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Endomorphismes des vari´et´es ab´eliennes

VI. Vari´et´es ab´eliennes

10. Endomorphismes des vari´et´es ab´eliennes

SoitX =V /Γun tore complexe de dimensiong; on noteEnd(X)l’anneau des endo-morphismes deX. Par le th´eor`eme I.2.3, p. 7, il s’identifie `a l’anneau des endomorphismes C-lin´eaires deV qui envoientΓdans lui-mˆeme. C’est un sous-anneau deEnd(Γ), donc un groupe ab´elien libre de rang au plus4g2. L’anneau des endomorphismes d’une vari´et´e ab´e-liennetr`es g´en´eraleestZ(exerc. VII.1, p. 102).

6. Voir exerc. VI.7.b).

10. ENDOMORPHISMES DES VARI ´ET ´ES AB ´ELIENNES 83

LaQ-alg`ebreEndQ(X) = End(X)⊗ZQest de dimension finie. Dans cette alg`ebre, les morphismes de mutiplication par un entier non nul sont inversibles, donc aussi, par 4.1, p. 72, toutes les isog´enies.

Th´eor`eme 10.1. — SoitX un tore complexe.

a) SiXest simple,EndQ(X)est un corps gauche.

b) SiX est une vari´et´e ab´elienne, elle est isog`ene `a un produitX1n1 × · · · ×Xrnr, o`u X1, . . . , Xrsont des vari´et´es ab´eliennes simples deux `a deux non isog`enes, et

EndQ(X)'Mn1(EndQ(X1))× · · · ×Mnr(EndQ(Xr)).

D´emonstration. — Tout endomorphisme non nul d’un tore simple est une isog´enie, qui est inversible dansEndQ(X). Cela prouve a). Le point b) r´esulte du th´eor`eme de Poincar´e 8.1.

D´efinition 10.2. — Soient(X, ω)une vari´et´e ab´elienne polaris´ee etuun endomorphisme deX. Posons

u0−1ω uϕˆ ω∈EndQ(X).

On a

(u0)0=u, (u+v)0=u0+v0 et (uv)0 =v0u0,

de sorte que l’on d´efinit ainsi une anti-involution0de laQ-alg`ebreEndQ(X), que l’on ap-pelleinvolution de Rosati.

10.3. — Soientuun endomorphisme de la vari´et´e ab´elienneX =V /ΓetuR l’endomor-phisme r´eel deV induit paru; il v´erifieuR(Γ)⊂Γ. Siuest une isog´enie, son degr´e est le cardinal de son noyauu−1R (Γ)/Γ, c’est-`a-dire[Γ :uR(Γ)], soit encore le d´eterminant deuR. Lorsqueun’est pas une isog´enie, le d´eterminant deuR est nul ; on posedeg(u) = 0. On d´efinit la trace deucomme ´etant celle deuR, et son polynˆome caract´eristiquePu comme celui deuR. C’est un polynˆome unitaire de degr´e2g`a coefficients entiers, et pour tout entier n, on a par ce qui pr´ec`ede

Pu(n) = deg(n−u), o`un:X →Xest la multiplication parn.

Th´eor`eme 10.4. — Soit(X, ω)une vari´et´e ab´elienne polaris´ee. L’application (u, v)7−→Tr(u0v)

est une forme bilin´eaire sym´etrique d´efinie positive rationnelle surEndQ(X).

D´emonstration. — Comme la trace estZ-lin´eaire, on peut suposer queuetu0 sont des en-domorphismes deX. Le polynˆome caract´eristique deu0est alors celui detuR, de sorte que

Pu0 =Pu =Pu. La forme bilin´eaire du th´eor`eme est donc sym´etrique. On a ensuite, pour tout entiern,

degϕnω−uω= deg(nϕω−ϕuω)

= deg(nϕω−uϕˆ ωu)

= deg(nϕω−ϕωu0u)

= deg(ϕω) deg(n−u0u) = deg(ϕω)Pu0u(n).

