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CHAPITRE 2. LA RÉVÉLATION DE LA VALEUR EXISTENTIELLE D’AUTRUI:

2.2.1. Formes inférieures de sympathie

D’après Scheler, la sympathie se divise en formes inférieures et supérieures selon une hiérarchie ascendante, de la plus généralisée (et de valeur inférieure) à la plus exceptionnelle ou rare (et de valeur supérieure).238 Ces formes de sympathie sont la fusion ou identification affective (Einsfühlung),239la reproduction affective (Nachfülhen), la sympathie proprement dite ou participation affective (Mitgefühl),240 l’amour de l’humanité

(Menschenliebe) et l’amour acosmique de Dieu (Gottesliebe) et de la « personne » spirituelle (akosmistische Personliebe).241 Il est à noter que toutes ces formes « se fondent

236 Matthias Schlossberger, op.cit., p. 193.

237 Les termes allemands sont repris de Max Scheler, Wesen, p. 17-19.

238Michael D. Barber, Guardian of dialogue. Max Scheler’s phenomenology, sociology of knowledge and philosophy of love, Lewisburg, Bucknell University Press, 1993, p. 116.

239Dans l’édition allemande du texte, l’auteur utilise un seul terme, Einsfühlung, pour faire référence à ce qui

est traduit comme « fusion » et « identification » dans l’édition française, raison pour laquelle nous employons ces deux mots indifféremment. Max Scheler, Wesen, p. 29-48.

240Le titre en allemand de la première partie du livre est en fait Das Mitgefühl, ce qui est traduit en français

soit comme « participation affective », soit comme « sympathie ». Max Scheler, Wesen, p. 17; Max Scheler,

Nature, p. 15.

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les unes sur les autres »242 ce qui veut dire que « les plus hautes ne peuvent pas se développer sans les plus basses ».243

Dans ce cadre, la fusion affective (Einsfühlung) -qui est à la base des formes de sympathie- se caractérise par le fait que « notre moi considère inconsciemment comme étant sien un processus circonscrit appartenant à une autre personne »244, jusqu’à arriver à

« l’identification complète [...] entre mon moi et un moi étranger ».245 Il s’agit donc d’une

véritable union ou identification au niveau vital ou existentiel,246 identification qui peut avoir lieu avec un être autant individuel que collectif (une communauté ou l’humanité tout entière). La fusion peut même se réaliser avec l’ensemble de la nature (vivante et inanimée247) ou avec le cosmos, ce qui s’appelle fusion cosmique ou cosmo-vitale.248 Pour comprendre la façon dont la fusion opère aux niveaux plus larges (avec l’humanité, la nature en général, etc.), il faut tenir compte du fait que cette faculté affective n’exige pas que nous éprouvions les sentiments sensoriels de l’objet de notre fusion (ce qui serait une

242 Patrick Lang, op.cit., p. 183. 243 Ibid.

244 Max Scheler, Nature, p. 34. 245 Ibid.

246 Ibid., p. 37.

247Scheler a bien noté qu’il existe des cas de fusion affective avec la nature inanimée, par exemple entre

certains peuples « primitifs » qui s’identifient avec des pierres; néanmoins, le philosophe souligne qu’« avec les choses mortes, et données comme telles, aucune fusion affective n’est possible [...] C’est seulement lorsque le corps mort, le corps inanimé, avec son changement et son mouvement, ses actions et réactions, sa naissance et sa disparition, est conçu, non comme tel, mais sous la forme d’une intuition ou d’une idée, et tel est le cas de l’organisme, dont nous avons l’intuition ou l’idée la plus directe et la plus pure, c’est alors que la fusion affective peut s’étendre à l’Univers entier, devenir cosmique. C’est alors que l’ensemble des manifestations de la nature représente, dans son indivisibilité, un champ d’expression universel et changeant de ce seul et unique organisme cosmique et de sa vie indivisible, partout répandue ». Ibid., p. 36, 128. Souligné dans l’original.

