DE LA VEGETATION ACTUELLE
Figure 44 : Divers centres du parc du puy de Montgy. On peut remarquer la masse arborée sur les pentes du
R. incluant des arbres
Herbacé Lande OUVERT Arbustif Arboré FERME TOTAL esp/
relevé/parc
Tx embrous‐
saillement
MANSON
Monges nord 13,4 16,3 15,2 17,5 13 16 14,6 4 %
Monges sud 15 18,4 17 22 21 21,7 17,4 10 %
Roche merle 19,3 20 19,7 22,6 22 22,3 18,4 6 %
Saint‐Aubin 15 22,1 18,8 23 15 22,6 21,6 6 %
Puy de Manson aucun 13,7 13,7 14 16,2 14,7 12,9 12 %
Total 15,4 18 17,4 18,7 19 18,6 17 7,6 %
ORCINES
Ft. du Berger 19 15 17,2 19 11 17 17,6 13 %
Collières aucun 15,4 15,4 10,8 10,6 10,7 13,9 31 %
Péage aucun 13,2 13,2 11,3 13,3 11,6 12,8 35 %
Principal 17,9 12,7 13,1 5,8 4,5 5,4 8,6 55 %
Total 18,2 11,6 13,6 7,6 5,6 6,6 13 33,5 %
RECOLEINE
Lassolas 19,2 23 21,1 18,9 19,4 19,1 19,5 63 %
La Moulerir 19 24 22,6 25,3 26 25,4 22,6 2 %
Montgy 21,7 14,2 15,9 13,9 11,2 12,5 19,2 36 %
Pourcharet 23,5 19,4 20,9 13,8 16,25 14,5 20,7 8 %
Total 21,7 18,1 19,3 16,4 15,2 15,7 20 27,25
TOTAL Global 19 14 15,7 10,7 8,5 9,8 13,9 21,6
Tableau 16 : Nombre moyen d’espèces par relevé floristique selon le type de strate, compilation des relevés
Sur Manson, l’étude des relevés selon qu’ils présentent les strates herbacées, landes, arbustives et arborées apporte des précisions (tab.16‐17). L’estive se distingue nettement des deux autres par la diversité floristique des relevés contenant des espèces arbustives et arborées. Elle est effectivement plus importante que celle ne contenant que des espèces herbacées et de lande. Cet état confirme nos précédentes observations selon lesquelles les zones arborées sont accessibles au troupeau et composées de sous‐bois clairs. Ici, la présence d’espèces ligneuses ne fait qu’augmenter le nombre d’espèces total. En outre, les relevés contenant des espèces de lande sont majoritaires, voire prépondérants, les cytisaies étant très développées. Pourtant, cet état ne tient pas compte de l’impact du troupeau sur celles‐ci, la plupart des plantules de Cytisus scoparius observées sur la zone étant très impactées. Ainsi, le parc de Monges nord est le plus faiblement diversifié de tout l’espace pastoral étudié. Cet état est probablement dû à la forte présence inhibitrice de Nardus stricta (dérivé des landes à Calluna vulgaris par surpâturage) et à une surexploitation sans réelle restitution.
Relevés
MANSON 11,5 % 74,6 % 48,4 % 11,5 % 122
ORCINES 4 % 58,9 % 71,8 % 30,7 % 319
RECOLEINE 27,4 % 57,1 % 52,4 % 44 % 84
TOTAL Global 9,5 % 62,3 % 63,2 % 32,4 % 525
L’analyse par ACP a confirmé ces observations, en regroupant des espèces herbacées avec l’ensemble des parcs de Manson, excepté le puy de Manson, plus enfriché et boisé. La caractérisation de l’embroussaillement/ boisement des parcelles selon la méthode de Picart et Fleury (2001) a également confirmé ces analyses avec un enfrichement moyen inférieur à 10 % sur Manson (16,5 % des lisières), excepté le puy de Manson à 12 % (53 % des lisières). Pourtant, les espèces caractéristiques de l’embroussaillement sont parmi les plus envahissantes : Crataegus monogyna, Rubus sp., et Cytisus scoparius. Ces espèces sont donc fortement contraintes par l’action du troupeau qui limite leur extension. Sur le parc de Monges nord, le relevé contenant des arbres est unique et peu diversifié, ce qui correspond à la présence ici d’affleurements rocheux en grand nombre et de résineux acidifiant le sol peu épais. Seul le parc du puy de Manson a une situation différente (taux d’enfrichement de 12 %) avec une diversité au sein des relevés plus faible et un seul relevé composé uniquement d’herbacées. Il est donc dans une situation intermédiaire entre les autres parcs de Manson et les parcs les plus enfrichés et boisés d’Orcines (Les Collières et le Péage).
