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explorer des ressources et faciliter dans leur expérimentation, une meilleure intégration amenant un changement de point de vue et de

comportement.

La rencontre humaine effective nourrit donc l’intériorité de l’écouté, elle participe à un échafaudage structurel car « c’est au contact d’autrui que l’on devient soi »

282

(Chalvin, p 48, 2007), ainsi, en construisant un cadre et un contexte suffisamment favorables au lâcher prise psychique et physique, l’inscription dans une qualité de lien éveille la vie intrapsychique de l’enfant

L’A.C.P. se poursuit par des expériences partagées, sous forme d’instances d’auto- ajustement qui permettent d’enrichir l’intersubjectivité et de développer la subjectivité ; l’une et l’autre se complétant, mutuellement.

7.2.3

L’ETA

Nous ne reprendrons pas ici la présentation de cette épreuve de personnalité énoncée dans le chapitre V, nous nous attarderons sur la valeur ajoutée de l’ETA dans son efficacité à mettre en relief rapidement la problématique de l’enfant, exposée par lui-même et nous justifierons à l’aide du travail empirique, l’efficacité d’un tel support.

Les mécanismes psychologiques principaux sollicités seront présentés et illustrés pour signifier les effets positifs produits tant sur les processus cognitifs que sur la santé mentale.

Cette partie fera référence à l’ouvrage de Benoît Fromage283

et à d’autres écrits complémentaires.

Nous les avions déjà cités dans leur partie conceptuelle, nous les reprenons avec les illustrations des quatre situations.

281 Rogers Carl, Psychothérapie et relations humaines : Théorie de la thérapie centrée sur la

personne (ESF, 2009).

282

Chalvin Marie Joseph, Apprendre à s’aimer avec ou sans les autres (Paris: Eyrolles, 2007).

283 Fromage Benoît, L’Epreuve des Trois Arbres Bilan de situation, accompagnement et

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7.2.3.1 L’identification

L’identification correspond au fait d’établir une ressemblance entre soi et un support, ici l’arbre.

Ceci est possible car des correspondances spontanées existent entre éléments appartenant à ces deux ensembles distincts que sont l’humain et l’arbre. Le vocabulaire témoigne de ces homologies.

Il est question ainsi du pied, du tronc ou de la tête de l’homme comme de l’arbre. L’identification opère tout au long du développement humain, elle est nécessaire à la construction identitaire de l’enfant, de l’adolescent et du petit d’homme devenu adulte. Le risque est la confusion des identités. Avec l’arbre, le cheminement est réversible.

Il est possible d’être à un moment donné comme un arbre et (re)devenir un humain.

Ce travail de réflexibilité facilite une ré- élaboration qui s’active encore plus avec l’énonciation du discours à la première personne du singulier.

Des métaphores initiales, symboles ludiques primaires et tout à fait conscients qui incitent l’auteur à s’identifier à l’arbre en faisant « comme si », nous passons progressivement aux « cryptophores » Piagétiennes correspondant plus à des symboles secondaires non conscients permettant d’exprimer des intérêts situés dans la profondeur de l’être.

Les récits des cahiers de l’arbre illustrent ce constat.

Jade « Les nuits, par les fenêtres de sa chambre, il a peur ».

Claire « la graine a été plantée dans une bonne terre» (en off, « on ne va pas à

lui, lui faire vivre l’horreur de commencer la vie dans une terre monstrueuse (sic) »).

Gabin « C’est une forêt dans le monde de … »(ville où habite l’enfant).

Maud « L’arbre il vit en Amérique. Il veut être loin de ses parents car ils sont pas

occupés de lui, des fois, il doit pleurer, c’est comme moi … ».

L’identification est réparatrice, restauratrice, en soi, elle est fondatrice d’un remaniement de la santé mentale ; entre mêmeté et ipséité, l’identification développe par l’intersubjectivité engagée, la capacité à devenir soi, un soi qui peut penser, choisir et s’engager.

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7.2.3.2 La projection

Dans le voyage arborescent que propose l’ETA, dans la suggestion à la verticalité et aux questions faisant appel à ce que l’arbre désire et à ce qu’il refuse, la projection devient une opportunité expérientielle pour passer du langage botanique au discours subjectif.

Nous sommes d’emblée dans le creuset d’une introduction de la botanique en lien au psychologique.

La projection sur l’arbre, c’est le déplacement et la localisation de « bouts de

moi » sur des supports externes sans que la personne en ait forcément une

conscience explicite.

La projection dans l’ETA permet de recourir à ces possibilités expressives selon une logique subjective graduelle.

Arbre de cauchemar de Gabin

« ….les autres arbres rigolent de lui, il n’est pas comme les autres… ».

