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Associations sémiques internes

Dans le document Changement lexical en nez-percé (Page 178-182)

3. Lexicalisation des tropes : métonymies et métaphores

3.3. Métaphores

3.3.2. Mécanismes sémantico-référentiels de la métaphore

3.3.2.3. Associations sémiques internes et externes aux métaphores

3.3.2.3.1. Associations sémiques internes

Les unités lexicales d'une métaphore sont liées par les associations sémiques (ces dernières sont étudiées d'après Greimas 1966 et Pottier 1992). Elles s'établissent en fonction du type de métaphore402.

En nez-percé, l'analyse des métaphores de spatialisation permet d'étudier de telles associations. Elles reposent sur des transferts / inanimé / vers / animé / ou / inanimé /. Le dérivé a un sème de spatialisation. Ce type de métaphore est très fréquent en nez-percé et dans d'autres langues sahaptiennes comme le yakima (Jansen 2010). En (338), le verbe watím, « être hier » est nominalisé par suffixation du nominalisateur du lieu -pamá et manifeste également le suffixe du locatif. Soit :

(338) watím-pamá-pa

être.hier-NZR.lieu-LOC « avant-hier »

En nez-percé, les sèmes relatifs à des positions statiques métaphoriques sont associés aux sèmes de mouvement (par exemple, le sème / haut / est associé à / mouvement vers le haut / et est incompatible avec / mouvement vers le bas /). Les sèmes relatifs à des délimitations métaphoriques sont associés aux sèmes / intérieur / ou / extérieur /, ainsi qu'aux sèmes relatifs aux mouvements (par exemple celui de sortir ou de rentrer). Les liens entre les sèmes de délimitation,

401 Les liens sémiques entre les unités lexicales ne sont pas strictement restreints aux unités lexicales des métaphores. 402 Les types de métaphores ont été mentionnés dans l'identification et le classement des métaphores.

d'intérieur/extérieur et de mouvement sont dus au fait que la délimitation impose, selon Lakoff et Johnson (1980)403 un intérieur (ou contenu intérieur) borné et un extérieur (ou contenant extérieur)

non borné à des noms relatifs à des concepts, des sentiments ou des indications spatio-temporelles. Du point de vue formel, les noms (auxquels sont éventuellement suffixées les marques casuelles de l'allatif, de l'ablatif ou du locatif) sont relatifs aux positions statiques et les verbes sont relatifs à une position statique ou à un mouvement (d'après la distinction entre verbe statique et verbe dynamique).

Soit les exemples (339) à (350)404. Soit :

(339) hi-q̓uyím-naqaw-nikika héwlekip-x ʾááqam-kin̓ikááy-x

S3SGINTR-grimper-X-PST espace-ALL chose.en.haut-un.choix.parmi.deux-ALL « Il grimpa jusque dans l'espace, jusqu'au paradis. »

(340) hi-teqíík-se ʾéénim-kin̓ike-k S3SGINTR-descendre-PRS chose.au.dessous-un.choix.parmi.deux-ALL « Il descend en enfer. » (341) hi-pááy-ca ʾéénim-kin̓ike-kin̓ix S3SGINTR-arriver-PRS chose.au.dessous-un.choix.parmi.deux-ALL « Il arrive de l'enfer. » (342) hi-teqíík-se ʾááqam-kin̓ikááy-kin̓ix S3SGINTR-descendre-PRS chose.en.haut-un.choix.parmi.deux-ABL « Il tombe du paradis. » (343) Ø-sex̣ním-leyléék-se S3SGINTR-automne-se.déplacer.vers.l'intérieur-PRS « On entre dans l'automne. »

(344) Ø-ʾeliw-leyléék-se

S3SGINTR-hiver-se.déplacer.vers.l'intérieur-PRS « On entre dans l'hiver. »

(345) Ø-ʾiyéé-leyléék-se

S1SGINTR-relatif à l'eau.l'eau-se.déplacer.vers.l'intérieur-PRS « Je coule. »

(346) Ø-ʾipsí-leyléék-se tóqox̣-x

S1SGINTR.à.pied-se.déplacer.vers.l'intérieur-PRS canyon-vers

« Je rentre dans le canyon. »

403 On convoque ponctuellement les travaux cognitivistes de Lakoff et Johnson (1980).

404 Les exemples sont aussi bien des figures vives que lexicalisées car nos propos concernent les premières et les secondes.