Comme la forme hermitienneH associ´ee `aω est d´efinie positive, il existe une base com-plexeBdeV dans laquelle cette matrice est l’identit´e, tandis que la matriceDde la forme hermitienne (positive) associ´ee `a uH est diagonale, de coefficients diagonauxa1, . . . , ag positifs. Puisqueω(x, iy) = ReH(x, y), la matrice deωdans la base r´eelle(B, iB)deV est

0 Ig

−Ig 0

, tandis que celle deuω est

0 D

−D 0

. SiP est la matrice de passage d’une base deΓ`a la base(B, iB), on a

pf(ω) =d´et(P), pf(nω−uω) =d´et(P)d´et(nIg−D).

Or le degr´e deϕnω−uωestpf(nω−uω)2(th. 4.2) et celui deϕωestpf(ω)2; on en d´eduit Pu0u(n) =d´et(nIg−D)2,

ce qui entraˆıneTr(u0u) = 2(a1+· · ·+ag)≥0. Si c’est nul,uωest nul, etuest nul.

SiXest une vari´et´e ab´elienne simple,K= EndQ(X)est donc un corps gauche de dimen-sion finie surQmuni d’une anti-involution0. Le th´eor`eme pr´ec´edent entraˆıneTrK/Q(u0u)>

0pour toutunon nul dansK. Les paires(K,0)v´erifiant cette propri´et´e ont ´et´e classifi´ees par Albert (cf.[LB,§5.5, p. 133]) ; cela permet de d´eterminer compl`etement la liste des alg`ebres EndQ(X)possibles.

Exercices

VI.1. — Th´eor`eme du cube.SoientXun tore complexe etπj:X×X×XX, pourj= 1,2,3, les trois projections. Pour tout fibr´e en droitesLsurX, le fibr´e en droites

1+π2+π3)L1+π2)L−12+π3)L−13+π1)L−1π1Lπ2Lπ3L surX×X×Xest trivial.

VI.2. — SoientXun tore complexe etnun entier. On notenl’endomorphisme deXde multiplication parn.

Montrer que pour tout fibr´e en droitesLsurX, on a

nL'L⊗n(n+1)/2(−1)L⊗n(n−1)/2.

VI.3. — Soientu:XY un morphisme entre tores complexes etLun fibr´e en droites surY. Montrer que le diagramme suivant est commutatif

X −→u Y

ϕuL y

yϕL

Xˆ ←−uˆ Yˆ

EXERCICES 85

VI.4. — SoientLun fibr´e en droites sur un tore complexeXetnun entier strictement positif.

a) MontrerK(Ln) ={xX|nxK(L)}.

b) Montrer l’´egalit´eeLn(x, y) =eL(x, ny)pour toutxdansK(L)etydansK(Ln).

VI.5. — SoientX=V /Γun tore complexe etu:XXˆun morphisme de groupes. Montrer que les conditions suivantes sont ´equivalentes :

(i) il existe un fibr´e en droitesLsurXtel queu=ϕL; (ii)ˆu=u.

VI.6. — SoientXle tore complexe quotient deC2par le r´eseau engendr´e par(i,0),(

2, i),(1,0)et(0,1), et Y le sous-tore deXimage du morphismeC/iZZXd´efini parz7→(z,0). Montrer qu’il n’existe aucun sous-toreZdeXtel queY ×Zsoit isog`ene `aX.

VI.7. — SoitΓun r´eseau dans un espace vectoriel complexeV. On appelle forme de Riemann toute forme hermitienne positive surV dont la partie imaginaire est enti`ere surΓ.

a) SoitH une forme de Riemann. Montrer que les formes de RiemannH0 telles que la forme hermitienne HH0soit positive sont en nombre fini.

b) En d´eduire que siDest un diviseur sur le tore complexeV /Γ, il existe des diviseurs effectifsirr´eductibles (cf.IV.2.6)D1, . . . , Drdeux `a deux distincts et des entiersn1, . . . , nrtels queD=n1D1+· · ·+nrDr.

VI.8. — SoitDun diviseur effectif ample sur une vari´et´e ab´elienneX. Montrer que tout sous-ensemble analytique compact deXqui ne rencontre pas le support deDest fini (Indication :il est contenu dans une fibre de l’application ψOX(3D)d´efinie en V.1.6, p. 52).