Les travaux sur l’arbre en psychologie ont essentiellement portés sur cet aspect projectif284et sur le postulat que « le test de l’arbre n’est rien d’autre que le

support de la projection, l’objet jouant le même rôle que le miroir qui ne fait que renvoyer l’image projetée en lui » 285

(Fernandez, p 11, 2008).

Maud : « Il (l’arbre) est pas gentil, il fait toujours des bêtises et il est toujours puni

dans sa chambre » ; l’arbre est l’occasion d’exposer des attributs et des contenus

affectifs ; il reflète une subjectivité qui s’exprime par la projection.

Les questions redondantes du protocole fluidifient les mécanismes de résistance et précisent de quelles façons les ressentis impactent sur les actions « Il casse les

assiettes exprès pour embêter ...» ; la projection est entière, l’arbre est personnalisé

voire introjecté.

284 Koch Karl, Le test de l’arbre. 285

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Claire : l’arbre a besoin « du soleil, de la pluie et beaucoup, beaucoup, beaucoup,

beaucoup, d’amour… tiens…. c’est comme moi…».

La projection dans l’Epreuve des trois Arbres est sollicitée en deux temps, d’abord dans la réalisation des dessins puis dans l’élaboration d’une histoire, celle-ci formant un espace projectif secondaire, une méta-projection.

La situation est l’exposé des forces en présence, leur mise en forme d’abord, leur approfondissement, leurs interrelations et leur inscription dans un avenir ensuite. Par forces, il faut entendre « le désiré et le refusé » encore appelés « pôles » et si le positif est reconnu comme ressource, le négatif l’est tout autant et c’est à partir de cette équilibre (+ et -) recherché que la psychologue va s’employer à accompagner l’enfant.

7.2.3.3 La fidélisation aux dessins et aux récits

L’un des intérêts majeurs dans l’épreuve des Trois Arbres, c’est que la clinicienne ne va pas chercher à interpréter avec sa propre subjectivité ce qui a été dessiné ou relaté, elle va suivre, de façon séquentielle et méthodologique (étape par étape, sur deux phases) ce qui vient de l’enfant, de sa propre subjectivité , à lui.

L’objectif de cette démarche efface l’idée d’un diagnostic à rechercher où à confirmer, il s’agit dans cette dynamique, de mettre en relief ce qui émane des cognitions et émotions de l’enfant.

Travail rigoureux qui implique un dépassement à supposer où à penser à la place de l’autre ; l’ETA rappelle une équité d’une situation de personne à personne dont l’une s’exprime et l’autre recueille cette expression.

Dans la forme enfantine présentée, graphique et discursive, ce sont les tracés écrits et verbaux qui sont repris, pas de jugement ni d’interprétation mais plutôt un « reliage » à des associations exprimées spontanément pour optimiser l’analyse finale.

La centration est bien sur la personne, ses modalités d’ajustement et sur son potentiel évolutif, la thérapeute écrit au nom de l’enfant et non pas, en son nom.

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7.2.3.4 L’objectivation des besoins

L’épreuve des Trois Arbres vient endiguer la spécificité du non jugement et de l’accompagnement centré sur la personne qui rappelle ce truisme que la personne se situe bien au centre du dispositif avec une psychologue qui insuffle, propose et invite , sans jamais penser à la place de l’autre, tout en pensant et repensant sa place, à elle, dans cette relation.

Si l’objectivité dans le soin ne semble pas être totalement possible par le contre transfert286 incontournable que peut représenter une relation thérapeutique et la semi directivité qui porte et oriente les séances ; il s’avère que l’ETA balise les éventuels glissements à l’interprétation abusive et ramène à tendre vers plus d’objectivation.

L’exercice des synthèses intermédiaires des deux grandes parties du protocole propres à l’ETA ponctué d’une synthèse générale maintient un cap objectif dans l’accompagnement thérapeutique.

Le recueil de données tend à porter la parole de celui qui s’est exprimé, à sa façon, sans déformation.

Le travail de « reformulation »287 essentiel par l’entretien d’explicitation288 participe à la garantie que ce qui a été compris, il s’agit de faire correspondre à l’expression du message, l’approbation de l’exactitude de l’adéquation entre ce qui a été dit et ce qui en a été compris

7.2.3.5 Les bilans de situation

Le bilan de situation recouvre une particularité novatrice, il n’a pas un but de mentionner ce qui ne va pas et qui confirmerait la situation psychopathologique de l’enfant, il a comme spécificité de se référer à une situation actuelle, vue par l’auteur des récits et des dessins, l’enfant étant le témoin principal de son histoire et de la perception qu’il en fait.

