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Le handicap d’être reconnu handicapé

Résumé du chapitre

2. La personne et le handicap

2.2.1 Le handicap d’être reconnu handicapé

Titre quelque peu provocateur même si là encore, il n’est pas lieu de penser que le handicap ne doit pas être nommé et discuté, bien loin de nous cette pensée qui se verrait alors peu réaliste dans une mise au travail d’identification, d’acceptation et d’intégration voire de résilience à mener.

118 Gardou Charles (sous la direction de), Le handicap par ceux qui le vivent, Collectif Reliance

(Paris: Erès, 2009).

119

Miller Alice, C’est pour ton bien (Paris: Aubier Montaigne, 1998).

120 Pernot-Masson Anne-Catherine, Le handicap d’être reconnu handicapé, Psychopathologie &

Pour autant, il est de bon ton de rappeler que lorsqu’un professionnel indique sur l’une des feuilles « arc en ciel » à la MDPH121

, une synthèse de ses observations, il est co responsable d’une conséquence probable portant sur le narcissisme de l’enfant, de sa fratrie et de ses parents122

(Pernot-Masson, p 31, 2011).

De la même façon, l’orientation qui en découle du côté des enfants ou des adultes suscite une réflexion car « la notion de handicap confère aux personnes

mentionnées une identité dont elles peuvent avoir du mal à se défaire, le moment venu»123 (Pernot-Masson, p 31, 2011).

Enfin, si c’est sur le nom et prénom d’une personne que la MDPH va décider d’une orientation, c’est toute une constellation familiale qui va être (ou qui est, souvent) touchée ; n’accueillir dans les établissements spécialisés que la personne concernée en écartant ou minimisant tout partenariat avec la fratrie et les parents, c’est absolument regrettable.

C’est pour cette raison qu’au SESSAD, la particularité FAMILLE prend une place importante tant par la présence des éducateurs chaque semaine au domicile que par les entretiens psychologiques familiaux réguliers avec un accueil approprié aux besoins et aux demandes : seul, en binôme ou sous forme de thérapie familiale.

Et si la famille a besoin d‘être entendue et surtout écouter , il va de soi que l’enfant en situation de handicap a aussi cette possibilité d’exprimer ses sentiments ou ressentiments à l’égard de sa fratrie et /ou de ses parents ; l’objectif étant de faire circuler la parole, sans jugement, autour d’un sujet de prime abord (le handicap) qui amène les auteurs à considérer chaque sujet (personne) ayant le droit de dire, d’être et de penser.

Le handicap existe, certes, mais il ne doit pas devenir « l’arbre qui cache la forêt » humaine, émotionnelle et relationnelle.

Chaque personne est unique et une vigilance s’impose à l’identifier.

C’est pourquoi poser sous un vocable « les Handicapés » tous les handicaps confondus avec des lois au demeurant nobles : loi de 1975, loi de 2002-2 loi de 2005 participe souvent à stigmatiser les différences plus qu’à les singulariser. Différence qui plus est, pour les troubles mentaux par exemple, voulue standardisée124 au profit d’un diagnostic identifié alors que ce qui demeure primordial reste d’identifier la personne.

121

Maison Départementale des Personnes Handicapées

122 Pernot-Masson Anne-Catherine, Le handicap d’être reconnu handicapé. 123

Ibid.

124

American Psychiatric Association, DSM-IV-TR Manuel diagnostique et statistique des troubles

« Le handicap porté comme un étendart125 (Flaschner, p 197, 2009) occupe une place prédominante faisant ainsi, insidieusement glisser à la première place celui-ci en modifiant les priorités jusqu’à nommer les personnes concernées, « d’usagers ».

Certes, une fois encore, ce mot présente, de façon implicite, un intérêt sans nul doute conséquent mais ce qui reste dans l’oreille après l’avoir prononcé repose tellement sur une signification accordée aux choses abîmées qu’il en devient désuet voire insupportable et pourtant, il est utilisé avec véhémence sans concevoir parfois, combien il peut impacter négativement.

Or, si nous savons que certaines adaptations financières, matérielles, éducatives, pédagogiques, thérapeutiques et professionnelles soutiennent et permettent d’envisager un meilleur développement psychologique ; force est de constater aussi que parfois la négligence du collectif au profit du singulier induit, malencontreusement, une seule et unique caractérisation126 (Boivin, Chaumont, p 116, 2009).

Ce fait est dommageable car il incline une direction qui oblitère des facteurs humains tant pour la personne concernée par le handicap que pour ses parents et sa fratrie ; l’expérience subjective d’un handicap reste unique et viscéralement appréhendée en fonction du système familial, lui-même composé de plusieurs représentations et sensibilités différenciées.

Accompagner en l’occurrence, un enfant, « relevant de la MDPH » en négligeant cette particularité identitaire et singulière tout en oubliant comme cela arrive parfois dans les IME127, d’associer les familles (parents et fratrie) revient à s’interdire toute empathie avec elles, démarche tout à fait inconcevable avec l’ACP.

C’est pour cette raison qu’il s’agit de récuser tant la vision généraliste que « la

relation métallique qui met au second plan, la souffrance, la jouissance et la réciprocité » 128 (Gardou, p 121, 2005) au profit d’ « un développement d’une

anthropologie du très proche »129. (Gardou, p 197, 2005).

Alors, « comment soutenir les personnes en situation de handicap dans leur

processus d’humanisation afin d’étayer in fine, leur processus de subjectivation » ? 130 (Scelles, p 14, 2007)

Envisager une place non pas d’handicapé mais bien une place de personne semble être un des préalables fondamentaux à cette démarche.

125

Gardou Charles (sous la direction de), Le handicap par ceux qui le vivent.

126

Ibid.

127 Institut Médico Educatif 128

Gardou Charles, Fragments sur le handicap et la vulnérabilité: pour une révolution de la pensée

et de l’action.

129 Ibid. 130

Ciccone Albert, Korff-Sausse Simone, Missonnier Sylvain, Scelles Régine (Sous la direction de),