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d e L o u i s X I V . 147 »
,i, la grandeur, le bien & là puiffance de l’Etat. Souvènt „ il y a des endroits qui fon t peine ; ii y en a de délicats „ qu’il eft difficile de démêler. On a des idées confufes. „ T a n t que cela e ft, on peut demeurer fans fe déterini- , , ner ; mais dès que l’on fe fixe l’ efprit à quelque ch o fe, „ & qu’on croit voir le m eilleur p a rti, il le faut pren- „ dre. C ’eft ce qui m’a fait réuffir fouvent dans ce que „ j ’ai entrepris. Les fautes que j’ai fa ite s , & qui m’ont , , donné des peines in fin ies, orit été par complai- „ fa n c e , & pour me laiffer aller trop nonchalamment „ aux avis des autres. R ien n ’eft fi dangereux que la „ faibleffe de quelque nature qu’elle foit. Pour com- ,, mander aux au tres, il faut s’ élever au-deffus d’eu x j „ & après avoir entendu ce qui vient de tous les en- „ d ro its , on fe doit déterminer par le jugem ent qu’on „ doit faire fans préoccupation , & p en fan t toûjours à „ ne rien ordonner ni exécuter qui foit indigné de : „ foi ,d u caraétère qu’on porté , ni de la grandeur dé . „ l ’ Etat. Les Princes qui ont de bonnes intentions ; ‘ „ & quelque connaiffance de leurs affaires, foit pât „ exp érience, foit par étude & une grande application ■ „ à fe rendre capables , trouvent tant de différentes „ chofes par lefquelles ils fe peuvent faire connaître , „ qu’ils doivent avoir un foin particulier & une appli- „ cation univerfelle à tout. Il faut fe garder contré „ foi-m êm e, prendre garde à fon inclination , & être, „ toûjours en garde contre fon naturel. L e m étier‘dé „ R oi eft gra n d , noble & fla tte u r, quand on fe fettt „ digne de bien s’acquitter He toutes les chofes arux- „ quelles il engage ; mais il n’eft pas exem pt de p e in e s, „ de fa tig u e s, d’inquiétude. L ’incertitude défefpère „ quelquefois ; & quand on a pâflfé Un tems raifonna- „ ble à examiner une a ffa ir e , il faut fe déterminer & „ prendre le parti qu’on croit le meilleur, (e)
jufqu’à iyj?. 11 con
damne févérement, -en phi-
fleurs endroits , l’adminiftra-
tion de
Louis X IV .Il ne veut
pas fùrtout qu'on rappelle
Louis le Grand.
Si
grandligni
fie
forfait, il eft fûr que ée
titre ne lui convient pat;
mais par ces mémoires écrits
de la main de ceMonarqne,
m m Àdt. s * a r 4*.
148 E
c r i t s d e l a m a j n3
„ Quand on a l ’Etat en vue , on travaille pour foi ; ,, le bien de l’un fait la gloire de l’ autre. Quand le pre- „ mier eft h eu reu x, élevé & p u iffan t, celui qui en eft „ caufe en eft glorieux , & par conféquent doit plus „ goûter que les fu je ts , par rapport à lui & à e u x , tout „ ce qu’il y a de plus agréable dans la vie. Quand on „ s’eft m épris, il faut réparer fa foute le plus tôt qu’il „ e ftp o flib le , & que nulle confidération n’en em p ê- „ che , pas même la bonté.
„ En 1671 un homme mourut qui avait la charge „ de Secrétaire d’Etat , ayant le département des „ étrangers. Il était homme c ap ab le , mais non pas ,, fans défauts. Il ne laifTait pas de bien remplir ce „ p o fte , qui eft très important.
