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4.5 Vers une Haute Ecole pédagogique

« Après avoir connu un développement relativement lent au temps des Ecoles normales, les formations à l’enseignement à l’école enfantine et à l’école primaire en Suisse vivent depuis une décennie des bouleversements importants en phase avec le mouvement international. » Prérisset Bagnoud, 2010, p. 6

C’est à partir du début des années 1990, et, plus particulièrement, à la suite de la publication par la CDIP des « Thèses relatives à la promotion des Hautes Ecoles pédagogiques », en 1993, que le débat sur la formation des enseignants s’accélère.

En 1990 déjà, un projet de loi sur la formation des maîtres est proposé au Grand Conseil qui refuse l’entrée en matière. La proposition de créer un Institut de formation des maîtres réunissant les EN et le SPES est refusée par les députés. Selon Roland Rapaz, ancien responsable du BUROFCO (le bureau EVM pour la formation continue) :

La HEP peut être vue comme une seconde réforme de la formation des enseignants.

L’EN avait une « posture ancienne », basée sur la didactique, les activités plus manuelles. Avec le développement de la profession et des sciences de l’éducation, il est apparu comme nécessaire d’introduire plus de psychologie et de pédagogie en plus des didactiques. Il y avait la volonté de sortir des « recettes pédagogiques », afin de développer la pratique réflexive. (entretien du 18 février 2010)

Pour Françoise Baudat, ancienne directrice de l’EN et ancienne directrice adjointe HEP : Dans les années 1990, on assiste à une volonté politique d’élever le niveau scolaire, ainsi que d’élever le niveau de formation des enseignants. En effet, le métier se complexifie (prise en compte de l’interculturalité, nouveau système éducatif, etc…).

Dès le milieu des années 1990, on s’est aperçu des limites du modèle de formation de l’Ecole normale : cette formation n’était plus adéquate par rapport au développement du métier et des sciences de l’éducation. Les prescriptions de la CDIP et les travaux de la FAPSE ont eu une influence prépondérante sur le contexte vaudois. Tout le monde partait d’une bonne volonté, mais les résistances ont été importantes à l’intérieur des différents Etablissements de formation des maîtres. (entretien du 6 septembre 2010)

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En outre, il faut rappeler que : « la conception globale de l’école vaudoise, promue par la mise en œuvre d’EVM, exige une adaptation de la formation initiale du corps enseignant. En ce sens, le projet de loi sur la HEP fait partie intégrante d’EVM. » (Noverraz, 2008, p.145).

D’après Roland Rapaz :

La réforme scolaire EVM pousse à restructurer le secondaire I et les études gymnasiales. Ce processus a une influence sur la formation des enseignants, car les plans d’études et la structure du système scolaire sont adaptés aux nouvelles approches pédagogiques prônées par la réforme. (entretien du 18 février 2010)

Ainsi, c’est en 1996 que le Département de l’Instruction publique et des cultes (DIPC) entreprend une procédure d’étude. Elle permet de :

Rassembler près de deux cents personnes issues des milieux de l’enseignement, de la formation et du monde professionnel en vue d’élaborer le profil d’une HEP vaudoise dans l’esprit des Thèses relatives à la promotion des hautes écoles pédagogiques (…) de la CDIP. (Noverraz, 2008, p. 103)

Le Groupe de coordination – composé de directeurs d’établissements scolaires ou de gymnases et de collaborateurs et cadres des Etablissements de formation des maîtres (EFM) – publie en 1998 un rapport sur « la formation des enseignants en HEP ; conception et description ». L’objectif général de la formation est présenté de la manière suivante : « former des professionnels de l’enseignement qui soient des praticiens réflexifs. » (Groupe de coordination, 1998, p. 10).

Pour atteindre ce but, le Groupe de coordination délimite 14 compétences réparties en 4 catégories de situations, afin d’y lier huit axes de formation. Il est intéressant de relever que ce document présente le premier référentiel de compétences du projet HEP. Mais nos investigations ne nous permettent pas de savoir ce qui est advenu de celui-ci. En effet, par la suite, un autre référentiel est utilisé dès 2001 dans les premières années de la HEP. En outre, nous constatons que ce sont dans les huit axes de la formation initiale que s’inscrivent notamment les cours de sciences de l’éducation, de didactique et de culture générale ou les stages. Il s’agit des suivants : axe académique, axe didactique, axe pédagogique, axe psychologique, axe sociologique, axe éthique, axe praxéologique et axe heuristique. Il est à

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noter que ces axes, même s’ils n’apparaissent plus comme tels quels dans la suite du projet HEP et dans la présentation du premier programme de formation influencent tout de même la suite de la conception de la formation. Il en va de même avec les 14 compétences qui se retrouvent au nombre de 18 dans le premier référentiel officiel de la HEP.

Concernant l’organisation des formations, on y découvre une formation de 180 crédits pour les enseignants des cycles primaires, une formation de 180 crédits pour les maîtres secondaires généralistes et une formation de 120 crédits pour les maîtres semi-spécialistes (porteurs d’une licence universitaire).

Toutes les filières sont découpées en trois phases : introduction à la profession, professionnalisation, spécialisation. Il apparaît pertinent de mettre en évidence que plusieurs principes de formation seront aussi gardés lors de la conception de la HEP : la création d’une culture commune entre tous les ordres d’enseignement (notamment durant le semestre d’introduction), la possibilité d’entrer à la HEP à chaque semestre (ce qui induit une semestrialisation des cours), le principe d’un stage long en fin de formation, une durée de 6 semestres pour la formation des enseignants primaires et une durée de trois semestres pour la formation des enseignants du secondaire porteurs d’une licence.

Ainsi, ce rapport du Groupe de coordination pose des jalons importants pour la suite des réflexions.

En 1999, un avant-projet de loi sur la HEP est déposé par le Département de la formation et de la jeunesse (DFJ). Dans ce document, nous ne trouvons plus trace d’un référentiel de compétences ni d’axes de formation. Par contre, les trois phases de formation sont maintenues pour toutes les filières. De plus, une nouvelle filière apparaît, celle de maître d’une discipline spéciale (arts visuels ou musique). La formation des enseignants spécialisés est également englobée dans les réflexions et intégrée aux filières HEP (comme c’était déjà le cas dans le rapport de 1998). En outre, les buts généraux et les principes de la formation semblent être en adéquation avec le rapport de 1998.

L’avant-projet de loi fait aussi référence aux recommandations de la CDIP. De plus, différents concepts sont retenus pour la conception et la mise en œuvre du projet HEP. Citons à ce titre

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les suivants : professionnalisation et intégration des sciences de l’éducation et de la recherche dans la formation initiale des maîtres, tertiarisation de la formation professionnelle, principes de la formation d’adultes, meilleurs liens entre la théorie et la pratique, certification par le système de crédits ECTS, développement des formations continues et secondes.

Concernant la recherche, elle est inscrite comme une des composantes de la HEP. Les fonctions assignées à la recherche sont les suivantes :

- Elaborer des savoirs sur la profession et le fonctionnement de l’école (…) ; on peut parler ici de recherche fondamentale ;

- développer des moyens, des outils didactiques ou pédagogiques (…) ; on peut parler ici de recherche-développement ;

- contribuer à la formation de futurs chercheurs ;

- élaborer des hypothèses de travail pédagogique et didactique à vérifier sur le terrain par les enseignants ; il s’agit là de recherche-action. (DFJ, 1999, p. 39)

4.6 La création de la Haute Ecole pédagogique (2001) : une