Ceffe donc d’animer ton Prince â fon fuppiiee »
Et prés d'aveir bcfoin de toute fa bonté,
Ne le fai pas ufer
ietoute fa juilice.
Monfieur Colbert, k qui l’on parla de ce fonftet injurieux , demanda fi le R o i y était offenfé ? On lui dît que non : j5 Je ne le fuis donc pas , répon» ,> dit le Miniftre.
Il ne faut jamais être la dupe de ces réponfes me. ditées, de ces difcours publics que le cœur défavoue.
Colbert paraiffait modéré , mais il pourfuivait la mort
de Fouquet avec acharnement. On peut être bon JV|i- njftre, & vindicatif. Il eft trille qu’il n’ ait pas fu être autfi généreux que vigilant.
Siècle de Louis X I V . Tom . II. F
3
82
L e T e l i i b e . S e g u i e r.Un des plus implacables de fes perfécuteurs était
François Le Tellier , alors Secrétaire d’Etat & fon rival
en crédit. C ’eft celui-là même qui fut depuis Chan celier. Quand on lit fon oraifon fu n èb re, & qu’on la compare ayec fa co n d u ite , que p e u t-o n p e n fe r, fi- non qu’ une oraifon funèbre n’eft qu’une déclamation ? Mais Seguier le Chancelier d’alors, & le premier de fes juges,fut celui qui pourfuivit fa mort avec le plus d’a charnement , & qui le traita avec le plus de dureté.
Il eft vrai que faire le procès au Surintendant, c’était accufer la mémoire du Cardinal M azarin. Les plus grandes déprédations dans les finances étaient fon ou vrage, Il s’était approprié en Souverain plufieurs bran ches des revenus de l ’Etat. Il avait traité en fon nom & à fon profit des munitions des armées. „ II im pofait ( dit Fouquet dans fes défenfes ) „ par l i t r e s de ca- „ c h e t, des femmes extraordinaires fur res Générali- 3, tés ; ce qui ne s’était jamais fait que par lui & p o u r 33 l u i , & ce qui eft puniffable de mort par les ordonnan- „ c e s .ct C ’eft ainfi que le Cardinal avait amaffé des biens iram enfes, que lui-même ne connaiffait plus.
J’ai entendu conter à fea Monfieur de Caumartin Intendant des finances , que dans ft jeuneffe , quelques années après la mort du C ard in al, il avait été au palais
M a z a r in , où logeait le D uc fon héritier & la Dueheffe Hortenfe; qu’il y vit une grande armoire de marquet-
te r ie , fort profonde, qui tenait du haut jufqu’en - bas tout le fond d’un cabinet. Les clefs en avaient été per dues depuis longtem s, & l’on avait négligé d’ ouvrir les tiroirs. Monfieur de Caum artin, étonné de cette négligence , dit à la Dueheffe de M azarin , qu’ on trou verait peut-être des curiofités dans cette armoire. On l ’ouvrit : elle était toute remplie de quadruples, dé jetons d’o r , & de médailles d’or. Madame de M azarin
( / T J ’ai retrouvé depuis cette même particularité dans
St. Evrenumt. w t j M p
.
-....
....
... ... — ... iH i r ef flf » * l«...
. ... — .. — ....
, . ... ... .u u u ty w »' 1 . ... . " 1 ' ...— — ... »"■ '>ji ÿiM — ■ ■■» -.... — — --i— - ,■«» , ' > ■ i ' .n " -v pr
F
O U Q. V B T.en jetta au peuple des poignées par les fenêtres , pendant plus de huit jours, ( / )
L ’abus que le Cardinal M azarhï avait fait de fa puif- fance defp otique, ne juftifiait pas le Surintendant ; mais l’irrégularité des procédures faites contre l u i , la longueur de fon procès , l’acharnement odieux du Chancelier Seguier,.co n tre l ui , le temps qui éteint l’envie publique & qui infpire la eompaffion pour les malheureux , enfin les fbllicitations toujours plus vives en faveur d’un in fo rtu n é , que les manœuvres pour le perdre ne font preffantes ; tout cela lui fauva la vie. L e procès ne fut jugé qu’ au,bout de trois ans en 1664. De vingt-deux juges qui o p in èren t, il n’ y en eut que n eu f qui conclurent à la mort ; & les treize a u tre s, ( g ) parmi lefquels il y en avait à qui Gourvïlle avait fait accepter des préfen s, opinèrent à un b a n n it fement perpétuel. L e R o i commua la peine en une plus dure. Cette févérité n’ était conforme ni aux an* ciennes lo is du R oyaum e, ni à celles de l ’humanité. Ce qui révolta le plus l ’efprit des citoyens , c’eft que le Chancelier fit exiler l ’un des juges nommé Roque-
fa n te qui avait le plus déterminé la Chambre de jultice
à l’ind ulgence. ( b ) Fouquet fut enfermé au château .de Pignerol. Tous ies hiftoriens difent qu’il y mourut en 16 8 0 , mais Gom ville aifure dans fes mémoires , qu’il fortit de prifon quelque tems avant fa mort. La Corn* teife de V aux fa belle-fille m’avait déjà confirmé ce fait ; cependant on croit le contraire dans fa fam ille. Ainfi on ne fait pas où eil mort cet infortu né, dont les moin dres aérions avaient de l’éclat quand il était puiffant.
