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Réflexion théorique autour de la notion de discours

Chapitre 2 Vers une Sémantique Discursive cognitive

2.2. Constructions et grammaire de constructions

2.2.3. Les évolutions structurelles de Lasch

2.2.3.3. Une grammaire de constructions version sémantique : von Polenz

Ce faisant, le remplacement des rôles argumentaux de Fillmore (1968a), tel qu’ils sont employés par Goldberg (1992, 1995, 2006, 2019), au profit de la liste d’arguments sémantiques de von Polenz (2008) (et de son cadre théorique) est naturel d’un point de vue théorique dans la mesure où ces derniers ont été théorisés dans une logique textuelle qui rend compte à la fois de l’emploi réel et authentique et de la généralisation abstraite.

Une grammaire de constructions de l’allemand peut s’appuyer sur les travaux de von Polenz sur la sémantique phrastique, du moins lorsqu’il s'agit de déterminer plus précisément les constructions du côté du contenu.181 (Ziem/Lasch 2013 : 128)

La référence à von Polenz (2008) s’explique par la tentative d’expliciter et de retravailler le lien entre une construction et le/s frame/s qui lui sont associés (l’importance de ce lien a été vue avec Diessel 2019 : 103) :

Une autre possibilité d’étendre le concept de frame orienté sur la valence dans FrameNet pourrait être la sémantique phrastique de Peter von Polenz, qui suit explicitement Fillmore (1968) et exige finalement une « grammaire du contenu » (von Polenz 2008 : 180 ; cf. Busse 2012, qui fait également cette référence), que von Polenz ne peut cependant qu’esquisser avec ses moyens en 1985. La sémantique phrastique de von Polenz est principalement orientée vers les verbes qui sont assignés à des classes prédicatives ; von Polenz les utilise à son tour pour déterminer les cadres prédicatifs qui sont spécifiés par les cadres énonciatifs. Cette vision d’une « grammaire du contenu » n’est (et n’était) compatible ni avec les travaux sur la théorie de la valence ni avec d’autres modèles grammaticaux, même si von Polenz – comme Fillmore (1968) et FrameNet – s’appuie sur la structure argumentale du verbe. Cependant, le concept de von Polenz est très proche de l’idée grammaticale constructiviste qui consiste à décrire des constructions syntaxiquement complexes via le côté sémantique de ces unités. Pour cette raison, les concepts sémantiques phrastique peuvent être intégrés dans la grammaire de constructions sans avoir à les redéfinir dans une « grammaire du contenu ».182 (Lasch 2016 : 35)

181 Eine Konstruktionsgrammatik des Deutschen kann auf die Arbeit von Polenz‘ zur Satzsemantik zurückgreifen, zumindest dann, wenn es um eine nähere inhaltsseitige Bestimmung von Konstruktionen geht.

182 Als eine weitere Möglichkeit, das valenzorientierte Frame-Konzept in FrameNet zu erweitern, könnte sich die Satzsemantik von Peter von Polenz erweisen, die explizit an Fillmore (1968) anschließt und in letzter Konsequenz eine „Inhaltsgrammatik“ (von Polenz 2008: 180; vgl. Busse 2012, der diesen Bezug ebenfalls herstellt) fordert, die von Polenz allerdings mit seinen Mitteln 1985 nur skizzieren kann. Von Polenz‘ Satzsemantik richtet sich vor allem an Verben aus, die Prädikatsklassen zugeordnet werden; diese nutzt von Polenz wiederum für die Bestimmung von Prädikationsrahmen, die durch Aussagerahmen spezifiziert werden. Diese Sichtweise auf eine „Inhaltsgrammatik“ ist (und war) weder für valenztheoretische Arbeiten noch für

Lasch (2016 : §3.1.4) à la suite de son manuel publié avec Ziem (Ziem/Lasch 2013) intègre alors les propositions de von Polenz (2008) à travers deux outils conceptuels le cadre prédicatif et le cadre énonciatif, ce qui lui permet de faire évoluer la structure sémantique et la structure argumentale/conceptuelle de la notion de construction.

