm, El Habouz et al., 2011; 50 cm, Costa, 2013). Cette différence pourrait être due à la différence du taux de croissance entre les deux sexes, ainsi qu’à la mortalité naturelle et la mortalité par pêche (El Habouz et al., 2011, Piñeiro, 2011), c'est-à-dire si les mâles se développent à un rythme plus lent que les femelles (Mellon-Duval et al., 2010), l'effet de la croissance et le taux de mortalité sur la taille des individus, conduiront à avoir une proportion de femelles ayant une taille supérieure par rapport aux mâles (Martin, 1991).

Les stades de maturité des gonades pour le merlu ainsi les indices mensuels de reproduction ont montré une saison de ponte étalée définit par 3 pics saisonniers. La principale saison a été fixée de juin à octobre et les deux autres saisons sont en janvier et en avril. Selon la littérature, le merlu en Méditerranée présente une variabilité dans la saison de reproduction et les résultats actuels sont dans la gamme de cette variabilité. En effet, une étude antérieure menée sur les côtes Nord de la Tunisie a enregistré un pic de ponte maximale en hiver, et deux pics secondaires au printemps et à la fin d'été (Bouhlal , 1973). Dans la mer Adriatique la période de ponte a été enregistrée au printemps (Alegría-Hernández et Jukić, 1992), en hiver (février-mars) et en été (septembre) le long de la mer Ligure et la mer Tyrrhénienne (Biagi et al., 1995; Orsi-Relini et al., 1986), à l’automne dans le golfe de Lion (Recasens et al., 1998; Morales-Nin et Moranta, 2004), encore en hiver début printemps, entre février et mai dans le Nord-Ouest de la Méditerranée (Lleonart, 2001). Dans les eaux du Nord de l'Atlantique (golfe de Gascogne), le pic de ponte est entre janvier et avril (Lucio et al., 2000; Alvarez et al., 2004 ; Murua et Motos, 2006 ; Domínguez -Petit, 2007) en se déplaçant vers le Sud sur la côte portugaise les pics de ponte a été observé en mars, mai et août (Costa, 2013). Dans les régions de l'Atlantique Sud (eaux Marocaine) la période principale est en hiver avec un pic secondaire en été (El Habouz et al., 2011). Plusieurs auteurs ont mis en évidence cette variabilité inter-annuelle durant la saison de ponte (Recasens et al., 1998 ; El

62 Habouz et al., 2011), reliant cette dernière à l'alimentation et de la disponibilité des ressources (Recasens et al., 1998), Tandis que d'autres observations suggèrent que des facteurs environnementaux et biologiques pouvant conduire à des variations inter-annuelles de caractéristiques de la reproduction (Murua , 2006), comme cela a été également observé chez d'autres espèces à fécondité indéterminée tel qu’Engraulis mordax (Hunter et Leong , 1981) et E. encrasicolus (Somarakis et al., 2004; Basilone et al., 2006).

Malgré les différences des ogives de maturité, l'estimation de L50 a montré des résultats assez similaires en utilisant les données macroscopiques et microscopiques. Ce résultat est probablement dû à la proportion élevée des femelles immatures. En général, l'analyse macroscopique n'est pas satisfaisante pour distinguer entre immature et les individus au repos sexuel, ce qui montre que les différences dues à l'attribution subjective lors de l’évaluation macroscopique et confirme la fiabilité et la précision de l'évaluation microscopique (Murua et al, 2003; Domínguez-Petit, 2007; Vitale et al., 2006; Recasens et al., 2008; Ferreri et al., 2009).

D’après Sarano (1986) et Dominiguez-Petit et al., (2010) pour M. merluccius de l'océan Atlantique et Recasens et al., (2008) pour M. merluccius dans la mer Méditerranée et modifié par les auteurs, 5 stades de maturité ont été décrits microscopiquement, pour M.

merluccius de la côte Nord de la Tunisie avec la conservation du premier stade des immatures mais en combinant le II et III en phase de maturation, puis la ponte et la post-ponte comme des stades séparés et enfin le reste de stades ont été rassemblés en post-ponte et repos. Pour le mâle la même stratégie de description macroscopique a été accordée à la classification microscopique en suivant Lucio et al. (2000) et ICES (2007).

Les valeurs de L50 ont confirmé les résultats obtenus par Bouhlal (1973) pour les populations de merlu tunisien depuis une trentaine d'années déjà. Les résultats obtenus par plusieurs études réalisées sur des populations de merlu de l'Atlantique et de la Méditerranée montrent une diminution de L50 durant ces décennies, principalement lorsque le stock est surexploité (tableau 13) pour les femelles et les mâles. En Tunisie, cette constatation est vérifiée pour les mâles et non pas pour les femelles.

63 Tableau 13. Taille de la première maturité sexuelle (cm) pour le merlu pour différentes

régions.

Aire d’étude

L50 (cm)

Références Femelle (cm) Mâle (cm)

Mer Catalane 39 32 (Sánchez et Martin, 1985)

35,8 - (Recasence et al., 2008)

Nord Tyrrhénien 42,5 27 (Biagi et al., 1995)

35,9 21,7 (Ligas et al., 2011)

Golf de Lion 43 - (Aldebert et Carriès, 1989)

38 28,8 (Recasence et al., 1998)

Nord du Maroc côté Atlantique 41.1 37,8 (Lahrizi, 1996)

33,8 28,6 (El Habouz et al., 2011)

Nord et Nord-Ouest mer Ibérienne

58 - (Perez et Pereiro (1985)

45,4 32,8 (Piñeiro et Saínza, 2003)

Bou-Ismaïl 30,6 21,5 (Bouaziz et al., 1998)

Baie d’Oran 33,5 20,5 (Belhoucine, 2012)

Nord de la Tunisie 29 28 (Bouhlal, 1973)

29 25 Présente étude

Des différents résultats ont été obtenus lorsqu’on a appliqué les recommandations de WKMOG-ICES (2008) pour une évaluation précise. La précision de l'estimation de L50 est devenue plus critique, étant donné qu'une erreur pourrait entraîner une sous-estimation de la

biomasse du stock reproducteur (SSB).

L'un des objectifs fondamentaux de la gestion de la pêche est de conserver un potentiel de reproduction suffisant dans un stock afin de permettre une exploitation durable. Pour cette raison, les stocks sont généralement gérés par référence au maintien de certains niveaux de SSB, étant donner que SSB est un indicateur de «viabilité» pour le stock. L'évaluation et la gestion des ressources halieutiques reposent sur l'estimation correcte de la SSB (Hilborn et Walters, 1992), qui nécessite une estimation fiable de la taille de première maturité sexuelle.

2. Etude de la croissance