L e Secrétaire d’Etat Guenegaüà , qui Vendit fa charge à Colbert, n’ en fu t pas moins pourfuivi par lâ; Ce ) Voyez tes mémoires je faurafi bafft mourir. S’if tïe Gourville,
prononça ces paroles, on ne
( h ) Racine a Hure dans fes peut tes eXcufer. Elles parSif-fent trop dures & trop r " eûtes.
84 S'x. E
v r e m o n t.
Chambre de ju ftic e , qui lui ôta la plus grande partie de fa fortune. Ce qu’il y eut de plus fmgulier dans les arrêts de cette Chambre ; c’eft qu’un Evêque d’Avran- ches fut condamné à une amende de douze mille francs. Il s’appellait Bolève ^c’était le frère d’ un partifan dont il avait partagé les concuflions. (z)
/
S t. E vrem ont, attaché au Surintendant, fut enve
loppé dans fa difgrace. Colbert, qui cherchait partout des preuves contre celui qu’il voulait perdre , fit faiûr des papiers confiés à Madame du PleJJis-Bellièvre ; & dans ces papiers on trouva la lettre manufcrite de S i.
Evremont fur la paix des Pyrénées. On lut au Roi cette
plaifanterie , qu’on fit paffer pour un crime d’Etat.
Colbert , qui dédaignait de fe venger de H a m au lt,
homme obfcur, perfécuta dans St. Evrem ont l’ami de
Fouquet qu’il h a ïffa it, & le bel efprit qu’ il craignait.
L e R oi eut l ’extrême févérité de punir une raillerie in n o cen te, faite il y avait longtéms contre le Cardinal
M azarin qu’il ne regrettait pas , & que toute la Cour
avait o u tra gé, calomnié & profcrit impunément pen dant plufieurs années. D e mille écrits faits contre ce M iniftre , le moins mordant fut le feul p u n i, & le fut après fa mort.
St. Evrem ont, rétiré en A n gleterre, vécut & mou
rut en homme libre & philofophe. Le Marquis de M i-
remont , fo n a m i, me difait autrefois à Londres , qu’il
y avait une autre caufe de fa d ifgrace, & que St. Evre-
mont n’ avait jamais voulu s’ en expliquer. Lorfque Louis X I V permit à St. Evremont de revenir dans fa patrie
fur la fin de fes jours , ce philofophe dédaigna de re garder cette permiffion comme une grâce ; il prouva que la patrie eft où l’ on v it h e u re u x , & il l’était à Londres.
L e nouveau Miniftre des finances , fous le fimple titre de Contrôleur-Général, juftifia la févérité de fes
; E t O B
E : D EL O
D I SX IV .
pourfuites, é a ,f etabliffantTofdpe qa« fe s ptaédéceffeurs avaient troublé , & en travaillant fans relâche ■ à la grandeur deL’E ta fr -v ’J ‘ V, ' !
■ • ’ . 'uS<4 y t/i .
La Cour devint y i e e ^ r e dès plàifirs & le m odèle des autres CoursJ :Le R o i« piqife d é âortder des fêtes qui fiffent oublier celles d f Vaux.
