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des péchés

LA PLUS IMPORTANTE FORME DE REPENTIR

Ces exemples montrent que la forme majeure de repentir est de par-donner à ses ennemis. Nous avons constaté que la plupart des péchés ne font pas autant obstacle au pouvoir de guérison de Dieu que l'ab-sence de pardon. En œuvrant dans le ministère de guérison, j'ai été amené à mieux saisir pourquoi Jésus insiste tellement sur le pardon à accorder à nos ennemis quand il parle de la prière. Il ne songe pas tant à l'ivrognerie ou à la luxure qu'à la dureté de cœur ou au refus de par-donner. Qui plus est, il semble souvent lier le pardon entre ennemis à la réponse du Père à nos prières :

Je vous le dis : tout ce que vous demanderez dans vos prières, croyez que vous l'avez déjà, et vous l'obtiendrez. Et quand vous êtes debout dans la prière, quoi que vous ayez contre quelqu'un, pardonnez-le-lui afin que votre Père, du haut des cieux, puisse vous pardonner vos offenses à vous aussi (Mc 11, 24-25).

Auparavant, je considérais que de tels passages sautaient en quelque

sorte d'un sujet à l'autre : dans la première phrase, Jésus nous encou-rage à voir foi en la prière, et dans la suivante, il nous dit de pardonner.

Maintenant, je vois bien que ces deux idées sont intimement liées. C'est un peu comme si ce que nous apporte Dieu, le salut, la guérison, l'amour miséricordieux, était comme un flux qui ne peut couler en nous que si nous sommes prêts à le laisser couler ensuite en d'autres.

Si nous refusons à autrui le pardon et la guérison, l'amour divin ne pourra se répandre en nous. Tout cela procède du commandement majeur par lequel aimer Dieu implique d'aimer son prochain. "Je n'aime Dieu qu'autant que j'aime mon pire ennemi". Il y a rapport di-rect entre notre disposition à aimer autrui et le ministère de guérison : Ayez de la compassion comme votre Père en a pour vous. Ne jugez pas et vous ne serez pas jugé. Ne condamnez pas et vous ne serez pas condamné. Pardonnez et vous serez pardonné. Donnez et vous rece-vrez : une pleine mesure, bien tassée, bien soupesée, débordante, sera déversée au creux de vos bras, car la mesure par laquelle vous donnez sera celle par laquelle on vous rendra (Lc 6, 36-38).

Autrement dit, pardonnez et vous serez pardonné : si vous êtes dis-posé à guérir autrui, y compris vos ennemis, vous serez guéri. La condi-tion première pour rechercher la guérison est de rejeter le péché, particulièrement les racines de la rancune.

Néanmoins, pour on ne sait quelle raison, nous paraissons incons-cients de nos pires péchés : ceux de la rancune et du ressentiment. Nous détectons le péché d'ivresse avec la même acuité qu'un non-fumeur sent la fumée résiduelle de la soirée de la veille, mais nous sommes loin d'être aussi réceptifs à notre rancune et à notre colère. Afin d'illustrer l'acrimonie qui souvent mine les églises Chrétiennes pourtant très ri-goristes sur des sujets tels que le tabac et l'alcool, voici un épisode édi-fiant de l'histoire Chrétienne :

Tout alla bien pour l'"Église de Dieu de Tomlinson" jusqu'à la mort de son fondateur, en 1943. Une lutte pour le pouvoir s'installa alors entre ses deux fils, Milton et Homer, afin de s'assurer le contrôle de l'Église. Dans un ahurissant ballet de manœuvres et contre-manœu-vres, le cadet, Milton, qui n'était pas pasteur mais imprimeur, fut élu "Surveillant Général". Après l'accession au pouvoir de son frère, Homer se trouva inexplicablement exclu de l'Église. En réaction à cette situation nouvelle, Homer s'installa à New York où il fonda une autre institution qu'il nomma l'"Église de Dieu, Quartier

Gé-néral du Monde". En mars 1953, l'ancienne "Église de Dieu de Tom-linson", avec Milton pour évêque et Surveillant Général, changea de nom pour devenir l'"Église de Dieu de la Prophétie", dénomination qui, ainsi qu'elle le proclamait, la désignait comme seule et véritable

"Église de Dieu".(2)

Nous nous sentons le droit de ne pas pardonner : la justice, c'est "œil pour œil, dent pour dent". Nous avons de bonnes raisons de réclamer vengeance (pour preuve, le sentiment — naturel mais non Chrétien

— d'autosatisfaction et de réjouissance que nous pouvons être tentés d'éprouver lors de l'exécution d'un criminel).

