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II - Collecter des données sur les recours aux soins transfrontaliers

Nous envisagerons successivement les données de nature quantitative et qualitative que nous avons recueillies tant au Laos qu’en Thaïlande.

A/ Une approche quantitative

Le projet de recherche a été élaboré alors qu’aucune information précise ni donnée statistique n’existent sur les recours aux soins des Laotiens en Thaïlande. Un article [Paphassarang et al. 2002] mentionne l’existence de recours transfrontaliers dans la population aisée de Vientiane et de Pakse sans plus de précisions. L’anthropologue Bernard Hours [1997] relève également la pratique lors de son étude sur le fonctionnement du district sanitaire de Pakkading (carte*/C3). Dans ces conditions, après avoir identifié l’offre de soins disponible de part et d’autre de la frontière, le premier objet de l’étude a été de dénombrer les patients transfrontaliers.

Pour ce faire, nous nous sommes attachées à collecter dans un premier temps les registres des patients laotiens dans quelques hôpitaux frontaliers thaïlandais pour vérifier la pertinence de la recherche. Dans un deuxième temps, nous avons procédé à des enquêtes villageoises au Laos. Du point de vue de l’organisation de la collecte des données, il a été nécessaire de solliciter des autorisations de recherche auprès des administrations de chacun des deux pays.

En Thaïlande, les autorisations de recherche ont été obtenues via deux centres de recherche universitaire :

o l’Asian Research Center for Migration (ARCM) de l’Université de Chulalongkorn à

Bangkok

o la Faculté de santé publique de l’Université de Khon Kaen

Au Laos, le projet de recherche a été habilité puis contrôlé par l’Institut National de Santé Publique (INSP) et la faculté des Sciences Médicales à Vientiane.

•••• Les registres hospitaliers en Thaïlande

Dans chaque ville thaïlandaise, nous avons choisi de visiter les structures publiques et privées les plus importantes en taille et en activité. Ainsi, bien que de nombreux cabinets privés de petite dimension existent dans chacune de ces villes, nous avons pris le parti de ne pas tous les visiter afin de pouvoir explorer l’ensemble des zones sélectionnées le long de l’axe frontalier.

Les registres nous ont permis de prendre connaissance des consultations externes et des hospitalisations des patients laotiens dans les cliniques et hôpitaux thaïlandais le long de la frontière, et plus précisément de connaître l’ampleur des recours et leur localisation.

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Chaque hôpital public (de l’hôpital de district aux structures de rang universitaire) est doté d’un bureau des registres qui traite informatiquement les renseignements concernant les patients pris en charge dans les services externes et en hospitalisation. Ceux-ci sont compilés par année sous

forme de table Access ou Excel et contiennent généralement les informations suivantes pour

chaque patient : identifiant, date de naissance, adresse, sexe, profession, date de la consultation, diagnostic du médecin (plus ou moins détaillé) et coût total des soins. L’information ‘diagnostic’

est codée en fonction de la 10ème Classification Internationale des Maladies (CIM 10).

Le travail de terrain a débuté en février 2005 à Nong Khai et s’est achevé en mars 2008 dans la région de Chiang Mai / Chiang Rai au Nord-Ouest de la Thaïlande. Nous avons tout d’abord testé notre méthodologie de recueil des données à l’hôpital provincial de Nong Khai du fait de la proximité avec Vientiane, où nous étions basés. Puis progressivement, nous nous sommes rendus à Udon Thani, Khon Kaen, missions toujours entrecoupées de retour au Laos. Quand notre méthodologie fut enfin affinée et notre connaissance du fonctionnement des hôpitaux thaïlandais mieux maîtrisée, nous avons procédé au reste du terrain dans le Sud-Est de la

Thaïlande (septembre 2005) puis le Nord-Ouest (février-mars 2008)58. L’intervalle de temps

pour l’étude de cette dernière zone s’explique par des problèmes d’autorisations.

Trois assistants de recherche différents nous ont aidés à collecter les registres dans les différents hôpitaux thaïlandais. Même si certains personnels hospitaliers parlent anglais, la plupart des agents assignés aux bureaux des registres ne parlait que le thaïlandais, une traduction était donc souvent nécessaire.