Les plantules de Cytisus scoparius sont ici plus nombreuses et moins impactées par le troupeau, qui se concentre dans la partie élevée du parc, et y a établi un lieu de chôme. Les sous‐bois sont peu, voire pas, utilisés, et difficiles d’accès car présentant une lisière de Cytisus dense.
Sur Recoleine, les relevés terrain ont révélé un schéma différent avec un petit nombre d’espèces au total : 84 espèces en ovin et 76 en bovin, mais une diversité par relevé plus importante avec 20 espèces en moyenne, les plus courantes étant de bonne qualité fourragère : Trifolium repens, Anthoxanthum odoratum et Plantago lanceolata. Cet état est courant dans des prairies relativement bien enrichies et productives qui provoquent une homogénéisation de la végétation (Gibon, 2005 ; Fleury et al., 1994). Cette estive comptabilise le plus grand nombre de relevés composés uniquement d’herbacées (alors que c’est la plus petite): 23 relevés (24 % des relevés) contre 13 pour Manson (12 % des relevés) et 14 pour Orcines (4 % des relevés). Le recouvrement arboré, en parcs ovins, est de 33,7 %, mais les disparités sont les plus importantes de la zone d’étude : le parc de Lassolas cumule le plus fort taux de la zone avec 63 % (48 % des lisières) et celui de La Moulerir, le plus faible, avec 2 % seulement (12 % des lisières). Le parc bovin est du même type avec 8 % d’enfrichement, mais 30 % des lisières. Les espèces sont ici de la classe 3, résineuses, confirmant les observations effectuées par Prévosto sur la présence de résineux en zone sud de la Chaîne, issus principalement des plantations avoisinantes, et de feuillus en zone nord et centrale. Le puy de Montgy a des espaces ouverts moins diversifiés que les autres parcs (15 espèces/relevés). C’est surtout le type de lande associé à ce parc (Genévraie), et sa situation en lisière de boisements à Picea abies, qui provoque une acidité des sols convenant à peu d’espèces. Les zones uniquement herbacées, quant à elles, sont de bonne qualité. Le parc de La Moulerir ne contient en réalité que quelques arbres et arbustes isolés ne gênant en rien la circulation du troupeau et lui permettant même de s’abriter. La présence d’arbres ne fait en réalité qu’augmenter le nombre d’espèces par parc (comme c’est le cas sur Manson). Le parc de Lassolas est très boisé, mais sa gestion de manière sylvopastorale (avec des clairières, des sous‐bois clairs facilitant la circulation) a donné naissance à une plus forte diversité floristique et une faible proportion de plantules. Les parcs de Montgy et Pourcharet ne suivent pas le même schéma. Sur Montgy, le front dense que forment Juniperus communis et Picea abies limite l’accès au massif forestier. La nature des boisements, résineuse, acidifie le sol et limite l’implantation des espèces. Pourtant, le nombre d’espèces par relevé est plus important que celui du parc principal d’Orcines. L’emplacement des relevés en est l’unique cause : de nombreux relevés sur Montgy contiennent des arbres isolés (comme sur La Moulerir) où la flore herbacée est plus importante (avec 20 à 36 espèces par relevés), contrairement à ceux situés dans le massif forestier résineux (avec 4 à 10 espèces/relevé). Sur l’estive bovine de Pourcharet, la plus faible diversité est due aux sous‐bois composés de Ptéridaies, l’écart moyen entre les relevés associés à des espaces ouverts et ceux associés à des espaces fermés est le plus fort de l’estive (6,4 espèces en moins en milieu fermé). La plupart des essences sont résineuses et seul un relevé, sur les quatre contenants des arbres, est associé aux vieux hêtres de l’estive et comptabilise 30 espèces. Il fait nettement augmenter la moyenne spécifique des relevés arborés qui s’établirait sinon à 11,7. Cet
espace, historiquement associé à la chôme du troupeau (les hêtres y sont appelés chouradous) est plus utilisé, et donc plus fertilisé par le troupeau.
Aujourd’hui, la pauvreté spécifique moyenne des relevés de l’estive d’Orcines est principalement due au recouvrement important des fronts de colonisation (les relevés au sein des corylaies étant très pauvres et nombreux) : avec 13 espèces en moyenne par relevé (123 espèces au total) et comme espèces majoritaires : Corylus avellana, Brachypodium pinnatum et Calluna vulgaris. L’analyse par ACP a cependant regroupé les parcs plus ouverts d’Orcines avec ceux de Recoleine et des Poaceae et Fabaceae de bonne qualité fourragère : Trifolium repens et T. pratense, Lotus corniculatus, Arrhenatherum eliatus, et Dactylis glomerata. Les parcs plus boisés se distinguent par la présence de pu l’être. Ainsi, le nombre moyen d’espèces par relevé herbacé est supérieur à celui de Manson et inférieur à celui de Recoleine. L’importance de considérer l’ensemble de l’espace pastoral, et non pas seulement les zones en cours de fermeture, est cruciale dans cette analyse. Ainsi, les relevés composés uniquement d’herbacées du parc de la Fontaine du Berger, très utilisé car contenant un parc de tri (arrivée des bêtes à l’estive, soins, présence des béliers sur une longue durée), ressemblent à ceux de Recoleine et Manson quant à leur diversité et leur composition floristique. Les relevés de milieux ouverts et ceux de milieux fermés y sont de même diversité floristique.