VI.9. — SoitXune vari´et´e ab´elienne de dimensiong; on d´efinit savari´et´e de KummerK(X)comme le quotient deXpar l’involutionι:x7→ −x. Il ressort du th´eor`eme de Cartan (th. VII.1.2, p. 91) queK(X)peut ˆetre muni d’une structure d’espace analytique de fac¸on queπ:XK(X)soit une application holomorphe.

a) Montrer queK(X)est une vari´et´e complexe sur le compl´ementaire des22gpoints images des points d’ordre 2deX.

b) SoitLun fibr´e en droites ample surX. Montrer queιLest un translat´e deL. On dit queLestsym´etriquesi ιL'L.

c) Soitωune polarisation principale surX. Montrer qu’il existe exactement22grepr´esentants sym´etriquesLde ω, et que le fibr´e en droitesM=L2ne d´epend que deω. Montrer qu’il d´efinit un morphismeψM:XP2g−1.

d) Sous les hypoth`eses de c), montrer que le morphismeψMse factorise en ψM:X−→K(X)−→ψ P2g−1.

Montrer queψest injectif et que c’est un plongement sur le lieu lisse deK(X)(on peut montrer que c’est un plongement partout ; ceci entraˆıne par le th´eor`eme de Chow (cf.§6) queK(X)est une vari´et´e alg´ebrique projective).

VI.10. — Soient(X, ω)une vari´et´e ab´elienne principalement polaris´ee etΘun diviseur thˆeta (cf.§6) sym´etrique (cf.exerc. VI.9.b)).

a) Soientaetbdes ´el´ements de12Zg/Zg. Montrer que la fonction thˆetaϑ ha

b i

(·, τ)a mˆeme parit´e que4tab.

b) En d´eduire queΘcontient au moins2g−1(2g1)points de2-torsion deX, et que s’il contient l’un des 2g−1(2g+ 1)points de2-torsion restants, il est singulier en ce point.

VI.11. — SoientEla courbe elliptique dont le groupe d’automorphisme est d’ordre4(cf.exerc. II.12, p. 23) etA la vari´et´e ab´elienneE4.

a) Montrer que la donn´ee d’une polarisation principale ind´ecomposable surA´equivaut `a celle d’une forme hermitienne positive unimodulaire ind´ecomposable sur leZ-moduleZ[i]4.

b) Montrer qu’une telle forme existe et est unique(7)(Indication :sa partie r´eelle, qui est une forme quadratique positive unimodulaire surZ8, est n´ecessairement la forme quadratique canonique sur le r´eseauΓ8du syst`eme de racinesE8).

etCjune base complexe deVj, orthonormale pour la forme hermitienne associ´ee `ac1(Lj). SoitPjla matrice de passage de la baseBj`a la baseCjtiCjde(Vj)R. Montrer l’´egalit´edimH0(Xj, Lj) = 1/d´et(Pj).

b) SoientAune matrice rectangulaire quelconque etH = I A

tA I

!

matrice hermitienne d´efinie positive.

Montrer d´et(H)1; s’il y a ´egalit´e,Aest nulle.

c) En d´eduire le r´esultat cherch´e.

VI.13. — SoitKun corps de nombres totalement r´eel de degr´eg, soitOK l’anneau de ses entiers, et soient σ1, . . . , σg les diff´erents plongements deK dansR. Soientτ1, . . . , τg des nombres complexes dont la partie

b) Montrer que l’alg`ebreEndQ(X)contientK.

VI.14. — L’astuce de Zarhin. Soient(X, ω)une vari´et´e ab´elienne polaris´ee etnun entier tel quen(Kerϕω) = 0, de sorte que−1ω d´efinit une applicationXˆ X.

Montrer que l’applicationϕMest injective et queMd´efinit une polarisation principale surX×Xˆ.

b) Montrer qu’il existe une polarisation principale sur la vari´et´e ab´elienne(X×X)ˆ 4(Indication :on pourra

consid´erer l’endomorphismeudeX4de matrice

VI.15. — SoitXune vari´et´e ab´elienne dont le groupe des endomorphismes est isomorphe `aZ.

a) Montrer que toute vari´et´e ab´elienne isog`ene `aXa la mˆeme propri´et´e.

b) Montrer que les seules sous-vari´et´es ab´eliennes deXsont0etX.

7. La vari´et´e ab´elienne principalement polaris´ee ind´ecomposable ainsi construite est ´etudi´ee dansAnnulation de thˆetaconstantes sur les vari´et´es ab´eliennes de dimension quatre, C.R.A.S., t. 305, S´erie I (1987), 885–888 et dans R. Varley,Weddle’s surface, Humbert’s curves, and a certain4-dimensional abelian variety, Am. J. of Math.