248 Ibid., p. 136. Notons qu’il y a un certain rapport entre la contagion et la fusion affective en ce que les deux

sont inconscientes et involontaires. À cet égard, Scheler ne détermine pas clairement s’il existe une différence de nature ou de degré entre les deux phénomènes : dans un premier temps le philosophe établit une nette distinction entre les deux, mais quelques pages plus loin il affirme que la fusion constitue « un cas exagéré, autant dire un cas limite de la contagion » (Ibid., p. 26, 34). Cependant, si la différence entre les deux sentiments est finalement de degré, ¿pourquoi la contagion est-elle exclue des formes authentiques de sympathie, tout en ayant une valeur négative, tandis que la fusion est à la base de ces formes, ayant par contre une valeur positive ? Nous sommes enclins à penser que cela pourrait s’expliquer par le fait que la fusion – surtout la fusion cosmique- dépasse généralement la simple « ‘extase’ momentanée » (Ibid., p. 35) propre à la contagion, pouvant même devenir une orientation vitale comme dans le cas de Saint François d’Assise que nous aborderons plus loin. De même, alors que la contagion se limite à absorber un sentiment déterminé (la joie, la tristesse, etc.) d’autrui, la fusion peut aboutir à une union totale avec ce dernier. Ainsi, étant donné que la fusion est potentiellement capable d’embrasser l’être d’autrui de manière plus profonde, c’est cette faculté qui serait en mesure de préparer le terrain pour l’établissement d’un véritable rapport avec autrui au moyen des formes supérieures de sympathie.

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fusion concrète); il suffit que l’individu total ou bien ses sentiments supérieurs (psychiques,

spirituels) demeurent accessibles à nous ou, dit autrement, qu’ils soient intelligibles affectivement pour nous (ce que Scheler appelle une fusion abstraite). Selon les mots de Scheler, « je puis réaliser ma fusion affective avec tout ce qui vit, avec l’humanité dans son ensemble, avec un peuple, une famille, sans pour cela embrasser tous les états affectifs [ou sentiments sensoriels] concrets que possède le sujet avec lequel je réalise cette fusion ».249

Par exemple, je peux m’identifier avec la souffrance (un sentiment psychique) des gens vivant dans un pays en guerre, même sans pouvoir éprouver la douleur physique (un sentiment sensoriel) de chacune des personnes qui habitent dans ce pays.

Mais ce qui précède constitue un exemple hypothétique. Est-il possible par contre de trouver des exemples réels de fusion affective? Scheler répond par l’affirmative et le prouve en faisant appel à une variété de cas tirés de l’anthropologie et de l’histoire ainsi que de la psychologie, dont nous ne mentionnerons ici que quelques-uns. À ce sujet, le philosophe repère la fusion ou l’identification affective dans le contexte des peuples dits « primitifs », comme celle qui se réalise entre le membre d’un totem et son animal totémique ou entre le membre d’une tribu et ses ancêtres ; dans ces deux cas, il n’y a plus deux moi, mais un moi uniquement : l’individu est son animal ou son ancêtre.250 Le mystique de l’antiquité fait aussi preuve de fusion affective lorsqu’il réussit, dans le cadre d’un état extatique, « à se sentir vraiment identifié avec l’être, la destinée et la vie du dieu ou de la déesse »251 en devenant « lui-même dieu ».252 La fusion apparaît également dans

les collectivités ou dans les foules vivant dans un état de guerre ou de révolution, étant donné qu’elles parviennent à former –lors de l’extase d’une bataille ou d’un rassemblement- une unité ou un bloc indivisible.253

249 Ibid., p. 149.

250 Ibid., p. 36. 251 Ibid., p. 37. 252Ibid.

253 Ibid., p. 60-61. Par rapport aux foules, Scheler affirme que « la fusion a lieu, d’une part, entre les membres

de la foule et le chef [...] et, d’autre part, il se produit une fusion réciproque des membres de la foule (par contagion cumulative et récurrente) emportée par le même courant impulsif et affectif qui détermine le comportement de toutes les parties, en le soumettant à sa propre rythme, et chasse capricieusement devant lui idées et projets d’actes comme le vent chasse les feuilles qu’il arrache de l’arbre ». Ibid., p. 44.

