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Figure 6 Diversité des stratégies d’entreprises

Spécialisation Lait avec sous traitance de la production d’aliments et élevage de génisse Lait et produits associés (fourrage, aliment, renouvellement)

Diversification Horizontale Ressources sectorielles

- Production d'énergie (biogaz, éolien, énergie solaire, etc.) - autre production animale ou végétale.

- Offre de sous-traitance ou d'autres services à d'autres fermes Ressources

territoriales

- Agro-tourisme

- Services environnementaux pour capter les primes offertes par le gouvernement.

Verticale Ressources individuelles

Transformation à la ferme et Ventre directe Ressources

collectives

Démarche collective de différentiation (également une stratégie de coopération)

La stratégie commerciale (2) s’articule avec la stratégie d’entreprise et définit son positionnement de marché. Elle renvoie aux approches stratégiques mises en avant par Porter (1985): la domination par les coûts (cost leadership), la différenciation (differentiation) et les stratégies de ciblage (focus).

Dans la stratégie de domination par les coûts, il s’agit de produire un produit qui, dans tous les aspects économiques pertinents, correspond à celui d'un concurrent - ou du moins considéré comme acceptable par les consommateurs - à un coût inférieur à celui des autres concurrents et à l’offrir à un prix moins élevé. C’est la stratégie dominante de la concurrence dans l’agriculture de la période d’industrialisaiton post seconde guerre mondiale. Les leaders des coûts sont généralement de grandes entreprises qui réalisent des économies d’échelle dans la production. Les économies d’échelle peuvent aussi concerner les autres fontions de l’entreprise : activités d’achat, logistique et distribution. Toutefois les économies d’échelle ne sont pas infinies comme en témoigne la forme en U des courbes de coût. L’agrandissement finit par générer des coûts supplémentaires de coordination notamment. En outre, d’autres outils de réduction des coûts peuvent être mis en œuvre, quelle que soit la taille de l’entreprise: des gains d’efficacité technique et d’allocation (effets d’apprentissage), une réduction du coût de la main-d’œuvre, des choix technologiques différents (machine outil modulaire, races mieux adaptées, etc.. ). La libéralisation du marché européen, par l’extension de l’espace de concurrence exerce une pression et une nécessité de révision de la stratégie de domination par les coûts, soit par une accentuation de la maîtrise des coûts, soit par un changement de stratégie. La première alternative defensive, vise à protéger l'entreprise contre la puissance des acheteurs, qui ne peuvent exercer leur pouvoir de marché pour faire baisser les prix au niveau du concurrent le plus efficace (Porter, 1980).

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Dans la stratégie de différentiation, le client considère que les produits ou services de l’entreprise ont des caractéristiques uniques pour lesquels il accepte de payer plus cher. Les approches que les agriculteurs peuvent adopter pour se différencier incluent le développement de marques propres, le plus souvent en lien avec une diversification verticale, la participation à des démarches collectives de qualité (AOP ou IG) et la mise en place de critères de production stricts pour se différencier du lait standard (démarches de producteurs, BIO). Le respect d’un cahier des charges et de règles collectives intégrée dans l’organisation (devoirs) permet d’accéder à une rente de qualité et à une capacité d’innovation (droits) (Dervillé, 2012). Les entreprises ayant des stratégies de différenciation présentent généralement un désavantage en termes de coûts, mais sont néanmoins rentables en raison de la fidélité accrue de leurs clients et de leur consentement à payer un prix plus élevé, ce qui évite dans une certaine mesure de recourir à une réduction des coûts.

Les entreprises qui adoptent des stratégies ciblées se concentrent sur des segments de marché restreints : un groupe d'acheteurs, un segment de la gamme de produits ou un marché géographique particulier. La stratégie repose sur le principe que l'entreprise est ainsi en mesure de servir le segment de marché étroit visé de manière plus efficace ou efficiente que ses concurrents. Les exploitations laitières, faisant de la vente directe (Shani and Chalasani, 1992) auprès de groupes ou de zones spécifiques, ou ciblées sur les acheteurs de produits non allergiques (Duarte-Vázquez et al., 2017) se rapprochent de cette stratégie. La multiplication des stratégies de différentiation renvoie aussi à l’évolution des modes de consommation et de production dans une optique de création de « valeur pour le client » (Reynaud, 2009) ; appréhendée ici comme élargissement de la stratégie de focalisation.

