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Les formes et les déterminants de la ségrégation sociale : le rôle du transport

Section 1. Les formes de la ségrégation sociale et le transport urbain

II- L’écologie factorielle de Shevky, Williams et Bell

2. Dimension sociodémographique

Cette dimension tient compte de l’ensemble de critères qui nous renseignent sur la démographie de la population de la zone étudiée. Parmi ces critères, sans être exhaustifs, on trouve : l’âge, nombre d’enfant par famille, situation familiale, etc.

L’étude du cycle de vie, en relation avec les trajectoires résidentielles, a permis de différencier le centre par rapport à la périphérie (Berry, 1968)1 :

Au centre, on trouve une proportion importante :

• Des personnes qui habitent seules ;

• Des jeunes (étudiants, jeunes actifs) ;

• Des personnes âgées ;

• Des locataires.

Par contre, en périphérie on trouve une proportion importante :

• Des ménages avec enfants ;

• Des propriétaires

Cette distinction de caractéristiques du centre par rapport à la périphérie selon cette dimension sociodémographique nous a donné une structuration en auréoles de Burgess. Certaines villes françaises sont structurées selon cette dimension (Pumain et al, 1998)2.

1 Berry J-L-B, (1968), « Concepts of social space : Toward an urban social geography », in J-L-B Berry et F-

E Horton, Geographies perspectives on urban systems, Prentice Hall.

2

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3. Dimension ethnique

Cette dimension rassemble l’ensemble de critères d’ordre ethnique tels : l’origine ethnique, la religion, la nationalité, etc. La dimension ethnique a donné une répartition polycentrique à la structure de la ville1.

Cette dimension permet également de caractériser les villes :

En France, la localisation des étrangers se fait dans des lieux tels (Pumain et al, 1998)2:

• Les quartiers populaires des centres-villes (anciens quartiers ouvriers qui se dégradent) ;

• Les quartiers péricentraux (banlieues anciennement ouvrières, habitat dégradé, Grands ensembles en périphérie, logements ouvriers près des usines : ex. Mantes la Jolie, usines automobiles Renault et Peugeot) ;

• Les grands ensembles des années 50-60 (zones urbaines prioritaires) : les populations sont souvent mixtes au départ, puis le départ des classes moyennes et des cadres (accession à la propriété).

Aux Etats-Unis, les noirs sont concentrés dans les centres villes dépourvues de services et d’emploi par contre les blancs se localisent dans les périphéries où se concentrent les emplois, les services et aussi des logements spatiaux et espaces verts (Bell, 1953)3.

E. Shevky et W. Bell4, dans leur étude de San Francisco et Los Angeles, analysent la stratification sociale et découvrent l’importance du phénomène ethnique dans la structure spatiale urbaine : la ségrégation se traduisant par des implantations ne correspondant ni au schéma concentrique ni au schéma sectoriel (socio-économique), mais à un schéma nucléaire se superposant aux deux autres.

En résumé, chaque type de dimensions étudiées détermine une structuration selon l’un des modèles de l’école de Chicago. Ainsi :

1 Murdie, R.A. (1969), Factorial Ecology of metropolitan Toronto 1951-1961, department of geography,

University of Chicago, research paper n°116

2 Pumain D. et Saint-Julien T., (1998), Op.cit.

3

Bell W., (1953), Op.cit.

4

• Les indicateurs démographiques ont donné naissance à une auréoles (Burgess) ;

• Les indicateurs de richesse et de professions ont produit une secteurs (Hoyt) ;

• Les indicateurs de statut ethnique ont donné naissa noyaux multiples (Harris et Ullman)

L’écologie factorielle permet une superposition des composantes des trois dimensions étudiées de l’espace urbain

Figure n°2.6 : Dimensions st

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Murdie, R.A. (1969), Op.cit

Modèle spatiale théorique des structures écologiques urbaines

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Les indicateurs de statut ethnique ont donné naissance à une noyaux multiples (Harris et Ullman).

