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Tout travail comporte des forces et des limites, soient-elles anticipées ou découvertes en cours de réalisation. Le présent projet n’est pas exempt d’une telle situation. Concernant les forces, cette étude offre un portrait cohérent du développement de l’adulte parent en lien avec les compétences parentales jugées nécessaires au développement harmonieux de l’enfant. Elle permet aussi d’établir ou de confirmer certains liens entre les variables étudiées pour en dégager une compréhension plus intégrative et pour en évaluer les influences réciproques.

Une autre force de cette étude est sa pertinence sociale et éducative. Ceci a pu être constaté par la facilité à recruter des parents désirant participer à l’étude. En effet, très rapidement après l’annonce de recrutement, plus de 100 personnes avaient répondu au questionnaire en ligne. Ce qui a été encore plus révélateur, c’est le nombre de parents qui ont aussi désiré participer au deuxième volet de la recherche : 80% des participants ont indiqué se porter volontaires pour l’entrevue. Ceci témoigne bien de l’intérêt des parents pour les études portant sur la parentalité et ce qui s’y rattache. Il faut aussi souligner le sérieux avec lequel les parents participants se sont montrés disponibles à effectuer l’entrevue (jour, soir et parfois même la fin de semaine) et ont répondu aux questions en précisant leur pensée et en élaborant leurs

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réponses pour bien expliciter leurs idées, assurant ainsi une meilleure validité aux données recueillies.

Les différents apports de cette recherche se situent à plusieurs niveaux. Sur le plan individuel, les parents ayant participé à l’étude ont été amenés à réfléchir sur leur pratique éducative, expérience qui semble leur avoir été profitable. Plusieurs parents ont en effet mentionné à la fin de l’entrevue avoir apprécié prendre le temps de recul nécessaire pour se questionner sur leurs pratiques quotidiennes avec leur enfant qui sont généralement spontanées, sans réflexion immédiate sur l’objectif éducatif visé.

Sur le plan conceptuel, les résultats de cette étude ont permis d’élaborer une grille d’analyse sur la parentalité telle que conçue par des adultes qui la vivent quotidiennement. Cette grille permet d’illustrer les différentes étapes que traverse l’adulte issu d’une population normale, dans sa compréhension et sa conceptualisation de la parentalité, de même qu’elle permet d’y établir des liens qui la relient avec les diverses compétences parentales.

Sur le plan méthodologique, le fait d’avoir choisi un devis mixte a permis un possible dialogue entre les données quantitatives et qualitatives et d’en comprendre les contributions et limites respectives.

Nonobstant ces forces de l’étude, certaines limites se doivent d’être mentionnées afin de nuancer l’interprétation des résultats. Une des premières limites tient à certains choix méthodologiques, tel celui de ne sélectionner qu’une partie de l’entrevue sur le fonctionnement réflexif (PDI) en vue de limiter la durée de l’entrevue. Cette décision a entrainé une analyse appauvrie de la dimension affective liée au fonctionnement réflexif, telle par exemple le style d’attachement parent-enfant établi durant l’enfance et adopté ultérieurement par le parent avec son propre enfant; n’ayant pas récolté de données qualitatives à cet égard, il a été impossible de comprendre pourquoi l’attachement ne s’est pas montré corrélé avec le niveau de développement du parent ; de même, certaines expériences difficiles vécues durant l’enfance du parent et leurs effets sur son fonctionnement actuel avec son enfant n’ont pu être examinés en détail, faute d’avoir eu accès à des données pertinentes.

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Une autre composante est à considérer avant de généraliser les résultats à l’ensemble des parents. Les participants de l’échantillon manifestent certaines particularités, dont celle de vouloir collaborer à l’étude par une invitation transmise par l’école, particularités qui peuvent ne pas être présentes chez ceux qui n’ont pas manifesté une intention dans ce sens. Il est possible que ces derniers ne lisent pas les informations en provenance de l’école, n’avaient pas de temps à y consacrer ou n’avaient qu’un faible intérêt pour discuter de leur rôle parental.

D’autres facteurs empêchent de tirer des conclusions générales. L’échantillon de l’étude n’est pas représentatif de la population en ce qui a trait au niveau de scolarité; en effet, selon le dernier recensement, il est plus élevé que celui de la population québécoise. Il faut ajouter aussi que la majorité des participants de la présente étude sont des mères, ce qui limite la portée des résultats obtenus, d’autant plus que ces dernières années, on observe une participation accrue des pères dans l’éducation de leurs enfants et, de ce fait, un possible intérêt plus marqué à l’égard de leur rôle parental.

Enfin, il faut mentionner que les caractéristiques de l’enfant (non questionnées dans le questionnaire sociodémographique et non abordées lors de l’entrevue) sont susceptibles d’influencer les parents ou de nuancer leurs propos concernant leur rôle parental. Certains parents y ont fait référence spontanément, en révélant l’importance de leur influence. Par exemple, le cas de l’enfant qui, ayant reçu un diagnostic médical sur sa condition, a fortement influencé les comportements des parents à son égard; l’absence de questions plus spécifiques sur cet aspect a rendu impossible d’en mesurer les effets.

L’étude comporte une autre limite méthodologique en ce sens que les données établissant les différents niveaux de développement de la parentalité n’ont pas été récoltées selon un devis longitudinal. De ce fait, il a été impossible d’illustrer l’évolution du parent d’un niveau à l’autre, selon son expérience progressive et l’avancement en âge de son ou ses enfants (petite enfance, entrée à l’école, transition vers le secondaire, etc.). Pour pallier en partie à cette limite, les parents ont été encouragés à exprimer, de façon rétrospective, les changements de conceptions qu’ils se souvenaient avoir vécus. Mais c’est surtout en s’appuyant sur le modèle de Perry et en référant à des critères reconnus comme développementaux (passage du concret vers l’abstrait, du simple au complexe, etc.) qu’ont été déterminés et ordonnés les différents niveaux obtenus. Leur

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pertinence a d’ailleurs été établie par les nombreuses citations dégagées des protocoles des participants.

Il faut aussi mentionner l’existence d’un biais possible dans la procédure d’analyse des données par le fait qu’elles ont été analysées et codifiées par la même personne qui a pu être influencée, en passant d’une composante à l’autre, par les propos déjà émis par le participant. Cette influence a été atténuée de diverses façons. Dans le cas des données obtenues par entrevue sur le développement de la parentalité, le fonctionnement réflexif et le style d’éducation parentale, elles ont d’abord été transcrites, puis analysées par composante et non par participant. Le but poursuivi par cette démarche était d’obtenir, de manière indépendante, une vue d’ensemble des données sur chacune de ces composantes. Le nombre important d’entrevues réalisées a également contribué à rendre difficile tout rappel des données issues de chaque participant. Enfin, la chercheure a fait appel à deux collègues pour effectuer indépendamment la cotation des différents niveaux de développement de la parentalité par l’une d’elles et la cotation du fonctionnement réflexif par l’autre. Lorsqu’il y avait absence de consensus entre la cotation de la chercheure et celle d’une des collègues, il y avait discussion jusqu’à obtenir un accord inter juge.