• Aucun résultat trouvé

Chapitre 2. Cadre théorique et méthode

2.3 Méthode

2.3.5 Evaluation quantitative et qualitative des éco-efficiences

Les indicateurs d’éco-efficience sont utilisés dans des évaluations agro-environnementales pour mesurer la durabilité environnementale de systèmes de production agricole. Il s’agit d’un rapport numérique entre la valeur d’un bien produit (quantitativement ou qualitativement) en numérateur et l’utilisation de ressources naturelles en dénominateur. L’évaluation des éco- efficiences dans les six exploitations enquêtées vise à réaliser un diagnostic de la situation actuelle et à alimenter les sorties du modèle de simulation SMA.

2.3.5.1 Indicateurs retenus dans ECOTERA

Deux méthodes complètes d’évaluation des éco-efficiences des systèmes de production animales ont déjà été élaborées et testées à l’échelle de l’exploitation agricole : le DEA (Data Envelopment Analysis) (Berre et al., 2015), les ACV (Analyse du cycle de vie) (Basset-Mens et al., 2009) ou la combinaison de ces deux méthodologies (Jan et al., 2012 ; Soteriades et al., 2016). Ces deux méthodes reposent sur la production d’un indicateur synthétique, agrégeant différentes composantes. Dans le cadre du projet ECOTERA, de nouvelles méthodes d’évaluation des éco-efficiences ont été mobilisées. Les mesures sont à la fois multi-critères (mesure des éco-efficiences par rapport à différentes ressources naturelles) et spatialisées ce qui permet d’identifier les trade-offs pouvant exister entre les différentes ressources et de combiner à plusieurs échelles (parcelle, exploitation agricole et territoire) les éco-efficiences des systèmes de production. Les indicateurs retenus à l’échelle de la parcelle et de l’exploitation concernent des ressources naturelles qui sont stratégiques dans les systèmes de production agricoles amazoniens face à la transition agraire :

 A l’échelle de la parcelle : l’éco-efficience relative à la ressource hydrique dans les pâturages et à la fertilité des sols dans les systèmes de cultures annuelles. L’eau est une ressource limitante dans ces systèmes d’alimentation basés à l’herbe. La baisse de la ressource hydrique en saison sèche génère une chute significative de l’offre fourragère. Avec l’interdiction de recourir au feu, la fertilité du sol devient aussi une ressource clé à gérer principalement dans les systèmes de cultures annuelles sans feu.

 A l’échelle de l’exploitation : l’éco-efficience énergétique et l’empreinte carbonée. L’énergie est loin d’être une ressource limitante en Amazonie (les radiations solaires permettant une forte activité photosynthétique), toutefois les émissions de gaz à effet de serre par les systèmes d’élevage et la déforestation sont fortement décriées. De plus, le processus d’intensification peut amener à une augmentation de l’usage d’énergies fossiles qui peuvent impacter négativement le bilan énergétique.

2.3.5.2 Echelle de l’exploitation : Mesure de l’éco-efficience énergétique et des émissions de gaz à effet de serre

Nous avons utilisé l’outil de diagnostic ANERPAAM (Analyse énergétique des propriétés agricoles d’Amazonie), une adaptation de l’outil PLANETE1

aux systèmes d’élevage tropicaux brésiliens (Clerc, 2011). Ce diagnostic, basé sur l’Analyse du Cycle de Vie, mesure les impacts environnementaux d’un produit sur le plan énergétique, de l’extraction de la matière première jusqu’à son élimination. Cet outil comprend deux indicateurs : le bilan énergétique et les émissions de gaz à effet de serre, à l’échelle de l’exploitation agricole.

