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Photo, Françoise Crasnier Ile Maurice, Mars

4. L’arbre en psychologie

De tous les temps, l‘homme a trouvé un intérêt pour l’arbre, tant dans sa forme, sa vocation, sa présentation réelle ou fictive, son allure frêle ou robuste, en quelque sorte, pour toute la projection, le symbolisme et la création qu’il procure.

4.1 L’intérêt de l’arbre en psychologie

L’arbre revêt une importance dès le début des « Ecritures », « toutes les ethnies

qui se sont intéressées à l’arbre en ont vu des ressemblances avec l’homme, tous deux vivent debout avec une longévité plus ou moins raccourcie en fonction des évènements de la vie »183 (De Castilla, p 6, 2000).

« L’arbre de la vie, de la science, l’axe du monde, ses fruits furent ceux de

l’Eden », c’est ainsi que « plus le symbole est archaïque et profond, plus il devient universel » 184(De Castilla cite Jung, p 6, 2000).

4.1.1

Les concordances entre l’arbre et l’homme

Les mots qui caractérisent l’arbre sont parfois ceux empruntés pour décrire l’être humain ; inspiration par des poètes, « le temps, ici, n’est pas une mesure.

Un an ne compte pas : dix ans ne sont rien. Etre artiste, c’est ne pas compter, c’est croître comme l’arbre qui ne presse pas sa sève, qui résiste, confiant, aux grands vents du printemps, sans craindre que l’été ne puisse pas venir. L’été vient. Mais il ne vient que pour ceux qui savent attendre, aussi tranquilles et ouverts que s’ils avaient l’éternité devant eux »185

.

Le « langage arbre », dans une intentionnalité de similitudes, permet ainsi d’évoquer une approche plus fine de l’être humain et de rendre à l’arbre toute sa grandeur vitale.

Leurs branches deviennent des « mains », leur sommet devient une « tête » et leurs racines des « pieds » ; « on leur trouve un air amical ou menaçant, on les

croit capables de souffrir si on les blesse, ils sont censés aimer qu’on leur parle, qu’on les caresse… »186

(Hallé, p 35, 1999).

183

De Castilla Denise, Le test de l’arbre Relations humaines et problèmes actuels (Paris: Masson, 2000).

184

Ibid.

185

Rilke Rainer Maria, Lettres à un jeune poète (Paris: Gallimard, 2006).

Ainsi, le cœur d’un arbre, l’œil désignant un bourgeon, la cicatrisation, la plaie, les feuilles malades, le tronc traumatisé, « les cernes de croissance »187, évoquent les similitudes du végétal avec l’humain.

4.1.2

L’arbre et son environnement

« La forêt est à l’image de l’humanité » 188(Koch, p 13, 1978).

Les arbres ne s’adaptant pas à leur environnement peuvent mourir de maladie, de blessures et de faiblesse mais si lumière, espace et soins leur sont prodigués, ils vivent robustes, majestueux et« en bonne santé », longtemps.

Abandonnés, ils peuvent mourir mais aussi, devenir, naturellement, des « résilients » puisant dans leurs racines, la sève et la force suffisantes pour contourner un obstacle et poursuivre avec une forme originale, leur évolution singulière réussissant « à vivre avec » un traumatisme.

4.1.3

Un symbole digne d’intérêt

Au-delà, du rôle primordial que jouent les plantes et les arbres tant dans la nature que pour l’Homme, ils sont aussi vécus comme les représentants de la vie ; l’arbre est devenu pour beaucoup, évocateur d’une solitude bienveillante, de silence, de méditation et parfois, de sérénité.

Les arbres représentent une symbolique, ainsi, la force du chêne par exemple est comme une double colonne vertébrale pour l’homme, adossé à ce tronc séculaire, à cette grandeur immobile, aux odeurs parfois subtiles, il insuffle énergie et quiétude à la fois.

Le chêne qui représente la solidité suprême se traduit en latin par le même mot « force »: robur, symbolisant autant la force morale que physique. Il est le symbole de l'arbre de vie, du salut ainsi que des figures allégoriques de la Force mais aussi, de la Prospérité.

L’arbre peut refléter la force d’un chêne centenaire mais aussi, la souplesse d’un roseau qui lui confère une habilité remarquable, celle de plier sans se casser (La Fontaine, 1621-1695).

Par ailleurs, à lui seul, l’arbre représente les quatre éléments que sont l’eau, le feu, la terre et l’air.

Il est à la fois aérien, terrestre et souterrain.