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Du côté de la psychologie, la vie psychique infantile et, plus précisément, les jeux de l’enfant constituent un exemple révélateur de fusion affective, puisque « ce qui pour l’adulte n’est qu’un ‘jeu’ est pour l’enfant une chose ‘sérieuse’ ou, tout au moins, une ‘réalité’ momentanée ».254En effet, lorsqu’une petite fille joue « à la maman » avec sa

poupée, elle ne fait pas « comme si » mais elle est réellement la maman, c’est-à-dire que la petite fille fusionne avec cette dernière. De même, la technique de l’hypnose ainsi que certains troubles psychopathologiques -comme l’identification avec une autre personne (un personnage historique, etc.)- constituent aussi des exemples de fusion affective, dans la mesure où il s’agit de situations dans lesquelles l’individualité, la distance entre mon propre moi et le moi d’autrui est annulée.255Cependant, d’après Scheler « le prototype [...] de toute

fusion affective avec le Cosmos »256 est l’acte sexuel qui découle de l’amour entre deux personnes (et non pas du simple désir « de jouissance, d’emploi utilitaire »257), étant donné qu’au moyen de cet acte, « les deux partenaires, enivrés jusqu’à l’oubli de leur personnalité spirituelle, croient se replonger dans le même courant vital dans lequel il n’existe plus de séparation entre les deux moi individuels ».258Autrement dit, l’acte sexuel entraîne une fusion affective réciproque, laquelle « transforme deux vies en un seul courant vital impétueux ».259

Nous trouvons aussi des exemples concrets de fusion affective dans l’histoire, notamment dans la vie de ceux que Scheler appelle les « génies affectifs »260, c’est-à-dire

les grands personnages d’Orient et d’Occident qui ont atteint des niveaux exceptionnels de fusion affective.261 Parmi ces cas, Scheler fait ressortir celui de Saint François d’Assise,

archétype de la fusion cosmique ou cosmo-vitale. À ce sujet, Scheler remarque que ce type de fusion n’entraîne pas nécessairement un panthéisme, puisque Saint François, par exemple, voyait 254 Ibid., p. 42. 255 Ibid., p. 37-44. 256 Ibid., p. 167. 257 Ibid., p. 44.

258 Ibid. Souligné dans l’original. 259 Ibid., p. 115.

260 Cf. le chapitre V de Nature et formes de la sympathie.

261 On peut citer par exemple la fusion négative ou souffrante hindoue (Bouddha), la fusion positive ou

joyeuse grecque (Platon, Aristote) et la fusion panthéiste de la Renaissance (Dante, Pétrarque). Nous renvoyons le lecteur au chapitre V de Nature et formes de la sympathie pour une information détaillée de ces formes de fusion.

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dans chaque produit de la nature une œuvre du Dieu créateur, spirituel et invisible, une des marches de l’énorme échelle par laquelle la nature cherche à s’élever vers Dieu, un escabeau sur lequel Dieu appuie ses pieds, une révélation de sa grandeur. D’après cette interprétation, la nature serait [...] non un objet direct de fusion affective avec une vie universelle détachée du Dieu spirituel ou même occupant le même rang que lui (c’est ce qu’elle était pour les panthéistes de la Renaissance), mais ainsi qu’en témoigne nettement son hymne au soleil, un symbole et un moyen de comparaison.262

L’examen des manifestations empiriques de la fusion affective permet à Scheler de tirer certaines conclusions concernant la nature de ce phénomène: d’abord, la fusion est automatique, de sorte qu’elle ne se produit « jamais à la suite d’un effort volontaire ».263

Ensuite, la fusion est associée à un certain degré de « primitivisme »,264 c’est-à-dire qu’elle apparaît surtout dans les stades, pour ainsi dire, « primaires » de l’évolution et de l’histoire humaines, comme le montre le fait qu’elle est plus fréquente dans les peuples dits « primitifs » ou dans l’étape infantile du développement humain individuel.265 Finalement,

Scheler soutient que la fusion se réalise surtout au niveau de la sphère vitale de l’homme, thèse sur laquelle nous nous attarderons un instant.

En effet, rappelons que la sphère vitale « se trouve à mi-chemin entre la conscience du corps qui, dans une unité spécifique et sui generis, comprend toutes les sensations fournies par les organes et par les sensations affectives localisées, et le côté spirituel et noétique de la personnalité, considérée comme le centre de toute l’activité intentionnelle ‘supérieure’ ».266 En ce sens, alors que les sphères sensible et spirituelle sont individuelles

et « appartiennent à chaque homme en propre et n’appartiennent qu’à lui »267 -étant ainsi inaccessibles à la fusion complète-,268 la sphère vitale humaine participe de ce que Scheler

262Max Scheler, Nature, p. 139-140. 263 Ibid., p. 59.