Nous avons visité les hôpitaux et cliniques de 11 villes thaïlandaises plus ou moins proches de la frontière, comme l’indique la carte ci-dessous.

Figure 16 - Villes thaïlandaises enquêtées

58 Nous avons fait le choix de ne pas consulter les registres des hôpitaux de Bangkok pour deux raisons principalement : le nombre d’hôpitaux publics et privés dans la capitale thaïlandaise est très élevé ce qui aurait nécessité un long travail de collecte. De plus, les Laotiens qui se rendent à Bangkok, peu nombreux en comparaison de ceux qui se rendent dans les structures frontalières, sont souvent issus des classes aisées de Vientiane et consultent par conséquent essentiellement dans les grandes structures privées. Or, par expérience (nous avons mené des enquêtes dans certains de ces hôpitaux dans le cadre d’une recherche sur le tourisme médical), nous savions qu’il était très difficile d’obtenir des informations dans ces structures.

L’échelonnement dans le temps de la collecte des données se traduit par un défaut de synchronisation : pour certains hôpitaux, l’analyse des données est conduite seulement pour les années 2003-2004 alors que pour d’autres les analyses sont possibles jusqu’à l’année 2007. En outre, le contenu des registres collectés s’est révélé hétérogène d’une structure à l’autre, les données sur les adresses sont, excepté pour l’hôpital provincial de Nong Khai, très imprécises et par conséquent inexploitables. Ce point constitue sans aucun doute un défaut de notre recherche, nous aurions souhaité travailler plus précisément sur les lieux de provenance des patients.

Concernant les structures privées, bien que nous ayons recueilli l’information sur les effectifs de patients transfrontaliers pour une ou plusieurs années consécutives, les données complémentaires (adresse, sexe, date de naissance, diagnostic, etc.) sur les caractéristiques de ces patients se sont révélées impossibles à obtenir. Malgré la détention d’autorisations de recherche obtenues via les universités thaïlandaises, nous ne sommes jamais parvenus à débloquer cette situation de barrage, identique d’une structure privée à l’autre. L’argument de discrétion médicale vis-à-vis des patients était avancé pour justifier la rétention d’informations.

Malgré les difficultés rencontrées avec les interlocuteurs du privé, il convient néanmoins de préciser que le déroulement de cette partie du terrain côté thaïlandais a été relativement aisé du fait de l’accueil qui nous a été réservé dans chacune des structures visitées, de la rapidité d’obtention des informations et enfin du fait que les données de registres nous ont été transmises par support numérique, prêtes à l’emploi et nous économisant ainsi une longue et fastidieuse phase de saisie des données.

•••• Les enquêtes au Laos

A défaut de toute donnée statistique existant au Laos, il nous a fallu rechercher les informations concernant les recours aux soins des Laotiens en Thaïlande en fonction de nos objectifs énoncés précédemment.

Nous avons pour cela procédé à des enquêtes par questionnaire auprès des ménages vivant dans les couples frontaliers exposés précédemment : 27 villages ont été sélectionnés à Vientiane et 6 en province.

Le village, unité administrative de base au Laos, est doté d’une existence juridique et est représenté par un chef de village. Cet échelon fait sens aussi bien dans les espaces ruraux que dans les zones urbaines ; c’est la raison pour laquelle nous avons choisi le village comme l’unité spatiale de référence de notre recherche.

La première enquête a été menée à Vientiane au début de l’année 2006 et sur ce modèle, nous avons ensuite poursuivi les enquêtes provinciales de novembre 2006 à février 2007.

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Figure 17 - Localisation des enquêtes villageoises au Laos

- Enquête domiciliaire de santé à Vientiane : enquête modèle

L’enquête conduite en février-mars 2006 à Vientiane a été réalisée dans le cadre du programme Urbanisation, gouvernance et disparités spatiales de santé à Vientiane issue d’une collaboration entre

l’Institut de Recherche pour le Développement59 (IRD) et le laboratoire Espace, Santé et

Territoire (LEST) de l’Université Paris Ouest Nanterre. Ce projet sur le thème « ville et santé » prolonge une recherche réalisée à Ouagadougou au Burkina Faso qui a servi de référence à l’enquête de Vientiane.