Pourtant, voici les paroles du Seigneur : "Vous avez appris qu'on di-sait : œil pour œil, dent pour dent. Mais moi, je vous dis ceci : n'offrez pas de résistance au méchant" (Mt 5, 38-39). John L. McKenzie, S.J.

[Societas Jesu, la Société — ou Compagnie — de Jésus, dont les membres sont les Jésuites, NdT], en fait le commentaire suivant :

Le droit de vengeance était une ancienne coutume du Proche-Orient qui protégeait les individus en obligeant le plus proche parent à ven-ger la blessure ou le meurtre […] Les lois du Pentateuque sont, en fait, des limites qui restreignent la blessure infligée par le vengeur aux proportions de celle occasionnée par l'agresseur. Le principe cou-tumier d'autodéfense est refusé par cette parole de Jésus, et remplacé par aucun autre du même genre. Cette parole est probablement la plus paradoxale de ce passage, et a certainement, plus qu'aucune autre, donné matière à réflexion. Il est difficile de voir comment le principe de non-résistance et de renoncement pourrait être plus clai-rement affirmé. L'interprétation rationnelle de ces mots de Jésus ne démontre pas qu'ils sont inapplicables ou exagérés, mais simplement que le monde Chrétien n'a jamais été prêt, et ne l'est toujours pas, à vivre selon cette éthique.(3)

Froideur d'esprit et rancœur semblent aussi entraîner la froideur physique. Lors de la prière de guérison, le phénomène que nous res-sentons le plus communément est une sensation de chaleur, que nous

2) Synan, pp. 195-196.

3) "L'Évangile selon St Matthieu", The Jerome Biblical Commentary (Englewood Cliffs, NJ : Prentice-Hall, 1968), pp. 72, 73.

associons d'ordinaire à l'amour humain, à la chaleur de l'amitié. In-versement, le froid est associé à la présence du mal.

Une sensation revient fréquemment, à la fois dans les compte rendus de possession démoniaque et dans ceux d'expériences métaphysiques.

Participants et assistants sont soudain saisis d'une impression de froid intense qui semble souvent émaner des murs. Lors d'un sabbat, l'arrivée du démon est annoncée par un courant glacé et une sensa-tion de contact physique. Des mains froides enserrent le cou de la personne possédée, un vent hivernal se lève soudain. La peur, qui donne le frisson et glace les extrémités, peut expliquer en partie cette impression de froid, mais elle paraît néanmoins parfois inexplicable.

Elle est généralement suivie de frigidité sexuelle.(4)

À mon avis, le chaud et le froid, en tant que symboles de l'amour et de la haine, ne sont pas par hasard concomitants avec la guérison di-vine totale et son contraire, le désir de mort du démon. La vie et la mort sont ici en conflit. Trop souvent, pourtant, nous bloquons nous-mêmes la guérison physique par notre propre froideur, notre propre ressentiment et notre refus de pardonner. Je vois plus clairement main-tenant pourquoi St Jacques, dans son fameux passage sur la prière pour les malades avec onction, encourage également la confession des pé-chés : "Confessez donc vos pépé-chés les uns aux autres, priez les uns pour les autres, et cela vous guérira" (Jc 5, 16).

Je me souviens d'une femme qui me demanda de prier pour sa gué-rison intérieure. Quand nous parlâmes de son enfance, elle m'avoua que son plus grave problème, une haine irraisonnée des hommes — son mari inclus —, remontait aux mauvais traitements et à la dérision dont elle avait fait l'objet de la part de ses frères quand elle était petite.