L’objectif étant de favoriser l’expression subjective sur un mode analogique, il ne s’agit aucunement de réaliser une évaluation.

L’ETA n’est pas focalisée sur la reproduction d’un ou de plusieurs arbres mais sur des orientations, les tendances internes, les visées qui s’expriment au long du protocole.

286 Searles Harold, Le contre- transfert, Folio essai (Paris: Gallimard, 2005). 287

Bandler Richard - Grinder John, Les secrets de la communication.

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Au cours des bilans de situation, la psychologue recueille les expressions de l’enfant et réfléchit à la prise de sens des contenus, elle en fait une photographie d’un instant T et non une fin en soi289

, ce qui rajoute au diagnostic devenu obsolète, un pronostic tout aussi désuet.

En résumé, il convient de fidéliser les réponses apportées aux questions principales : que fait l’arbre et comment le fait-il ? La vigilance s’imposant sur l’utilisation des catégories botaniques et le maintien sur un plan descriptif.

7.2.3.6 La place accordée au négatif

L’arbre dans l’ETA est une occasion de donner forme à ce que la personne refuse sans bien souvent en avoir conscience ou du moins partiellement.

Le refusé est le plus difficile d’accès dans un mode d’expression conventionnel. L’arbre facilite la formalisation à travers l’arbre négatif choisi dès l’étape 2 (A- phase I) et l’arbre de cauchemar qui apparaît dans l’étape 10 (AC, phase II). Les pôles expriment des tendances antagonistes qui peuvent être notées dans les matrices d’explicitation (E5, 6, 10) aux niveaux (e) et (f), cet antagonisme favorise la projection.

L’arbre mythique élaboré à partir de l’arbre de rêve (AR) et de l’arbre de cauchemar (AC) amplifie ces tendances qui ont pour effet d’être articulées.

Une valeur est souvent double. Son affirmation génère simultanément une contre valeur qui peut être exposée ou demeurer implicite. La valeur ne fonctionne jamais au singulier mais par paires, la valeur affichée et son opposé. La constitution des valeurs subjectives dérive de la polarisation du monde par la personne.

Au regard des quatre protocoles analysés, qu’il s‘agisse d’un passé traumatisant (Gabin), d’une croissance perturbée par le contexte de vie » (Jade) d’une colère (rébellion) éloquente (Maud) ou de la croyance « d’une affiliation à un monstre (Claire), nous prenons conscience que c’est en favorisant l’évocation du négatif et en accompagnant son intégration que la mise au travail a pu être effective et l’avenir suscité, évoqué et envisagé.

Gabin a pu ainsi accepter l’intérêt des bizarreries, Jade a pu nommer l’indicible, Maud a découvert combien son arbre était (trop) petit et Claire a pu révéler cette monstruosité qu’elle voyait en elle.

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Lutter contre le négatif, le repousser ou le combattre ne fait qu’augmenter les forces contraires ou les résistances insolubles à la problématique repérée ; au contraire, intégrer le négatif pour finir par l’accepter libère les tensions et participe à un lâcher prise mental et émotionnel induisant des ouvertures au possible, jalonnées sur un horizon temporel.

Dans la démarche d’ACP renforcée par l’ETA, cette phase accordée au négatif est essentielle, elle a participé pleinement à la libération des blocages repérés sur un plan psychoaffectif.

La colère de Maud reçue sans jugement, lui a permis de s’auto canaliser et lui a procuré, avec l’ETA l’envie de grandir « à cause des touts petits arbres que je ne

veux pas qu’ils restent petits».

Le fantôme que Claire voulait tuer, ramené face à elle, a facilité une moindre dissociation psychique et une reconnaissance de ses pensées hallucinatoires qu’elle a pu contrôler.

Les bizarreries sans cesse évoquées par Gabin dans ses dessins et ses récits au cours de l’ETA ont fini par être perçues comme un atout pour pouvoir s’affranchir et dépasser son mutisme.

Quant à Jade, les peurs nocturnes exprimées dès les premières étapes ont réduit dans un premier temps, l’éprouvé ; elle a pu ainsi s’affranchir d’un d’une autre conviction, celle d’un bien être possible, même la nuit.

Il va de soi que les réponses données au cours du protocole ont été notées comme des éléments centraux, repris et accompagnés a posteriori de l’ET

L’acceptation du négatif est une ouverture à l’autonomisation, paradoxalement, c’est en intégrant le négatif que la personne réussit à s’en détacher, cela peut aussi faciliter l’accès à la dynamique des processus cognitifs et amoindrir les effets néfastes liés à la santé mentale et surtout, l’intégration du négatif suscite l’avenir ainsi, l’effet statique disparaît au profit de l’établissement d’une subjectivité qui se mobilise.