La Stratégie patrimoniale (3) correspond aux modalités de gestion et de renouvellement des ressources de l’entreprise sur le temps long. La vision de la gestion stratégique basée sur les ressources établit une distinction entre les ressources matérielles - telles que les terrains, les bâtiments, les machines et les fournitures - et les ressources immatérielles - telles que le savoir-faire en matière de marketing ou de production et le capital humain, y compris les capacités, les connaissances, le talent, la capacité et la motivation du directeur de l'exploitation et, le cas échéant, des membres de sa famille ainsi que des employés (Barney, 1991 Barney, 2001;Penrose, 1959;Wernerfelt, 1984). La spécificité des entreprises agricoles tient à la place des ressources « naturelles » ou plus précisément à la valorisation des processus biologiques dans le processus productif. Ainsi, les exploitations peuvent être dans une logique linéraire d’extraction de ressources naturelles ou au contraire dans une logique circulaire de recyclage. La stratégie patrimoniale concerne aussi l’équilibre entre ressources naturelles, humaines et financières. Traditionnnellement, les entreprises agricoles familiales cherchent à valoriser le travail (Cochet 2017). Ainsi, les processus de substitution capital / travail et/ ou capital / ressources naturelles sont au coeur de ce processus stratégique.

Un changement de stratégie patrimoniale, un changement dans l’équilibre des ressources créées et utilisées par l’entreprise correspondant par une innovation de rupture. Le développement de systèmes de production et de formes d'organisation nouveaux et innovants revêt une importance particulière en temps de crise ({Coquil, 2014 #1044}), ce qui est extrêmement pertinent pour le contexte actuel du secteur laitier européen. Pour rappel, une gestion des ressources basée sur la résilience “insisterait sur la nécessité (…) de concevoir des systèmes capables d'absorber et de gérer les événements futurs sous quelque forme inattendue qu'ils puissent être” (Holling, 1973, p. 21 cité par Darnhofer 2014), à savoir potentiellement un investissement dans des ressources renouvelables qui pourait être remobilisée selon une orientation différentes en fonction de la pression des facteurs externes d’exposition.

La stratégie patrimoniale renvoie aussi aux choix de croissance, de stabilité ou de réduction des activités de l’entreprise (Hunger and Wheelen 2003). La dynamique de la croissance est souvent liée au cycle de vie de la ferme, c’est-à-dire à son âge et au futur plan de relève de la ferme. Les agriculteurs proches de la retraite ont tendance à ne plus investir dans la croissance quand aucune succession n'est prévue, tandis que les jeunes agriculteurs ont tendance à investir dans la croissance et que les agriculteurs d'âge moyen

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ont plus facilement accès aux crédits ({Gale Jr, 1994 #1042;Potter, 1996 #1043}). Les enjeux de tranmission des exploitations concernent ce processus patrimonial.

La Stratégie fonctionnelle (4) détermine les procédures dans les domaines fonctionnels de l'entreprise. Après avoir défini les stratégies patrimoniales, d’entreprises et commerciales, les gestionnaires prennent des décisions relatives à leur opérationnalisation (management opérationnel). La stratégie fonctionnelle correspond à une marge de manœuvre à court et moyen termes dans le cadre défini par les composantes stratégiques de long terme précédemment définies. Elle correspond aux choix technico-économiques et organisationnels. Des exemples en sont les achats, la production, le marketing, la structure financière, les ressources humaines, la conception organisationnelle et les stratégies de R & D ({Van Fleet, 2013 #1045}). Dans le cas des exploitations laitières, cela correspond aux modes d’organisation du travail et aux choix en matière de génétique et de gestion du troupeau, d’alimentation du troupeau et notamment de la place de l’herbe dans le système. Ces procédures, en lien avec des capacités d’information et d’expérimentation, contribuent aux capacités d’apprentissage de l’entreprise. Elles sont le lieu d’innovations incrémentales. Les processus stratégiques fonctionnels interragissent avec les processus stratégiques d’entreprise commercials et patrimonials. Ils alimentent et sont le support des capacités dynamiques, tant sur le plan de la création de valeur que de sa captation.

La stratégie de coopération (5) renvoie à la nature et à l’ampleur des ressources collectives mobilisées par l’entreprise. Les coopérations peuvent être définies comme une interaction sociale volontaire d'au moins deux personnes ou groupes travaillant ensemble pour augmenter le degré de réussite des objectifs (Hein et al., 2011). Les coopérations peuvent être convenues verbalement ou formellement. La

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