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Fréquence des troubles cognitifs dans la SEP et problèmes méthodologiques posés par les critères de

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PARTIE I SEP ET COGNITION : CONTEXTES ET CONSIDERATIONS THEORIQUES

CHAPITRE 2 TROUBLES COGNITIFS DANS LA SEP

I.2.2 Fréquence des troubles cognitifs dans la SEP et problèmes méthodologiques posés par les critères de

déficience cognitive adoptés

Selon les études, les troubles cognitifs concernent 40 à 72% des personnes atteintes de SEP (Prosiegel et al., 1993, Rao, 1995, Defer, 2001, Fisher, 2000, Wallin et al., 2006, Nocentini et al., MS, 2006). Les fréquences indiquées varient selon la représentativité des échantillons évalués (forme clinique, degré d’atteinte clinique, durée d’évolution, présence d’un groupe témoin, nombre de sujets…), des tests inclus dans l’évaluation cognitive ou encore des critères adoptés pour définir l’atteinte cognitive. Chez l’enfant par exemple, la fréquence des atteintes cognitives est estimée à un peu plus de 30% (Ghezzi et al., 2010).

Les études réalisées sur des échantillons de patients recrutés dans la population générale, en évitant les biais inhérents au recrutement des centres spécialisés, et incluant différentes formes cliniques et durées d'évolution, ont indiqué une prévalence autour de 40% (Rao et al., 1991a; McIntosh-Michaelis et al., 1991). Rao et al. (1991a), pour éviter une surestimation liée aux biais de recrutement, ont par exemple réalisé 31 tests cognitifs auprès de 100 PvSEP issues de la population générale (non uniquement hospitalière) et 100 témoins appariés. Quarante-huit PvSEP et 5 témoins étaient déficitaires à au moins 4 tests sur les 31, soit 43 % des PvSEP. Deloire et al., (2006) rapportent plus de 50% des PvSEP présentant des scores significativement inférieurs à ceux des volontaires sains à au moins deux tests neuropsychologiques.

Patti et al. (1999), à partir d’une cohorte multicentrique de 550 PvSEP-RR, ont montré que le pourcentage de PvSEP-RR variait selon le critère d’atteinte retenu. Selon que le critère retenu est au moins 2 ou au moins 3 tests cognitifs atteints (un test étant considéré comme révélant un

déficit lorsque le score est en dessous du 5ième percentile), le pourcentage de PvSEP-RR considérées comme atteintes était respectivement de 34,9% et de 19,5%.

En utilisant une batterie spécifique à la SEP, la (Brief Repeatable Battery for Neuropsychological Examination) (BRB-N), Sepulcre et al. (2006) ont souligné les variations de pourcentage de PvSEP atteintes cognitivement. Ils ont analysé 9 catégories de patients en fonction de la présence de déficit dans 1 test ou plus, 2 tests ou plus ou 3 tests ou plus et en fonction du nombre d’ET considéré (<1, 1,5, ou 2) pour chaque situation. Dans ces 9 catégories, les pourcentages de PvSEP variaient de 30,5 à 89,83 selon le critère retenu soulignant ainsi la question du nombre de tests échoués et du seuil à adopter pour définir une atteinte. De plus en réalisant un z-score global des performances observées à tous les tests, les auteurs indiquent que comparativement aux 152 témoins appariés, les 59 PvSEP présentaient globalement une performance située à 0,7 écart-type en dessous des performances des témoins, ce qui est assez éloigné des standards cliniques souvent utilisés pour déterminer un score pathologique à un test, à savoir de 1,5 à 1,64 (5ième percentile) voire 2 écarts-types (ET) en dessous de la moyenne. Ceci nous engage à la prudence et à réviser les critères d’atteintes chez les PvSEP.

Ainsi à la question de la détermination de la fréquence sont liés les questionnements complexes des choix des seuils pathologiques ou encore de ce que reflète l’atteinte considérée en termes de déficit. Nous pouvons en effet nous interroger : dans quelle mesure le type d’évaluation et les choix méthodologiques réalisés sous-estiment ou non les dysfonctionnements cognitifs ? En pratique, à partir de quel seuil peut-on considérer qu’une personne présente un trouble cognitif? Un des choix méthodologiques lié à un choix conceptuel et pragmatique essentiel concerne celui de considérer le score d’un test cognitif comme atteint lorsqu’il est inférieur au 5ième percentile ou lorsqu’il est inférieur à 1, 1,5 ou 2 ET de la moyenne. De plus, nombre de patients se plaignent et pour autant leurs évaluations ne semblent pas pathologiques. Les évaluations classiques peuvent-elles détecter une perturbation légère et détectent-elles vraiment les perturbations de processus cognitifs mis en jeu dans la vie quotidienne ? Un trouble est-il assimilable à la gêne ressentie qui pourrait aussi avoir une autre origine non directement liée à la maladie? Une personne ayant un score à -1 écart-type reflétant la capacité de stockage en mémoire de travail et des scores par ailleurs supérieurs à +2 ET ne va-t-elle pas être gênée dans son fonctionnement quotidien si avant la maladie elle était habituée à des performances plus efficientes de ses capacités de mémoire de travail ? La moyenne utilisée comme référence doit-elle être celle proposée dans le manuel du test édité parfois sur un groupe de sujets peu nombreux et avec des ET très importants ou celle obtenue avec un groupe de témoins appariés? Autant de questions qui ouvrent des fenêtres de réflexion sur la classification d’une PvSEP comme atteinte

ou non sur le plan cognitif et plus largement sur l’interprétation des scores dont le sens sera à confronter avec d’autres éléments cliniques, parfois plus subjectifs. Aussi, il est fort possible qu’à ce jour, les troubles cognitifs soient encore sous-estimés, d’une part parce que le dépistage n’est pas systématique et d’autre part parce que les outils d’évaluation utilisés jusqu’ici ne sont pas toujours assez fins ou encore exploités avec des seuils assez fins pour détecter les atteintes légères présentes dans la SEP. De plus, nous y reviendrons dans le chapitre II de la partie II, les tests cognitifs habituellement utilisés, en pratique clinique et dans la plupart des protocoles de recherche donnant lieu aux publications, évaluent peu d’interactions entre les processus cognitifs mis en jeu dans la vie quotidienne.

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