264 Ibid., p. 37.

265 Ibid., p. 54. Il convient de souligner que le caractère inconscient et primitif de la fusion n’implique pas que

cette dernière soit une faculté affective méprisable ; en fait, Scheler regrette qu’elle ait été « perdue » au cours du processus évolutif humain en faveur de la rationalité, étant donné que la perte de la faculté de la fusion entraîne à son tour la perte de notre capacité de rapprochement et de connexion avec le monde. Ibid., p. 54-55.

266 Ibid., p. 56. En ce sens, la couche vitale est le siège de « nos instincts en rapport avec la vie et avec la mort,

nos passions, nos sentiments, nos désirs et nos impulsions (faim et soif, impulsions vitales érotiques avec toutes leurs formes secondaires : désirs de puissance, de domination, d’expansion, d’affirmation de soi- même) [...] ». Ibid., p. 58.

267 Ibid., p. 56.

268Pour cette raison Scheler critique même l’idée de l’union mystique comme une « fusion » spirituelle avec

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appelle l’« élan vital » commun à l’ensemble des êtres vivants,269 de sorte que c’est cette

sphère qui serait en mesure d’être particulièrement ouverte à la fusion. D’après Scheler, un argument en faveur de cette hypothèse est le fait que la fusion entraîne, dans le sujet qui l’éprouve, un certain « oubli » de son être corporel ainsi que de son centre spirituel, comme c’est le cas pour l’acte sexuel, les extases mystiques de l’Antiquité et les actions impulsives des « foules révolutionnaires ».270 En effet, dans tous ces cas, « l’homme doit s’élever

‘héroïquement’ au-dessus de son corps et de tout ce qui présente pour lui de l’‘importance’, il doit oublier ou, tout au moins, ne pas tenir compte de son individualité, renoncer à sa dignité spirituelle, contempler d’un œil impassible le flux de sa vie ‘instinctive’ ».271

Concernant la thèse de Scheler selon laquelle la fusion affective ou l’identification « avec tout ce qui est vivant en général »272 constitue la « fondation » des autres formes de sympathie, notre philosophe soutient qu’

un minimum de fusion affective non spécifiée est nécessaire pour rendre possible l’intuition d’un être vivant (voire du mouvement organique le plus simple, en tant que distinct du mouvement d’un objet inanimé) en tant qu’être vivant, et que c’est sur cette base de la plus primitive intuition des êtres extérieurs que s’édifient la « reproduction affective » la plus élémentaire, la « sympathie » non moins élémentaire et, par-delà ces deux attitudes, la « compréhension » spirituelle.273

l’existence de l’un et celle de l’autre, un minimum de distance, ce que j’appelle une ‘distance intentionnelle’, et conduit tout au plus à une union inadéquate ». Ibid., p. 58.

269 Remarquons que le concept d’« élan vital » chez Scheler n’a pas la même signification que chez Bergson.

En effet, Scheler rejette la thèse bergsonnienne (qui est aussi la thèse des théories métaphysico-monistes en général) qui suggère l’existence d’une « essence cosmique par l’‘élan vital’ » (Ibid., p. 117), c’est-à-dire d’un principe d’unité cosmique qui embrasserait tout mode d’être, puisque, si c’était le cas, la sphère spirituelle de l’homme en particulier ne serait qu’« une ‘efflorescence’, une ‘sublimation’ de la vie » (Ibid.). Cela s’oppose au souci schelerien de préserver l’autonomie de chacune des couches anthropologiques (corporelle, vitale- psychique et spirituelle) et surtout celle de l’esprit, étant donné qu’« aucune manifestation noétique [spirituelle], quelles que soient sa forme et sa variété, ne se laisse ‘réduire’ aux lois biopsychiques » (Ibid., p. 117-118). Il admet par contre –mais seulement en tant que possibilité- l’existence d’un principe unique valide

exclusivement pour la sphère vitale ou, selon ses propres mots, « un principe vital universel et unificateur,

supra-singulier, source d’une finalité réelle valable pour tous les genres, pour toutes les espèces, pour tout ce qui est vivant sur la terre » (Ibid., p. 117), perspective qu’il ne considère toutefois « comme suffisamment prouvée », Ibid., p. 117.

