• Aucun résultat trouvé

La grille d’analyse

6. Analyse de l’évolution des formations et de leur organisation

6.2 Constats entre les différents modèles

Au regard des résultats qui précèdent, il est intéressant de mettre en exergue les constats suivants.

6.2.1 Conception générale de la formation et savoirs professionnels

La proportion de cours en lien avec les savoirs professionnels constitue, dans les trois modèles de formation présentés précédemment, la plus grande partie des cours dispensés en EN ou en HEP. Néanmoins, cette proportion diminue avec la HEP version 1 qui met plus l’accent sur des contenus de culture générale, dans des modules intitulés compléments académiques. Par contre, avec la HEP version 2, les cours de culture générale sont nettement réduits. Néanmoins, nous pouvons faire l’hypothèse que certains cours de didactiques débutent par quelques remises à niveau, directement en lien avec des connaissances générales.

La proportion générale de stages augmente entre l’Ecole normale et la HEP et reste stable entre les deux versions de la HEP.

! '$!

Quant à la structure de la formation, on passe progressivement d’une forme quasiment scolaire relativement aux horaires et aux programmes à une forme plus universitaire (calendrier académique, modules, semestrialisation des cours, etc…).

De plus, la durée de la formation augmente, entre l’EN et la HEP, de 2 à 3 ans.

6.2.2 Les trois plans d’études

Les plans d’études varient considérablement entre les instituts de formation. Avec l’EN, on découvre un plan d’études fondé sur des objectifs d’acquisition de connaissances et un programme plus ou moins détaillé pour chaque cours. Avec la HEP version 1, le plan d’études présente un rapide descriptif du module et des UF, ainsi que les habiletés visées par le cours.

Pour sa part, le plan d’études de la HEP version 2 et son descriptif des modules indiquent les compétences qui vont être travaillées et évaluées durant le module de formation, les UF et les principaux thèmes qui seront abordés.

6.2.3 Les référentiels de compétences

Progressivement, on constate une utilisation toujours plus marquée du terme de

« compétence ». Ainsi, la HEP version 2 semble être l’institution qui exploite le mieux ce concept et qui l’utilise dans les divers contextes de la formation. Ce qui démontre une évolution du processus de professionnalisation (cf. revue de la littérature & Barbier, 2006).

Il est intéressant de relever que les trois instituts de formation possèdent un référentiel de compétences. Néanmoins, son utilisation et son agencement diffèrent et démontrent une évolution de sa conception :

• A l’EN, le référentiel de compétences comporte 26 compétences qui servent à l’évaluation des stages pratiques. Aucune référence n’est faite aux compétences dans le plan d’études.

! '%!

• A la HEP version 1, le premier référentiel est composé de 18 compétences et certaines d’entre elles se retrouvent mêlées avec les habiletés visées du plan d’études. Le deuxième référentiel comporte 11 compétences qui sont définies en niveaux de maîtrise. Ce document est surtout utilisé pour l’évaluation des stages.

• Avec la HEP version 2, le référentiel est composé de 11 compétences-clés, déclinées en composantes et en niveaux de maîtrise, qui servent aussi bien à l’évaluation de la formation pratique que pour les fondements et l’évaluation des cours théoriques.

En outre, le référentiel de compétences des deux versions de la HEP est identique pour toutes les filières de formation. Il s’agit d’un principe intéressant qui permet de créer une culture professionnelle commune entre les différents ordres d’enseignement.

Comme relevé dans la revue de littérature, dans une culture de professionnalisation, le référentiel de compétences doit être la pièce centrale de dispositif de formation. Avec la HEP version 2, on a l’impression que c’est le cas. En effet, de nombreuses références dans le plan d’études et l’évaluation des modules ainsi que des stages font référence aux compétences-clés, aux composantes et/ou aux niveaux de maîtrise.

Quant aux compétences-clés et aux finalités de la formation, on peut relever que cette dernière est de plus en plus orientée vers un ordre curriculaire : le but étant de comprendre une situation professionnelle et non obligatoirement de la résoudre ou de réussir (cf. partie 3.3). On peut donc en déduire que la pratique réflexive se développe de plus en plus.

6.2.4 Vers une alternance théorie-pratique

Concernant l’articulation entre la théorie et la pratique, à l’instar de toutes les institutions de formation des maîtres, cette thématique semble très présente aussi bien à l’EN que lors de la conception de la HEP ou de sa refonte (voir à ce propos le point 3.1 et les entretiens).