„ Je fus quelque tems à penferà qui je ferais avoir „ cette charge ; & après avoir bien examiné , je trou- „ vai qu’un homme qui avait longtems fervi dans „ des ambaflades , était celui qui la remplirait le „ mifcux. ( / )
. „ Je lui fis mander de venir. M on choix fut approuvé „ de tout le monde , ce qui n’arrive pas toujours. Je „ le mis en poffelfion de cette charge à fon retour. Je „ ne le connailTais que de réputation & par les com- „ millions dont je l’ avais chargé , & qu’il avait bien „ exécutées ; mais l ’emploi que je lui ai donné s’eft „ trouvé trop grand & trop étendu pour lui. Je n’ai „ pas profité de tous les avantages que je pouvais „ a v o ir , & tout cela par complaifance & bonté. Enfin ,, il a folu que je lui ordonne de fe retirer , parce que „ tout ce qui paflait par l u i , perdait de la grandeur „ & de la force qu’on doit avoir en exécutant les „ ordres d’un R oi de France. Si j’avais pris le parti
il paraît qu’il avait d’auffi bons principes de gouverne ment , pour le moins , que
l’Abbé de St. Pierre. Ces mé moires de l’Abbé de dï. Pier re n’ont rien de curieux que ■ pw
SÉa
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„ de l’ éloigner plus t ô t , j ’aurais évité les inconvéniens „ qui me font arrivés, & je ne me reprocherais pas „ que ma complaifance pour lui a pu nuire à l ’Etat. „ J’ai fait ce détail pour faire voir un exem ple de ce, „ que j ’ai dit ci-devant. “
Ce monument fi p récieu x, & jufqu’ à préfent incon nu , dépofe à la poftérité en faveur de la droiture & de la magnanimité de fon ame. On peut même dire qu’il fe juge trop févérem en t, qu’il n’avait nul repro che à fe faire fur Monfieur de Pompone, puifque les fervices de ce M iniftre & fa réputation avaient dé terminé le choix du Prince confirmé par l’ approbation univerfelle ; & s’il fe condamne fur le choix de M on fieur de Pompone t qui eut au moins le bonheur de fervir dans les tems les plus glo rie u x , que ne devait-il pas fe dire fur Monfieur de Cbamillart , dont le miniftère fut fi infortuné & condamné fi univerfelle- m ent ?
Il avait écrit plufieurs mémoires dans c e g o û t ,f o i t pour fe rendre com pte à lui-même , foit pour l ’inftruc- tion du Dauphin D uc de Bourgogne. Ces réflexions vin rent après les événemens. Il eût approché davantage de la perfection où il avait le m érite d’a fp ire r, s’il eût pu fe former une philofophie fupérieure à la politique ordinaire & aux préjugés ; philofophie que dans le cours de tant de fiécles on vo it pratiquée par fi peu de Souverains , & qu’il eft bien pardonnable aux R ois de ne pas co n n a ître , puifque tant d’hommes privés l’ ignorent. ^
V o ici une partie des inftruétions qu’ il donne à fon petit-fils Philippe V partant pour l ’Efpagne. Il les écri v it à la h â te , avec une négligence qui découvre bien
I la bonne foi grofiière avec laquelle cet homme fe croit fait pour gouverner,
C f )Mr. de
Pompone.
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i f Q E c r i t s d e l a m a i nm ieux l’am e, qu’un difcoürs étudié. On y voit le pèrç & ie Roi.
„ Aimez les Efpagnols & tous vos fujets attachés ,j à vos couronnes & à votre perfonne. N e préférez „ pas ceux qui vous flatteront le plus ; eftimez ceux „ qui pour le bien bazarderont de vous déplaire. Ce „ font là vos véritables amis.
„ Faites le bonheur de vos fujets ; & dans cette „ vue n’ayez de guerre que lorfque vous y ferez for- „ c é , & que vous en aurez bien confidéré & bien „ pefé les raifons dans votre Confeil.
!
» Eflayez de rem ettre vos finances ; veillez aux In- 3j des & à vos flottes ; penfez au commerce ; viv e z j, dans une grande union avec la France ; rien n’étant
jj
fi bon pour nos deux p u iffan ces, que cette union ,j à laquelle rien ne pourra réfifter. (g)„ Si vous êtes contraint de faire la g u e rr e , met-
,, tez-vous à la tête de vos armées.
