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L’expérience de la séparation parentale des pères ou des mères séparés dont un enfant présente un trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDA/H)

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Academic year: 2021

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L’expérience de la séparation parentale des pères ou

des mères séparés dont un enfant présente un trouble

déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité

(TDA/H)

Mémoire

Florence Lévesque

Maîtrise en service social - avec mémoire

Maître en service social (M. Serv. soc.)

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L’expérience de la séparation parentale des pères

ou des mères séparés dont un enfant présente un

diagnostic de trouble déficitaire de l’attention avec

ou sans hyperactivité (TDA/H).

Mémoire

Florence Lévesque

Sous la direction de :

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Résumé

Au Québec, nombreuses sont les familles qui connaissent la séparation parentale. Plusieurs chercheurs observent que les enfants présentant un diagnostic de trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDA/H) vivent plus souvent cette transition importante que les enfants n’ayant pas le trouble. On en connait pourtant très peu de l’expérience de ces familles. En donnant la parole à neuf parents séparés d’enfant présentant un diagnostic de TDA/H, cette recherche souhaite répondre à deux questions : qu’est-ce qui particularise l’expérience de séparation parentale dans les familles d’enfants présentant un TDA/H et comment les parents ont-ils perçu leurs besoins et ceux de leurs enfants et comment y ont-ils répondu lors de cette transition familiale importante? Le cadre conceptuel retenu dans ce mémoire de maitrise de nature qualitative et exploratoire comprend le modèle bioécologique de Bronfenbrenner ainsi que certains concepts de l’analyse des besoins définis par différents auteurs. L’étude a permis de mettre en lumière les préoccupations financières associées à ce diagnostic, bien qu’il soit initialement reçu comme un soulagement pour les parents en raison de la compréhension nouvelle qu’il génère face aux comportements difficiles de l’enfant. Le fait pour l’enfant d’avoir deux milieux de vie complexifie le soutien qui lui est offert et l’importance d’une stabilité entre ses deux environnements familiaux ressort. Par ailleurs, un enjeu sur le plan de l’accessibilité aux services publics et privés au Québec se dégage des propos des participants. À cet effet, les parents rencontrés expriment une insatisfaction quant à la quantité de services offerts dans le système public et face au coût important exigé par l’utilisation de services privés. Un travail important d’information est à entreprendre auprès des parents qui vivent la réalité étudiée pour leur faire connaître leurs droits et les ressources disponibles pour les aider.

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Table des matières

Résumé ... iii

Table des matières ... iv

Liste des tableaux ... vi

Liste des acronymes ... vii

Remerciements ... viii

Introduction ... 1

Chapitre 1 : Problématique ... 3

1.1 Objet de l’étude ... 3

1.2 Pertinence scientifique et pertinence sociale ... 7

1.3 Démarche documentaire ... 9

1.4 Recension des écrits scientifiques ... 9

1.4.1 Facteurs associés au TDA/H. ... 10

1.4.2 Conséquences du TDA/H dans la famille. ... 12

1.4.3 Séparation parentale et troubles développementaux. ... 14

1.4.4 Traitement des cas de séparation avec enfants présentant un diagnostic de TDA/H dans le système juridique familial. ... 16

1.5 Forces et limites des études consultées ... 18

Chapitre 2 : Cadre d’analyse ... 20

2.1 Épistémologie constructiviste ... 20

2.2 Approche bioécologique ... 21

2.2.1 Historique. ... 21

2.2.2 Principes fondamentaux. ... 23

2.3 Analyse des besoins ... 25

2.3.1 Typologie des besoins des enfants. ... 28

2.3.2 Besoins des parents séparés d’enfant TDA/H. ... 31

Chapitre 3 : Méthodologie ... 33

3.1 Approche privilégiée et type de recherche ... 33

3.2 Population à l’étude ... 34

3.3 Méthode et technique d’échantillonnage ... 35

3.4 Recrutement ... 36

3.5 Échantillon final ... 37

3.6 Opérationnalisation des concepts ... 38

3.7 Méthode de collecte de données ... 40

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3.9 Considérations éthiques ... 43

Chapitre 4 : Présentation des résultats ... 45

4.1 Présentation des participants ... 45

4.2 L’expérience de la séparation parentale dans les familles où un enfant a reçu un diagnostic de TDA/H ... 50

4.2.1 Les circonstances de la séparation. ... 50

4.2.2 Les conséquences de la séparation chez l’enfant. ... 53

4.2.3 Les conséquences de la séparation chez le parent. ... 58

4.2.4 Le diagnostic de TDA/H, et ce qu’il implique. ... 59

4.2.5 Les particularités d’être séparé(e) quand ton enfant est TDA/H ... 63

4.3 Les besoins des parents pendant la séparation ... 68

4.3.1 La demande d’aide pour traverser la séparation. ... 69

4.3.2 La perception des services. ... 70

4.3.3 Vers une meilleure adéquation des services. ... 74

Chapitre 5 : Discussion ... 77

5.1 L’ontosystème : le parent séparé ... 77

5.2 Le microsystème impliquant l’enfant TDA/H ... 78

5.2.1 La division du microsystème familial : conséquences pour l’enfant TDA/H. ... 79

5.2.2 Les besoins de l’enfant TDA/H selon les parents séparés. ... 81

5.3 La séparation parentale : les microsystèmes impliqués ... 84

5.3.1 Le microsystème familial. ... 84

5.3.2 Le réseau social et le milieu du travail du parent. ... 86

5.4 L’exosystème : l’accessibilité aux services, un enjeu de taille ... 87

5.5 Qu’en est-il du macrosystème? ... 89

5.6 Pistes pour les recherches futures ... 93

5.7 Implications pour la pratique du travail social ... 94

5.8 Limites et forces de l’étude ... 97

Conclusion ... 100

Bibliographie ... 101

Annexe A : Affiche de recrutement ... 112

Annexe B : Courriel de recrutement ... 113

Annexe C : Grille de contact téléphonique ... 114

Annexe D : Guide d’entrevue ... 117

Annexe E : Questionnaire sociodémographique et familial ... 120

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Liste des tableaux

Tableau 1. Caractéristiques sociodémographiques des participants.

Tableau 2. Opérationnalisation des concepts d’expérience de séparation et de besoin. Tableau 3. Situation conjugale passée.

Tableau 4. Caractéristiques sociodémographiques de l’enfant TDA/H.

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Liste des acronymes ACTS : Association canadienne des travailleurs sociaux. APA : American psychiatric association.

ASPC : Agence de la santé publique du Canada. CADDRA : Canadian ADHD resource alliance.

CÉRUL : Comité d’éthique de la recherche de l’Université Laval. CLSC : Centres locaux de services communautaires.

ELDEQ : Étude longitudinale du développement des enfants du Québec. INSPQ : Institut national de santé publique du Québec.

ISQ : Institut de la statistique du Québec.

OTSTCFQ : Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec.

TDA/H : Trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité. TES : Techniciens en éducation spécialisée.

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Remerciements

Merci à l’Université Laval, pour toutes les ressources mises à la disposition des étudiants. Un immense merci à ma directrice de recherche, Marie-Christine, pour les conseils précis, les réflexions et les questionnements enrichissants. Merci de m’avoir guidée tout au long de la maitrise. De m’avoir encouragée et obligée à aller plus loin.

Merci aux parents qui ont choisi de participer à cette recherche. Merci de votre ouverture et de vos partages, précieux et essentiels, sans lesquels ce mémoire n’existerait pas. Votre collaboration est plus qu’appréciée et j’espère avoir su rendre justice à vos préoccupations. Merci aux vieilles amitiés, de perdurer malgré la distance qui empiète sur le temps de qualité. Milles mercis à Lau, May, Audreynol, Anne-Ma et Dad, pour le soutien, la normalisation et le découragement partagés. Merci au Banlao d’être le lieu de rassemblement de nos soupers, rares, mais inestimables.

Merci à ma famille. D’avoir cru, toujours, que je réussirais. De ne pas m’avoir permis d’abandonner.

Merci à Lee, pour tout.

Pour terminer et parce qu’on ne se le dit pas assez, un merci tout particulier à moi-même, de ne pas avoir choisi le chemin facile et d’avoir persévéré malgré les embûches, les délais inattendus et les situations hors de contrôles. Malgré le stress et la surcharge émotionnelle. Pour les joies et la fierté des petits pas.