Avant de prier pour sa guérison intérieure, je lui demandai de pardon-ner à ses frères. Elle refusa tout net. Je lui expliquai que cela bloquerait toute possibilité de guérison : elle refusa encore. Quand je voulus savoir pourquoi elle s'accrochait tant à ce ressentiment alors même qu'il la détruisait, elle réfléchit un moment et me répondit que pardonner à ses frères ôterait toute raison d'être à sa propre dureté, qu'elle ne pour-rait plus les en blâmer. Après quelques instants de prière, elle comprit

4) Jean Vinchon, "Diabolic Possession" in Soundings in Satanism, ed. Franck Sheed (New York : Sheed & Ward, 1972), p. 4.

combien cela était contraire à son engagement Chrétien et à son désir affirmé d'être en bonne santé. En larmes, elle pardonna à ses frères au-tant qu'elle le put. Elle reçut alors la profonde guérison qu'elle recher-chait. En résumé, plus je prie avec les gens pour leur guérison, plus je constate l'étroite corrélation qui existe entre toutes les formes de gué-risons. Les Églises connaissent depuis longtemps le pouvoir du Christ à pardonner les péchés, mais je prends de plus en plus intensément conscience que :

• notre maladie physique, loin d'être une bénédiction rédemptrice, est le signe que nous ne sommes pas remis de nos péchés, pas en bonne santé spirituelle ;

• la guérison physique requiert souvent au préalable le pardon des péchés ou une guérison intérieure ;

• le repentir le plus important est celui des péchés de rancune ou de ressentiment que les Chrétiens, dans leur vie personnelle, ne recon-naissent pas souvent comme étant des péchés ;

• encore une fois, l'amour est le meilleur remède pour briser la froi-deur, la blessure et la rancœur qui empêchent le pouvoir de guérison de Dieu de se diffuser en nous.

La découverte majeure que j'ai faite dans le domaine traditionnel du repentir du péché est que recourir à notre seule volonté s'avère souvent insuffisant. Nous devons, en plus, demander à Dieu, dans la prière, de nous aider, de nous guérir, de briser ces liens — quels qu'ils soient — qui nous font retomber dans les schémas habituels du péché. Peu im-porte la nature de notre problème — rancune, addiction, luxure — la prière de guérison nous aidera à en être libérés. Si les prédicateurs stig-matisent certaines formes de péché, ils doivent aussi, ensuite, laisser au repentant la possibilité de prier. Comme le dit Paul (dans Romains 7), nous nous retrouvons à faire ce que nous haïssons et la grâce salva-trice de Jésus-Christ est notre seul espoir.

J'en ai eu l'exemple le plus émouvant de toute ma vie alors que notre équipe s'adressait à un groupe d'étudiants au Costa Rica. Nous ne par-lions pas de péché ou de repentir, mais du pouvoir de l'Esprit lorsque, tout à coup, à notre grande surprise, tout le groupe se mit à pleurer.

Nous avons découvert plus tard qu'ils pleuraient pour leurs péchés : le Saint-Esprit les avait touchés de l'intérieur.

Dans le vaste domaine du pardon, je crois qu'il est, en général, hu-mainement impossible de pardonner à quelqu'un qui nous a profon-dément et injustement blessés. Je prie donc avec la personne offensée et demande à Jésus de verser son propre amour miséricordieux dans son cœur.

Et cela se produit, encore et encore !

Toutes ces considérations faites, je comprends de mieux en mieux ce que Jésus voulait dire quand il dit, en désignant la femme qui avait versé de l'onguent sur ses pieds de parfum au banquet de Simon :

"Simon, dit-il, vois-tu cette femme ? Je suis venu dans ta maison et tu n'as pas versé d'eau sur mes pieds, mais elle, elle les a baignés de ses larmes et essuyés avec ses cheveux. Tu ne m'as pas donné de bai-ser, mais elle, elle en a couvert mes pieds depuis que je suis entré. Tu ne m'as pas oint la tête d'huile, mais elle, elle m'a parfumé les pieds.

Pour cette raison, je t'annonce que ses péchés, ses nombreux péchés, doivent lui avoir été pardonnés, sinon elle n'aurait pas manifesté autant d'amour. C'est l'homme auquel on pardonne peu qui aime peu." Puis, il s'est adressé à elle : "Tes péchés te sont remis." Ceux qui étaient à table avec lui se mirent à penser en eux-mêmes : "Qui est cet homme, pour qu'il aille jusqu'à remettre les péchés ?" Alors il dit à la femme : "Ta foi t'a sauvée, va en paix" (Lc 7, 44-50).

D'une manière ou d'une autre, l'amour de cette femme a été déblo-qué, sa chaleur montre clairement que le pardon — la guérison de son esprit — est intervenu en elle. Pour Jésus, le flot d'amour qu'elle a ma-nifesté est le signe qu'elle reçoit l'amour miséricordieux et guérissant de son Père.

La guérison 13