SOCIO ‐ ENVIRONNEMENTAL
II. LES ESTIVES, TEMOINS DE L’OCCUPATION HUMAINE DU SECTEUR
I.2. C ARACTERISTIQUES PHYSICO ‐ GEOGRAPHIQUES
Parmi les unités volcaniques du PNR des Volcans d’Auvergne, la Chaîne des Puys s’étend sur environ 170 km² (fig.19). Cette unité d’une centaine d’édifices (dômes, cônes, maars), située sur un horst granito‐gneissique, est la plus septentrionale du Massif central et culmine à 1464 m au sommet du Puy de Dôme. Chronologiquement, deux paroxysmes ont contribué à la mise en place de la Chaîne, l’un entre 45 000 et 25 000 ans, l’autre entre 12 000 et 7 500 ans, à la faveur des failles hercyniennes du plateau et selon un axe nord‐sud (Lemée et al., 1956 ; Le Coeur, 1984 ; Richet, 2003).
D’un point de vue climatique, le secteur de la Chaîne des Puys forme la première barrière aux flux d’ouest, occasionnant un climat de type montagnard à fortes influences océaniques (régime océanique dégradé à précipitations élevées, régulièrement réparties dans l’année). Un effet de foehn induit cependant un gradient ouest‐est : à l’ouest des puys, Rochefort reçoit 1268 mm annuel alors que Gelles en reçoit 1045 mm et Clermont‐Ferrand, plus à l’est, 591 mm (Prévosto, 1999).
Les températures moyennes annuelles sont de 7°C et l’amplitude thermique d’environ 30°C à 40°C. A titre d’exemple, au sommet du puy de Dôme (1464 m), en 2011, les minimales étaient de ‐ 12 °C et les maximales de 29 °C, l’amplitude thermique maximale s’élève donc à 41 °C40. Les gelées s’échelonnent entre 120 et 130 j/an en moyenne et les vents fréquents (38 j/an > 58 km/h), dont la force et la fréquence augmentent avec l’altitude, constituent un frein au développement de la végétation sur les crêtes (Raynal, 1986 ; Coquillard, 1993). On remarque une plus grande xéricité au sud de la Chaîne, probablement due à un autre effet de foehn provenant du Sancy (Michelin, 1995).
Issus pour la plupart de roches mères volcaniques (fig.20) et formés en milieu montagnard humide, la plupart des sols sont de type andosol41 ce qui les distingue des autres types de sols (Baudry, 1991 ; Bozon et al., 1991 ; Prévosto, 1999 ; Burel et al., 2000 ; Brunner, 2002 ; Arnalds et al., 2007). Cette propriété andique des sols induit des teneurs élevées en carbone organique des horizons de surface (produisant des horizons de couleur sombre et très humifères, fertiles), une forte rétention du phosphore, une faible densité apparente et une grande capacité de rétention d’eau (Arnalds et al., 2007 ; Legrand et al., 2007). Les andosols allophaniques de la Chaîne des Puys, typiques d’un volcanisme récent, sont ainsi sensiblement identiques à ceux du Cantal, de l’Eifel et du Vogelsberg en Allemagne et des Carpates (Hongrie, Slovaquie et Roumanie). La nature des recouvrements et saupoudrages volcaniques (trachy‐andésitiques, trachy‐basaltiques, basaltiques) ou du socle granitique ou métamorphique, les conditions climatiques, la durée de la pédogénèse et les variations altitudinale introduisent toutefois des variantes dans la nature de ces sols (Bonfils et al., 1971 ; Dejou, 1985 ; Prévosto et al., 2002 ; Legrand et al., 2007).
40 En moyenne journalière, données issues de l’Observatoire de Physique du Globe de Clermont‐Ferrand http://wwwobs.univ‐bpclermont.fr/SO/mesures/pdd.php
41 Andosol, du japonais « an » qui signifie « noir » et « do » qui signifie « sol » (Legrand et al., 2007).
Figure 19 : Localisation du site d'étude (tranches d’altitudes définies selon la méthode des seuils naturels de Jenks, plaçant les limites aux endroits où se trouvent de grandes différences entre les valeurs)
Figure 20 : Carte géologique de la Chaîne des Puys issue des travaux de Boivin (2004)
Il est possible de les distinguer en deux classes :
classe des andosols « vrais » : andosols oligotrophes à des altitudes supérieures à 1100 m, sous des conditions humides et fraîches ;
classe des sols brunifiés : sols bruns « andiques » et sols bruns issus de basalte, à des altitudes variant entre 800 et 1000 m, sous conditions climatiques plus chaudes et sèches.
Les andosols du Massif central présentent les caractéristiques suivantes (Legrand et al., 2007) :
un horizon vitrique ou andique d’une épaisseur minimale de 30 cm. L’horizon vitrique est un stade préalable à la formation d’un andosol avec minimum 10 % de verre volcanique et autre minéraux primaire, et une densité apparente supérieure à 0,9 kg / dm3. L’horizon andique est à un stade d’altération plus avancé avec une densité apparente inférieure à 0,9 kg / dm3 d’où une porosité exceptionnellement élevée (60 à 90 %), 10 % ou plus d’argiles, une rétention en phosphates supérieure à 70 %, et moins de 10 % de verre volcanique ;
deux sous‐types d’horizons andiques se distinguent : siliandique (brun chocolat, 20 à 40 % d’argiles) et aluandique (brun noir, 40 à 60 % d’argiles) selon qu’ils soient caractérisés par une prédominance d’allophanes ou d’aluminium ;
une faible cohésion à l’état sec ;
une texture d’apparence limoneuse (due à l’abondance d’agrégats très fins de la taille des limons et non pas à celle de limons vrais) ;
une importante capacité de rétention d’eau (due à une porosité capillaire élevée).
A ces distinctions s’ajoute l’usage passé des sols qui engendre des variations de pH, de taux de matière organique et de teneur en allophanes avec des sols sur anciennes cultures caractérisés par un rapport C/N plus faible, un flux d’azote nitrique plus élevé et une brunification superficielle plus marquée que les sols sur landes ou pâtures (Prévosto et al., 2002). Ces anciens usages (notamment surpâturage) combinés aux fortes pentes des puys et à la fréquentation touristique sont également à l’origine d’une érosion et d’une dénudation importantes (Coquillard et al., 1988 ; Bakker et al., 2008).
Ainsi, la Chaîne des puys est caractérisée par des andosols issus de roches pyroclastiques dont la composition varie du basaltique au trachytique. Dans sa partie nord, les andosols sont développés sur des cendres trachytiques, avec un pH de 5,3 à 5,8 dans l’horizon supérieur et une accumulation de complexe Al‐Fe‐matière organique ; ils sont ainsi préférentiellement colonisés par Betula pendula.
Dans sa partie sud, les andosols sont plus majoritairement développés sur cendres basaltiques ont un pH plus élevé de 5,7 à 6,4 et contiennent moins de matière organique et plus allophanes offrant des conditions plus propices à l’installation de Pinus sylvestris, avec la combinaison d’un climat plus chaud et sec et la présence de semenciers (Prévosto et al., 2004 ; Legrand et al., 2007).