108(1986), 931–952. Son groupe d’automorphismes est d’ordre 46080. Elle admet une polarisation principale ind´ecomposable et une autre polarisation pour laquelle elle est produit de4courbes elliptiques.

8. On trouvera dans l’articlePolarisations sur les vari´et´es ab´eliennes produits, C.R.A.S., t. 323, S´erie I (1996), 631–635, une d´emonstration alg´ebrique de ce r´esultat.

EXERCICES 87

c) Montrer que le groupeNS(X) = Pic(X)/Pic0(X)(cf.rem. V.5.12.2), p. 63) est isomorphe `aZ. En parti-culier, les polarisations deXsont toutes proportionnelles.

VI.16. — Soit(X, ω)une vari´et´e ab´elienne polaris´ee.

a) Montrer que l’on peut d´efinir une application

NS(X)ZQ −→ EndQ(X) η 7−→ ϕ−1ω ϕη

et que son image est l’espace vectoriel des ´el´ements sym´etriques deEndQ(X), c’est-`a-dire qui v´erifientu0 =u (Indication :utiliser l’exercice VI.5).

b) Lorsque la polarisationωest principale, montrer que cette application se restreint en un isomorphisme entre NS(X)et l’ensemble desvraisendomorphismes sym´etriques deX (l’involution de Rosati est dans ce cas d´efinie surEnd(X)puisqueϕωest un isomorphisme).

VI.17. — Soient(X, ω)une vari´et´e ab´elienne polaris´ee etuun automorphisme de(X, ω), c’est-`a-dire tel que uω=ω.

a) Montrer l’´egalit´eu0u= 1dansEndQ(X).

b) En d´eduire que le groupe d’automorphismes de(X, ω)est fini (on obtiendra dans le corollaire VII.3.5, p. 98, une borne explicite sur l’ordre de ce groupe).

CHAPITRE VII ESPACES DE MODULES

1. Espaces de modules de vari´et´es ab´eliennes polaris´ees

SoientX = V /Γ un tore complexe etω une polarisation surX. La proposition VI.1.1 permet d’associer `aωdes entiersd1, . . . , dgstrictement positifs v´erifiantd1 | · · · | dg. On appelera∆ = (d1, . . . , dg) letype(1) de la polarisationω. On note encore∆ la matrice diagonale de coefficients diagonauxd1, . . . , dg.

On cherche `a param´etrer les classes d’isomorphisme de vari´et´es ab´eliennes munies d’une polarisation de type fix´e. Par le th´eor`eme VI.1.3, p. 66, toute vari´et´e ab´elienne polaris´ee de type∆est isomorphe au quotientXτ deCgpar un r´eseauΓτ =τZg⊕∆Zg, o`uτest dans le demi-espace de Siegel

Hg={τ∈Mg(C)|τ=tτ,Imτ >0}.

Pour que de telles vari´et´esXτ etXτ0 soient isomorphes, il faut et il suffit qu’il existe un automorphismeudeCgqui v´erifieu(Γτ0) = Γτ(th. I.2.3, p. 7). SoientAla matrice de l’ap-plicationC-lin´eaireudans la base canonique deCgetNsa matrice (enti`ere) dans les bases deΓτ0 etΓτ correspondant aux colonnes des matrices τ0

et τ ∆

respectivement.

Notonsσl’automorphisme P 7−→

Ig 0

0 ∆

−1 P

Ig 0

0 ∆

deGL2g(Q); il est plus commode de consid´erer la matrice (rationnelle)M =σ(N)deu dans les basesC0 etC correspondant aux colonnes des matrices τ0 Ig

et τ Ig

. On a la relation

A τ0 Ig

= τ Ig

M.

1. Cette notion de type est diff´erente celle de type de fibr´e en droites d´efinie dans le th. V.5.10, p. 62, mais cela ne posera pas de probl`eme. On s’autorisera aussi `a parler de fibr´e en droites (ample) de type(d1, . . . , dg)sur une vari´et´e ab´elienne.

Si on ´ecrittM = de sorte que la matricecτ+dest inversible et

τ0= (aτ+b)(cτ+d)−1.