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Introduction

Le portrait des familles québécoises a changé dans les dernières décennies et les statistiques récentes révèlent que la situation semble encore en évolution. Le nombre de familles monoparentales et recomposées augmente continuellement (Lapierre-Adamcyk, LeBourdais et Martin, 2009). On peut ainsi dire que la complexité et la diversité des structures familiales représentent des réalités sociales de plus en plus présentes en Occident (Gosselin, Babchishin et Romano, 2015). La séparation parentale peut soulever des enjeux sur le plan de l’adaptation, tant pour les parents que pour les enfants. Elle affecte différents aspects de la vie des membres de la famille, que ce soit les relations et dynamiques familiales, les émotions de chacun des membres, la routine familiale au quotidien, le milieu de vie des enfants et plus encore. À ces défis peut s’ajouter le fait qu’un ou plusieurs enfants présentent un diagnostic médical, autant d’éléments supplémentaires qui doivent être pris en considération lors de la séparation des parents. Un diagnostic fréquent chez les enfants d’âge scolaire est celui du trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDA/H) (Biederman et Faraone, 2005). Dans ces familles où les parents se séparent, si un ou plusieurs enfants présentent un diagnostic de TDA/H, la situation se complexifie davantage. Peu de travaux ont approfondi la question de l’expérience de la séparation parentale dans ces familles. Pourtant, des chercheurs évaluent que les enfants présentant un diagnostic de TDA/H sont proportionnellement plus nombreux à vivre la séparation de leurs parents que ceux n’ayant pas le trouble (Björkenstam, Björkenstam, Jablonska et Kosidou, 2017; Brown et coll., 2017). Ainsi, l’expérience de la séparation parentale dans les familles où un enfant a reçu un diagnostic de TDA/H étant encore peu connue au Québec, le but général de ce projet de mémoire est de mieux comprendre cette réalité en donnant la parole aux parents séparés afin qu’ils expriment leur vécu. Plus spécifiquement, ce mémoire cherche à répondre à ces deux questions : 1) qu’est-ce qui particularise l’expérience de la séparation parentale dans les familles où un enfant présente un diagnostic de TDA/H et 2) comment les parents ont-ils perçu leurs besoins et ceux de leurs enfants et comment y ont-ils répondu lors de cette transition familiale importante?

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la problématique qui comprend la pertinence sociale et scientifique, la démarche documentaire, la recension des écrits scientifiques et, finalement, les limites des études consultées. Le second chapitre présente le cadre d’analyse, soit la théorie bioécologique de Bronfenbrenner et celle de l’analyse des besoins selon les concepts définis par différents auteurs. Pour poursuivre, le chapitre trois présente la démarche méthodologique et l’opérationnalisation des concepts d’expérience de séparation et de besoins. Le quatrième chapitre présente l’analyse des résultats. Finalement, le dernier chapitre est consacré à une discussion qui synthétise les résultats en les discutant à la lumière du cadre conceptuel et des écrits scientifiques d’autres chercheurs. On retrouve dans ce dernier chapitre des pistes de recherches futures ainsi que des implications pour la pratique du travail social.

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Chapitre 1 : Problématique

Ce premier chapitre expose de façon plus spécifique le sujet de ce mémoire et la pertinence, tant sociale que scientifique, de poursuivre cette recherche. La recherche documentaire entreprise est mise de l’avant suivie par la recension des écrits scientifiques du domaine. Il sera parfois question dans ce mémoire « d’enfant TDA/H ». Cette expression ne signifie pas que l’enfant se résume à son diagnostic et n’est utilisée qu’afin d’alléger le texte en évitant la répétition d’une trop longue expression.

1.1 Objet de l’étude

Selon la terminologie utilisée par Statistique Canada (2018), une famille qu’on dit intacte est formée de deux conjoints mariés ou en union libre vivant avec leurs enfants biologiques ou adoptés. Une famille recomposée implique quant à elle un couple marié ou en union libre résidant avec des enfants dont au moins un est issu d’une union précédente de l’un ou l’autre des conjoints. Finalement, une famille monoparentale comprend un parent seul vivant avec ses enfants. Dans le cadre de cette recherche, il sera donc considéré qu’il y a séparation parentale lorsque la relation conjugale n’est plus et que le couple cesse de vivre ensemble, bien que la relation parentale demeure en raison des enfants. La séparation parentale est aussi une transition de vie familiale. Les transitions de vie surviennent après qu’un ou des événements marquants se soient produits. C’est une étape dans le cours de la vie des individus qui demande de mettre à contribution leur capacité d’adaptation ainsi que leurs processus réflexifs et de négociation, où les demandes sociales et la définition des concepts familiaux des individus changent (Euteneuer et Uhlendorff, 2014). La séparation parentale et la recomposition familiale sont deux exemples de ce que peut être une transition de vie familiale.

Selon les statistiques présentées par l’Institut de la statistique du Québec (ISQ), environ 50% des couples qui se séparent ont des enfants et environ un couple marié sur deux au Canada vit une séparation (Duchesne, 2006). D’ailleurs, c’est environ 25% des enfants au Canada qui vivent dans un ménage familial dont les parents sont séparés en 2016 (Statistique Canada, 2017). Au Québec, il y a une surreprésentation des couples en union de fait (38% en 2011),

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soit une relation conjugale qui n’a pas été pas officialisée par le mariage (Saint-Jacques et Drapeau, 2009), comparativement aux autres provinces du Canada où les taux varient plutôt entre 12% et 18% (Castagner Giroux, Le Bourdais et Pacaut, 2016). Les statistiques montrent qu’entre 2001 et 2006, il y a eu deux fois plus de couples en union libre qui se sont séparés que de couples mariés, soit respectivement 67,6% des couples en union libre et 32,4% des couples mariés (Beaupré et Cloutier, 2006). Aussi, ce sont plus de six bébés québécois sur dix qui sont nés hors mariage en 2018, un taux semblable aux années précédentes (ISQ, 2019). Ces statistiques soulignent que la séparation conjugale sera vécue par une grande proportion des couples et que dans plusieurs cas, des enfants seront touchés par cette transition familiale. Dans ce mémoire, le terme « séparation » est utilisé tant pour désigner les séparations de fait que les divorces.

Le fait de naître dans une famille où le couple parental vit en union libre augmente, pour l’enfant, les probabilités de vivre la séparation de ses parents (Saint-Jacques et Drapeau, 2009). Effectivement, les couples vivant en union libre présentent plus de facteurs de risque de dissolution conjugale que les couples mariés (Gosselin et coll., 2015). On remarque aussi que la structure familiale dans laquelle les enfants vivent au Québec varie en fonction de leur âge. Alors qu’en 2011 le pourcentage d’enfants âgés de 0 à 4 ans qui vivaient dans une famille monoparentale était de 12 %, celui des enfants âgés de 5 à 11 ans et de ceux âgés de 12 à 17 ans était respectivement de 21 % et 28 %. De plus, environ 1 enfant sur 6 vit en famille recomposée (Ministère de la Famille, 2014).

Mettre fin à une relation conjugale représente une épreuve marquante et intense dans la vie d’une personne (Timmermans, 2012). Plusieurs facteurs de risque et de facteurs de protection influencent la façon dont les adultes ou les enfants s’adapteront à la séparation conjugale et parentale (par exemple : le statut socioéconomique, la santé mentale) (Amato, 2000; Amato, 2014; Ambert, 2009). Il s’agit d’un moment vécu difficilement par les membres du couple qui a des répercussions sur l’entourage des individus impliqués et sur tous les membres de la famille immédiate (Simonič et Klobučar, 2017). Dans une famille avec des enfants, on évalue que la séparation parentale, bien qu’elle n’occasionne pas toujours de problèmes d’adaptation chez les enfants, n’entraine seulement que peu d’impacts pouvant être qualifiés de positifs sur le plan de l’adaptation comportementale ou psychologique, de la santé ainsi que de la

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performance scolaire (Saint-Jacques et Drapeau, 2009). Ambert (2009) souligne que la séparation des parents expose les enfants à plus de risque de pauvreté et d’autres problèmes, lesquels découlent souvent de la pauvreté. De plus, les répercussions de la séparation parentale peuvent se maintenir dans le temps (Amato, 2010). Elles ne prennent malheureusement pas fin avec la seule décision de la séparation, de la recomposition familiale ou même des modalités de garde privilégiées concernant les enfants (Simonič et Klobučar, 2017). Il s’agit d’un processus qui s’écoule sur plusieurs mois, voire années (Amato, 2000). Or, le fait qu’un enfant présente un trouble neurodéveloppemental peut complexifier la situation vécue par la famille au cours d’une séparation parentale.

