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2. Les cellules souches neurales

2.5 Différenciation des cellules souches neurales

2.5.2 Genèse et marqueurs des cellules différenciées

Le phénomène de différenciation est complexe et tous les éléments le régulant ne sont pas encore connus. Le processus permettant à une CSN de devenir une cellule spécialisée pleinement différenciée est long et peut prendre, pour les oligodendrocytes humains par exemple plusieurs semaines, voire mois, dans les modèles expérimentaux disponibles.

La notion de différenciation elle-même est facilement galvaudée. Une cellule engagée dans une voie n’est pas pour autant une cellule différenciée. )l faut distinguer une cellule impliquée dans une voie gliale ou neuronale par exemple, d’une cellule ayant acquis l’ensemble des marqueurs moléculaires, phénotypiques et fonctionnels d’un astrocyte, d’un oligodendrocyte ou d’un neurone. De même, une cellule totalement mature et fonctionnelle, peut selon les cas se dédifférencier et générer un autre type cellulaire. Ce phénomène, appelé transdifférenciation est connu depuis longtemps lors de l’ontogenèse corticale. Les cellules de la glie radiaire, caractérisées entre autres par des marqueurs des astrocytes, se transdifférencient après avoir servi de guide à la migration des jeunes neurones, en neurones eux-mêmes (Barnes and Polleux, 2009; Rakic, 1971). Il a été récemment montré dans un modèle de démyélinisation que des neurones peuvent faire preuve de plasticité en se réorientant dans une voie gliale pour pallier à la disparition des oligodendrocytes dans le corps calleux. Des neuroblastes ainsi que des neurones exprimant la GAD65, un marqueur de la spécialisation des neurones GABAergiques inhibiteurs, se transdifférencient et migrent dans le corps calleux pour générer des oligodendrocytes (Jablonska et al., 2010).

L’expression des marqueurs doit donc être analysée en tenant compte du lieu, du niveau de maturation de la cellule et de son microenvironnement.

Pour les paragraphes ci-dessous, les CSN murines et humaines présentées sont à peu près sensibles aux mêmes facteurs inducteurs, si ce n’est que la différenciation des cellules humaines demande des étapes de maturation plus longues.

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2.5.2.1 Les neurones

En conditions physiologiques, les neurones sont les premières cellules neurales qui se forment à partir des CSN et de la glie radiaire, comme vu précédemment. In vitro, il est possible de différencier les CSN en neurones en retirant les facteurs de croissance bFGF et EGF responsables de maintien des cellules souches. Ces dernières peuvent alors spontanément se différencier en neurones grâce à une partie de programmation intrinsèque (Barnes and Polleux, 2009; Temple, 2001). Une partie des CSN peut être forcée à se différencier en neurones en ajoutant dans les milieux de culture des facteurs solubles comme le BDNF ou de l’acide rétinoïque. Dans un premier temps les CSN vont générer des neuroblastes, puis des neurones immatures et finalement des neurones spécialisés exprimant notamment des neurotransmetteurs spécifiques de chaque neurone (Qian et al., 2000).

Les neuroblastes, ou progéniteurs neuronaux peuvent être reconnus par le marquage de la doublecortine DCX dont l’expression s’estompe avec la différenciation future (Magavi and Macklis, 2008). Puis les neuroblastes se différencient en neurones post-mitotiques immatures et se mettent à exprimer entre autres : la tubuline -3 (encore appelée Tuj1), ainsi que la protéine associée aux microtubules de type MAP . L’expression de ces deux marqueurs pan-neuronaux augmente au fur et à mesure que le neurone prend sa véritable identité (Keung et al., 2013). Finalement, le neurone acquiert ses derniers marqueurs tardifs tels que NeuN ou Fox-3 qui peuvent être associés à des protéines spécifiques des familles de neurones excitateurs ou inhibiteurs.

2.5.2.2 Les astrocytes

Apparaissent ensuite les astrocytes, cellules à la fois très différenciées, primordiales à l’homéostasie du tissu cérébral, et forment également la population de maintien des CSN des niches neurogéniques adultes.

La CSN se différencie en progéniteur glial, dont la sélection, notamment basée sur des techniques de tri cellulaire dans l’étude de l’équipe de Han et collaborateurs, se base sur un phénotype A2B5+/PSA-NCAM-. En effet ces cellules sont ensuite capables de générer des astrocytes matures exprimant la protéine GFAP (Mendes et al., 2015; Glaser et al., 2007;

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Zhang, 2001), le ganglioside de série-C A2B5 (Han et al., 2013) ainsi que l’aldéhyde déshydrogenase ALDH-1 non exclusive (Rowitch and Kriegstein, 2010) . Les astrocytes pleinement différenciés exprimant GFAP, co-expriment en général des protéines spécifiques de transport du glutamate et de l’aspartate comme GLT-1, GLAST et les transporteurs EAAT (Yang et al., 2011; Perego et al., 2000).