Il fem blàit°que la n atu # prît p liffiF é le ts àp rod u irè en France les plus grands-hQmrnïS-âalts fous -les arts j & à raffembler 4 laC o u r c e qu^il g avait jamais eü dé plus beau & d e mieux e n hommes « a femmes. Le R o i l ’emportait für fous fesScoértifôîkfippar ta r it cheffe de fa'taille & par la tieaq B nW jttefélife de fês traits. Lefcm d e Fâ v q k , tm blé^-toiléhâifti*g)lgnait lés cœurs qu’intimidait fa p réfeticei'Ilà^ altîu n e démarche qui ne pouvait c d à v e n irq u ’à iBtfàïîŒ âjn ra n g , & qui eût été ridicule en tout autre. L ’embafrras qu’ il infpfc rait à ceux qui lui p arlaien t, flattait en fecret la coin- plaifance avec laquelle il fentait fa fupériorité. Ce vieil Officier v q u i.fe troublaiC',i quêdjègayàîf en lui demandant une g râ c e , & ;q u f n é:pouvant achever fon d ifcàu rs, lui dit i , . Sire ,;je ne trem b lép as ainfi devant vos en nem is, ,n’e u t pas de peiné à obtenir c e qu'il
demandait. •
:
L e goût dé la fosiété n ’a vait pas encor reçu to u te fa perfection à la Cour. La R e in e-m ère, A nne d 'A u
triche , com m ençait à aimer ia retraite. La R ein e ré
gnante favait à peine le français , & la bonté faxfait fon feul mérite, La Princefle d’Angleterre beile-fœur du R o i, apporta à la Cour les agrémens d’ une coriver- fation douce & animée , foutenue bientôt par la lec ture des bons ouvrages & par un go û t fûr & délicat. Elle fe perfectionna dans la connaiffance de la lan gu e, qu’ elle écrivait mal encor au tems de fon mariage. E lle infpira une émulation d’efprît nouvelle , & introdui- fit à la Cour une politeffe & des grâ ce s, dont à pei ne le relie de l’Europe avait l’idée. M adam e avait
. F iij
~ M:,A:..D'. A M Ei:
tout l’efprit: ÿeVbnr/es I I Ton Frère , em belli par les charmes d e ; fon .fexe , par i e don & par le défit de plaire. La Cour de Louis X I V refpiràit une galan terie que la décadence rendait plus piquante. Celle qui régnait à îa;Cdi*r;dè Gfgiplet ' i t détâit ipltis hardie , & trop degro ffiéjrété.en déshonorait les plaifirs.
*!
Il y eut d’abord entre Madame & le Roi beaucoup d e -ces coquetteries, d ’e fp r^ i& -de; cette intelligence fe e rç tte i qui jfg: remarquèrent, dans de petites fêtes fbugent répéiéet-;: L e R o i Ipi-envoyait des ve rs; elle y répondait j i s^f#vft ;que le Jn.êiK^ tontine fut à la fuis le confident; du R oi & de Madame dans ce com m erce ingétjjepXi, C ’était le Marquis de Dangemt. Le R o i ie, ç^argeaîp d’é^rite poqr lui ; <& la Princeflet Ren gageait Ji r é p q p d r ^ Il les férvit ainfi tous deux , fans lajfTer foupconner à l ’ un f qu’il fut em ployé pçur l ’atttrft i .& ce fpt une des càufes de fa fèf£un#.jï';3‘M ,h;v . -■ *' . î
. C ette intelligence jetta des allarmes dans la famille royale. L e R o i réduiût l’ éclat de ce commerce à un fonds d’eftime & d’amitié * qui ne s’altéra jamais. L ord ijue M adame fit depuis travailler Racine & Corneille à la tragédie de Bérénice, elle avait en vue non-feu lem ent la rupture du Roi avec la Connétable Calon- m v v ffiftM e . frein q tfelle - même a va it mis à.fon'pro- p^è'penchant s d e peur qu’il ne devînt dangereux.
Louis X I V elt alfe'z défigné dans ces d eu x vers de
1i Rêténke. ^, 'R«cme : , .
:
. , Qû'efi'quelque obfcnrité que le ciel l’eût Fait naître,
Le mqnde en le voyant eût reconnu fan maître. Ces amufemens firent place à la pafiion plus férieu- fe & plus fuivie,, qu’il eut pour M adem oifelle de la
Valiere, fille d’honneur de Madame. Il goûta avec
elle le bonheur rare d’être aimé uniquement pour lui- même. Elle fu t deux ans l’objet caché de tous les
L a V a l i I r e .
87
amufemens galan s, & de toutes les fêtes que le Roï donnait. U n jeune valet de chanfbre du R oi nommé
B eiloc, compofa plufieurs r é c its , qu’on m êlait à des
d an fes, tantôt chez la Reine , tantôt ch ez M adam e; & ces récits exprim aient avec m yftère le fecret de leurs cœ u rs, qui cefla bientôt d’être un fecret.
