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4. LES ÉCRITS SUR LA RÉUSSITE SCOLAIRE

4.3 Les recherches sur la réussite scolaire en milieu socioéconomique

4.3.2 Les facteurs familiaux

Au niveau familial, les principaux facteurs de la réussite scolaire, indépendamment des milieux, prennent en compte le statut socioéconomique de la famille, le rapport au savoir scolaire et à l’école des parents, la structure de la famille, l’implication des parents à l’école et les pratiques éducatives parentales. Le statut socioéconomique est un facteur souvent évoqué dans cette section car nous ciblons principalement les écrits en relation avec les couches défavorisées. Ce statut est abordé sous divers angles. Dans les pays industrialisés, Adams et Ryan (1999) et Willie (2001) relèvent l’impact du revenu de la famille sur l’aide susceptible d’être apportée par les parents à la réalisation des devoirs ou sur la relation parent-enfant. Ces auteurs soulignent aussi les impacts de la pauvreté notamment sur la structure familiale et sur le temps que les parents consacrent aux études de leurs enfants. Le niveau de scolarité des parents est considéré comme un autre facteur important de la réussite scolaire des enfants. Par exemple, Lauzon (2001) et Heymann et Earle (2000) ont analysé la scolarisation des parents canadiens et américains ainsi que leurs conditions de travail, puis les effets de ces déterminants sur la réussite à l’école des enfants. Leurs conclusions indiquent que, selon le niveau de scolarité, les parents peuvent servir de modèles à leurs enfants et leur enseigner la valeur de l’éducation. De leur côté, Fredricks, Blumenfeld et Paris (2004) et Willms (2003) avancent que les parents peuvent renforcer la croyance de l’enfant dans l’école et consolider son engagement scolaire considéré selon ces mêmes auteurs comme un facteur important de la réussite à l’école. En contexte haïtien, l’IHSI (2005a) observe que les enfants haïtiens dont le chef de ménage n’est pas scolarisé achèvent au plus la classe de 5e AF. Selon l’IHSI

(2005 a), les enfants haïtiens dont le père ou la mère ont un niveau scolaire considéré comme élevé parviennent en classe de 7e AF, voire dépassent la classe de 3e secondaire

lorsque les parents ont de 7 à 13 ans de scolarité. De son côté, Leibowitz (1974) soutient que la scolarité de la mère est un facteur essentiel de la réussite scolaire car elle s’occupe de l’enfant et veille à la réalisation de ses devoirs.

Au sujet de l’implication des parents dans le travail scolaire de leurs enfants, Cooper, Jackson, Nye et Lindsay (2001), en contexte anglophone, puis Delgado (1998) au Brésil, se sont intéressés à l’influence des devoirs et du travail en dehors de la classe, au primaire et au secondaire, en milieu défavorisé. Ils observent que le rapport des parents au savoir scolaire et à l’école se manifeste dans l’aide apportée aux devoirs. Ces auteurs considèrent que cette aide des parents soutient et favorise la réussite scolaire. Quant aux conditions de réalisation des devoirs, Vézina (2001) précise qu’elles ont été étudiées, surtout au primaire, avec la participation des femmes, tandis que Crul (1999) souligne la participation de toute la fratrie. Zeroulou (1988) considère que l’implication de la fratrie dans les études permet le déploiement du projet des parents immigrants, originaires d’Afrique du Nord, sur leurs enfants inscrits au secondaire. De leur côté, Adams et Ryan (1999) observent que l’implication des parents dans le travail scolaire à la maison et l’harmonie familiale à travers la bonne communication entre parent et enfant sont des facteurs importants de la réussite scolaire. Les élèves qui ont des parents scolarisés ont plus d’atouts à divers égards que ceux dont les parents sont moins scolarisés. Cet aspect de la réussite scolaire est aussi retenu dans les écrits concernant les pays développés. Concernant les devoirs au primaire avec des liens pour le niveau secondaire, l’avis du Conseil supérieur de l’éducation (2010) du Québec relève des résultats mitigés sur la réussite dépendamment des dispositifs mis en place ou de l’organisation de cette activité. Par ailleurs, le Conseil supérieur de l’éducation (2010) observe des différences entre l’effet des devoirs au primaire et au secondaire sur la réussite scolaire relativement au temps consacré aux devoirs, aux objectifs poursuivis par le personnel enseignant et à la participation ou non des parents. En général, la gestion des devoirs devrait tenir compte des réalités de chaque contexte éducatif. Par exemple, en Haïti, les devoirs sont un facteur important de la réussite scolaire. En effet, d’après nos observations et nos échanges avec

différents acteurs de l’éducation en Haïti, les enseignants haïtiens font faire en général peu de travaux et d’exercices en classe. Une grande partie du temps de classe est consacrée aux exposés de l’enseignant et à la prise des notes par les élèves. Il faudrait aussi considérer l’intégration des savoirs tirés des devoirs dans les activités en classe ou dans les examens.