In vitro, de la même manière que pour obtenir des neurones, les CSN peuvent spontanément donner des astrocytes en retirant les facteurs mitogènes. Selon les lignées cellulaires, les quantités d’astrocytes peuvent changer mais restent toujours élevées, entre 50 et 90 % des cellules différenciées sont positives à GFAP. L’ajout dans le milieu de SVF, de BMP-4, de CNTF permet de forcer les cellules à présenter un phénotype astrocytaire, ou à le faire apparaitre plus précocement (Lim et al., 2000; Pollard et al., 2009; Ravin et al., 2008; Sun et al., 2008).

2.5.2.3 Les oligodendrocytes

Ce sont les dernières cellules issues des CSN à apparaitre dans le SNC. Comme vu précédemment, l’oligodendrogenèse débute à la toute fin de la vie fœtale pour se développer et se terminer durant la vie post-natale. Le processus de maturation est long et se découpe en 4 étapes intermédiaires avant d’obtenir un oligodendrocyte myélinisant ramifié (figure

14). )l a été établi qu’une CSN donnant un progéniteur glial aux propriétés décrites dans le

paragraphe précédent peut se différencier en cellule précurseur d’oligodendrocyte OPC . Elle est reconnue par son expression simultanée de NG2 et A2B5. Comme ces marqueurs ne sont pas exclusifs de ce type cellulaire, il est possible de rechercher la présence du récepteur PDGFR- , de la protéine homéobox Nkx . (Kriegstein and Alvarez-Buylla, 2009; Aguirre and Gallo, 2004; Fu et al., 2002) tout à fait caractéristiques ainsi que des facteurs de transcription Sox10 et Olig- promouvant l’expression des gènes oligodendrocytaires (Rowitch and Kriegstein, 2010). La cellule est alors sensible aux signaux de SHH et du PDGF- A, lui permettant d’évoluer vers le stade suivant de pré-oligodendrocyte. Lors de cette étape, l’OPC bipolaire se ramifie, va petit à petit perdre l’expression des marqueurs précédents pour exprimer la protéine ’- ’ cyclic nucleotide phosphodiesterase CNPase, ou CNP , dont le gène correspondant est le plus précoce dans la myélinisation et dont l’expression perdure toute la vie de l’oligodendrocyte (Yu et al., 1994). Un autre marqueur de ganglioside très utilisé est O , dont la date d’apparition prête encore aujourd’hui à controverse à ce stade. Il est en revanche certain que son expression se stabilise à l’état de différenciation suivant

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d’oligodendrocyte immature, très ramifié mais non myélinisant. Des gènes impliqués dans la fabrication de la myéline s’activent alors tels que l’enzyme GalC et le galactocérébroside O . Enfin, l’étape de différenciation en oligodendrocyte mature myélinisant marque le bout du processus de maturation, avec notamment la présence de molécules constitutives de la myéline telles que MBP, PLP, MOG (Peyron et al., 1997). Généralement ces cellules très différenciées sont également positives pour les marqueurs des stades précédents : CNP, O1, O4 et GalC (Jakovcevski et al., 2009; Glaser et al., 2007; Baumann and Pham-Dinh, 2001).

La culture in vitro d’oligodendrocytes ou du moins la différenciation de CSN dans cette voie nécessite la mise en place d’un protocole long, faisant se succéder des facteurs de stimulation des différents stades de maturation. Le PDGF-A et le bFGF entrent en jeu dans les premiers stades promouvant la prolifération des CPO et des pré-oligodendrocytes, tandis que l’ajout progressif de tri-iodothyronine T et/ou d’acide ascorbique permettent d’enfoncer la cellule dans la voie oligodendrocytaire vers l’état de différenciation final 7

(Glaser et al., 2007; Qian et al., 2000).

7 Il faut noter que la différenciation des oligodendrocytes à partir de CSN murines est particulièrement

rapide (environ 5- jours , comparativement au processus identifié chez l’(umain de à jours .

Figure 14 : Représentation schématique du développement et de la maturation des oligodendrocytes. La progression depuis les cellules précurseurs jusqu’aux oligodendrocytes myélinisants passe par une évolution des marqueurs antigéniques. Certains marqueurs sont propres à chaque étape tandis que d’autres sont partagés le long du lignage cellulaire. Baumann et Pham-Dinh., Physiological reviews, 2001.

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