187

Hallé Francis, Playdoyer pour l’arbre (Arles: Actes sud, 2005).

188

4.1.4

Le regard porté sur l’arbre

Le regard qu’il soit posé sur les racines, le tronc, la frondaison ou les branches revêt un symbolisme particulier qui peut rappeler une romance tranquille avec des odeurs sensorielles renouvelées ou des souvenirs de noël en famille face à un sapin aux apparences initialement tristes, se transformant progressivement « en

beau sapin, roi des forêt ».

Dans le regard porté sur l’arbre, la relation devient pragmatique avec un vécu extérieur et intérieur qui s’entrecroise, porté par des notions spatio-temporelles qui se chevauchent.

Le mystique affleure partout comme dans l’arbre « vivant et pensant car l’âme

est du domaine du ressenti, expression de la permanence de l’être »189. (Bachelard, p. 214, 2004)

L’attitude perceptive sur l’espace extérieur induit donc une sorte d’introspection libérant une imagination « fertile » facilitant « un mouvement associé à une

énergie individuelle qui peut ainsi organiser le présent et propulser vers l’avenir » »190

(Sutter, p 21, 1983).

L’arbre est riche tant dans son apport naturel que projectif, c’est pour cette raison que spontanément, la personne s’identifie à l’arbre et par analogie exprime des éléments de sa personnalité. C’est le postulat sur lequel est fondé le test de l’arbre.

4.2 Aperçu historique du test de l’arbre

Le premier homme ayant utilisé l’arbre comme instrument de diagnostic psychologique est Emile Jucker en 1928, un conseiller d’orientation professionnelle de Zurich, doté « d’une démarche empirique et intuitive »

191

(Stora, p 11, 1978).

L’idée émane alors principalement de son intuition et de l’étude des mythes faisant intervenir les arbres.

Cette piste fut explorée, de manière plus méthodique, en 1934 par G. Schliebe à partir de plus de 4500 dessins d’arbres, il a pu en dégager des caractéristiques de tracé de profils d’arbres : l’arbre joyeux est dessiné dans un cadre paradisiaque tandis que l’arbre blessé a des cicatrices.

189

Bachelard Gaston, La poétique de l’espace, 4ème éd. (Paris: Presses Universitaires de France, 2004).

190 Sutter Jean Marie, L’anticipation: psychologie et psychopathologie (Paris: Presses

Universitaires de France, 1983).

191

Stora Renée ,Fromont Marie-Françoise, Le test de l’arbre (Paris: Presses Universitaires de France, 1985).

« Il distingue également les caractéristiques du tracé en fonction de l’âge du

dessinateur »192 (Stora, p 12, 1978).

Dans son investissement, il inaugure, une façon originale d’appréhender les rapports entre les dessins d’arbre et la personnalité.

Koch 193s’est également attaché à objectiver ce test en donnant des instructions de mesure de l’arbre dessiné pour l’analyser aussi bien qualitativement que quantitativement.

Renée Stora, continue ses travaux sur le test du dessin d’Arbre sous la responsabilité du Professeur René ZAZZO.

Son immense travail est basé sur l’étude de plus de 3500 sujets différents en âge, sexes et pathologies. Elle en a interprété leurs dessins d’arbres.

Denise de Castilla194, s’inspirant de tous ces travaux a perpétué l’utilisation de ce test en complément du test de Rorschach, d’une étude graphologique et d’un entretien.

Elle a rapporté de nombreux cas cliniques qu’elle classifiait au sein de catégories telles, l’anxiété, la nervosité, l’impulsivité, l’alcoolisme, la dépression, la sexualité et la drogue.

Lydia Fernandez 195s’est inspirée de tous ces travaux et présente, par ses recherches, les principales approches méthodologiques.

4.2.1 Le test de l’arbre : un enrichissement

Enrichissement pour le thérapeute si tant est que celui-ci ne se laisse pas happé par des interprétations hâtives rédhibitoires.

« Le test de l’arbre est à la fois comme un langage graphique, une création et

une médiation »196, nous allons décliner ces trois formes de langage cité en nous appuyant sur la perception de Lenthéric.

192 Ibid. 193

Koch Karl, Le test de l’arbre.

194

De Castilla Denise, Le test de l’arbre Relations humaines et problèmes actuels.

195 Fernandez Lydia, Le test de l’arbre Un dessin pour comprendre et interpréter. 196

Lenthéric Pierre, « L’arbre en question... » (Le test du dessin de l’arbre en consultation homéopathique, Collioure, 2001).