Plusieurs recherches de géographie de la santé ont été développées dans le cadre de ce programme parallèlement à l’étude sur les recours transfrontaliers :

o une recherche sur les états de santé de la population de Vientiane en lien avec le

niveau d’urbanisation menée par Julie Vallée60

o une étude sur l’offre de soins et les recours aux soins associés dans la capitale

laotienne par Virginie Mobillion61

L’approche commune des trois recherches réside dans l’étude de l’organisation de l’espace urbain comme source d’inégalités sanitaires : en quoi l’état de santé de la population de Vientiane et les recours aux soins reflètent des disparités socio-territoriales au sein de la ville ? La localisation des enquêtes s’est conformée au découpage établi par l’ensemble des membres de

l’équipe62 : 27 villages de la capitale laotienne répartis en trois strates d’urbanisation ont ainsi été

sélectionnés et étudiés comme l’indique la carte ci-dessous.

59 unité de recherche 178 « Conditions et Territoires d’Emergence des Maladies »

60 Julie Vallée, 2008. Urbanisation et santé à Vientiane (Laos) : les processus à l’origine des disparités spatiales de santé dans la ville.

61 Virginie Mobillion, 2010. Une géographie du laisser-faire : la gouvernance des soins à Vientiane (titre provisoire).

Figure 18 - Localisation des 27 villages enquêtés à Vientiane

Trois types de questionnaires ont été établis (annexe 5 à 7). Le questionnaire ‘ménage63’ auquel

répond le chef de famille à son domicile permet d’évaluer le niveau socio-économique et culturel du foyer et de cerner d’un point de vue général les pratiques en matière d’hygiène et de soins. A l’issue de cette première étape, un adulte de plus de 35 ans et/ou un enfant âgé de 6 mois à 6 ans sont choisis au hasard pour la poursuite de l’enquête. Ils se déplacent alors vers un centre de santé mobile crée par l’équipe de recherche pour répondre respectivement à un questionnaire individuel ‘adulte’ ou ‘enfant’, tous deux très similaires du point de vue du contenu des questions.

Différentes sections ont été créées au sein des questionnaires pour chacun des trois axes de la recherche énumérés ci-dessus. Il convient de préciser que le volet ‘recours aux soins’ repose

62 Comme les différents périmètres administratifs et de planifications urbaines de Vientiane (« 100 villages », « 189 villages », « Capitale de Vientiane ») étaient peu pertinents en termes de niveau d’urbanisation, l’équipe de recherche a établi des critères d’urbanisation visant à définir la zone d’étude. Un traitement statistique par Classification Ascendante Hiérarchique (CAH) portant sur treize variables d’urbanisation a permis de différencier les villages urbains des villages ruraux et constituer ainsi le périmètre « urbanisé » de la ville. Ce périmètre comprend 148 villages, dans lesquels nous avons choisi 27 villages à enquêter répartis en 3 couronnes d’urbanisation : une couronne très urbaine, une couronne intermédiaire et une couronne moins urbanisée. La méthode de la stratification et du choix des villages est détaillée dans le travail de thèse de Julie Vallée ainsi que dans un article rédigé par les membres de l’équipe [Vallée et al. 2007]. La méthode pose néanmoins certains problèmes quant au choix des variables pour définir les strates d’urbanisation. En outre, nous verrons au cours de l’analyse que le facteur urbain est un facteur moins discriminant que d’autres déterminants pour l’étude des recours transfrontaliers.

63 Dans le cadre de l’enquête, l’expression ménage désigne un groupe de personnes qui habite sur un même terrain (une ou plusieurs maisons) ou à l’intérieur d’un immeuble (appartement) et qui partage les repas ensemble. Le ménage au Laos dépasse très fréquemment la famille nucléaire, plusieurs générations vivant sous le même toit auxquelles il faut parfois ajouter des membres de la famille élargie : neveu, nièce, cousin, cousine, etc.