Dans cet ordre d’idées, on remarque au cours des deux dernières décennies une augmentation du nombre de diagnostics chez les enfants pour une variété de troubles neurodéveloppementaux, psychiatriques ou de symptômes médicaux (Eme, 2009). Les termes « troubles neurodéveloppementaux » employés dans les écrits scientifiques désignent un ensemble de symptômes variés allant des troubles de l’apprentissage et des atteintes cognitives jusqu’aux handicaps physiques, aux troubles de comportement sévères ou même aux conditions médicales sérieuses. Parmi les troubles développementaux, on retrouve entre autres le TDA/H (Pickar et Kaufman, 2015), dont la prévalence mondiale est estimée à 5,29% (Polanczyk, Silva de Lima, Horta, Biederman, et Rohde, 2007).

À la suite de leur analyse des données de la National Longitudinal Survey on Children and

Youth, Brault et Lacourse (2012) remarquent que la prévalence du diagnostic de TDA/H chez

les enfants âgés de trois à neuf ans au Canada est passée de 1,7 % en 2000 à 2,6 % en 2007. Aussi, les données de l’Étude longitudinale du développement des enfants du Québec (ELDEQ, 1998-2010) documentent l’évolution de comportements d’hyperactivité et d’inattention chez une cohorte d’enfants nés au Québec en 1998, dès leurs 3 ½ ans jusqu’à ce qu’ils atteignent l’âge de 8 ans, tels que rapportés par leurs parents (Cardin, Desrosiers, Belleau, Giguère et Boivin, 2011). Les auteurs estiment que près de 8% des enfants de ce groupe d’âge sont susceptibles de présenter un niveau élevé de symptômes d’hyperactivité et d’inattention. De plus, il ressort de cette analyse des données qu’environ 7% des enfants de 8 ans, selon leurs parents, avaient déjà reçu un diagnostic de TDA/H de la part d’un

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spécialiste de la santé au cours des quatre années précédentes. Bien que seulement le tiers (35%) des enfants assignés à la trajectoire élevée de symptômes et 10% de ceux assignés à la trajectoire modérée, telles qu’élaborées par les auteurs, avaient reçu un diagnostic, c’est la majorité des enfants diagnostiqués (87%) qui appartenaient à ces deux trajectoires (Cardin et coll., 2011). Les données montrent que les enfants présentant un niveau élevé de symptômes d’hyperactivité et d’inattention selon leurs parents ne sont pas nécessairement diagnostiqués par la suite, c’est-à-dire que chaque enfant n’obtient pas le diagnostic de TDA/H s’il présente des symptômes élevés. Les données ne permettent toutefois pas d’en connaître la raison : il se pourrait par exemple que les parents ne cherchent pas à obtenir le diagnostic ou que l’enfant ne présente simplement pas le trouble. Cependant, qu’ils aient ou non un diagnostic, l’enseignante de ces enfants les décrit comme présentant un niveau plus élevé de symptômes ainsi qu’un rendement scolaire inférieur à celui des autres enfants en deuxième année du primaire (Cardin et coll., 2011).

Des données plus récentes indiquent que la prévalence annuelle du TDA/H chez les enfants âgés d’un an à 24 ans se situe à 4,1% au Québec en 2015-2016 (Institut national de la santé publique du Québec [INSPQ], 2019). En raison des particularités du TDA/H, les enfants présentant ce trouble peuvent éprouver plus de difficultés à s’adapter aux changements dans leur milieu familial amenés par la séparation des parents et un mode de garde partagé (Pickar et Kaufman, 2015).

La plupart des études examinant à la fois les concepts de séparation parentale et de TDA/H décrivent l’occurrence de leur combinaison au sein de la population (Björkenstam et coll., 2017; Brown et coll., 2017; Heckel, Clarke, Barry, McCarthy et Selikowitz, 2009; Kousgaard, Boldsen, Mohr-Jensen et Lauritsen, 2018; Wymbs et coll., 2008). De plus, même en élargissant le sujet à d’autres troubles développementaux (trouble du spectre de l’autisme, trisomie 21, etc.), il apparaît que les études sur des échantillons d’individus présentant ces troubles ont aussi cherché à trouver un lien entre la présence d’un trouble développemental et la séparation parentale (Clarke et McKay, 2008; Hartley et coll., 2010; Hatton, Emerson, Graham, Blacher et Llewellyn, 2010; Tøssebro et Wendelborg, 2017; Urbano et Hodapp, 2007). Bien qu’une corrélation puisse souvent être établie entre le fait qu’un enfant présente

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un trouble neurodéveloppemental et la séparation de ses parents, l’expérience entourant la séparation parentale vécue par ces familles n’est pas encore documentée.

1.2 Pertinence scientifique et pertinence sociale

La pertinence scientifique de poursuivre cette recherche est de combler un manque de connaissances sur le plan de l’expérience de séparation parentale dans les familles où un enfant présente des besoins spéciaux en raison d’un TDA/H. Le TDA/H est diagnostiqué chez 2,5% à 6% des enfants de plusieurs sociétés occidentales (American psychiatric association [APA], 2000; Biederman et Faraone, 2005; Polanczyk et coll., 2007) et des études évaluent que plus de 20% de ceux-ci vivent la séparation de leurs parents (Brown et coll., 2017; Heckel et coll., 2009; Wymbs et coll., 2008). Par exemple, Björkenstam et ses collaborateurs (2017) observent que 45% des personnes avec un diagnostic de TDA/H ont des parents séparés, contre 29% dans le reste de la cohorte étudiée. Au Québec, environ 40% des enfants âgés de 0 à 17 ans connaissent la séparation de leurs parents (ISQ, 2017) et les données de l’ELDEQ indiquent qu’environ 8% des enfants de 8 ans au Québec présentent des comportements d’hyperactivité et d’inattention selon leurs parents (ISQ, 2016). En 2015-2016, la prévalence annuelle du TDA/H se trouvait à 4,1% chez les jeunes Québécois âgés d’un à 24 ans, soit à 5,3% chez les garçons et à 2,8% chez les filles (INSPQ, 2019). Toujours selon les données de l’ELDEQ, le quart des enfants de la cohorte connaissent la séparation de leurs parents à l’âge de 8 ans, et les statistiques atteignent 35% pour les enfants issus de parents en union libre (47,3% de la cohorte) (Desrosiers et Tétreault, 2018). On peut supposer que plusieurs enfants ayant un diagnostic de TDA/H au Québec sont susceptibles de vivre la séparation de leurs parents. Comme le but de la recherche est de mieux comprendre la réalité des familles où les parents se séparent et comment le TDA/H d’un des enfants peut influencer l’expérience de la séparation parentale au sein de la famille, ce mémoire fera ressortir les difficultés et enjeux qu’elles vivent ainsi que les ressources utilisées et les stratégies appliquées pour s’adapter à la situation.

La pertinence sociale de cette recherche provient du constat que la séparation est une épreuve exigeante pour un couple (Amato, 2010; 2014). Lorsque des enfants sont touchés, la situation devient encore plus délicate et les répercussions ne sont pas vécues que par les membres du

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couple parental. Tant les adultes que les enfants vivent les changements dus à la séparation des parents (Amato, 2010; Ambert, 2009). Le simple fait d’élever un enfant comporte des défis, qui se transforment parfois en difficultés, et lorsque cet enfant présente des besoins particuliers comme un TDA/H, les parents ressentent un stress plus élevé en lien avec leur rôle parental que les parents d’enfants ne présentant pas de besoins particuliers (Daly, Creed, Xanthospoulos et Brown, 2007). De plus, les relations entre l’enfant TDA/H et sa fratrie ou ses parents sont souvent plus conflictuelles que lorsqu’aucun enfant ne présente ce trouble (Heckel, Clarke, Barry, McCarthy et Selikowitz, 2013), ce qui peut ajouter au stress vécu au sein de la famille. Dans la population générale, la séparation parentale entraine peu d’effets positifs sur l’adaptation des enfants (Amato, 2000; Amato, 2014). Or, ceux qui présentent un TDA/H vivent déjà certaines difficultés liées à leur trouble (Massé, Verreault et Verret, 2011). La séparation des parents amène des changements supplémentaires susceptibles d’accentuer des manifestations du trouble ou d’engendrer des réactions chez les enfants. Tout cela mis ensemble montre que la situation est plus complexe encore lorsque des enfants présentant un TDA/H sont touchés par la séparation que dans les cas de séparation conjugale sans enfants ou sans enfants présentant des besoins particuliers. Les chercheurs Kousgaard, Boldsen, Mohr-Jensen et Lauritsen (2018) observent que la proportion de parents vivant la séparation ou le divorce est plus grande dans les familles où un enfant présente un diagnostic de TDA/H que dans celle où il n’y en a pas. Or, les recherches sur le sujet n’indiquent pas à quel point l’un affecte l’autre ni sur quelles dimensions. Ce que vivent les parents d’enfants TDA/H qui se séparent demeure inconnu de la communauté scientifique. C’est pourquoi il est pertinent de s’intéresser à leur vécu ainsi qu’aux moyens qu’ils ont mis en place pour surmonter les épreuves de la séparation parentale et conjugale. Une plus grande connaissance des problématiques particulières rencontrées par ces familles permettrait de vérifier l’adéquation des services qui leur sont offerts. Parmi les retombées escomptées, on pourrait s’attendre à ce que la recherche permette de sensibiliser à la fois la population générale et les intervenants à la réalité particulière de ces familles.

