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Identification et classement

Dans le document Changement lexical en nez-percé (Page 141-144)

3. Lexicalisation des tropes : métonymies et métaphores

3.1. Définitions de la métonymie, de son sous-type la synecdoque et de la métaphore

3.2.1. Identification et classement

La métonymie en tant que figure vive est identifiée d'après les critères sémantico-référentiels et syntaxiques suivants : la figure engendre une rupture de combinaison syntactico-sémantique dans la prédication, une distorsion dans le genre ou le nombre du syntagme nominal ou une incohérence d'ordre logique dans la relation attributive (Lecolle 2001). La métonymie est également identifiable par l'incohérence avec les connaissances extra-linguistiques ou situationnelles. Par exemple, la phrase en (210) illustre la rupture syntactico-sémantique entre le sujet les stations et le verbe se

frotter. Soit :

(210) Il a neigé sur les Pyrénées. Les stations se frottent les mains297.

La typologie des métonymies est effectuée d'après celle de Bonhomme (2006) qui repose sur les transferts de fonctions qu'opèrent les métonymies entre les composantes d'un domaine notionnel. Selon l'auteur, c'est le critère relationnel, centré sur les différentes sortes de contiguïtés en jeu au sein d'une cotopie donnée et à l'origine des liaisons métonymiques, qui permet de constituer une typologie. Deux types fondamentaux se dégagent, celui des métonymies statives (qui ont pour support une relation stative) et celui des métonymies actantielles (qui ont pour support une relation dynamique). Les premières correspondent aux relations situatives, les secondes correspondent aux relations transformationnelles qui génèrent une séquence associative puissante, relativement développée et orientée (par exemple, action-agent de l'action-lieu de l'action-temps de l'action). Les métonymies statives sont classées en fonction des types suivants : elles sont datatives

296 Nous expliquons en quoi la mention des effets discursifs nous paraît pertinente dans l'analyse du trope, bien que cela soit ponctuellement une analyse discursive et non primordialement sémantique.

(concomitance temporelle), locatives (coprésences spatiales), matérielles, évaluatives, possessives et existentielles. Les métonymies actantielles sont quant à elles classées dans les sous-types suivants : métonymies du cadre actantiel (spatial et temporel), de la cause, de la source, de l'instrument, du procès, de l'efférence298, et du but. La phrase en (211)299 exemplifie les métonymies

statives de la coprésence spatiale (dont le sous-type est celui du contact ou coprésence spatiale proche). Le syntagme blouses blanches est employé à la place de l'expression linguistique relative au médecin. La métonymie repose sur la relation entre le médecin et la blouse blanche qu'il porte ou ne porte pas. Comme le mentionne Bonhomme (2006), le classement de blouse blanche parmi les métonymies de la coprésence spatiale (de sous-type contact proche) tient au fait que l'habit est en contact physique avec le médecin. Ce dernier peut ne pas la porter, c'est pourquoi la relation entre le syntagme blouse blanche et médecin est une relation de contiguïté étroite et non d'inclusion (ce type de métonymie est classé dans Le Guern (1973) comme une synecdoque de la partie). La phrase en (212)300 exemplifie les métonymies actantielles de l'efférence : santé, relatif au résultat du processus

actantiel de boire est employé à la place de l'expression linguistique relative à l'eau minérale qui apporte la bonne santé. Soit :

(211) Trois blouses blanches entourent maintenant le malade. (212) Buvez la santé. Arkina.

Les synecdoques sont des sous-types de métonymies car elles entrent dans un cadre cotopique et génèrent des transferts contiguëls à l'intérieur de ceux-ci (Bonhomme 2006). Leurs classements dans un sous-type particulier se justifie par le fait que les synecdoques se conforment à une hiérarchisation : les transferts ont lieu du méronyme vers l'holonyme ou l'inverse. Le sous-type de la synecdoque a lui-même deux sous-types : celui de la synecdoque particularisante (dans lequel le méronyme est employé à la place l'holonyme), et celui de la synecdoque généralisante (dans lequel l'holonyme est employé à la place du méronyme). Par exemple, le méronyme pinces de la synecdoque particularisante en (213)301 est relatif à une partie du crabe. Il est employé à la place du

nom relatif à ce dernier. En (214)302 l'holonyme Indonésie de la synecdoque généralisante est relatif

298 Réalisation ou résultat du processus actantiel.

299 Extrait du journal VSD du 10.04.2003 dans Bonhomme (2006). 300 Extrait du journal L'Hebdo du 06.02.1997 dans Bonhomme (2006). 301 Exemple du journal VSD du 12.08.2004 dans Bonhomme (2006). 302 Extrait du journal L'Hebdo du 28.12.2004) dans Bonhomme (2006).

à tout le territoire dans lequel a eu lieu le tsunami et non à la zone spécifique de Sumatra touchée par le cataclysme. Soit :

(213) Des centaines de millions de « pinces » sont en marche à l'île Christmas. (214) L'Indonésie a été frappée de plein fouet par le tsunami.

D'autres classements des métonymies et synecdoques ont été établis. Celui de Bonhomme se rapproche de ceux de Greimas (1966), Bremond (1973) et Fillmore (1968 et 1976), typologies qui reposent sur les relations syntagmatiques profondes dans la syntaxe actantielle. Pour Bonhomme, il y a autant de relations cooccurrentielles (ou logico-casuelles) entre deux pôles cotopiques que de types métonymiques. Les études de rhétorique ont donné lieu à des classements hétérogènes. Fontanier (1821) distingue les métonymies de la cause, de l'instrument, de l'effet, du contenant, du lieu, du signe, du physique, du maître ou du patron et de la chose. Pour Bonhomme, cette typologie fait intervenir différents traits : relationnels, chronologiques, thématiques et variationnels et regroupe des sous-catégories différentes réalités (par exemple, la métonymie du signe chez Fontanier doit être traitée comme un symbole). Le courant cognitiviste adopte une définition élargie de la métaphore en intégrant ce qui correspond à des métonymies et des synecdoques. Kövecses (2010) a établi des classements de ce type. Ce dernier, classe parmi les métaphores conceptuelles les métonymies et synecdoques dans lesquelles l'expression linguistique relative à une chose indique le matériau de la chose et vice-versa. Il en va de même pour la catégorie qu'il nomme contenu/contenant. Pour Lakoff et Johnson (1980) la métonymie est une sous-classe de la métaphore ; ce classement qui privilégie le concept au détriment de l'expression linguistique ne tient pas compte des transferts cotopiques et allotopiques qui distinguent les métonymies des métaphores.

Le classement des métonymies et synecdoques en nez-percé est effectué d'après la typologie de Bonhomme (2006).

Soit les exemples en nez-percé (215) et (216)303304 : (215) hi-túúqi-se keléémet S3SGINTR-fumer-PRS pipe « Il fume la pipe. » (216) cóqoy-cóqoy trou.d'un.objet-RED « tipi »

L'exemple (215) est une métonymie stative de la coprésence spatiale, plus précisément une métonymies du contact. Le nom keléémet, « pipe », désigne le tabac, un élément coprésent avec la pipe. L'exemple (216) est une synecdoque lexicalisée particularisante. Le nom cóqoycóqoy est relatif au trou d'un tipi. La réduplication dénote le tipi dans son ensemble.

3.2.2. Métonymies relatives aux choses, aux actions, aux individus, et au cadre temps spatio-

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