(347) kúús-ʾimíít-kin̓ix hi-ʾáát-im

eau-chose.dans-ABL S3SGINTR-aller.dehors-PST

« Il sont sortis de l'eau. » (348) Ø-ʾiyéé-léht-se

S1SGINTR-relatif.à.l'eau-sortir.de-PRS « Je sors de l'eau. »

(349) Ø-nikt-láhtq̓i-ya

S1SGINTR-creuser-faire.une.action.vers.le.dehors.de.l'eau-PST « Je l'ai fait traîner en dehors de l'eau. »

(350) Ø-ʾiyéé-lúú-se

S1SGINTR-relatif.à.l'eau-être.dans.l'eau-PRS « Je suis dans l'eau. »

Les spatialisations métaphoriques du paradis405 et de l'enfer sont construites à partir des

noms ʾááqamkin̓ikááy406, « paradis » et ʾéénimkin̓ike, « enfer ». Ces noms ont respectivement les sèmes / chose au dessus / et / chose en dessous /. Les sèmes des unités lexicales des métaphores (339) à (342) sont liés à ces deux sèmes. En (339) les sèmes / mouvement vers le haut / de q̓uyím, « grimper » sont liés à / chose en dessus / et en (340) et (342) les sèmes / mouvement vers le bas / de teqíík, « descendre » à / chose en dessous /. En (341) le verbe pááy, « arriver » a quant à lui le sème / mouvement /. Les marques de l'allatif -x et de l'ablatif -ki̓nik des quatre métaphores indiquent également la direction du mouvement.

De (343) à (346) le sème de délimitation des morphèmes sex̣ním, « automne », eliw, « hiver », tóqox̣, « canyon » et iyéé, « relatif à l'eau » est lié à / mouvement vers l'intérieur / par

léyléék, « faire quelque chose vers l'intérieur ». De (347) à (349) celui des morphèmes kúús, « eau »

et ʾiyé, « relatif à l'eau » et nikt, « creuser » est associé à / mouvement vers l'extérieur / par l'intermédiaire de ʾáát, « aller dehors », léht, « sortir de » et láhtq̓i, « faire une action vers le dehors ».

L'exemple (350) illustre l'association entre le sème de la délimitation et ceux de la localisation et de l'intérieur par le support formel de lúú, « être dans » suffixé à ʾiyé, « dans l'eau ».

Les sèmes des unités lexicales se classent plus précisément en fonction des relations équipollentes (Coseriu 1964) détaillées dans les tableaux ci-après.

405 Les concepts de paradis et l'enfer ont été importées par les protestants à partir de 1860. 406 La glose de ces noms est située à la suite.

Tableau 16: Analyse sémique 1

(Tableau des sèmes associés à / chose au dessus / et / chose en dessous /)

/ chose au dessus

/

/ chose en dessous / / mouvement vers le

haut / / mouvement versle bas /

q̓uyímnaqaw ʾááqamkin̓ikááyx « grimper au paradis » + - + - teqíík ʾéénimkin̓ikek, « descendre en l'enfer » - + - + pááy ʾéénimkin̓ikekin̓x « arriver de l'enfer » - + - - teqíík ʾááqamkin̓ikááykin̓ik « descendre du paradis » + - - +

Tableau 17: Analyse sémique 2

(Tableau des sèmes associés à / dedans /)

/ dedans / / mouvement vers

l'intérieur / vers l'extérieur // mouvement

sex̣nímleyléék, « entrer dans l'automne » + + -

ʾeliwleyléék, « rentrer dans l'hiver » + + -

kúúsʾimíítkin̓ix ʾáát, « sortir de l'eau » - - +

niktláhtq̓i,

« traîner en dehors de l'eau »

- - +

ʾiyeyléylek, « couler » + + -

ʾiyééléht, « sortir de l'eau » - - +

ʾiyéélúú, « être dans l'eau » + - -

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