Cette recherche est pertinente au champ du travail social, car en donnant directement la parole aux parents séparés d’enfants présentant un TDA/H afin qu’ils puissent exprimer leur vécu, elle favorise chez eux le développement du pouvoir d’agir. Autrement dit, les participants

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s’autodéterminent en choisissant de participer à la recherche et leur décision de prendre la parole leur donne une emprise nouvelle sur leur situation. Redonner le pouvoir aux personnes sur leur situation et leur laisser la place de s’autodéterminer sont deux principes au cœur de la profession du travail social (ACTS, 2005).

1.3 Démarche documentaire

Les articles scientifiques consultés pour cette recension des écrits ont été trouvés sur différentes bases de données. La base de données PubMed a été la plus consultée en raison de ses nombreux résultats de recherches établissant des liens entre la séparation parentale et la présence d’un TDA/H chez les enfants. Aussi, PsycNET, Social Services Abstracts, Social Work Abstracts et Érudit sont d’autres banques de données qui ont été consultées pour cette recherche. Les mots clés qui ont permis d’explorer la littérature font partie de la combinaison suivante : séparation parentale (parental separation), divorc*, modalités de garde (child

custody), TDA/H (ADHD), TDA (ADD), trouble déficitaire de l’attention (attention deficit disorder), trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité (attention deficit hyperactivity disorder), enfan* (child*). Lorsqu’il a fallu élargir la recherche, les mots clés suivants ont

été soumis aux banques de données : besoins spéciaux (special needs) et monoparental* (single-parent). En raison du peu d'études sur le sujet et de la difficulté d’obtenir des résultats pertinents en combinant les mots clés, plusieurs périodiques ont été recherchés séparément tels que Journal of Child Custody, Journal of Divorce and Remarriage, Family Conciliation

Court Review, Children and Youth Services Review, Journal of Family Studies, Juvenial and Family Law Court Journal, Journal of Attention Disorders. Un dernier moyen utilisé a été

de passer en revue les bibliographies des articles pertinents au thème de recherche de façon à cibler précisément d’autres études pouvant enrichir l’état des connaissances sur le sujet. 1.4 Recension des écrits scientifiques

Cette synthèse est divisée par thèmes selon les articles scientifiques consultés en lien avec la séparation parentale et la présence d’un TDA/H chez les enfants. Dans le cadre de la recension des écrits, les termes « séparation » et « divorce » sont utilisés en alternance selon l’utilisation faite par les auteurs des articles consultés, afin de rester fidèle à leurs études. La

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première section présente l’état des connaissances scientifiques sur les facteurs liés à l’apparition d’un TDA/H. Le débat scientifique actuel entre les causes génétiques et l’influence des facteurs environnementaux dans l’explication de l’apparition du trouble y est exposé. On retrouve notamment parmi ces derniers la séparation parentale. Ensuite, les conséquences d’avoir un TDA/H sur la dynamique familiale sont décrites. Effectivement, la recherche montre que la présence du TDA/H chez un enfant peut exercer une certaine influence sur les relations familiales. Le troisième volet de la recension regroupe les constats de la recherche sur la séparation parentale lorsqu’on l’élargit aux articles scientifiques dont les participants sont des enfants ayant des besoins spéciaux, comme des troubles neurodéveloppementaux de façon plus générale. Le dernier volet est consacré aux écrits impliquant le système juridique familial. On remarque que les cas de séparations parentales nécessitant des recours devant un juge sont complexifiés par la présence de diagnostics de troubles neurodéveloppementaux chez les enfants, dont le plus fréquent est le TDA/H. Les principales limites des études recensées sont finalement présentées dans la dernière section du chapitre.

1.4.1 Facteurs associés au TDA/H. Bien qu’il s’agisse d’un des diagnostics les plus fréquents chez les enfants d’âge scolaire, la définition du TDA/H ne fait pas l’unanimité au sein de la communauté scientifique. Le TDA/H est un trouble neurobiologique caractérisé par des déficits dans les régions corticales et sous-corticales du cerveau qui entrainent des niveaux d’inattention et/ou d’hyperactivité inappropriés et/ou dysfonctionnels (APA, 2000; Biederman et Faraone, 2005). La présence de ce trouble chez un enfant peut entrainer différentes conséquences notamment quant à la performance scolaire, au fonctionnement intellectuel et aux capacités sociales (Faraone, Sergeant, Gillberg et Biederman, 2003). Les enfants présentant ce trouble peuvent par exemple avoir plus de difficulté à nouer des relations d’amitié avec les autres enfants (Massé et coll., 2011). Bien que la plupart des individus qui en sont affectés présentent des manifestations à la fois d’hyperactivité et d’inattention, il existe trois sous-types de TDA/H : le sous-type combiné, le sous-type avec prédominance d’hyperactivité ou d’impulsivité et le sous-type avec prédominance d’inattention (APA, 2000).

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La définition du TDA/H émise par l'APA (2000) propose une perspective biologique de l’explication de l’apparition de ce trouble, laissant peu, voire aucune, place au rôle possible joué par des facteurs environnementaux. Cette vision selon laquelle l’environnement social n’a pas de réelle influence dans l’explication de l’apparition des symptômes chez les enfants présentant ce trouble s’est répandue dans la communauté et est aujourd’hui plutôt commune (Heckel et coll., 2013). Il faut cependant demeurer critique face aux études présentant une cause génétique au TDA/H. Bien qu’aucune recherche n’ait permis d’identifier un gène associé au TDA/H, plusieurs études de jumeaux présentent des résultats favorisant l’hypothèse de l’hérédité comme cause principale du TDA/H (Joseph, 2009). Or, les jumeaux partagent souvent des contextes environnementaux ainsi que des opportunités de développement similaires (Furman, 2008; Joseph, 2009). De plus, même si les recherches permettaient d’observer une corrélation entre la présence d’un gène particulier et le fait de présenter un TDA/H, cela ne justifierait pas l’établissement d’un lien de causalité. De fait, il est pratiquement impossible d’exclure complètement les facteurs environnementaux lors de la recherche sur ce qui entraine le TDA/H (Furman, 2008). D’ailleurs, aucune recherche étudiant des jumeaux présentant un diagnostic de TDA/H, mais n’ayant pas grandi au sein du même milieu familial, n’est reportée dans la littérature scientifique (Furman, 2008), alors qu’il s’agit précisément du type de devis qui permettrait de mieux départager le rôle de la génétique de celui de l’environnement. Le fait que les diagnostics soient plus souvent établis chez les deux jumeaux monozygotes (jumeaux identiques) que chez les deux jumeaux dizygotes (jumeaux non identiques) ne permet pas de distinguer les rôles de la génétique, des facteurs familiaux ou de mener vers une conclusion annonçant que le TDA/H se transmet uniquement de façon génétique.