Le « cadre prédicatif » définit les rôles sémantiques, qui ne forment pas une classe systématiquement fermée, et la classe de prédicats ACTION, PROCES, PROPRIÉTÉ et ÉTAT [, et GENRE ; MB] incluant leurs sous-types dans une relation spécifique. Il donne une dimension générale de sens à la construction.183 (Ziem/Lasch 2013 : 127)

Il est également essentiel d’utiliser des cadres énonciatifs pour l’analyse des constructions et de leur signification, car c’est la seule façon de faire une description différenciée des phénomènes linguistiques. Sans cadres énonciatifs, toutes les constructions dans lesquelles un agent et un patient apparaissent comme arguments d’un verbe d’action seraient affectées à un cadre prédicatif. […] Le cadre énonciatif spécifie à la fois les classes de prédicats et les cadres prédicatifs ainsi que la dimension sémantique d’une construction. Le « cadre énonciatif » prend en compte d’une part les caractéristiques sémantiques essentielles des verbes incorporés dans la construction et d’autre part les conditions contextuelles de l’utilisation d’une construction.184 (Ziem/Lasch 2013 : 127–128)

Le lien entre les deux cadres énonciatif et prédicatif est rendu obligatoire par la nécessité de généraliser et de catégoriser :

En utilisant les cadres prédicatifs et énonciatifs que nous venons de présenter, dans l’analyse de l’exemple donné [= (61) Leonard rentre […] chez lui ; MB], nous pouvons maintenant déterminer de manière plus différenciée comment le sens du verbe correspond au cadre d’énoncé sémantique et donc aussi au cadre prédicatif, et dans quelle mesure les rôles que le sens constructionnel met à disposition fusionnent avec ceux du sens verbal.185 (Ziem/Lasch 2013 : 129)

Ainsi, pour l’exemple « Rose fährt zum Krankenhaus », j’isole une structure prédicative (HANDLUNG), un cadre prédicatif structuré autour de la structure prédicative et des rôles

andere Grammatikmodelle anschlussfähig, auch wenn von Polenz – wie Fillmore (1968) und FrameNet – auf die Argumentstruktur des Verbs setzt. Allerdings weist das von Polenzʼsche Konzept eine große Nähe zur konstruktionsgrammatischen Idee auf, auch syntaktisch komplexe Konstruktionen über die Bedeutungsseite dieser Einheiten zu beschreiben. Deshalb lassen sich die satzsemantischen Konzepte in die konstruktionsgrammatik integrieren, ohne diese zu einer „Inhaltsgrammatik“ umwidmen zu müssen

183 Der „Prädikationsrahmen“ setzt semantische Rollen, die keine systematisch geschlossene Klasse bilden, und die Prädikatsklasse HANDLUNG, VORGANG, EIGENGSCHAFT und ZUSTAND [, und GATTUNG; MB] einschließlich ihrer Subtypen in eine spezifische Relation. Er gibt eine allgemeine Bedeutungsdimension der Konstruktion an.

184 Aussagerahmen sind auch für die Analyse von Konstruktionen und ihrer Bedeutungsseite unbedingt hinzuzuziehen, da nur so eine differenzierte Beschreibung von sprachlichen Phänomenen vorgenommen werden kann. Ohne Aussagerahmen würden nämlich alle Konstruktionen, in denen neben einem Handlungsverb ein Agens und ein Patiens als Argumente auftreten, einem Prädikationsrahmen zugewiesen. […] Der Aussagerahmen spezifiziert sowohl Prädikatsklassen und Prädikationsrahmen als auch die Bedeutungsdimension einer Konstruktion. Durch den „Aussagerahmen“ werden zum einen wesentliche semantische Merkmale der in die Konstruktion eingebetteten Verben und zum anderen kontextuelle Bedingungen des Gebrauchs einer Konstruktion berücksichtigt.

185 Unter Hinzuziehung der Prädikations- und Aussagerahmen, die wir soeben vorgestellt haben, kann man in der Analyse des gegebenen Beispiels [= (61) Leonard geht [...] nach Hause; MB] nun zum einen differenzierter bestimmen, wie die Verbbedeutung mit dem semantischen Aussagerahmen und damit auch mit dem Prädikationsrahmen korrespondiert, und inwiefern jene Rollen, die die Konstuktionsbedeutung zur Verfügung steht, mit denen der Verbbedeutung fusionieren.

argumentaux AGENT et DESTINATION, de telle manière que j’aboutis à l’ensemble suivant HANDLUNG[AG, DES], qui autorise par fusion sémantique l’articulation avec le cadre énonciatif fahren(Subjekt, Ort) afin de lui donner un sens constructionnel.

