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1 INRA, Unité d’écodéveloppement, Domaine Saint Paul, Site Agroparc, 84914 Avignon cedex 9 ; 2 INRA, UMR Innovation, 2 Place Viala, 34060 Montpellier cedex 1

Contacts : claragouy@gmail.com ; lecriv@avignon.inra.fr ; jocelyne.porcher@supagro.inra.fr

Résumé : Cette étude, réalisée chez des éleveurs ovins du sud-est de la France, montre que les relations tissées avec le troupeau et les animaux sont importantes pour une majorité des éleveurs enquêtés. Onze valeurs relationnelles ont été caractérisées ce qui a permis également de cerner leur rôle : sous-tendre les rapports de travail entre éleveurs et animaux. Ces valeurs sont présentes chez les éleveurs certifiés en production biologique tout comme chez les conventionnels. Elles sont toutefois en ligne avec les valeurs fondatrices de l’AB qui pourraient les promouvoir.

Mots-clés : éleveurs ovins, PACA, relation de travail entre éleveurs et animaux, valeurs relationnelles Projets dans lesquels s'intègrent les travaux : DynRuraBio (ANR Systerra, 2011-2014)

Partenaires impliqués : INRA, ISARA Lyon et VetAgroSup

Contexte

Les conditions de vie des animaux d’élevage et leur bien-être sont une préoccupation sociétale croissante. Il existe une attente des consommateurs vis-à-vis du label bio pour représenter un type d’élevage plus respectueux de la Nature et des animaux. La relation éleveur-animaux n’est toutefois pas abordée dans le cahier des charges de l’AB alors que c’est un élément fondateur du bien-être des animaux tout autant que de celui des éleveurs.

Objectifs et enjeux du travail de recherche

Dans ce contexte, nous cherchons à voir si l’AB est porteuse de valeurs relationnelles différentes de l’élevage conventionnel. Si la question a déjà été soulevée dans le cadre d’élevages aux degrés d’intensité variés (Fiorelli et Porcher, 2007), l’influence potentielle des signes de qualité n’a pas encore été étudiée et l’enjeu pour l’AB est important. Il s’agit de différencier et de valoriser l’AB en tant qu’approche systémique de l’élevage, à la différence des systèmes focalisés sur les résultats technico-économiques.

Démarche scientifique

Un ensemble de 50 entretiens semi-directifs a été réalisé avec des éleveurs ovins de la région PACA, et leurs systèmes d’élevage ont été décrits par 22 variables. Un CAQDAS (logiciel d’aide à l’analyse des données qualitatives) et le logiciel R (logiciel d’exploration statistique de données) ont été utilisés pour analyser les données. Cela a permis de mettre à jour 11 valeurs primordiales dans la relation que les éleveurs entretiennent avec leurs animaux. Ces valeurs se traduisent par des pratiques spécifiques mises en place et décrites par les éleveurs.

Acquis scientifiques

Les premiers résultats montrent qu’il existe des valeurs relationnelles chez ces éleveurs ovins pastoraux bio et non bio. De plus, la composante relationnelle du métier apparaît aussi importante que la composante économique (Figure). A partir de leurs discours et des pratiques décrites, nous avons identifié les 11 valeurs relationnelles suivantes : observer, communiquer, passer du temps avec, avoir de la considération, de l’empathie, de la reconnaissance, donner de la valeur à l’animal, aimer les bêtes, être proche, être bien ensemble et se percevoir dans des rapports de don avec les animaux. Deux valeurs sont communes à l’ensemble des éleveurs ; elles témoignent de pratiques fondamentales du métier et sont, d’après eux, nécessaires pour assurer le bien-être des animaux et donc le leur. Dans un deuxième temps, nous avons analysé le lien entre les 9 autres valeurs relationnelles et les 22 variables décrivant l’intensité des systèmes d’élevage. Nous montrons que les valeurs relationnelles ne se distribuent ni en fonction du degré d’intensité du système d’élevage ni en fonction du type de certification (AB, IGP-Label Rouge ou conventionnel). Ces résultats montrent que l’importance prise par les valeurs relationnelles serait avant tout liée à la hiérarchie des éléments constitutifs du métier propre à chaque éleveur.

Figure : Proportion des éléments constitutifs du métier d'éleveur décrits par les éleveurs enquêtés

Impact des résultats / applications / résultats opérationnels

Aujourd’hui, l’aspect relationnel du métier d’éleveur est passé sous silence ; il est pourtant omniprésent chez les éleveurs pastoraux comme chez de nombreux autres éleveurs. Dans sa forme actuelle, le cahier des charges AB n’en tient pas compte : il est surtout question du bien-être animal. En cela, il permet le développement d’élevages intensifs où la rationalité dominante est la rationalité technico-économique. Il nous semble qu’une différenciation est importante pour démarquer l’élevage bio du conventionnel. Les éleveurs bio pourraient formaliser une charte déontologique du métier d’éleveur et proposer son intégration au processus de certification en AB. Ce serait pour les éleveurs l’occasion de réaffirmer leurs engagements vis-à-vis des animaux. Cela leur permettrait d’assumer les différents rôles qui leur incombent et de justifier les rationalités relationnelles, morales et identitaires qui les motivent tout autant que la rationalité économique. Dans ce contexte, le rapport à la mort est un aspect complexe du métier qui mériterait d’être rediscuté. En pratique, un système de transport et d’abattage des animaux à la hauteur de l’engagement des éleveurs vis-à-vis des animaux fait parfois défaut. Cela pourrait être reconsidéré dans les politiques de développement de l’élevage, et en particulier de l’élevage en AB.

Perspectives

Cette étude se base sur des entretiens qualitatifs : il serait intéressant de les compléter par des observations sur les pratiques des éleveurs. De plus, ce travail pourrait être approfondi par une investigation sur les effets de la relation éleveur-animaux sur le système d’élevage : est-ce un facteur de changement du système et si oui, comment ces changements s’opèrent-ils ?

Pour en savoir plus

Fiorelli C., Porcher J., Dedieu B., 2007. Pourquoi faire de l’élevage quand on a un autre travail ? Rencontres Recherches Ruminants, Paris, 5-6 déc. 2007 : 389-392.

Lamine C., 2006. Mettre en parole les relations entre hommes et animaux d’élevage. Circulation des récits et mise en débat. Ethnographiques.org, n° 9 (disponible sur www.ethnographiques.org)

Leroux J., Fouchet M., Haegelin A., 2009. Elevage Bio : des cahiers des charges français à la réglementation européenne. INRA Productions Animales, 22 (3): 151-160.

Porcher J., 2011. Vivre avec les animaux, une utopie pour le 21ème siècle. Editions La Découverte. 168 p.

Waiblinger S. et al., 2006. Assessing the human–animal relationship in farmed species: A critical review. Applied Animal Behaviour Science, 101(3- 4):185-242. (disponible sur: http://linkinghub.elsevier.com/retrieve/pii/S0168159106000475)

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