T ous les divertiffemens p u b lic s , que le R o i don nait , étaient autant d’hommages à fa maîtreffe. O n fit en 1662 un carroufei , v i s - à - v i s les T u ile ries , ( k ) dans une vafte en ce in te , qui en a retenu le nom de la place du cccrroufel. Il y eu t cinq qua drilles. L e R o i était à la tête des Romains ; fon frè re , des Perfans; le Prince de Condé, des T u r c s ; le D uc d 'Engbien fon fils , des Indiens ; le D uc de Uaife , des Américains. Ce D uc de Guife était p e tit-fils
t
du Balafré. Il était célèbre dans le monde,
par l ’audace malheureufe avec laquelle il avait entre pris de fe rendre m aître de Naples. Sa p rifo n , fes d u e ls, fes amours romanefques , fes profufions , fes avantures , le rendaient fingulîer en tout. Il fem blait être d’un autre fiécle. O n difait de l u i , en le voyant courir avec le grand C o n d é ; Voilà les héros de l'bif-toire Ê? de la fable.
La R e in e -m è re , la Reine régn an te, la R ein e d ’An gleterre veu ve de Charles J , oubliant alors fes mal h eu rs, étaient fous un dais à ce fp ed acle. L e Com te de S a id t, fils du Duc de Lefdiguières, remporta le p r ix , & le reçut des mains de la R ein e-m ère. Ces fêtes ranimèrent plus que jamais le goût des devifes & des em blèm es, que les tournois avaient mis autre fois à la m o d e , & qui avaient fubfifté après eux.
Un antiquaire , nommé d’ O uvrier, imagina alors pour Lotus X I V l ’emblème d’un foleil dardant fes rayons fur un glo b e , avec ces mots : nec pluribus
irn-i
( £ ) Non dans la place 1 royale, comme le dit l'hiftoi- 1
re de h H a ie, fous le nom delà Martinüre. F iiij
....
..
—
« S iX S S \'i
..
J-J
....
.
..
fttU
B
i
SS
F i
tE
fa r . L ’idée était un peu imitée d’une devife efpagno-
l e , faite pour Philippe l t , 8 c plus convenable à ce R o i , qui poffédait la plus belle partie du nouveau Monde & tant d’ Etats dans l’a n c ie n , qu’à un jeune Roi de France qui ne donnait encor que des efpé- rances. C ette devife eut un fuccès prodigieux. Les armoiries du R o i , les meubles de la couronne , les tapilferies, les fculptures en furent ornées. L e Roi ne la porta jamais dans fes carroufels. On a repro ché injuftement à Louis X I V i e faite de cette devi f e , comme s’il l ’avait choifie lu i-m ê m e ; & elle a été p e u t-ê tre plus juftement critiquée pour le fond. L e corps ne repréfente pas ce que la légende fignifie ; & cette légende n’a pas un fens affez clair & affez déter miné. Ce qu’on peut expliquer de plufieurs m anières, ne mérite d’être expliqué d’aucune. Les d e v ife s , ce relie de l ’ancienne chevalerie , peuvent convenir à des fê t e s , & ont de l’agrém en t, quand les allufions font ju lle s, nouvelles & piquantes. Il vaut mieux n’en point avoir que d’en fouffrir de mauvaifes & de baffes , comme celle de Louis X I I s c ’était un porc-épic avec ces paroles : jQui s’y frotte s’y pique. Les devifes font par rapport aux infcrip tion s, ce que font des maf-
carades en comparaifon des cérémonies auguftes. La fête de Verfailles en 1664 furpaffa celle du car- roufel , par fa fingularité , par fa magnificence , & les plaifirs de l’e fp rit, qui fe mêlant à la fplendeur de ces divertiffemens , y ajoutaient un goût & des grâces dont aucune fête n’avait encor été embellie. Verfailles commençait à être un féjour d é lic ie u x , fans approcher de la grandeur dont il fu t depuis.
L e $ M ai le Roi y vin t avec une Cour compofée de fix cent perfonnes, qui furent défrayées avec leur fuite , auffi-bien que tous ceux qui fervirent auxapprêts de ces enchantemens. Il ne manqua jamais à ces fê tes que des monumens conftruits exprès pour les don ner , tels qu’ en élevèrent les Grecs & les Romains.
d e
V
e r s a i l l e s. 89
Mais la promtitude avec laquelle on conftruKit des théâtres, des amphithéâtres , des portiques^, ornés avec autant de magnificence que de g o û t, était une merveille qui ajoutait à F iilu fio n , & qui diverfifiée de puis en mille m anières, augmentait encor le charme de ces fpectacies.
