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Les formes et les déterminants de la ségrégation sociale : le rôle du transport

Section 2. Les déterminants de la ségrégation sociale et le rôle du transport urbain

III- L’impact des politiques de transport urbain sur les structures socio-spatiales

1. L’impact des modes de transport

L’impact des transports urbains et des politiques correspondantes sur la structure sociale de la ville (quand la population est hétérogène) est très peu étudié dans la littérature. En effet, Arnott et MacKinnon (1977)1 s’intéressent aux effets des changements de la structure des coûts des différents mode de transport sur la répartition de la population entre ces modes et indirectement sur le bien être de la population et sa répartition dans l’espace urbain. Dans ce modèle, il y a deux classes sociales, différentiées par leurs revenus et leurs préférences, qui sont définies sur la consommation de logement, de bien composite et le loisir. Les coûts de transport incluent les coûts monétaires et le coût du temps. Il y a quatre modes de transport à distinguer : pédestre, bus (transport public), voiture premier prix et voiture chère. Les auteurs font une distinction attentive entre les coûts et le temps de déplacement spécifique au chaque mode de transport, mais ils ignorent la congestion. Dans le calcul de l’équilibre, chaque catégorie sociale a un revenu fixé, mais

1 Arnott R. J. et Mackinnon J. G., (1977), « The effects of urban transportation changes: A general

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les niveaux d’utilité sont déterminés dans le modèle. Les auteurs calculent également un équilibre compensé, où les revenus des ménages peuvent varier pour atteindre un niveau d’utilité fixé au même niveau qu’au scénario de base.

Dans le scénario de référence, le schéma de localisation correspond au schéma habituel, avec les ménages pauvres situés près du centre, en utilisant le mode pédestre ou le transport public, tandis que les ménages riches sont localisés à la périphérie et utilisent le transport privé (voiture) comme moyen de déplacement. Ce résultat reste très sensible à la structure des coûts de chaque mode de transport, et des changements en termes de coûts monétaires ou de temps peuvent perturber fortement ce schéma de localisation. Par exemple, une forte taxation du parking peut provoquer une partie des ménages riches de se délocaliser vers le centre et de changer le mode de transport, en passant au mode pédestre ou au transport public. Il en résulte, ainsi, une ville structurée en trois zones occupées respectivement par les riches, les pauvres et les riches. D’autres schémas de localisation plus complexes peuvent être générés.

DeSalvo et Huq (1996)1 analysent dans leur article, le lien entre les transports urbains et la structure socio-spatiale de la ville avec la population hétérogène. Les auteurs s’intéressent au lien entre le choix modal et la localisation en fonction des revenus des ménages. Ils définissent les modes de transport en termes de vitesse moyenne et de temps de déplacement associés, les deux étant des variables continues. C’est une modélisation dans l’esprit du concept de mode abstrait de Quandt et Baumol (1996)2. Un mode de transport abstrait est caractérisé par les valeurs des différentes variables qui influencent la désirabilité d’un mode de transport : vitesse, fréquence de service, confort et coût. Ainsi, on peut définir un continuum de modes abstraits, dont une partie peut correspondre à la réalité présente ou future. DeSalvo et Huq utilisent la vitesse, le temps de déplacement et le coût associé comme variables de caractérisation des modes de transport.

Dans ce cadre là, les auteurs montrent que l’effet du revenu sur la localisation des ménages est une question d’amplitude des élasticités revenus du coût de déplacement et de la demande de logement. Si l’élasticité du coût marginal de déplacement est croissante par rapport au revenu et située entre zéro et un et si l’élasticité de la demande de logement est

1

Desalvo J.H. et M. Huq, (1996), « Income, residential location and mode choice », Journal of Urban

Economics, n°40, pp. 84-99.

2

Quandt R. E. et W. J. Baumol, (1966), « The demand for abstract transport modes :Theory and

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constante et supra-unitaire, les ménages riches se localisent plus loin du centre que les ménages pauvres. Si l’élasticité de la demande de logement est entre zéro et un, les schémas de localisation deviennent plus compliqués.

Si le choix modal est introduit, l’élasticité coût de déplacement peut être positive ou négative. Si elle est négative et le logement est un bien normal, les ménages avec des revenus plus élevés se localisent vers la périphérie. Si elle est positive et décroissante par rapport au revenu l’analyse est plus complexe. Pour un certain niveau du seuil de revenu, les deux élasticités peuvent être égales. Parmi des ménages avec des revenus inférieurs (supérieurs) à ce seuil, ceux qui ont les revenus les plus faibles (élevés) seront localisés plus loin du centre ville.

Cette analyse permet d’expliquer les changements des schémas de localisation en temps ou dans l’espace. Par exemple au Etats-Unis, les ménages riches habitaient auparavant dans le centre ville. Avec l’introduction généralisée de l’usage des automobiles, ce schéma a été rapidement changé. Egalement, les schémas de localisation résidentielle diffèrent selon les villes, même si aux Etats-Unis, le schéma prédominant est caractérisé par une localisation centrale des ménages pauvres. Ainsi une explication pour toutes ces variations peut être fournie par la variation temporelle ou spatiale des amplitudes relatives des deux élasticités revenu présentées précédemment.