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*14) Fulvia Copiola, tibicina

15) Galeria Copiola, emboliaria

BIBLIOGRAPHIE : SPRUIT 1966, n° 78 ; GARTON 1972, 85 ; 1982, 32 ; LEPPIN 1992, 227 ; FERTL 2005, 179.

SOURCES : PLIN., 158-159. Texte :

Pline, Histoire Naturelle, VII, 158-159 (Ier siècle av. J.-C. – Ier siècle ap. J.-C.)

Et ex feminis Liuia Rutili LXXXXVII annos excessit, Statilia Claudio principe ex nobili domo LXXXVIIII, Terentia Ciceronis CIII, Clodia Ofili CXV, haec quidem etiam enixa quindeciens. Lucceia mima C annis in scaena pronuntiauit. Galeria Copiola emboliaria reducta est in scaenam C. Poppaeo Q. Sulpicio cos. ludis pro salute Diui Augusti uotiuis annum CIIII agens; producta fuerat tirocinio a M. Pomponio aedile plebis C. Mario Cn. Carbone cos. ante annos XCI, a Magno Pompeio magni theatri dedicatione anus pro miraculo reducta. 159 Sammullam quoque CX uixisse auctor est Pedianus Asconius. Minus miror Stephanionem, qui primus togatus saltare instituit, utrisque saecularibus ludis saltauisse, Diui Augusti et quos Claudius Caesar consulatu suo quarto fecit, quando LXIII non amplius anni interfuere, quamquam et postea diu uixit.

« Parmi les femmes, Livie, femme de Rutilius91, dépassa l’âge de 97 ans ; Statilia92, qui sortait d’une grande famille, 99 ans, sous le règne de Claude ; Terentia, femme de Cicéron, 103 ans ; Clodia, femme d’Ofilius93, 115 ans : cette dernière avait même été quinze fois mère. Lucceia, une mime, déclama pendant 100 ans sur la scène. Galeria Copiola, une actrice d’intermèdes, a été ramenée sur la scène, à l’âge de 104 ans, sous le consulat de C. Poppaeus et de Q. Sulpicius, à l’occasion des jeux votifs donnés pour le salut du Divin Auguste ; elle avait été engagée pour ses débuts par l’édile de la plèbe M. Pomponius, sous le consulat de C. Marius et de Cn. Carbo, 91 ans auparavant ; lors de la dédicace de son grand théâtre, le Grand Pompée l’avait rappelée alors qu’elle était déjà vieille, à titre de curiosité. Sammulla vécut aussi 110 ans, selon Pedianus Asconius. Je trouve moins surprenant que Stéphanion, qui le premier a introduit la danse sous la toge, ait dansé aux deux jeux séculaires94, à ceux du Divin Auguste et à ceux que l’empereur Claude organisa à son quatrième consulat : il n’y eut en effet pas plus de 63 ans d’intervalle ; toutefois, il vécut encore longtemps après. »

COMMENTAIRE :

Dans cet extrait, Pline propose une liste de personnalités connues ayant eu une longévité remarquable. Après avoir évoqué un certain nombre d’hommes politiques, il en vient aux femmes de l’ordre sénatorial, puis aux actrices. Il est intéressant de remarquer que pour être une femme connue d’après cette liste, deux options existent : être l’épouse d’un

91 Publius Rutilus Rufus consul en 105.

92 Il s’agit peut-être de la fille ou de la sœur de T. Statilius Taurus, consul en 37 et en 26 av. J.-C. Sénèque (SEN., Ep., 77, 20) évoque également une Statilia qui aurait vécu 99 ans.

93 Juriste, familier de César.

94 Fondés en 249 av. J.-C., les Jeux Séculaires sont célébrés par Auguste en 17 av. J.-C. Les jeux organisés par Claude et mentionnés ici par Pline ne sont pas à proprement parler des « jeux séculaires ». Suétone explique en effet que Claude, remettant en cause la datation suivie par Auguste, célébra également des jeux séculaires pour les 800 ans de Rome en 47 ap. J.-C. (SUET., Cl., XXI). Ainsi Pline parle d’un intervalle de 63 ans. Il convient plutôt de parler pour les jeux de Claude, des célébrations pour le huit-centième anniversaire de Rome.

homme politique connu et donc bénéficier de sa renommée, ou bien s’être exhibée sur scène et être ainsi actrice de sa propre réputation. Certaines actrices semblent en particulier avoir marqué les mémoires grâce au temps durant lequel elles ont occupé la scène publique. Ainsi, ce sur quoi insiste Pline ici, ce n’est pas seulement la longévité extraordinaire de Galeria Copiola mais la durée pendant laquelle il a été possible de la voir sur scène et surtout sur l’intervalle de temps entre sa première et sa dernière performance.

Selon les informations que fournit Pline, Galeria Copiola avait 104 ans lorsqu’elle fut ramenée sur scène sous le consulat de C. Poppaeus et Q Sulpicius, c’est-à-dire en 9 ap. J.-C. Elle serait donc née en 95 av. J.-C. Elle aurait commencé sa carrière à l’âge de treize ans, en 82 av. J.-C., et se serait retirée de la scène bien avant ses quarante ans puisque cet âge semble déjà être un motif d’étonnement et d’intérêt (pro miraculo) lorsqu’elle est rappelée sur scène pour la première fois en 55 av. J.-C. à l’occasion de la dédicace du théâtre de Pompée. Galeria semble donc avoir pu choisir de se retirer de la scène relativement tôt95 et vivre plus de soixante-dix ans sans pratiquer son art, ce qui suppose une certaine autonomie et surtout une aisance financière non négligeable. Il faut sans doute supposer ici d’autres sources de revenus ou une reconversion éventuelle de l’actrice. L’âge avancé de Galeria Copiola, cent quatre ans, est certes un aspect remarquable de sa performance aux jeux votifs d’Auguste qui explique qu’on ait choisi de la produire. Mais c’est également sa célébrité et le fait qu’elle se soit retirée de la scène depuis longtemps qui explique son succès prévisible pour les organisateurs des jeux. Galeria Copiola est une vedette qui n’a pas été vue sur scène depuis des dizaines d’années mais dont la réputation s’est maintenue. La voir de nouveau sur scène est donc, pour le public romain, tout à fait exceptionnel et inespéré.

C’est intéressant car Galeria Copiola n’est qu’une emboliaria. Nous savons peu de choses sur ces artistes dont on suppose qu’elles se produisaient pendant de courts « intermèdes » (embolium). Cependant ces performances devaient être suffisamment importantes et appréciées pour avoir permis à Galeria Copiola de se forger une réputation durable. On peut cependant se demander ce que l’actrice était en mesure de faire sur scène à l’âge de 104 ans. La plupart des inscriptions funéraires de professionnelles des spectacles concernent de jeunes voire très jeunes femmes. Galeria Copiola a ainsi commencé sa carrière à treize ans et l’a interrompue avant quarante ans. On peut imaginer qu’il s’agissait là d’un

95 Relativement par rapport à l’âge atteint par cette artiste car, étant donnés l’espérance de vie moyenne à Rome et le caractère probablement très physique de cette profession, on comprend tout à fait que cette retraite ne paraisse pas spécialement précoce à Pline. Cela donne une idée de la durée moyenne de ce type de carrières qui semblent pouvoir commencer vers dix ans et se déployer sur une vingtaine d’années.

choix stratégique : se consacrer à une autre activité plus intéressante ou moins infamante. Mais il est probable que cette interruption ait également été motivée par la nécessité, l’actrice n’ayant plus les capacités physiques nécessaires à l’exercice de sa profession.