„ Songez à rétablir vos troupes p a rto u t, & com-
jj m encez pat celles de
Flandre-jj N e quittez jamais vos affaires pour votre plaifir; „ mais faites-vous une forte de règle qui vous donne „ des terns de liberté & de divertiffement.
„ Il n’y en a guères d e plus innocens djue la chaffe j, & le goût de quelque maifon de campagne , pour- „ vu que vous n’y faffiez pas trop de dépenfe.
,3 Donnez une grande attention aux affaires quand
jj on vous en parle ; écoutez beaucoup dans le com- „ m encem ent, fans rien décider.
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„ Quand vous aurez plus de connaiffance, fouve- ,, nez-vous que c ’eft à vous à décider ; mais quélque „ expérience que vous a y e z , écou tez toujours tous les „ avis & tous les raifbnnemens de votre C o n feil, avant
„ que de faire cette décifion.
„ Faites tou t Ce qui vous fera poffible pour bien ,, connaître les gens les plus im portans, afin de vous ,, en fervir à propos.
J, T â ch e z que vos Vice-R ois & Gouverneurs foient 33 toûjours Efpagnols.
„ T raite z bien tou t le monde ; ne dites jamais rien „ de fâcheux à perfonne ; mais diftinguez les gens » de qualité & de mérite.
,3 T ém oignez de la reconnaiffance pour le feu R o i, „ & pour tous ceux qui on t été d ’avis de vous choîfir
,3 pour lui fuccéder.
I.
k » Ayez une grande confiance au Cardinal Porto- » Carrera , & lui m arquez le gré que vous lu i favez 53 de la conduite qu’ il a tenue.
„ Je crois que vous d evez faire quelque chofe de 33 confidérable pour l ’Ambaffadeur qui a été a lle z heu- 33 reux pour vous demander & pour vous faluer le 33 premier en qualité de fujet.
3, N ’oubliez pas B edm ar, qui .a du m é r ite , & qui 33 eft capable de vous fervir.
33 A yez une entière créance au D uc à 'Mar court ; il
33 eft habile homme , & honnête homme , & ne vous 33 donnera des confeils que par rapport à vous.
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T en ez tous les Français dans l ’ordre.éU m
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c r i t s d e l a m a i n... j, T raite z bien vos dom efliques, mais ne leur don- „ nez pas trop de familiarité , & encor moins de
„ créance. Servez-vous d’eux tant qu’ ils feront fages :
,, renvoyez-les à la moindre faute qu’ils fe r o n t, & ne „ les foutenez jamais contre les Espagnols.
,j N ’ayez de commerce avec la R eine douairière „ que celui dont vous ne pouvez vous difpenfer, Fai- y, tes enforte qu’ elle quitte M ad rid , & qu’elle ne forte j, pas d’Efpagne. En quelque lieu qu’elle fo it , obfer- 33 ve z fa conduite,, & em pêchez qu’ elle ne fe mêle 33 d’aucune affaire. Ayez pour fufpeéts ceux qui auront j, trop de commerce avec elle.
* ,
:
' 33 Aimez toujours vos parens. Souvenez-vous de la ,, peine qu’ils ont eu à vous quitter. Confervez un j, grand commerce avec eux dans les grandes chofes s, & dans les petites. D em andez-nous ce que vous ,3 auriez befoin ou envie d’avoir qui ne fe trouve pas 33 chez vous ; nous en uferons de même avec vous.
33 N ’oubliez jamais que vous êtes F ran çais, & ce 3, qui peut vous arriver. Quand vous aurez alluré la 33 fuccelïion d’ Efpagne par des enfans , vifitez vos 3, royaum es, allez à Naples & en S ic ile , pafTez à Mi- „ lan & venez en Flandre ; (A) ce fera une occafion 33 de nous revoir : en attendant vifitez la Catalogne, ,3 l’ Arragon, & autres lieux. V oyez ce qu’ il y aura à 33 faire pour Ceuta.
,3
Jettez quelque argent au peuple quand vous ferez 33 en E fpagn e, & furtout en entrant à Madrid.Y*
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