270« Les foules révolutionnaires offrent, dans leurs mouvements, les mêmes états de griserie collective, dans

lesquels le moi corporel et le moi spirituel se fondent et disparaissent dans le mouvement vital passionné de la collectivité une et indivisible ». Ibid., p. 61.

271Ibid., p. 59-60.

272 Antonio Pintor Ramos, op.cit., p. 238. Ma traduction. 273 Max Scheler, Nature, p. 53.

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En d’autres termes, grâce à la fusion nous percevons la dimension vitale d’autrui. L’autre se révèle ainsi comme un être capable de se réjouir, de souffrir, etc., ce qui constitue à son tour la « matière première » de toute forme de partage affectif. Effectivement, aucun partage n’est possible sans la révélation initiale de l’autre comme un être extérieur à moi doué de sentiments et de vie en général.274 C’est donc l’intuition de la

vitalité d’autrui donnée premièrement par la fusion qui déclenche les autres actes de sympathie.

Une fois que l’autre s’est révélé en tant qu’être doué d’une vie affective, il est possible alors de reproduire affectivement (Nachfülhen) ou « revivre » (Nachleben)275 son sentiment. À ce sujet, la reproduction affective peut être définie comme « a feeling of the Other’s feeling, more than a mere knowing about it or a judgment that the Other has that feeling. In vicarious feeling one grasps the quality of the Other’s feeling without it migrating into oneself ».276 Dit autrement, dans la reproduction nous n’éprouvons pas le sentiment d’autrui comme tel, mais nous comprenons affectivement le caractère, la particularité propre à ce sentiment. Il s’agit de saisir la qualité ou la spécificité du sentiment d’autrui, de se faire une représentation, une « idée complète »277 de l’état psychique

d’autrui, sans l’éprouver nous-mêmes.278 Contrairement à la fusion, la reproduction

affective exige donc une prise de distance –consciente- par rapport à autrui.279 Bref, la reproduction constitue un acte cognitif qui nous permet de connaître et de comprendre la vie psychique d’autrui280, raison pour laquelle Scheler l’appelle aussi « compréhension

affective ».281 D’après Scheler, cette forme de sympathie apparaît dans plusieurs domaines

274 À cet égard, rappelons que si Saint François était capable de fusion affective avec l’ensemble de la nature

(humaine et extra-humaine), c’était précisément car il la concevait comme un champ d’expression ou une incarnation de la « vie divine ». Ibid., p. 141.

275 Max Scheler, Wesen, p. 19; Max Scheler, Nature, p. 20-21. 276 Michael D. Barber, op.cit., p. 116.

277Max Scheler, Nature, p. 21.

278« Nous ressentons pour ainsi dire les sentiments d’autrui, ce qui est plus qu’une simple connaissance ou un

simple jugement qu’autrui éprouve tel sentiment donné. Mais nous n’éprouvons pas le sentiment réel, en tant qu’état psychique. En revivant les sentiments d’autrui, no nous rendons également compte de la qualité de ces sentiments, sans nous laisser envahir par ceux-ci ou sans éprouver réellement des sentiments semblables ».

Ibid.

279Ibid., p. 149.

280 La reproduction affective « is a cognitive act, one in which we understand the emotional acts of persons ».

Eugene Kelly, op.cit., p. 151.

281 Dans l’édition allemande du livre qui nous concerne, Scheler utilise -en plus de Nachfühlen- le nom Verständnis et le verbe Verstehen pour parler de la reproduction affective, termes qui se traduisent par

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de la vie humaine, parmi lesquels l’évolution affective de l’homme. À ce sujet, notre philosophe affirme que la reproduction représente d’une certaine manière une évolution à l’égard de la fusion affective; ainsi, il nous dit qu’

en se plaçant au point de vue de l’évolution affective, qu’il s’agisse de l’évolution qui, de l’enfant, aboutit à l’homme adulte ou de celle qui aboutit de l’animal à l’homme ou de l’homme primitif au civilisé, [...] les états les moins évolués sont caractérisés principalement par la fusion affective, tandis que dans les états plus évolués, c’est la reproduction affective qui domine [...]. C’est ainsi [...] que la petite fille qui joue « à la maman » avec la poupée réalise une fusion affective aussi bien avec sa poupée [...] qu’avec sa propre mère [...]. Lorsque l’enfant qui se livre à ce jeu est déjà grande, nous assistons, non à une fusion, mais à une reproduction affective. C’est ainsi que l’identification primitive avec