Siuinduit aussi un isomorphisme entre vari´et´es ab´eliennespolaris´ees, il respecte les formes altern´ees de matriceJ =

0 Ig

−Ig 0

dans les basesC0 etC, de sorte queM, donc aussi

tM, appartient au groupe symplectique

Sp2g(Q) ={M ∈GL2g(Q)|M JtM =J}.

R´ecapitulons : pour que des vari´et´es ab´eliennes polaris´eesXτ etXτ0 soient isomorphes, il faut et il suffit qu’il existe un ´el´ement

a b tel que la matricecτ +dest inversible (nous verrons dans la d´emonstration de la proposi-tion 1.1 que cette condiproposi-tion est toujours r´ealis´ee) etτ0= (aτ+b)(cτ+d)−1. L’isomorphisme entreXτetXτ0(induit paru−1) est d´efini par

2. Lange et Birkenhake utilisent dans [LB] la mˆeme action que nous (avec les mˆemes notations pourσetG).

Igusa pr´ef`ere utiliser dans [I] l’action

1. ESPACES DE MODULES DE VARI ´ET ´ES AB ´ELIENNES POLARIS ´EES 91

D´emonstration. — Pour qu’une matriceM = a b

c d

soit dansSp2g(R), il faut et il suffit que

tac=tca, c’est-`a-dire tac sym´etrique ;

tbd=tdb, c’est-`a-dire tbd sym´etrique ;

tad−tcb=Ig=tda−tbc.

On en d´eduit en d´eveloppant

(26) t(cτ+d)(aτ+b)−t(aτ +b)(cτ+d) =τ−τ= 2iImτ.

Sivest un vecteur complexe tel que(cτ+d)v= 0, cette formule entraˆınetv(2iImτ)v= 0, soitv = 0puisqueImτest non d´eg´en´er´ee. Le membre de droite de la formule (25) est donc bien d´efini pour toutM dansSp2g(R); notons-leτ0. On a aussi

t(cτ+d)(τ0tτ0)(cτ+d) =τ−tτ= 0, de sorte queτ0est sym´etrique. Enfin, la relation (26) s’´ecrit aussi (27) t(cτ+d)(τ0tτ0)(cτ+d) = 2iImτ,

de sorte que Imτ0 est d´efinie positive ; la matrice τ0 est donc dans Hg. On v´erifie sans probl`eme que l’on d´efinit bien ainsi une action du groupeSp2g(R)surHg.

L’ensemble des classes d’isomorphisme de vari´et´es ab´eliennes polaris´ees de type∆est donc en bijection avec le quotientG\Hg. Grˆace au th´eor`eme suivant de H. Cartan ([C2]), on peut munir ce quotient d’une structure naturelle d’espace analytique(3).

Rappelons que l’action d’un groupe Gsur un espace topologiqueX est dite propre et discontinuesi, pour tout compactKdeX, l’ensemble{g∈G|gK∩K6=∅}est fini.

Th´eor`eme 1.2(H. Cartan). — SoientX un espace analytique,Gun groupe agissant pro-prement et discontinˆument sur X par transformations biholomorphes, et ρ: X → X/G

3. Je renvoie au chap. 5 de [GR] pour une d´efinition pr´ecise des espaces analytiques. L’id´ee est assez simple : de la mˆeme fac¸on qu’une vari´et´e complexe est un espace topologique qui ressemble localement `a un ouvert de Cn, un espace analytique ressemble localement `a un sous-ensemble d’un ouvert deCnd´efini par des ´equations holomorphes (on permet ainsi des singularit´es). Le bon langage pour une d´efinition correcte est celui des faisceaux : on d´efinit un espace analytique comme une paire(X,OX), o`uXest un espace topologique etOXle faisceau des fonctions holomorphes surX(on peut tr`es bien, mˆeme si ce n’est pas l’approche habituelle, d´efinir de la mˆeme fac¸on une vari´et´e diff´erentiable comme un espace topologique muni d’un faisceau de fonctions localement isomorphe `a un ouvert deCnmuni du faisceau des fonctions diff´erentiables sur cet ouvert ; dans notre cas, il faut pr´eciser ce qu’on entend par fonction holomorphe sur un sous-espace analytique, peut-ˆetre singulier, deCn, et cela se fait tr`es bien avec le langage des faisceaux quotients). On dit qu’un pointxd’un espace analytiqueXestlisse, ou queXest lisse enx, s’il existe un voisinage dexdansXqui est une vari´et´e complexe. Dans le cas contraire, on dit queXest singulier enx, ou quexest un point singulier deX. Par exemple, l’espace analytique d´efini par l’´equationx2=y3 dans le planC2a un seul point singulier, l’origine.