Dans le même ordre d’idées, de nombreux chercheurs ont tenté de découvrir la part d’explication qui peut être accordée à la présence de facteurs environnementaux précis. La présence d’un TDA/H et la sévérité des symptômes sont notamment associées à un faible statut socioéconomique (Russel, Ford, Rosenberg, et Kelly, 2014) et à la présence de conflits dans la relation conjugale (Wymbs, Pelham Jr., Molina, et Gnagy, 2008). La présence de psychopathologie, même autre que le TDA/H, chez les parents est aussi considérée comme un facteur de risque au développement du trouble chez l’enfant (Margari et coll., 2013; Wang,

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Liu, Zhang, Aragam et Pan, 2012). Une étude longitudinale auprès d’un échantillon populationnel (N=15 462 enfants canadiens âgés de 2 à 7 ans) évalue que le fait d’être un garçon, de vivre auprès d’une mère souffrant de dépression, d’évoluer dans un milieu familial où le style parental est hostile ainsi que le fait que la mère fume pendant la grossesse sont tous des prédicteurs significatifs de taux d’hyperactivité élevés et persistants dans le temps chez les enfants (Romano, Tremblay, Farhat et Côté, 2006).

1.4.2 Conséquences du TDA/H dans la famille. Dans les familles où un membre est atteint d’un TDA/H, que ce soit chez les parents ou chez les enfants, les interactions entre les membres de la famille sont différentes de celles dans les familles où on ne retrouve pas ce trouble (Williamson et Johnston, 2016). Au sein de celles-ci, les relations familiales tendent effectivement à être plus conflictuelles et stressantes (Ghanizadeh et Shams, 2007; Wymbs et Pelham, 2010). Comme la fratrie d’enfants présentant un TDA/H partage le même bagage génétique et est souvent éduquée dans le même environnement familial, elle est plus sujette à vivre des difficultés quant à son fonctionnement psychosocial (Ma, Roberts, Winefield et Furber, 2017). De plus, si des frères ou des sœurs d’enfant ayant un TDA/H satisfont aussi les critères diagnostiques pour ce trouble, les relations de fratrie risquent d’être significativement plus conflictuelles que dans les familles où la fratrie ne présente pas le trouble (Faraone et coll., 1996). Ces résultats de recherche montrent que la présence d’un TDA/H chez l’enfant peut influencer le climat familial en générant des tensions dans les relations entre les différents membres de la famille. D’ailleurs, la réaction d’un enfant à la séparation de ses parents sera entre autres influencée par la qualité des relations qu’il entretient avec eux (Heckel et coll., 2013). Il est possible d’émettre l’hypothèse qu’en raison de l’accumulation des risques de conflits générée à la fois par la présence du TDA/H et par la situation de séparation familiale en elle-même, il se peut que la capacité d’adaptation de l’enfant présentant un TDA/H face à la séparation de ses parents soit particulièrement mise à l’épreuve. On note de plus que l’absence ou la présence de conflits dans une famille qui se sépare est un des meilleurs prédicteurs de l’adaptation des enfants à la séparation des parents (Cyr, 2014).

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Dans le même ordre d’idées, Heckel et ses collaborateurs (2013) ont recherché les associations possibles entre le divorce des parents, la recomposition familiale, les multiples transitions de vie et la qualité des relations entre les membres de la famille d’enfants et d’adolescents présentant un TDA/H (N=86 enfants ayant un TDA/H et des parents séparés et 393 enfants dont les parents ne sont pas séparés). Pour y arriver, les chercheurs ont utilisé quatre instruments de mesure quantitatifs soit le Conners’ Parent Rating Scale – Revised, le

Child Behaviour Checklist, le Depression and Anxiety in Youth Scale (DAYS) ainsi qu’un

questionnaire sur la qualité des relations créé par les auteurs se composant d’une échelle de Likert. Les résultats de la recherche indiquent que les adolescents présentant un TDA/H mentionnent avoir significativement une moins bonne relation avec leur mère, leur père et leur sœur que les enfants ayant le trouble, et que ceux dont les parents étaient divorcés affirmaient avoir significativement une moins bonne relation avec ces derniers que ceux dont les parents n’étaient pas divorcés. De plus, les relations conjugales entre les parents d’enfants présentant un TDA/H témoignent aussi d’enjeux relationnels (Schermerhorn et coll., 2012; Williamson et Johnston, 2016; Wymbs et coll., 2008). Dans leur étude de jumeaux (N=1296 jumeaux), Schermerhorn et ses collaborateurs (2012) observent que la présence du TDA/H chez au moins un enfant d’une famille est associée à un plus haut taux de conflits conjugaux, et ce même dans les familles où les parents vivent toujours ensemble.

Les conflits entre les parents de ces enfants, qu’ils soient en couple ou séparés, concernent souvent le TDA/H : la sévérité des symptômes, le meilleur moyen de réguler les comportements de l’enfant, l’approche de traitement à privilégier (Kaufman et Pickar, 2017). Les avantages et désavantages de l’utilisation d’une médication pour traiter les manifestations du TDA/H chez l’enfant est aussi une source fréquente de conflits entre ses parents, tant dans les familles intactes que divorcées ou séparées (Kaufman et Pickar, 2017). La prise d’une médication est le moyen le plus utilisé pour traiter le TDA/H afin d’en atténuer les symptômes (Hauck, Lau, Wing, Kurdyak et Tu, 2017). Or, les enfants exposés à des situations générant un stress important, comme la séparation ou le divorce des parents, sont plus à risque de présenter des symptômes du TDA/H menant à la prise d’une médication pour les contrôler (Strohschein, 2007). Les parents peuvent se disputer sur le fondement même du diagnostic et ces conflits affectent la vie au quotidien et le bien-être de l’enfant (Saposnek,

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Perryman, Berkow et Ellsworth, 2005). Effectivement, les désaccords des parents peuvent affecter directement le bien-être de l’enfant en diminuant sa capacité d’adaptation : il arrive qu’un parent ne soit pas d’accord avec le fait de médicamenter l’enfant et donc, lorsqu’il est chez lui, il ne reçoit pas sa médication alors que c’est le cas chez son autre parent (Saposnek et coll., 2005). Or, les enfants ayant un TDA/H ont un plus grand besoin de routine et de stabilité que ceux ne présentant pas le trouble ou d’autres besoins particuliers (Pickar et Kaufman, 2015).

1.4.3 Séparation parentale et troubles développementaux. Plusieurs chercheurs observent une association entre la séparation parentale et la présence d’un TDA/H chez les enfants (Björkenstam et coll., 2017; Brown et coll., 2017; Heckel et coll., 2009; Wymbs et coll., 2008). Plus particulièrement, Brown et ses collaborateurs (2017) notent dans leur étude populationnelle (N=76 227 enfants) une relation significative entre le fait d’avoir des parents divorcés et le fait de présenter un TDA/H de sévérité modérée à sévère. Leurs résultats montrent qu’environ 36% des jeunes présentant un TDA/H ont vécu la séparation de leurs parents, tandis que c’est le cas pour environ 20% seulement de ceux n’ayant pas le trouble. Il faut cependant nuancer ce résultat au regard de la méthodologie employée par cette étude. Effectivement, la présence d’un TDA/H chez l’enfant ainsi que le degré de sévérité des symptômes sont rapportés par les parents, ce qui peut possiblement avoir introduit un biais menant à une mauvaise catégorisation. Les résultats de l’étude de Brown et ses collaborateurs (2017) font écho à ceux d’une étude longitudinale réalisée en Suède. Björkenstam et ses collaborateurs (2017) notent que 45% des personnes nées en Suède entre 1987 et 1991 présentant un diagnostic de TDA/H ont vécu la séparation de leurs parents, comparativement à 29% dans l’ensemble de la cohorte (N=543 650). Il est important de noter qu’Heckel et ses collaborateurs (2013) n’observent aucune différence significative dans l’expression des symptômes du TDA/H chez les enfants qui ont vécu plusieurs transitions de vie (soit la séparation parentale et la recomposition familiale) plutôt qu’une seule, bien que ceux vivant en famille recomposée ne présentent pas un niveau d’adaptation nécessairement supérieur à ceux vivant dans une famille monoparentale.

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Dans le même ordre d’idées, il semble que les parents d’un jeune présentant un diagnostic de TDA/H soient plus sujets à divorcer avant que leur enfant n’atteigne l’âge de huit ans (22,7%) que les parents d’enfants n’ayant pas ce trouble (12,6 %) (Wymbs et coll., 2008). Les enfants qui vivent plus jeunes le divorce de leurs parents sont plus à risque de vivre des impacts négatifs que les enfants plus âgés (Amato, 2000; Amato, 2014). Comme il est plus probable que les parents d’enfants avec un TDA/H terminent leur relation plus rapidement que les parents d’enfants sans ce trouble, on peut émettre l’hypothèse que ces enfants sont plus à risque d’avoir à vivre les impacts négatifs de la séparation parentale à un plus jeune âge que les enfants ne présentant pas le trouble. Pour leur part, Schermerhorn et ses collaborateurs (2012) qui ont mené une étude auprès de 1 296 jumeaux arrivent au constat que la présence d’un TDA/H chez un des enfants ne permet pas de prédire la séparation ou le divorce des parents. Toutefois, ils observent une forte tendance et mentionnent que le manque de puissance statistique peut expliquer l’absence de relation significative.