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exclusivement sur les déclarations des patients relatives à leurs pratiques thérapeutiques, tandis que le volet qui traite des états de santé, combine les déclarations des enquêtés sur leurs modes de vie (alimentation, consommation d’alcool, cigarettes, etc.), leur perception en matière de santé ainsi que les examens médicaux et dentaires dont ils ont été l’objet.

Le volet « recours aux soins en Thaïlande » comporte 19 questions (annexe 6) :

la première (Q.206) permet de distinguer parmi les adultes enquêtés ceux qui sont déjà allés

en Thaïlande pour des problèmes de santé de ceux qui n’y sont jamais allés. C’est à partir de cette information que nous serons en mesure de calculer les taux de recours transfrontaliers des habitants de Vientiane.

Les deux questions suivantes (Q.207 ; Q.208) tendent à déterminer si les individus qui ne

sont jamais allés en Thaïlande pour se soigner, envisagent de le faire à l’avenir.

Les questions qui suivent (à partir de Q.209), permettent d’avoir une vision plus fine des

mobilités. Les informations collectées concernent dans l’hypothèse d’une pluralité de recours, le dernier et portent sur :

la fréquence des recours transfrontaliers

la/les pathologies de recours

le type de structures visitées en Thaïlande

les personnes ayant donné des conseils sur les structures en Thaïlande

les moyens de transports utilisés

la satisfaction des intéressés

D’autres questions (Q.214 et 215) ont pour objet le nombre de consultations effectuées au

Laos ayant précédé la décision d’aller se soigner en Thaïlande. A partir des réponses obtenues, nous pourrons replacer le recours en Thaïlande dans un contexte plus large, celui de l’itinéraire thérapeutique dans son ensemble depuis le début des symptômes jusqu’à la guérison éventuelle.

Ce panel de questions permet donc d’avoir une information détaillée et synthétique sur les recours transfrontaliers au départ de Vientiane et d’enrichir les connaissances sur ce comportement thérapeutique.

D’une façon plus générale, les questionnaires ont permis de collecter des informations qui, répondant à nos hypothèses de recherche, constituent les facteurs déterminants des recours transfrontaliers :

l’âge, le sexe, la profession, l’ethnie, le revenu des personnes enquêtées

les habitudes des individus enquêtés en matière de pratiques transfrontalières pour des

activités diverses telles que du commerce, des achats, du tourisme,...

la présence de membres de la famille en Thaïlande

le contexte familial dans lequel évolue la personne enquêtée, le niveau de vie général du

ménage et son réseau social.

La traduction des questionnaires en laotien s’est révélée être une tâche difficile : il a fallu en effet combiner nos objectifs de recherche avec des intitulés de questions faciles d’accès qui plus est dans une langue où le vocabulaire technique est relativement restreint. Un test préalable a été réalisé auprès d’une dizaine de ménages afin de vérifier la pertinence et la clarté des questions, la manière dont elles étaient reçues et perçues par les répondants, etc.

Malgré les précautions prises par l’équipe au cours de la conception de l’enquête, celle-ci présente néanmoins des biais, relatifs par exemple aux refus de certains ménages de participer à

l’enquête64. En outre, il est probable que certaines questions aient été mal interprétées par les

enquêtés donnant lieu par conséquent à des réponses approximatives.

Durant les deux mois de l’enquête conduite à Vientiane, 2950 ménages ont été visités et interrogés à leur domicile dans les 27 villages sélectionnés ; suite à cette première étape, 2042 adultes et 1650 enfants se sont rendus aux centres mobiles de santé pour répondre aux questionnaires individuels et faire l’objet d’un examen de santé.

- Les enquêtes villageoises en province

Les enquêtes provinciales concernent, elles, uniquement le volet relatif aux recours transfrontaliers. Elles sont conduites sur le modèle utilisé à Vientiane dans une forme toutefois simplifiée (annexe 8).

