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Chapitre 5 : Discussion

5.7 Implications pour la pratique du travail social

En questionnant directement les parents sur les services accessibles dont ils ont connaissance pour les aider à traverser leur séparation en ayant un enfant qui a reçu un diagnostic de TDA/H, la recherche a permis de mettre en lumières plusieurs recommandations pour améliorer les pratiques auprès de ces familles.

Les propos des parents montrent que le fait d’avoir deux milieux de vie génère de l’anxiété chez l’enfant présentant un TDA/H et rend plus difficile son encadrement suivi de la part des parents. Une réponse à ce besoin de sécurité se trouve dans les relations intermicrosystémiques soit, le mésosystème de l’enfant. En effet, une bonne communication et une bonne entente entre les parents sont d’autant plus importantes pour qu’une cohérence et une stabilité soient possibles entre ses deux milieux de vie, cruciales pour l’enfant qui a reçu un diagnostic de TDA/H. Des parents ont exprimé avoir essayé de maintenir cette communication dans l’objectif de fournir un encadrement similaire dans les deux milieux, sans toutefois y parvenir en raison d’une relation coparentale difficile, comme en témoigne la présence de conflits. La relation coparentale a une influence importante sur différents systèmes des acteurs impliqués (Feinberg, 2003). Compte tenu du nombre d’enfants qui reçoivent le diagnostic de TDA/H chaque année, il ressort de cette étude qu’une rencontre offerte d’emblée aux parents qui se séparent pourrait être bénéfique tant pour eux que pour l’enfant. À cet effet, l’obtention du diagnostic de ce dernier pourrait servir d’indicateur d’un besoin des parents pour cette rencontre d’information offerte par exemple par le CLSC, dont les services sont gratuits et ainsi plus accessibles. Des travailleurs sociaux, qui travaillent en majorité au sein des établissements publics (Larivière, 2012), sont qualifiés pour animer ces rencontres et soutenir les parents. Le TDA/H serait présenté et les bases sur les besoins particuliers qu’il implique en matière de pratiques parentales encadrantes et adéquates pour l’enfant seraient posées, en plus de bien informer les parents sur les ressources et les services auxquels ils ont droit. Il serait pertinent de soulever l’importance d’une bonne relation coparentale pour le développement optimal de l’enfant. Ce genre de rencontre permettrait aux parents séparés de jouer leur rôle positivement auprès de leur enfant aux besoins particuliers. Les relations plus conflictuelles dans les familles où un enfant présente un TDA/H (Heckel et coll., 2013) agissent sur la façon dont les parents vont entrer en relation

avec leur enfant, ce qui peut les amener à développer des pratiques parentales moins appropriées qui à leur tour risquent d’exacerber les comportements difficiles des enfants présentant un TDA/H (Massé et coll., 2011). Donner à ces parents des outils pour les diriger vers des pratiques parentales adaptées aux besoins de leur enfant ne nécessiterait pas la création de nouveaux programmes, car il en existe déjà (Massé et coll., 2011; Sanders, 2008), mais quelques adaptations pour tenir compte des particularités liées au TDA/H. Certains sont par ailleurs déjà offerts à la population dans des instances gouvernementales de santé publique (ASPC, 2016) ou communautaires (http://www.fafmrq.org/).

Dans le même ordre d’idées, des ressources spécifiques pour soutenir les parents dans leur rôle parental tant en lien avec la séparation qu’avec le diagnostic de leur enfant existent (ASPC, 2016; Massé et coll., 2011; Sanders, 2008). Cependant, un travail d’information auprès des parents séparés est à faire pour rendre l’information plus accessible à grande échelle. Les participants ont mentionné ne pas savoir où chercher les ressources et avoir le sentiment d’être laissés à eux-mêmes, malgré les rapports d’évaluation du diagnostic de TDA/H de l’enfant qui soulèvent principalement des recommandations en milieu scolaire. Plusieurs parents ont suggéré que les médecins de famille ou les pédiatres remettent des brochures informatives détaillant les ressources disponibles dans leur milieu et celles auxquelles les enfants ont droit en raison du diagnostic lui-même. Effectivement, les parents rapportent d’abord se tourner vers leur médecin pour les orienter en lien avec le TDA/H de leur enfant, ce qui est cohérent avec les résultats publiés par l’INSPQ (2019) concernant l’utilisation des différents services par les personnes présentant un TDA/H. Lors de l’entrevue réalisée dans le cadre de ce mémoire, quelques parents ont d’ailleurs mentionné que c’était la première fois qu’ils recevaient une liste des ressources existantes pour les aider à soutenir leur enfant qui a reçu un diagnostic de TDA/H ainsi que pour les aider à traverser la séparation en prenant connaissance de celle fournie à la fin du formulaire de consentement de la présente recherche. Il y a donc du travail à faire de manière à rendre les services et les ressources plus accessibles.

Pour poursuivre sur ce besoin de combler un manque d’information, les médiateurs familiaux qui interviennent auprès de nombreux parents qui se séparent pourraient être un autre élément

de la réponse. La médiation familiale est un service à partir duquel les parents pourraient recevoir plus d’informations, ce qui serait susceptible d’améliorer leur expérience. Il serait notamment pertinent que les médiateurs expliquent davantage aux parents qui se séparent les différents aspects du formulaire de fixation des pensions alimentaires pour enfants (Ministère de la Justice, 2016). Les propos des participants montrent que certains éléments de cette grille, notamment en ce qui a trait aux frais particuliers nets, semblent être mal compris et influencent la perception qu’ils ont du service de médiation. Comme il a été soulevé précédemment, les parents rencontrés ont fait part de leur besoin d’être guidés dans leur séparation, notamment en ce qui concerne les ressources disponibles pour les aider à s’adapter à cette transition importante. Il semble questionnant de constater que c’est aussi le cas des parents qui ont bel et bien eu recours à la médiation. L’impression selon laquelle les émotions n’y avaient pas leur place, alors que la séparation peut être vécue comme un choc émotionnel intense (Timmermans, 2012), était partagée par plusieurs. Dans cet ordre d’idées, les médiateurs, sans offrir eux-mêmes un soutien émotionnel, pourraient aussi propager l’information sur ce genre d’aide aux parents en processus de séparation, par exemple sous forme de brochure informative encore une fois.

On remarque qu’il est principalement question de mieux faire connaître leurs droits et les ressources disponibles aux parents séparés québécois qui ont un enfant ayant reçu un diagnostic de TDA/H. Ces recommandations s’inscrivent directement dans deux des trois devoirs généraux et obligations des travailleurs sociaux envers le public tels que reconnus dans le code de déontologie de l’Ordre professionnel des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec [OTSTCFQ]. On y décrit que « le travailleur social favorise et appuie toute mesure susceptible d’améliorer la qualité et l’accessibilité des services professionnels en service social » et qu’il « [reconnait] comme un objectif important à sa profession l’information et l’éducation du public en matière de service social » (OTSTCFQ, 2020). Les résultats de la présente recherche soulèvent l’enjeu d’accessibilité des services auquel font face les parents séparés d’enfants présentant un diagnostic de TDA/H et les recommandations suggérées visent une amélioration de leur expérience en lien avec la connaissance et l’utilisation des services existants et futurs.