Les écrits scientifiques sur les enjeux soulevés par la séparation parentale dans les familles où un enfant présente un diagnostic de TDA/H sont limités. La recherche a donc été élargie aux troubles développementaux autres que le TDA/H, comme le trouble du spectre de l’autisme ou la trisomie 21. L’enfant présentant des besoins spéciaux représente une source de stress supplémentaire pour la famille (Kaufman et Pickar, 2017). Concernant la séparation parentale dans les familles où il y a des troubles développementaux, les résultats des études divergent. Plusieurs travaux scientifiques rapportent des taux plus élevés de séparation parentale dans ces familles (Hatton, Emerson, Graham, Blacher et Llewellyn, 2010; Hartley et coll., 2010; Kousgaard, Boldsen, Mohr-Jensen et Lauritsen, 2018; Clarke et McKay, 2008). Cependant, les auteurs d’une recherche réalisée aux États-Unis notent l’inverse, soit que les parents d’enfants atteints de trisomie 21 ont des taux de séparation moins élevés (Urbano et Hodapp, 2007). De plus, Hatton, Emerson, Graham, Blacher et Llewellyn (2010) observent que lorsque le statut socioéconomique est contrôlé, les taux de séparation parentale dans les familles d’enfants présentant un trouble neurodéveloppemental ne sont plus aussi élevés. Ce résultat suggère que le facteur environnemental que représente le statut socioéconomique, ou le stress qui lui est associé (Ambert, 2009), en plus de la présence d’un

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trouble neurodéveloppemental chez l’enfant, joue un rôle dans le contexte familial pouvant mener à une séparation parentale.

Qui plus est, d’autres chercheurs n’ont pas observé de différence significative quant aux taux de séparation entre les familles devant s’occuper d’un enfant présentant un trouble neurodéveloppemental et les familles d’enfants ne présentant pas de trouble (Seltzer, Greenberg, Floyd, Pettee et Hong, 2001). Tøssebro et Wendelborg (2017) observent pour leur part un taux de divorce légèrement plus bas chez les familles d’enfants avec des déficiences jusqu’à ce que ces derniers aient atteint l’âge de huit ans. À ce moment, les taux de séparation redeviennent équivalents pour toutes les familles. Les chercheurs observent cependant qu’une fois que l’enfant avec une déficience a atteint l’âge de huit ans, les mères se remettent moins en couple, ce qui peut témoigner de la difficulté relatée par les chercheurs qu’elles ont à rencontrer un nouveau partenaire. Il semble qu’il soit plus facile de trouver un nouveau partenaire lorsque la séparation survient alors que l’enfant n’a pas encore atteint l’adolescence (Tøssebro et Wendelborg, 2017).

Une corrélation existe entre l’âge de l’enfant à la séparation et la structure familiale après la séparation, ce qui peut avoir une influence sur l’expérience de séparation dans les familles à l’étude. Il est important de noter que cette dernière étude est menée en Suède, où les inégalités sociales sont beaucoup moins élevées qu’aux États-Unis ou qu’en Angleterre (Pickett et Wilkinson, 2010), ce qui peut expliquer les plus bas taux de séparation observés comparativement à ceux des études réalisées dans ces deux derniers pays.

1.4.4 Traitement des cas de séparation parentale avec enfants présentant un diagnostic de TDA/H dans le système juridique familial. Comme illustrée par les thèmes de recension précédents, une corrélation existe entre la présence d’un trouble développemental chez un enfant et la séparation de ses parents ainsi que la présence de conflits dans les relations conjugales et familiales. Aussi, et de façon cohérente avec l’augmentation du nombre de diagnostics de troubles développementaux chez les enfants, il apparaît que le nombre de cas de séparation parentale ou de divorce impliquant des enfants présentant des besoins spéciaux augmente rapidement (Price, 2012).

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Le TDA/H est l’un des troubles neurodéveloppementaux les plus diagnostiqués chez les enfants d’âge scolaire (Eme, 2009; Price, 2012; Saposnek et coll., 2005). Cependant, il n’est pas encore bien compris et comme mentionné précédemment, il n’y a pas encore de consensus clair au sujet de ce qui le cause. De plus, les symptômes du trouble peuvent se manifester différemment d’un enfant à l’autre. Il n’y a d’ailleurs aucun test médical clair qui permet d’affirmer qu’un enfant présente bel et bien un TDA/H ni d’établir un diagnostic différentiel. Tous ces facteurs, entre autres, font en sorte que les cas de séparation parentale qui se concluent devant un juge à la cour impliquant des enfants avec un TDA/H sont d’une plus grande complexité pour ce qui est du traitement juridique qu’il faut leur accorder comparativement aux cas impliquant des enfants ne présentant pas de besoins particuliers (Saposnek et coll., 2005; Trazzera, 2019).

Les enfants présentant des besoins spéciaux demandent, dans la vie de tous les jours, des interventions particulières et personnalisées à leur réalité individuelle. Ainsi, l’approche à privilégier auprès de leurs familles lorsque les parents se séparent doit aussi être différente et adaptée (Price, 2012). Les familles de ces enfants doivent donc être traitées par les professionnels sociojudiciaires avec des attentions particulières (Rappaport, 2017; Trazzera, 2019). Leur situation est beaucoup plus complexe et demande de considérer plusieurs problèmes qui sont spécifiques à ces familles. Par exemple, élever un enfant avec des besoins spéciaux peut être stressant et représenter un défi plus grand pour les parents de cet enfant que pour ceux d’enfants ne présentant pas de tels besoins (Daly et coll., 2007). Or, il est important de ne pas considérer uniquement les besoins des parents dans l’établissement des modalités de garde, mais en particulier ceux de l’enfant (Rappaport, 2017; Trazzera, 2019). Selon Rappaport (2017), les enfants présentant un TDA/H ont besoin de plus de continuité dans leur environnement que d’autres enfants. Cependant, les recommandations formulées dans le rapport de cet auteur sont rédigées à l’intention des avocats et juges et concernent la gestion judiciaire des cas de séparation parentale impliquant des enfants ayant reçu un diagnostic de TDA/H. Il faut les traiter avec prudence puisque les sources sur lesquelles s’appuient ces recommandations ne sont pas présentées. Des modalités de garde partagée favorisant des transitions fréquentes entre les milieux de vie seraient à proscrire dans le cas des familles séparées d’enfants présentant un TDA/H (Pickar et Kaufman, 2015).

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Toutefois, un constat clair qui se dégage de la recherche est que ce n’est pas le type de garde comme tel qui importe pour l’adaptation de l’enfant, mais plutôt la façon dont les parents vont pouvoir gérer adéquatement ces diverses modalités de partage du temps de vie de leur enfant sur le plan pratique et relationnel, surtout lorsqu’elles sont imposées par la Cour. Des études récentes mettent en évidence l’importance de tenir compte du contexte familial de chacun des enfants dans l’établissement du type de garde. Ainsi, le niveau de conflit entre les parents, la volonté de la mère de faciliter les contacts avec le père, celle-ci obtenant le plus souvent la garde principale, les compétences parentales, la sensibilité parentale aux besoins de l’enfant et sa disponibilité émotive, la stabilité et la prévisibilité des arrangements de garde, mais aussi la souplesse et la communication entre les parents autour des besoins de l’enfant sont tous des éléments importants à considérer (Cyr, 2014, p.15).