l’application quotient. Le faisceau d’anneauxOsurX/Gd´efini pour tout ouvertUdeX/G par

O(U) ={f:U →C| f ◦ρest holomorphe dansρ−1(U)}

d´efinit surX/Gune structure d’espace analytique.

Sous l’hypoth`ese du th´eor`eme, les stabilisateurs sont finis. SiXest une vari´et´e complexe, X/Gest localement quotient d’une vari´et´e par un groupe fini ; ce type de singularit´e est assez b´enin et les espaces analytiques de ce type jouissent de beaucoup des propri´et´es des vari´et´es complexes. En tout ´etat de cause, si l’action de Gest de plus libre, X/Gest une vari´et´e complexe.

Tout ce passe bien dans notre cas, comme le montre la proposition suivante.

Proposition 1.3. — Tout sous-groupe discret deSp2g(R)agit proprement et discontinˆument surHgpar la formule (25).

D´emonstration. — SoientGsous-groupe discret deSp2g(R)etKun compact deHg. Soit M =

a b c d

un ´el´ement deGtel que(M·K)∩Ksoit non vide ; prenonsτM ∈(M·K)∩K et posons τM0 = M−1·τM. SoientHτM la forme hermitienne d´efinie positive surCg de matrice(ImτM)−1etuM l’automorphisme deCg de matricet(cτM +d)−1. L’´egalit´e (27) s’´ecrit alorsHτ0

M =HτM◦uM. CommeImτM etImτM0 sont dans un compact deGLg(C), il en est de mˆeme pouruM. Il s’ensuit quecτM+dest dans un compact, donc aussi sa partie imaginairecImτM, donc aussic, puisd, ainsi queaτM0 +b=τM(cτM0 +d), donc aussiaet bpar le mˆeme raisonnement. Il s’ensuit queM est dans un sous-ensemble compact donc fini deG.(4)

Le th´eor`eme de Cartan permet ainsi de munir l’ensembleG\Hgdes classes d’isomor-phisme de vari´et´es ab´eliennes polaris´ees de type∆d’une structure d’espace analytique de mˆeme dimensiong(g+ 1)/2queHg. On appelle cet espace l’espace des modulesdes vari´e-t´es ab´eliennes polaris´ees de type∆; on le noteAg,∆, ou simplementAglorsque∆ =Ig.

Le stabilisateurG∆,τ d’un pointτdeHg sous l’action deGest isomorphe au groupe Aut(Xτ, ωτ) des automorphismes ude la vari´et´e ab´elienne Xτ qui conservent la polari-sation(5), c’est-`a-dire tels que uωτ = ωτ. Il contient toujours−IdXτ (cf.exerc. VI.9.b), p. 85), mais l’action deG/{±I2g}n’est cependant pas libre : il existe en toute dimension des vari´et´es ab´eliennes polaris´ees dont le groupe d’automorphismes contient strictement(6) {±Id}.

4. On pourra pr´ef´erer la d´emonstration plus conceptuelle de [LB, p. 218] qui utilise le fait que l’action (25) de Sp2g(R)est transitive `a stabilisateurs compacts, ce qui entraˆıne que la surjectionSp2g(R)Hgest propre.

5. Il ressort de l’exercice VI.17, p. 87, que ce groupe est fini. Cela r´esulte aussi du fait que l’action deGest propre et discontinue. On obtiendra dans le corollaire 3.5 une borne explicite sur l’ordre de ce groupe.