Nous avons en effet gardé un seul questionnaire, dont le contenu a été intégralement repris afin de pouvoir comparer le poids de chacun des déterminants au sein des différents espaces transfrontaliers étudiés. Il a été complété avec le chef de ménage à son domicile et dans lequel la question des recours transfrontaliers est abordée à l’échelle familiale : lorsqu’un membre du ménage a été soigné en Thaïlande dans le passé, le tableau situé à la dernière page du questionnaire est complété en ligne. L’opération est répétée pour chacun des individus composant le ménage ayant déjà reçu des soins en Thaïlande. Dans les 6 villages sélectionnés en province, l’ensemble des ménages a été enquêté (soit entre 63 et 123 ménages).

Tableau 4 - Tableau à compléter par les personnes ayant déjà eu recours en Thaïlande.

Nom Relation au chef de ménage

Sexe Age Combien de fois?

Date/année du dernier

recours

Où le patient est-il allé se soigner? Ville, type et nom

de la structure Pour quelle raison de santé ? symptômes, diagnostic 1 2 3

Le nombre de villages enquêtés en province est relativement plus faible qu’à Vientiane. Nous sommes conscients que l’échantillonnage choisi présente de ce fait certaines limites alors qu’il aurait été intéressant d’élargir l’étude à plusieurs autres villages. Les raisons de ces restrictions tiennent d’une part des moyens matériels limités dont nous disposions et d’autre part au régime des autorisations.

En ce qui concerne les autorisations, les enquêtes au Laos requièrent l’approbation de l’administration centrale, en l’espèce l’Institut National de Santé Publique à Vientiane, suivie de l’accord des autorités provinciales puis des autorités du district et enfin des chefs de villages concernés. Ce protocole doit être scrupuleusement respecté afin de pouvoir réaliser le travail de collecte de données. Or ces formalités sont fastidieuses et consommatrices de temps, c’est la raison pour laquelle nous avons choisi de limiter nos études à un ou deux villages par province

64 Bien que le nombre de refus ait été relativement faible (moins de 9% des adultes et des enfants sélectionnés et 3% des ménages), ils constituent néanmoins un biais dans la représentativité de l’échantillon. On a observé que les hommes, les jeunes et les personnes provenant d’un ménage aisé avaient eu plus tendance à refuser une participation à l’enquête [Vallée 2008].

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afin de ne pas perdre trop de temps dans des procédures administratives et mettre ce temps à profit pour les enquêtes à proprement parler.

Enfin, la question des enquêteurs recrutés localement a contribué à ce choix : travailler avec plusieurs administrations de district nécessite de recruter des enquêteurs dans chaque bureau afin de ne pas froisser les sensibilités locales. Or former des enquêteurs en peu de temps est un véritable défi : il convient en effet de présenter les objectifs globaux de la recherche, de présenter les questionnaires, d’exposer la manière dont les questions doivent être posées, etc. Il nous a donc semblé préférable de concentrer nos efforts avec une équipe réduite pour un suivi plus efficace. En province, nous avons obtenu la participation de trois fonctionnaires du Ministère de la Santé laotien : Dr Vilavanh Sayaseng, assistante de recherche de l’INSP, a supervisé l’ensemble des terrains en province ; deux enquêteurs, recrutés sur place au sein du bureau provincial ou de district de santé, étaient formés quelques jours avant le début des enquêtes.

L’approche chiffrée des mobilités de santé a constitué le premier volet de notre terrain au Laos et l’apport des enquêtes réalisées en plusieurs points frontaliers réside dans la quantification du phénomène transfrontalier, jusque là connu qu’au travers des récits de patients. Cette approche fournit en outre les éléments numériques pour établir des points de comparaison entre les différents points de passage sélectionnés.

Toutefois l’emploi des questionnaires présente des biais et ne permet guère d’outrepasser le stade descriptif du phénomène ; pour parvenir à saisir les processus au cœur de la pratique transfrontalière, il nous semble nécessaire de compléter par une approche qualitative.

B/ Et une approche qualitative

Après avoir appréhendé de manière synthétique et abstraite les flux, il convient de s’interroger concrètement sur le cheminement individuel du patient, son itinéraire thérapeutique et son parcours géographique : tout d’abord, la recherche d’un hôpital où il est susceptible de recevoir des soins, la décision de s’y rendre, la recherche du moyen de transports adéquat et l’organisation de son séjour suppose des moyens intellectuels et matériels et de nombreuses