Pour certaines familles, il existe des enjeux qui doivent être tranchés par des tribunaux lors de la séparation parentale, par exemple en ce qui a trait au partage du temps parental ou bien aux modalités de communication entre les parents. Or, la situation peut être complexifiée lorsque des enfants présentant des besoins particuliers sont impliqués dans ces situations. Les écrits scientifiques soulèvent une préoccupation des professionnels du droit et de l’intervention psychosociale face à ces cas de séparation parentale. En plus d’être peu nombreux, les écrits prennent souvent la forme de recommandations sur la marche à suivre au regard des procédures à privilégier dans les cas de séparation impliquant des enfants avec des besoins particuliers (Price, 2012). Or, il semble que les parents séparés n’ont pas été questionnés directement, ce qui ne permet pas de bien comprendre ce qu’il en est réellement face à l’application pratique de ces recommandations. De plus, les auteurs n’ont pas cherché à soumettre ces recommandations à un examen empirique démontrant leur raison d’être. 1.5 Forces et limites des études consultées

Les études recensées présentent des forces et des limites. Parmi les forces, notons que plusieurs études, toutes quantitatives, examinant la corrélation entre la présence d’un TDA/H chez les enfants d’une famille et la séparation des parents ont un grand échantillon (N >200) permettant ainsi d'observer des relations significatives (p. ex. : Björkenstam et coll., 2017; Brown et coll., 2017; Heckel et coll., 2009; Tøssebro et Wendelborg, 2017; Wymbs et coll., 2008). Ces études permettent d’alimenter les connaissances en appuyant l’hypothèse selon

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laquelle il existe une corrélation entre la présence d’un TDA/H chez les enfants et la séparation parentale, comme expliqué dans la recension.

Les auteurs mentionnent des limites qui sont importantes à considérer lorsqu’on s’intéresse aux études sur le sujet. D’abord, certaines d’entre elles ne contrôlent pas la présence de facteurs concomitants importants; par exemple, le fait que le parent ait un TDA/H ou d’autres psychopathologies est lié à la présence du TDA/H chez l’enfant. Pourtant, la recherche montre l’importance de prendre en considération la santé mentale des parents dans l’étude des symptômes du TDA/H (Margari et coll., 2013; Williamson et Johnston, 2016). Ensuite, la plupart des recherches sur le thème de la séparation parentale et du TDA/H ont des échantillons où il y a plus de participants masculins que féminins. Cela peut biaiser les résultats puisque les filles ont tendance à plutôt présenter le sous-type de TDA/H avec prédominance d’inattention alors que chez les garçons, c’est plutôt le sous-type combiné ou celui avec prédominance d’hyperactivité qui est diagnostiqué (Heckel et coll., 2009). Aussi, la plupart des études se basent sur des informations rapportées par les mères, mettant de côté les perceptions du père ou bien celles de l’enfant. Finalement, il est important de garder à l’esprit que les études consultées n’avaient pas de devis expérimental permettant d’examiner des liens de causalité entre la séparation des parents et la présence d’un diagnostic de TDA/H chez les enfants. Des associations et des corrélations peuvent être examinées, mais la direction des relations entre les variables ne peut pas être affirmée avec certitude.

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Chapitre 2 : Cadre d’analyse

Cette recherche s’inscrit dans l’épistémologie constructiviste, laquelle explique les choix qui ont été faits dans l’élaboration du cadre d’analyse. Le chapitre suivant présente une justification du positionnement épistémologique, ainsi que l’approche bioécologique de Bronfenbrenner et l’analyse des besoins, selon les définitions de plusieurs auteurs qui permettront d’orienter la création du guide d’entrevue ainsi que l’analyse des données collectées.

2.1 Épistémologie constructiviste

Lorsqu’un chercheur s’inscrit dans une perspective constructiviste, il considère que la réalité peut être appréhendée de nombreuses façons (Guba et Lincoln, 1994). Plutôt que sur les conditions objectives des problèmes sociaux, l’intérêt du chercheur est orienté sur les processus par lesquels les problèmes sociaux se construisent (Mayer et Ouellet, 2000). Selon cette épistémologie, la connaissance est construite des consensus qu’on peut retrouver dans les différentes expériences subjectives des personnes (Guba et Lincoln, 1994), ce qui guide le chercheur à s’intéresser à la complexité et à la diversité des perceptions (Creswell, 2007). Comme il accorde une grande importance aux données subjectives (Padgett, 2017), le chercheur constructiviste étudie les phénomènes sociaux selon les connaissances et la définition qu’en font les personnes directement impliquées.

En concordance avec cette épistémologie, et si l’on souhaite mieux comprendre l’expérience de séparation parentale dans des familles d’enfants ayant reçu un diagnostic de TDA/H, il s’avère indispensable de donner la parole aux personnes directement concernées par l’objet d’étude. Dans le cas de cette recherche, les points de vue de parents séparés d’enfants présentant un TDA/H sont mis de l’avant dans la définition des enjeux rencontrés et dans l’identification des besoins de ces familles lorsque survient une séparation parentale. Dans une analyse bioécologique de type constructiviste, le sujet, ici le parent séparé, est conçu comme un constructeur de sens qui génère des compétences utilisables dans les situations de déséquilibre où son environnement lui demande de s’adapter (Larose, Terrisse, Lenoir et Bédard, 2004), comme c’est le cas d’une séparation.

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2.2 Approche bioécologique

L’approche bioécologique de Bronfenbrenner a d’abord été développée par l’auteur dans l’objectif d’étudier le développement humain, et plus spécifiquement celui de l’enfant (Garbarino, 2014). Depuis, cette approche est utilisée comme cadre d’analyse dans plusieurs recherches en sciences sociales dont les objets ne portent pas qu’uniquement sur le développement humain. En effet, ce modèle est utilisé comme cadre d’analyse dans des recherches voulant examiner un enjeu qui peut complexifier le développement des personnes en insistant sur la contribution de l’environnement. C’est le cas par exemple de certaines recherches portant sur la maltraitance envers les enfants (Mavis, 2018; Romano, Babchishin, Marquis et Fréchette, 2015), envers les ainés (Wangmo, Teaster, Grace, Wong et Mendiondo, 2014), ainsi que pour des recherches portant sur l’intervention auprès des familles immigrantes (Paat, 2013) ou sur les défis et réussites parentales dans des familles où grandissent des enfants avec des besoins particuliers (Algood, Harris et Hong, 2013). Toutes ces études ont en commun d’étudier l’environnement des familles. Dans le cas de ce mémoire, l’étudiante examine les interactions des membres de familles où un enfant présente un diagnostic de TDA/H avec leur l’environnement dans le contexte particulier de la séparation parentale, ce qui rend cette théorie pertinente pour analyser les données en lien avec les questions de recherche.

Il est toutefois important d’expliquer brièvement le développement de cette approche afin de bien comprendre comment chacune des étapes a bonifié la précédente jusqu’à la forme que l’on connaît aujourd’hui. Tudge, Mokrova, Hatfield et Karnik (2009) observent dans leur revue de la littérature sur les recherches utilisant l’approche bioécologique comme cadre d’analyse depuis l’année 2000 que seulement quatre études sur 25 en font une utilisation adéquate selon eux. Par exemple, une utilisation de la théorie est adéquate lorsqu’on observe la diversité des niveaux écologiques touchés par les questions d'entrevues. C’est pourquoi, dans un souci d’une meilleure compréhension de l’approche, un bref historique de celle-ci est établi avant d’expliquer plus en profondeur les principes fondamentaux qu’elle sous-tend. 2.2.1 Historique. La théorie bioécologique du développement humain telle qu’initialement conçue par Urie Bronfenbrenner a subi plusieurs changements depuis les

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années 1970, jusqu’au décès de son créateur en 2005. Rosa et Tudge (2013) divisent en trois phases le développement de la théorie de Bronfenbrenner. La première phase commence en 1973 et culmine avec la publication du livre The Ecology of Human Development en 1979 par Urie Bronfenbrenner. À cette époque, la recherche sur le développement des enfants est en majorité réalisée en laboratoire. Ces recherches où l’environnement est contrôlé ne témoignent pas adéquatement, selon Bronfenbrenner, des phénomènes développementaux qui ont lieu par l’influence des interactions entre les individus et leur environnement dans la vie quotidienne (Rosa et Tudge, 2013). Il construit alors la théorie écologique du développement en lui attribuant quatre structures environnementales, lesquelles s’interinfluencent : le microsystème, le mésosystème, l’exosystème et le macrosystème. Le développement de la personne est vu comme s’actualisant par l’entremise de processus, c’est-à-dire par des interactions réciproques entre les personnes et leur environnement.