La Fig. 18 est un exemple de construction dans le modèle de Lasch (2016) :

Sem HANDLUNG < AG OBEFF >

Instance ‘essen’ < AG OBJ >

Syn VP NNOM NAKK

E E P er ps ect iv ité C ogn iti ve a

Manon isst einen Döner.

Nina und Vanessa haben einen Fruchtsalat gegessen. Héloïse wird einen Teller Gemüse essen.

s P er ps ect iv ité C om m uni ca tiv e

Fig. 18 : Une construction selon Lasch, l’exemple de la construction transitive actualisée avec le verbe essen

Telle que complétée par les outils conceptuels de von Polenz (2008), Lasch (2016) dispose d’une théorie fondamentalement sémantique, donnant la priorité à la structure de sens et lui assignant une épaisseur fonctionnelle et située permettant de travailler l’organisation sémantique de l’interface conceptuello-linguistique d’une communauté linguistique à travers la reconnaissance du réseau de constructions (constructicon) et de sa structure fondamentalement sémantique et conceptuelle (Diessel 2019) :

Afin de reconstruire la forme et le sens d’une construction, on utilise un modèle qui – comme on le voit – est essentiellement basé sur les modèles utilisés pour représenter la structure interne des constructions chez Goldberg (i.a. 1995) et Croft (2001 et à nouveau 2013 : 225 ; résumé par Boas 2013 : 234–239). En outre, les prémisses de la sémantique phrastique (dans l’édition actuelle de 2008) publiée par von Polenz sont mises en œuvre (en ce qui concerne le modèle, cf. Lasch in Ziem & Lasch 2013 : 110–142 et Lasch 2014a, Lasch sous presse). À l’aide de ces concepts, le sens des constructions peut être analysé. Ainsi, non seulement une description de la structure des constructions est alors possible, mais aussi leur interconnexion dans le « constructicon », qui tient compte des relations sémantiques et formelles, peut être représentée (cf. chapitre 3.2.3 et dans la discussion des résultats ci-dessous chapitre 11).186 (Lasch 2016 : 46–47)

186 Um die Form- und Bedeutungsseite einer Konstruktion zu rekonstruieren, wird mit einem Modell gearbeitet, das – wie dargestellt – im Wesentlichen auf die Modelle zur Darstellung der internen Struktur von Konstruktionen bei Goldberg (1995 u.ö.) und Croft aufbaut (2001 und wieder 2013: 225; zusammenfassend Boas 2013: 234–239).24 Darüber hinaus werden die Prämissen der von Polenzʼschen Satzsemantik (in der aktuellen Auflage von 2008) implementiert (in Bezug auf das Modell vgl. Lasch in Ziem & Lasch 2013: 110– 142 und Lasch 2014a, Lasch im Druck). Mit Hilfe dieser Konzepte lässt sich die Bedeutung von Konstruktionen analysieren. Damit ist dann nicht nur eine Beschreibung der Struktur von Konstruktionen möglich, sondern auch ihre Vernetzung im so genannten Konstruktikon, das semantische und formale Beziehungen berücksichtigt, darstellbar (vgl. Kap. 3.2.3 und in der Ergebnisdiskussion unten Kap. 11).

Lasch (2016 : §3.2) parle alors d’un modèle intégré ; je reprends cette idée dans mon modèle de l’Analyse Cognitive de Discours en

(i) poursuivant sa volonté d’une saisie sémantique à haut degré de granularité, adossée à des résultats empiriques et théoriques cognitifs tels qu’exploités par Tomasello, permettant d’éviter une réduction épistémique trop généralisatrice (cf. pour un exemple Konerding 1993) et ainsi autoriser une examination totale et en profondeur des phénomènes langagiers187,

(ii) travaillant plus précisément l’aspect sémantique des frames en privilégiant une saisie phrastique et conceptuelle à la suite de von Polenz et des propositions découlant de ce travail fondateur de Busse et Ziem, dans le but de réaliser une saisie discursive du sens transmis lors du transfert d’informations pour une situation de communication particulière.