L’écologie factorielle permet une superposition des composantes des trois de l’espace urbain ; ce qui forme l’écologie urbaine

: Dimensions structurantes du modèle de Shevky, Williams et Bell

Source : Murdie (1969)

Modèle spatiale théorique des structures écologiques urbaines

Modèle spatiale déformé de façon à mettre en évidence l’effet produit par les différents réseaux de transport sur

la structure écologique urbaine

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: Murdie (1969)1

Modèle spatiale déformé de façon à mettre en évidence l’effet produit par les différents réseaux de transport sur

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Sur des données américaines, Salins (1971)1 montre, en effet, que la position socio- économique est plutôt distribuée selon un modèle sectoriel. Le modèle concentrique rend compte du statut sociodémographique et familial pendant que le modèle polynucléaire constitue une meilleure schématisation de la distribution des individus en fonction de leur appartenance ethnoculturelle. En conséquence, l’organisation sociale de l’espace urbain naît de la superposition des trois modèles qui rendent compte des trois dimensions structurantes mises en évidence par Shevky, Williams et Bell.

Sur ce modèle, de nombreuses études ont été menées, au cours des années 1960-70, à l’échelle d’autres villes américaines et ont confirmé la présence de ces trois dimensions structurantes. Toutefois, les récentes analyses montrent que ce modèle à trois dimensions rend, plus difficilement, compte de l’organisation sociale de l’espace urbain en raison des changements économiques, démographiques et culturels auxquels sont confrontées les sociétés occidentales depuis les années 1970. [Davies et Murdie (1991, 1994)]2.

Schwabe (2007) 3 évoque les principales transformations suivantes : La désindustrialisation des centres urbains et les politiques de rénovation urbaine ont permis la revalorisation sociale des quartiers centraux de la ville (phénomène dit de « gentrification »). Sur le plan sociodémographique, les fractures familiales ont contribué à l’augmentation du nombre de ménages d’une personne et des familles monoparentales. Aux extrémités du cycle de vie, la faiblesse des taux de fécondité et la prolongation de l’espérance de vie contribuent également à modifier la composition sociale des espaces urbains.

Au terme de cette sous section, nous pouvons dire que l’écologie factorielle a contribué par ses outils à l’éclaircissement des formes de ségrégation sociale dans les espaces urbains. Les travaux de Shevky, Williams et Bell ont permis de montrer l’intérêt de l’analyse factorielle. Un tel intérêt est d’expliquer les configurations socio-spatiales en mettant en évidence les principes de clivage de l’espace étudié. Les auteurs ont pu dégager

1

Salins P.D, (1971), « Household location patterns in American metropolitan area », Economic Geography,

vol. 47, pp: 234-248.

2

Davies W.K.D et Murdie, R.A, (1991), « Consistency and Differential Impact. Urban Social

Dimensionality », Urban Geography, 12 (1), pp: 55-79.

Davies W.K.D., Murdie R.A., (1994), « The Social Complexity of Canadian Metropolitan Areas in 1986: A Multivariate Analysis of Census Data », in Frisken F. (eds.), The Changing Canadian Metropolis. Berkeley, The Institute of Governmental Studies and Toronto: The Canadian Urban Institute, pp: 203-236.

3

Schwabe, M. (2007), « La ségrégation résidentielle dans les plus grandes villes françaises (1968-1999) : quel modèle urbain ? », Revue européenne de géographie, Espace-Société-Territoire, n°398.

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les grandes dimensions de la structuration socio-spatiale. Ces grandes dimensions sont celles du revenu, de la scolarisation et du statut social. Les divers statuts familiaux sont également très prégnants dans l’explication des différenciations (cycle de vie…). La troisième dimension, ethnique, est souvent relativement claire aux Etats-Unis.

III- Les transports urbains et les formes de ségrégation sociale