Cependant, d’après Vanhulle & al. (2007) : « la traditionnelle coupure entre la théorie et la pratique tombe au rang des simplifications abusives. L’alternance nous renvoie à la définition même de la notion de pratique. » Et d’ajouter : « l’opposition théorie-pratique renvoie à une certaine conception qui réifie la théorie comme une entité distincte et autonome

! '&!

de l’agir humain, alors que celui-ci est inséparable des construits sociaux et individuels qui l’animent. » (p. 10).

Cette relation entre les pôles théorique et pratique de la formation tend à plus s’articuler entre les différents modèles analysés. En effet, partout les étudiants sont amenés à concevoir et à animer des situations d’enseignement-apprentissage et à en rendre compte à leurs formateurs de l’EN ou de la HEP. Cependant, la HEP version 2 introduit un dispositif permettant aux étudiants d’aborder des problématiques rencontrées en stages et à les analyser au regard des cours théoriques. Il s’agit des séminaires d’intégration qui ont lieu tout au long de la formation. La HEP 1 avait introduit un tel séminaire, mais seulement à la fin du semestre d’introduction à la profession.

Comme le constatent Vanhulle & al. (2005), l’alternance est influencée par quatre grandes conceptions d’organisation :

Un modèle de type applicationniste où la théorie précède la pratique ; un modèle acculturateur faisant avant tout la part belle à l’immersion sur le terrain ; un modèle intégrateur précoce organisant des allers-retours réguliers entre les lieux de cours et de stage que des démarches d’analyse de pratique viennent soutenir ; et un modèle intégrateur par étapes où la formation théorique est censée soutenir l’entrée progressive dans une pratique guidée puis davantage autonome, la théorie étant susceptible de se laisser infléchir et questionner par des problématisations issues des situations de pratique. (p. 11)

Ces différentes organisations de l’alternance sont intéressantes et nous renvoient aux institutions analysées ou évoquées dans ce travail. Ainsi, selon nous, l’EN se situe davantage dans un modèle applicationniste de l’alternance. Quant au modèle acculturateur, celui-ci peut se rapprocher du SPES, où tous les étudiants étaient engagés comme « enseignant-stagiaire » durant leur année de formation. Avec la HEP, nous passons aux modèles intégrateurs. Les deux versions de la HEP proposent une entrée par étape dans la formation pratique, tout en ayant la théorie comme soutien et en organisant des allers-retours réguliers entre les stages et cours. Par contre, nous ne disposons pas d’information concernant l’organisation de séminaires d’analyse de pratique. Nous faisons l’hypothèse pour la HEP 1 que certains cours d’exploitation des stages d’introduction (soit les ateliers pédagogiques) et quelques cours de

! ''!

développement personnel sont consacrés à cette approche. Avec le dispositif étendu des séminaires d’intégration, la HEP 2 améliore la relation entre les deux pôles de formation et permet aux étudiant de construire leurs compétences professionnelles en favorisant un

« dialogue permanent » entre la théorie et la pratique. Ce type d’alternance s’inscrit donc davantage dans le modèle intégrateur par étapes.

6.2.5 Le titre délivré et l’attachement institutionnel

Pour ce qui est du titre délivré, on constate une évolution de la dénomination. Ainsi, à l’EN, les étudiants obtiennent un brevet de capacité cantonal. Avec la HEP 1, les étudiants reçoivent un diplôme de maître généraliste. La HEP 2 quant à elle octroie un bachelor en enseignement préscolaire et primaire. L’utilisation du terme de « bachelor » marque clairement un rapprochement du processus de Bologne et des exigences de la CDIP. De plus, ce nouveau titre est reconnu au plan national.

Concernant l’attachement institutionnel, le Département de la formation, de la jeunesse et de la culture (DFJC) marque clairement une rupture avec l’évolution du projet HEP. D’un établissement de formation de degré secondaire II, voire « secondaire II+ » (comme qualifié par les pairs CDIP lors de leur première visite), on s’achemine vers un institut de formation de degré tertiaire, rattaché à la Direction générale de l’enseignement supérieur et aux affaires universitaires. En effet, l’EN, puis la HEP dans ses premières années sont placées sous la direction de l’ancien Service de l’enseignement secondaire supérieur et de la formation (SESSFO). Puis, la HEP est placée sous la responsabilité des affaires universitaires. Nous pouvons ici faire un parallèle avec les constats de Perrenoud (2000) cités dans la partie 4.6.5.

Pour lui, les HEP doivent se développer de manière indépendante de l’administration si elles veulent pouvoir être reconnues comme des institutions universitaires. Le projet HEP conçu en étroite collaboration entre le Département et les collaborateurs des anciens EFM a eu des difficultés à se positionner dans ce modèle universitaire.

! '(!

6.3 Le rôle des exigences nationales et internationales