Cependant, seul un relevé contient des arbres, qui sont résineux, et il est peu diversifié au regard des relevés contenant des arbustes. Le parc des Collières est très proche en taux d’embroussaillement de celui du Péage81 (respectivement 33 et 35 %, 61 et 45 % des lisières), pourtant leur situation est très différente. Si le parc du Péage est caractérisé par une Bétulaie de haute taille (plus de 10 m) et un sous‐bois relativement clair (hormis Ptéridaies à certains endroits), le parc des Collières est quant à lui caractérisé par des espèces de classe 1 : Crataegus monogyna, Rubus sp., Cytisus scoparius mais aussi de classes 2, 3 et 4 : Corylus avellana, Betula pendula, Pinus et Picea. Leur implantation massive rend impossibles les déplacements du troupeau en de nombreux endroits. Ainsi, ces deux parcs ne contiennent aucun relevé uniquement herbacé. Enfin le parc principal, seul reliquat des grands espaces pastoraux traditionnels, avec 500 ha non clôturés, est marqué par des boisements installés (55 % du parc, 68 % des lisières) avec présence de Fagus sylvatica. Malgré cette extension ligneuse, ce parc contient encore de nombreuses zones ouvertes, faciles d’accès pour le troupeau. Ce parc est le plus surprenant, on y constate que les relevés composés uniquement d’herbacées sont bien diversifiés (17,9 espèces/relevé en moyenne) contrairement à ce que pourrait stipuler la littérature avec baisse de la diversité. En revanche, les relevés contenant de la lande sont les plus faiblement diversifiés de la zone pastorale. Rappelons que le système traditionnel, très perturbateur, était à l’origine de vastes zones de landes à Calluna vulgaris. Des espaces ouverts, certes, mais donc peu diversifiés, à l’image des landes actuelles. La situation présente est donc réellement plus avantageuse sur ce point. En ce qui concerne les relevés contenant des arbustes et des arbres, leur diversité est nettement moindre sur cette estive. On note donc un appauvrissement majeur en sous‐bois de corylaies lorsqu’elles deviennent denses et peu ou pas pâturées. Les espaces plus accessibles au sein des corylaies, où le pâturage peut s’exercer, sont plus majoritairement diversifiés (5 espèces en moyenne dans les corylaies denses, contre 13 dans les plus claires). Une valorisation sylvopastorale
C ONCLUSION
Ainsi que l’avaient décrit Picart et Fleury (2001) et Camacho (2004) dans leurs travaux, la plupart des zones extensives caractéristiques des estives sont sous‐exploitées, d’où un déséquilibre répété (d’année en année) entre la pression de pâturage et la production des prairies. Le protocole méthodologique mis en place a déterminé un embroussaillement important, avec une moyenne d’enfrichement des estives de 22 % et une forte variabilité selon les secteurs et selon l’usage pastoral des parcs.
Ainsi, Manson, Orcines et Recoleine ont une situation actuelle bien différenciée. L’analyse des résultats phytosociologiques et agronomiques (caractéristiques de la flore, représentativité des espèces, analyse de la biodiversité, patrons d’embroussaillement) montre des variations dans la composition floristique des estives. Malgré un usage encore présent de ces espaces, la fermeture est un paramètre récurent. Ainsi, tous les parcs sont touchés par la présence de l’arbre et nombreux sont les parcs où cette dynamique est à la fois présente en lisières et en centres de parcelles. L’analyse des relevés et des espèces permet cependant d’envisager une richesse spécifique variable au sein des placettes arborées. En effet, la différence de richesse spécifique entre milieux ouverts et fermés est à l’avantage des milieux ouverts lorsque les boisements sont denses mais la tendance s’inverse lorsque les zones boisées sont claires. La pénétration du rayonnement lumineux sous les strates arborées et arbustives contribue donc à peut‐être plus même que dans le système agropastoral traditionnel. La nécessaire vision du domaine pastoral dans son ensemble, et non seulement par l’analyse des dynamiques de fermeture, permet donc d’envisager l’état écologique de ces espaces de manière différenciée.
L’analyse des modes d’exploitation des parcelles est donc cruciale, et la trame végétation‐
milieu‐pratiques sur l’actuel sera ainsi renforcée, comme le montrent les résultats présentés dans le chapitre suivant.