6. En dimensiong >1, siE1, . . . , Egsont des courbes elliptiques, le groupe d’automorphismes de la vari´et´e ab´elienneE1× · · · ×Egmunie de la polarisation produit(d1)× · · · ×(dg)contient(Z/2Z)g; en dimension 1,cf.exerc. II.12, p. 23. Cependant, pour une vari´et´e ab´elienne polaris´ee(Xτ, ωτ)tr`es g´en´erale, c’est-`a-dire

1. ESPACES DE MODULES DE VARI ´ET ´ES AB ´ELIENNES POLARIS ´EES 93

Au voisinage d’un point correspondant `a une vari´et´e ab´elienne polaris´ee(Xτ, ωτ), l’es-pace analytiqueAg,∆est isomorphe au quotient d’un voisinageUdeτdansHgpar l’action deG∆,τ. Une telle action peut toujours ˆetre lin´earis´ee, c’est-`a-dire que le quotientU/G∆,τ

est isomorphe en tant qu’espace analytique au quotient d’un voisinage de0 dans l’espace tangentT `aHgenτpar l’action deG∆,τ. Identifions cette action.

Lemme 1.4. — Le groupeG∆,τ agit `a gauche sur l’espace vectorielT des matrices com-plexes sym´etriques d’ordregpar

D´emonstration. — Pour toutεdansT et toutM = a b

Comme on l’a vu en (24), la matrice dans la base canonique deCg de la diff´erentielle de l’automorphisme deXτ associ´e `aM estA =t(cτ +d)−1; puisqueM−1 =

Par un th´eor`eme de Chevalley(8), pour que le quotientG\Hg soit lisse au voisinage de la classe deτ, il faut et il suffit queG∆,τ soit engendr´e par des ´el´ements qui agissent comme des pseudo-r´eflexions surT, c’est-`a-dire des applications lin´eaires qui sont l’identit´e sur un hyperplan. Gardons nos notations ; commeAest d’ordre fini, elle est diagonalisable

pourτdans un ouvert dense deHg, on a bienAut(Xτ, ωτ) =Id}(cf.exerc. VII.1, p. 102, pour le cas d’une polarisation principale et exerc. II.12, p. 23, en dimension1).

7. Le lecteur savant se sera souvenu que les d´eformations au premier ordre de la vari´et´e complexeX =V /Γ sont param´etr´ees par l’espace vectorielH1(X, T X), o`uT Xest le fibr´e tangent `aX(th´eorie de Kodaira). OrT X est trivial, de sorte que

H1(X, T X)'H1(X,OX)H0(X, T X)'VV.

L’application tangente de l’isog´enieϕω:XXˆinduit un isomorphisme entreH0(X, T X)etH1(X,OX). On obtient doncH1(X, T X)'V V et l’action d’un automorphismeudeXpr´eservant la polarisation est donn´ee paru·(x⊗y) =u(x)⊗e u(y), o`ue euest l’automorphisme lin´eaire deVassoci´e `au. L’espace vectorielTparam`etre les d´eformations au premier ordre de lapaire(X, ω); celles-ci correspondent aux tenseurssym´etriquesdansV⊗V (on trouvera tous les d´etails—expos´es de fac¸on tr`es formelle—dans l’article de G. Welters :Polarized abelian varieties and the heat equations, Comp. Math.49(1983), p. 181). On retrouve ainsi de mani`ere plus alg´ebrique le r´esultat du lemme.

8. Voir Bourbaki, Groupes et Alg`ebres de Lie, Ch. V,§5, exerc. 7.

de valeurs propresλ1, . . . , λg, et l’action deMsurTa comme valeurs propres lesλjλkpour 1 ≤ j ≤ k ≤g. La seule possibilit´e, en dehors deA =±Ig, pour que l’espace propre de la valeur propre1contienne un hyperplan estg = 2,λ1 = 1etλ2 =−1. On en d´eduit le r´esultat suivant(9)qui entraˆıne queAg,∆n’est jamais une vari´et´e complexe (cf.note 6, p. 92).

Th´eor`eme 1.5. — Les points lisses de Ag,∆ correspondent exactement, pourg ≥ 3, aux vari´et´es ab´eliennes polaris´ees dont le groupe d’automorphisme est{±Id}.

Ce r´esultat n’est plus vrai pour g = 2: les surfaces ab´eliennes polaris´ees produits de deux courbes elliptiques g´en´erales correspondent `a des points lisses deA2,(1,p), bien que leur

Ce r´esultat n’est plus vrai pour g = 2: les surfaces ab´eliennes polaris´ees produits de deux courbes elliptiques g´en´erales correspondent `a des points lisses deA2,(1,p), bien que leur