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Chapitre II : Recension des écrits Autisme

2.3 Étiologie de l’autisme

2.3.1 Facteurs génétiques

L’autisme peut être vu comme la manifestation comportementale de troubles génétiques hétérogènes et complexes (83). L’amélioration constante de la technologie et des outils de recherche facilitent l’identification de nouveaux facteurs et une proportion croissante de cas d’autisme (près de 25 %) peut maintenant être associée à des facteurs génétiques connus (82).

Les facteurs de risque génétiques de l’autisme représentent différents types de variations sur un seul nucléotide (single nucleotide variants; SNV) ou encore du nombre de copies de gènes et/ou de fragments chromosomiques (copy number variants; CNV). La majorité de ces variations sont héréditaires, alors que d’autres apparaissent spontanément (de

novo) (83). Il est actuellement estimé qu’entre 500 et 1000 gènes différents pourraient être

impliqués, causant alors les formes monogéniques, ce qui démontre l’hétérogénéité génétique de cette condition.

Les variations génétiques identifiées dans l’autisme touchent souvent des gènes codant des protéines impliquées dans des fonctions cellulaires spécifiques (p. ex. remodelage de la chromatine, synthèse et dégradation des protéines, transport intracellulaire) (83, 84). Plusieurs de ces gènes sont essentiels pour l’intégrité des fonctions neuronales, telles que la croissance des axones (p. ex. SHANK2/3), la synaptogenèse (p. ex. NLGN3/4x, NRXN1/3) et la transmission synaptique (p. ex. GABRA3/B3, GLRA2) (83, 85). Il est d’ailleurs bien établi que

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cette condition partage des facteurs génétiques communs avec d’autres conditions neurologiques (p. ex. épilepsie, DI, schizophrénie, trouble déficitaire de l’attention) (86-88).

Environ 10 % des individus autistes présenteraient des altérations génétiques causant d’autres types de syndromes (85, 89). Parmi les plus communs, notons par exemple le X fragile (SNV près du promoteur du gène FMR1;  2 % des cas de TSA), la sclérose tubéreuse de Bourneville (SNV sur les gènes TSC1 ou TSC2 ;  1 %), la neurofibromatose (altérations du gène NF1 ;  1 %) et le syndrome de Rett (SNV du gène MECP2 ;  1 %). D’autre part, 5 % des individus autistes auraient des anomalies chromosomiques et/ou du caryotype (85, 90). L’autisme a également été associé à des altérations chromosomiques causant des conditions congénitales connues, telles que certaines formes du syndrome de Prader- Willi/Angelman (p. ex. CNV 15q11-q13) et le syndrome de Phelan-Macdermid (CNV 22q13 impliquant SHANK3) (90).

2.3.1.2 Facteurs héréditaires

Le rôle des facteurs génétiques héréditaires a d’abord été mis en évidence par la récursivité des cas dans certaines familles. Il est maintenant bien établi que dans les familles où au moins un membre est atteint, le risque de récurrence chez les enfants à naître augmente en fonction du degré de parenté génétique avec le membre atteint (91). Par exemple, une étude sur les familles de 14 516 enfants suédois autistes a estimé un risque de récurrence 153 fois plus élevé chez les jumeaux monozygotes (ou identiques) comparativement aux enfants des familles sans membre atteint (92). Cette même étude estime que ce risque est de 8 à 10 fois plus élevé pour les jumeaux dizygotes (non identiques) et la fratrie de mêmes parents, environ 3 fois plus élevé pour les demi-frères/sœurs et 2 fois plus élevé pour le cousinage. Un article de revue récent de Huguet et coll. (2016) rapporte que les études ayant analysé des jumeaux ont systématiquement démontré une concordance plus élevée de cas d’autisme chez les paires de jumeaux monozygotes (45 % en moyenne) que chez les jumeaux dizygotes (16 % en moyenne) (83). Si les facteurs environnementaux expliquent aussi une partie des cas récurrents observés chez les individus d’une même famille, il est estimé que des facteurs génétiques héréditaires contribuent à 52 % des causes étiologiques de l’autisme (83).

18 2.3.1.3 Relation gène-environnement

Les facteurs environnementaux (âge des parents, nutrition, stress, exposition à des substances toxiques, etc.) contribuent à l'étiologie de l’autisme par différents mécanismes liés à la génétique. Les variations génétiques de novo se forment très tôt durant le développement ou dans les cellules germinales des parents avant d’être transmises à leur descendance (91). Huguet et coll. (2016) considèrent donc ce type de variation comme des effets génétiques « de causes environnementales » (83). Ainsi, selon eux, la contribution relative de la génétique dans l’étiologie de l’autisme est de 62 % (52 % héréditaire + 9,5 % de novo). Toutefois, seuls les facteurs héréditaires ont été considérés comme de réels facteurs génétiques, les variations

de novo étant classées parmi les facteurs environnementaux (contribution relative de 48 % au

total).

Les interactions gène-environnement et les mécanismes épigénétiques sont moins étudiés (93). Les interactions gène-environnement pourraient entre autres expliquer l’hétérogénéité des effets de certains facteurs génétiques et environnementaux entre les individus (94). Par exemple, des variations dans les gènes impliqués dans le métabolisme du carbone et de l’acide folique pourraient expliquer la variabilité des effets protecteurs de la prise de vitamine prénatale sur le risque d’autisme chez les enfants (94).

Contrairement aux variations génétiques et génomiques, les variations épigénétiques sont fréquentes et n’altèrent pas la séquence du code génétique (89). Certains mécanismes de régulation épigénétiques forment des modifications sur la chromatine et l'ADN (p. ex. méthylations des histones et des nucléotides) afin de réguler l’expression des gènes en réponse de l’environnement. Ces modifications peuvent apparaître durant le développement ou être transmises par les gamètes lors de la fécondation. Certaines modifications épigénétiques ont été associées à l’autisme. Par exemple, l’exposition prénatale au médicament antiépileptique valproate induit des altérations épigénétiques qui sont susceptibles de causer l’autisme en interférant avec le métabolisme de l’acide folique et en inhibant l’expression du gène MECP2 (93, 95). En plus du valproate, plusieurs autres substances (p. ex. métaux lourds, BPC) peuvent causer des modifications épigénétiques susceptibles de mener au développement de l’autisme (89, 95).

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En résumé, les mutations de novo, les interactions gène-environnement et les modifications épigénétiques sont les trois principaux mécanismes médians des effets des facteurs environnementaux liés à la génétique. Les interactions gène-environnement et les mécanismes épigénétiques demeurent peu connus, mais sont vraisemblablement essentiels à la compréhension du rôle de l'environnement dans l’étiologie de l'autisme.