1
Il y eut d’abord une efp èce de carroufel. C eux qui devaient courir, parurent le premier jour comme dans une revue ; ils étaient précédés de h érau ts-d ’armes , de p a g es, d’ é c u y e r s , qui portaient leurs devifes & leurs boucliers ; & fur ces boucliers étaient écrits en lettres d’or des vers compofés par Pèrigni & par Ben-
J'erade. C e dernier furtout avait un talent fingulier
pour ces pièces galantes , dans lefquelles il faifait toujours des allufions délicates & p iq u ah tes, aux caradères des perfonnes , aux perfonnages de l’an tiquité ou de la fable qu’on rep réfe n tait, & aux paillons qui animaient la Cour. L e Roi repréfen- tait Roger : tous les diamans de la couronne brillaient fur fon habit , & fur le cheval qu’il montait. Les Reines , & trois cent Dames , fous des arcs de triom phe , voyaient cette entrée.
L e R o i , parmi tous les regards attachés fur l u i , ne diftinguait que ceux de M adem oifelle de la Valière. La fête était pour elle feule ; elle en jouiffait con fondue dans la foule.
i
La cavalcade était fuivie d’un char doré de dix- huit pieds de h a u t, de quinze de la r g e , de vingt-qua tre de lo n g , repréfentant le char du Soleil. Les qua tre â g e s , d’o r , d’a rg e n t, d’airain & de f e r , les lignes celeftes, les faifons , les heures fuivaient à pied ce char. T o u t était caraétérifé. Des bergers portaient les pièces de la barrière , qu’on ajuflait au fon des trom p e tte s, auxquelles fuccédaient par intervalle les mu- fettes & les violons. Quelques perfonnages qui fui vaient le char d'A p o llo n , vinrent d ’abord réciter aux
90
F
ê t e s,
R e in e s , des vers convenables an Heu , au te m s, au Roi & aux Dames. Les courfes fin ies, & la nuit ve nue , quatre mille gros flambeaux éclairèrent l ’efpace où fe donnaient les fêtes. Des tables y furent fer- vies par deux cen t perfonnages, qui repréfentaient les faifons , les Faunes , les Sylvains , les Dryades , avec des porteurs , des vendangeurs , des moiffonneurs.
Pan & D ' i n e avançaient fur une montagne mouvan
te , & en d é te n d ire n t pour faire pofer fur les ta b le s, ce que les c .mp ignes & les forêts produifent de plus délicieux. Derrière les tables en d em i-cercle, s’éleva to u t-d ’ u n -coup un théâtre chargé de concertans. Les arcades qui entouraient la table & le th é âtre, étaient ornees de cinq cent girandoles vertes & a rgen t, qui portaient des bougies; & une baluftrade dorée fermait cette vafte enceinte.
Ces fêtes fi fupérieures à celles qu’ on invente dans les romans , durèrent fept jours. Le R o i remporta quatre fois le prix des j e u x , & laifla difputer enfuite aux autres chevaliers , les prix qu’il avait gagnés , & qu’il leur abandonnait.
■
. La com édie de la Princeffe £ E lid e , quoiqu’ elle ne
fo'it pas une des meilleures de M olière, fut yn des plus
agréables ornemens de ces je u x , par une infinité d’ al légories fines fur les mœurs du te tn s , & par des à- propos qui font l’agrément de ces fêtes , mais qui font perdus pour la poftérité. On était encor très entêté à la Cour de l’artronomie judiciaire : plufieurs Princes p e n fa ie n t, par une fuperftition orgueilleufe , que la nature les diftînguait jufqu’à écrire leur deftinée dans les aftres. Le Duc de Savoie Ficlor - Ame die , père de la Ducheffe de B ourgogne, eut un aftrologue au près de l u i ,. même après fon abdication. Molière ofa attaquer cette illufion dans les Amans magnifiques.
On y voit auffi un fou de Cour. Ces miférables étaient encor fort à la mode. C ’était un refte de
Kj,çpS^£sesse5a
F i n s .
sg ^ S tS lf^ Ê È ts:
-kkhm m
9 1 b arie, qui a duré plus longeons en Allem agne qu’ail- leurs, t e befoin des amufemens , l’im puiflance de s’en procurer d’agréables & d’honnêtes dans les tems d’ignorance & de mauvais g o û t , avaient fait imaginer ce trifte plaifir , qui dégrade l’efprit humain. L e fo u , qui était alors auprès de Louis X I V , avait appartenu au Prince de Coudé : il s'ap p e la it l’ Ange li. L e Com te de Grammont d ifa it, que de tous les fous qui avaient