Avant d’aller plus loin, je conclurai ce chapitre dédié aux apports de Lasch, en précisant ma définition d’une construction, version intégrée pour reprendre le titre de Gréciano (1991) :

Une construction est un appariement cognitif émergeant de l’expérience langagière dans un environnement plus ou moins délimité dans le temps et l’espace d’une structure de sens conventionnalisée (cf. Croft 2001 : 19). Le résultat du couplage des deux structures génère une unité cognitive symbolique multidimensionnelle autorisant le stockage d’informations conceptuelles (Lasch 2016) et permettant ainsi la compression de connaissances en unités prototypiques sémantiques organisées par une matrice syntaxique adaptée par l’injection de rôles communicationnels à la situation de communication pour laquelle la construction est déployée (Goldberg 1995, 2019). La construction est un élément du développement conceptuel global mobilisé pour la production et la réception d’une information transférée entre deux ou plusieurs

187 « Das hat auch forschungspraktische Gründe, denn man sollte nicht der Versuchung erliegen, eine „‘maximal explizite Paraphrase‘ einer Satzbedeutung“ erarbeiten zu wollen, so Busse (2012: 735) schon mit Bezug auf von Polenz im Kontext der Framesemantik. Mit dem offenen Set an Frames, Relationen und Frame-Elementen besteht nämlich die Gefahr, den „Auflösungsgrad (‚Granularität‘)“ (Busse 2012: 734 nach Fillmore und Klein) so zu wählen, dass eine forschungspraktische Bewältigung und adäquate Beschreibung des gewählten Gegenstands oder seine Systematisierung zum Problem werden kann. Damit soll die Framesemantik also nicht gegen den hier gewählten Zugriff über von Polenz, der mit seiner „Inhaltsgrammatik“ in Bezug auf Fillmore eine Variante dessen entwarf, was man heute Framesemantik nennt, ausgespielt werden – wie eingangs skizziert, werden im Moment verschiedene konstruktionsgrammatische Modelle im Hinblick auf das Konstruktikon entwickelt und fruchtbar (vgl. oben Kap. 2 und besonders 2.2). Wie mittlerweile auch deutlich geworden sein sollte, lassen sich der hier gewählte Zugang zu Konstruktionen und framesemantische Zugriffe, da beide von der Bedeutungsseite von Konstruktionen her argumentieren, aufeinander beziehen. Mit dem Hinweis auf das Problem der ‚maximalen Periphrase‘ ist hier jedoch nicht die Kritik aufgerufen, mit der dem prototypisch organisierten Set von semantischen Rollen von Polenzʼ teilweise begegnet wurde (vgl. etwa Eroms 2000: 181f.). » (Lasch 2016 : 133–134)

individus par le moyen d’un énoncé (Tomasello 2003, 2019). On reconnaît une construction à sa fréquence d’apparition dans l’espace sociolinguistique d’une communauté à un temps et en un lieu donnés (Goldberg 2006 ; Ziem/Lasch 2013) ; une fois la construction reconnue, elle est intégrée à un réseau dynamique de constructions au regard de sa fonction dans la communication. L’ensemble des connaissances conceptuello-linguistiques d’un individu est supporté par le réseau de constructions (Goldberg 2003, 2006 ; Tomasello 2003). Sur la base de ces connaissances et en prenant en considération la motivation pragma-situationnelle de l’individu (Tomasello 2008), une construction A est préférée à une construction B, si A permet de mieux transmettre l’intention du locuteur que B (Bach 2020b). Enfin, une construction est sui generis dynamique : elle évolue dans l’usage et l’expérience linguistique d’un individu et d’une communauté (Lasch 2016 ; Hilpert 2019). Ainsi, on reconnaît l’existence des constructions à chaque niveau de la production langagière : du morphème au lexème, du lexème à la construction groupe nominal, de la construction adjectivale à la construction propositionnelle (Goldberg 2006 ; Ziem/Lasch 2013). Il convient de conférer à la structure constructionnelle une triple dimension sémantique, argumentale et syntaxique conventionalisée par et dans l’usage (Feilke 1996 : 35) permettant à une construction d’être convenablement indexée à une situation de communication par le transfert d’informations conceptuelles multidimensionnelles contenues dans un frame, lui-même compris dans un frame discursif ; l’articulation conceptuelle s’effectue au moyen du partage de la structure sémantique et argumentale entre frames et constructions.

La reconnaissance du lien fondamental entre constructions et frames et la reconnaissance de ces deux notions de linguistique-cognitive comme support du transfert d’informations indexé à un environnement phénoménal dans le but de prendre part à une expérience sociolinguistique impliquent de concevoir la cognition de manière holistique et située (Ziem 2008a ; Busse 2012) et par conséquent d’adopter une approche interprétative textuelle (Busse 2015a ; Lasch 2016).