Sur un autre plan, en milieu défavorisé des pays développés, Perkins et Milgram (2000) avancent que l’aide des parents aux devoirs pourrait constituer à certains égards une épée à double tranchant. Pour ces auteurs, cette aide peut être un obstacle à l’effort personnel ou à l’autonomie de l’élève lorsque ce dernier ne s’implique pas personnellement dans la tâche. Toujours dans les pays développés, Adam et Ryan (1999) indiquent que la structure de la famille joue un rôle dans la réussite scolaire des enfants. Battle (1998) et Leibowitz (1974) ont étudié l’impact éducatif des familles monoparentales sur les élèves afro-américains et le rôle des mères et des grands-mères dans les performances scolaires de ces élèves. Selon Leibowitz (1974), les mères scolarisées consacrent généralement plus de temps à leurs enfants que les mères moins scolarisées.

Concernant les familles monoparentales, l’ECVH (2003c) indique qu’en Haïti 53 % des ménages sont monoparentaux et dirigés par des femmes. Par contre, dans leur étude sur le lien entre les pratiques parentales et la réussite scolaire en contexte québécois, Deslandes et Cloutier (2005) avancent que les enfants vivant dans un ménage monoparental, composé du père ou de la mère, reçoivent en général moins d’aide et d’encouragement dans leurs devoirs scolaires que ceux vivant dans une famille traditionnelle, composée du père et de la mère biologiques. Aux États-Unis, Ertl (2000) observe que l’implication des parents dans la scolarisation de leurs enfants se traduit par des liens concrets avec l’école, par exemple la présence aux activités de l’école ou leur participation dans la vie de l’école. Aux États-Unis, au Québec et en France, Adams et Ryan (2000), Luchuck (1998), Deslandes (2005) et Glasman (1994) soutiennent que l’implication des parents à l’école permet de comprendre la place que

la famille accorde à la réussite scolaire. Cette implication de la famille se manifeste, entre autres, par le soutien des enfants dans leur travail scolaire, et dans les échanges entre élève-parents sur le vécu scolaire de l’enfant.

Enfin, les écrits sur la réussite scolaire en milieu défavorisé, quel que soit les pays, s’intéressent aux facteurs familiaux de réussite scolaire reliés aux pratiques parentales (Deslandes, 2005 ; Deslandes et Cloutier, 2005 ; Shumow, Vandell et Posner 1998 ; Terrisse, 2000). À ce sujet, Lautrey (1980) soutient que les pratiques éducatives familiales qui permettent l’autonomie et la prise d’initiative de l’enfant ou le débat parents-enfants favorisent davantage la réussite scolaire. Montmarquette, Houle, Crespo et Mahseredjian (1989) relient le niveau scolaire des parents à la qualité des interactions parents-enfants et aux ressources financières disponibles pour la réalisation avec succès des études des enfants. Plusieurs des écrits qui viennent d’être cités et d’autres que nous avons aussi consultés concluent que le niveau de scolarité des parents agit positivement sur la réussite scolaire et sur l’image de soi de l’élève, ce qui renforce sa réussite. Or, Dornbusch, Ritter et Mont-Reynaud (1990) soutiennent que dans la population afro-américaine, le style parental autoritaire semble produire de meilleurs rendements scolaires que le style démocratique. Malgré ses réserves sur cet aspect, l’UNESCO (2007a) relève aussi des effets positifs du style parental autoritaire en milieu défavorisé dans les pays en développement. Dans la même veine, Willms (2002) a réalisé une étude longitudinale sur 20 000 enfants canadiens de 4 à 11 ans, vulnérables au plan cognitif, comportemental et affectif. Cet auteur avance que le style éducatif parental, le fonctionnement familial et la présence ou non de dépression chez la mère sont des facteurs prédictifs significatifs d’un bon départ du jeune dans la vie, en particulier à l’école.

En résumé, les facteurs familiaux sont de divers ordres. Ils jouent un rôle important dans la réussite scolaire et dans le développement intégral des enfants notamment en contexte de défavorisation.