La deuxième phase se déroule entre les années 1980 et 1993. L’objectif de Bronfenbrenner au cours de cette étape est de montrer comment l’environnement se conceptualise de différentes façons dans les écrits scientifiques, que ce soit empiriquement ou théoriquement. Il est aussi de répondre à une lacune soulevée au cours de la première phase, soit l’absence d’explication concernant l’influence des caractéristiques personnelles de l’individu dans son propre développement (Rosa et Tudge, 2013). Bronfenbrenner bonifie ses précédents écrits en affirmant l’importance d’accorder plus d’attention à l’individu dans son développement ainsi qu’au passage du temps. Pour ce faire, il décrit deux nouvelles niches écologiques, soit l’ontosystème et le chronosystème, et modifie ses définitions du microsystème et du macrosystème. Il précise la notion de processus proximaux aux quatre systèmes établis précédemment (Rosa et Tudge, 2013). Ces nouveaux paramètres de la théorie permettent une grande variété de combinaisons des caractéristiques personnelles et des interactions au sein des différentes niches écologiques (Tudge et coll., 2016).

La troisième phase de développement de la théorie se déroule de 1993 à 2006. C’est à cette étape que la théorie devient connue sous les noms de la théorie bioécologique ou du modèle bioécologique du développement humain. À ce moment, l’accent est mis sur le rôle de l’individu dans son développement. Bronfenbrenner cherche lors de cette phase à montrer

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comment les caractéristiques individuelles et le passage du temps peuvent influencer les processus proximaux, soit les interactions réciproques entre l’individu et son environnement, ainsi qu’entre les niches écologiques. C’est la création d’un système théorique en évolution utile à la recherche scientifique sur le développement humain dans le passage du temps. Le développement humain est alors composé de quatre éléments qui s’interinfluencent les uns les autres : les processus proximaux, la personne, le contexte et le temps (Rosa et Tudge, 2013).

La théorie bioécologique facilite l’organisation des informations, mais surtout une prise en compte globale des facteurs en présence concernant les personnes et leur environnement dans l’objectif de comprendre leur interinfluence. Les individus passent par plusieurs transitions au cours de leur vie, lesquelles nécessitent de solliciter leur environnement et leurs capacités individuelles afin de s’adapter. Il s’agit d’un cadre d’analyse pertinent à ce projet de recherche, car il permet aussi d’examiner à quelles niches écologiques renvoient différentes stratégies mises en œuvre par les parents séparés pour s’adapter à la transition familiale que représente la séparation parentale, et ce dans le contexte particulier où au moins un enfant présente un diagnostic de TDA/H.

2.2.2 Principes fondamentaux. Les processus proximaux sont un incontournable dans la théorie bioécologique d’Urie Bronfenbrenner. Ils sont les principaux moteurs du développement de la personne. Les processus proximaux résultent des interactions dynamiques entre la personne et son environnement immédiat, qui ont cours sur une base régulière et qui s’échelonnent sur une longue période de temps (Tudge et coll., 2016). Ces échanges sont d’ailleurs étroitement liés aux conditions environnementales dans lesquelles ils sont initiés (Drapeau, 2008), ce qui justifie l’explication plus détaillée qui suit des différents niveaux de contexte environnemental.

Selon Bronfenbrenner, ce qui survient dans une des niches écologiques est intimement lié à ce qui se passe dans tous les autres environnements ainsi que dans les relations entre ces environnements (Rosa et Tudge, 2013). De fait, il est central de bien définir chacune des niches écologiques qu’implique la théorie bioécologique. D’abord, l’ontosystème, ou

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l’individu en lui-même, comprend les caractéristiques personnelles qui sont divisées en trois catégories : les dispositions (âge, genre, apparence physique, etc.), les ressources (expériences passées, génétique, habiletés, etc.) et les forces (motivation, persévérance, tempérament, etc.) (Tudge, Merçon-Vargas, Liang et Payir, 2017). Dans ce mémoire, l’ontosystème est le parent séparé qui participe à la recherche.

Le microsystème représente les environnements immédiats de l’individu, par exemple d’un parent, soit les environnements qui peuvent avoir une influence directe sur sa vie par leurs interactions réciproques. Par exemple, cela peut être les membres de la famille, le milieu de travail et les collègues, ou même le voisinage (Bukatko et Daehler, 2012). Le mésosystème quant à lui correspond aux interrelations bidirectionnelles entre les microsystèmes (Bukatko et Daehler, 2012). Ainsi, en posant un regard sur le mésosystème on pourrait observer comment les interactions entre le parent et son enfant à la maison exercent une influence réciproque sur les interactions du parent avec son patron au travail ou comment le milieu de travail peut influencer le parent dans l'exercice de ses rôles parentaux (Drapeau, 2008). Ensuite, le niveau écologique avec lequel la personne n’a pas d’interactions directes, mais qui exerce tout de même une influence sur elle se nomme l’exosystème (Tudge et coll., 2017). À titre d’exemple, si le patron des parents vit des moments difficiles à la maison, cela pourrait influencer les processus proximaux par lesquels il est en relation avec le parent au milieu de travail. Le macrosystème, de son côté, englobe le contexte socioculturel d’une société. Il ne s’agit pas d’un lieu en soi, mais plutôt d’une matrice culturelle où les valeurs et les croyances véhiculées par la société dans laquelle évolue une personne, par exemple un parent, influencent son développement et sa vie (Tudge et coll. 2017). Les membres de ce système partagent des opportunités, des modes de vie et des ressources. Souvent, le même macrosystème est observable dans plus d’un microsystème d’un individu, c’est-à-dire qu’ils évoluent au sein de la même matrice culturelle (Tudge et coll., 2009).

Finalement, l’influence du passage du temps s’illustre par la niche écologique nommée

chronosystème (Bukatko et Daehler, 2012). Tudge et ses collaborateurs (2009) divisent le

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(chronosystème). Le premier correspond à ce qui survient au cours d’une interaction spécifique. Le second tient de la continuité des interactions dans le développement de la personne, donc à la fréquence où certaines activités ou interactions surviennent au cours de la vie de l’individu concerné. Le dernier temps réfère au fait qu’un événement particulier, qu’il soit historique ou personnel, peut influencer le système de valeurs de la société ou de l’individu (Tudge et coll., 2009). Le chronosystème des parents séparés est spécifié dans le cas de ce mémoire : on s’intéresse au processus de séparation. Ainsi, il s’agit d’une période de temps assez précise dans la vie d’un couple, bien qu’elle puisse s’échelonner sur plusieurs années, puisque les perturbations débutent bien avant la décohabitation et se terminent plusieurs années après. En ce sens, on peut demander aux participants à la recherche s’ils sont en mesure d’identifier quand leur relation a commencé à se détériorer, le moment de l’annonce de la séparation, comment le temps parental a-t-il été divisé par la suite et plus encore.

Pour arriver à saisir globalement la réalité d’un individu, il faut à la fois tenir compte de ses caractéristiques personnelles que de l’environnement dans lequel il évolue (Drapeau, 2008). Ainsi, l’utilisation de cette approche comme cadre d’analyse pour cette recherche est pertinente, car elle permet de poser un regard large et inclusif sur les différents niveaux de systèmes en jeu en établissant une période précise du chronosystème, soit la séparation parentale. Les événements de la vie et leurs conséquences peuvent se retrouver dans les différentes niches écologiques des individus. Dans le cadre de ce mémoire, la théorie bioécologique de Bronfenbrenner permet d’organiser l’expérience de séparation parentale de parents séparés d’enfants présentant un diagnostic de TDA/H selon les niches écologiques, ce qui permet de faciliter la compréhension globale de la situation complexe vécue par ces familles.

2.3 Analyse des besoins

La notion de besoin n’est pas nouvelle dans la recherche en travail social, mais fait référence à plusieurs conceptions théoriques. Les besoins peuvent être, entre autres, physiques, émotionnels, sociaux et intellectuels et doivent être satisfaits pour profiter pleinement de la vie (Pringle, 1979). Plusieurs définitions de ce que représente un besoin se trouvent dans la

Figure

Tableau 2. Opérationnalisation des concepts de séparation parentale et de besoin.
Tableau 3. Situation conjugale passée.  Nom du  participant  Durée de la relation  (années)  Temps écoulé  depuis la  séparation  (années)  Nombre  d'années de  cohabitation   Nombre  d'enfants avec  l'ex-partenaire  Distance entre le domicile des parents
Tableau 4. Caractéristiques de l’enfant TDA/H.  Nom de  l’enfant  Âge au  moment de  l'entrevue  Âge au  moment de la séparation  des parents  Âge au  moment du  diagnostic de TDA/H  Niveau de scolarité au moment de l'entrevue  Nom du parent
Tableau 5.   Résumé des préoccupations et des besoins dans une perspective bioécologique

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