Le bilan énergétique

Le bilan énergétique consiste à évaluer la quantité d’énergie non renouvelable qui a été utilisée par unité de biens produits (par litre de lait, kilo de viande, kilo de grains). Le principe est simple : il suffit de faire la différence entre l’énergie non renouvelable qui entre dans le système de production et l’énergie brute qui en sort. Ces bilans sont dressés en Joule (J). Les entrées d’énergie non renouvelables sont de deux types : l’énergie directe (qui correspond aux carburants, à l’électricité et à l’eau) et l’énergie indirecte (qui correspond à l’énergie utilisée pour produire les intrants agricoles, les équipements et les bâtiments depuis l’extraction des matières premières jusqu’au transport vers l’exploitation). Les sorties d’énergie brutes sont de trois types : les produits animaux, végétaux, les co-produits et les sous-produits (Figure 2-21). Entre entrées et sorties, le système de production est vu comme une « boîte noire ». Les flux entre les composants à l’intérieur du système ne sont pas pris en compte (Poccard-Chapuis et al., 2015a).

Figure 2-21 : Flux entrants et sortants dans le calcul du bilan énergétique (Clerc, 2011)

Les émissions de GES

ANERPAAM évalue les émissions en équivalent carbone de trois gaz à effet de serre : le dioxyde de carbone (CO2), le méthane (CH4) et l’oxyde d’azote (NO2). On distingue deux

types d’émissions :

 Les émissions directes : Il s’agit des émissions entériques (principalement du méthane) émises par les ruminants lors du processus de fermentation au niveau du rumen, des émissions issues des déjections animales au pâturage (méthane et oxyde d’azote), du stockage et de leur gestion, des émissions émises par les sols agricoles en réponse à l’application de fertilisants (minéraux ou organiques) dues aux processus bactériens de nitrification et dénitrification, des émissions dues à la consommation de carburants et par l’usage du feu (déforestation et entretien de surfaces). En ce qui concerne l’usage du feu, nous avons considéré dans l’inventaire les émissions de gaz par la déforestation uniquement si la défriche a eu lieu il y a moins de 20 ans c’est-à-dire postérieurement à 1995. Ces émissions ont été amorties sur 20 ans.

 Les émissions indirectes : dues à la fabrication et au transport des intrants et des équipements.

ANERPAAM ne prend pas en compte la fixation des gaz à effet de serre.

Collecte et analyse des données

Au cours des entretiens réalisés dans les six études de cas, nous avons réalisé un inventaire précis de toutes les entrées ainsi que des sorties d’énergie. Pour les cas où nous manquions de données précises sur les effectifs et les poids des animaux, nous avons procédé à des estimations. Les données ont été traitées et analysées à l’aide du tableur ANERPAAM. Les résultats de nos analyses ont été comparés avec les résultats de précédents diagnostics conduits à Paragominas sur 35 exploitations : 6 fazendas intensives ayant adopté le programme des « Bonnes Pratiques Agricoles », 7 fazendas extensives, 2 fazendas intensives laitières et 20 établissements familiaux (Poccard-Chapuis et al., 2015a).

2.3.5.3 Echelle de la parcelle : une approche qualitative des impacts des pratiques

Les mesures des éco-efficiences relatives aux ressources hydriques et à la fertilité des sols réalisées dans le cadre du projet ECOTERA n’étant pas finalisées au moment de l’implémentation du modèle SMA, nous avons décidé de qualifier l’impact de pratiques et de systèmes de production sur ces deux types de ressources à partir d’avis à dire d’experts. Nous avons réalisé le même travail pour la structure des sols car au fil des enquêtes, nous nous sommes aperçus que cette ressource avait beaucoup d’importance pour les éleveurs. Notre démarche s’est décomposée en trois temps :

 Identifier les principaux processus naturels de dégradation de ces ressources (à partir des avis d’experts et de la révision de la littérature) ;

 Identifier les pratiques mises en place par les éleveurs pouvant amplifier les processus de dégradation ou au contraire les réduire voire améliorer le capital en ressources ;

 Croiser ces données au sein d’un tableau avec en colonne les processus de dégradation des ressources naturelles et en ligne les pratiques pouvant amplifier ou réduire ces processus. Ce tableau inclut une évaluation qualitative de ces amplifications ou réductions.

2.3.6 Modélisation multi-agents des interactions entre système de décision,