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explicatives en classe de langue

2.1.3. Etude du lexique dans les textes littéraires

Pour rendre compte des constituants de la phrase, le découpage en mots est mal aisé. La langue est difficilement segmentable en mots et une phrase n’est pas la succession de mots, ni un texte la suite juxtaposée de phrases. Nous ferons référence à la microsémantique, mésosémantique et macrosémantique de Rastier, Cavazza &

1 Cf. PARTIE 1, Chapitre 2, 2.4.2.

2

Cf. Annexe 2 : Lexies planifiées et compréhension globale/détaillée des textes

Compréhension globale Compréhension détaillée

Bel-Ami L’office

(Il lui sembla qu’il allait) faire un bond du portique de la Madeleine au portique du Palais-Bourbon

(Il était) plein de reconnaissance pour la divinité qui l’avait ainsi favorisé Coulait comme un fleuve

Un perron Des égards

Les assistants (de l’office) Balbutiait

(La foule) amassée (La foule) bruissante

105 Abeillé (1994 : 25) pour définir clairement et précisément le fonctionnement des textes choisis et de leurs constituants.

Au niveau microsémantique, le mot est une forme linguistique qui pose problème tant à l’oral qu’à l’écrit (Maingueneau, 2001). Du point de vue phonique, le mot n'aide pas à identifier et à délimiter les unités lexicales dans la chaîne sonore. Au niveau syntactico-sémantique, la notion de mot se heurte également à un problème de segmentation mais aussi de permutation. « Pomme de terre » est-il un ou plusieurs mots ? S'il est un seul mot, il pose des problèmes de segmentation dans un énoncé. Il est difficilement repérable pour un non-initié et on pense immédiatement aux difficultés rencontrées par des étudiants étrangers apprenant le français. Et si, au contraire, on considère que « pomme de terre » représente plusieurs mots, comment expliquer que l'on ne puisse pas dire « *carotte de terre » ou « *choux de terre ». La commutation confirme, par le critère d'inséparabilité, que l'on est en présence d'une unité complexe et lexicalisée. Le mot ne saurait rendre compte de sa réalité en tant qu'unité de base linguistique tant au niveau graphique qu’au niveau phonique. C’est une forme linguistique qui peut contenir un ou plusieurs morphèmes (Niklas-Salminen, 1997 : 18) appelés aussi monèmes (Martinet, 1991) ; le morphème étant le signe linguistique minimal pour Rastier (1987).

Pour notre part, nous utiliserons le terme de lexie (Pottier, 1987/ 1992). En effet, « la lexie est le groupe de morphèmes intégrés qui constitue l’unité de signification. C’est une unité fonctionnelle, vraisemblablement mémorisée en compétence » (Rastier, Cavazza & Abeillé, 1994 : 47). Le terme de lexie correspond à ce qui peut être expliqué dans un texte. Il fait référence à la réalité des choses. Il peut s’agir d’une lexie comprenant un seul morphème comme la préposition « à » ou bien composée de plusieurs morphèmes. Les lexies sont des unités de sens (Pottier, 1992) qui font partie soit de la compréhension globale, soit de la compréhension détaillée du texte. Ces lexies peuvent être simples ou complexes. Pottier (idem) parle d’unité lexicale (UL) pour une lexie simple, c’est-à-dire que le sens est perceptible par le lecteur au premier abord. Au contraire, une lexie complexe associe un sens supplémentaire qu’il n’est pas forcément aisé de reconnaitre. On peut inclure dans cette catégorie les métaphores, métonymies, synecdoques mais aussi les lexies nécessitant des opérations cognitives interprétatives en fonction du contexte, du cotexte, etc. Il peut s’agir d’une activation, inhibition ou

106 propagation de sèmes et qui transforment les significations répertoriées en langue (Rastier, Cavazza & Abeillé, 1994 : 69).

C’est le cas de « boite noire » retenu dans notre protocole qui ne fait pas référence au mouchard installé dans un avion mais à un fiacre, moyen de transport dont les caractéristiques sémantiques sont semblables à sa métaphore : la /forme carrée/ et la /couleur sombre/. Nous avons fait le choix d’étudier des lexies simples et des lexies complexes conformément à ce qui se passe lors d’explication de textes en classe de langue.

Au niveau mésosémantique, c’est-à-dire le palier intermédiaire entre la lexie et le texte (Rastier, Cavazza & Abeillé, 1994 : 110), nous avons décidé de sélectionner des propositions lexicales dont le sens est difficilement compréhensible hors contexte. Il s’agit de propositions composées de lexies aisées ou non à décrypter pour un lecteur non averti. « Des regards […] comme des coups d’épervier », « (il lui sembla qu’il allait) faire un bond du portique de la Madeleine au portique du Palais-Bourbon » sont des propositions qui ne peuvent être qualifiées uniquement de lexies.

La première proposition ne comporte pas à proprement parlé de lexique difficile (nous sommes dans la classification lexique facile/difficile à comprendre pour un apprenant et non pas dans la distinction des lexies qui sont soit simples soit complexes). Pourtant « épervier » fait appel à deux sémantismes selon le contexte textuel assigné : il désigne à la fois l’oiseau de proie et de ce fait, l’ensemble de la proposition définit la façon dont le personnage principal regarde les femmes qui l’entourent. Le deuxième sens conféré à « épervier » provient du domaine de la pêche. L’épervier est un grand filet conique et circulaire que l’on lance à la main. Il permet d’emprisonner tous les poissons qui se trouvent dans son champ d’application. Ainsi la proposition « des regards […] comme des coups d’épervier » n’a-t-elle plus le même sens. Il s’agit là de provoquer un effet circulaire, englobant, entourant, voire emprisonnant. Il n’est pas question d’un oiseau de proie.

Il en est de même pour la deuxième proposition retenue « (Il lui sembla qu’il allait) faire un bond du portique de la Madeleine au portique du Palais-Bourbon ». La proposition comprend des métonymies, qui associées entre elles, révèlent un sens

107 particulier. La Madeleine est le nom de l’église dans laquelle le personnage principal se marie, et le Palais-Bourbon, la Chambre des députés. Si l’auteur parle de portique, c’est que ces deux bâtiments comportent la même architecture de colonnes. Le personnage principal se trouve dans l’église en tant que marié, il perçoit dans le même axe au loin la Chambre des députés et semble pouvoir, grâce à cette nouvelle position sociale, envisager une carrière politique. Le cotexte révèlera que c’est grâce à sa future femme, dont la situation financière lui est bénéfique et grâce à ses relations mondaines nouvelles, qu’il pourra devenir un homme politique.

Comme tout texte narratif comporte à la fois du lexique et des propositions lexicales complexes et importantes à expliquer en classe, nous avons retenu des lexies simples, complexes et des propositions lexicales1 par lesquelles passent la compréhension globale et la compréhension détaillée.

Il faut ajouter que le choix de l’étude de lexies en classe de langue découle de l’expérience des enseignants. Ces derniers procèdent en faisant des hypothèses sur ce que les apprenants sont susceptibles de savoir. Ces suppositions portent sur les vocabulaires (thèmes possiblement frayés pendant la scolarité et le vécu de l’enfant/adolescent) et les lexies qui les composent. Par exemple, un enseignant suppose comme ayant été abordé le thème du fantastique et admet comme connu les termes de « personnages mythiques, « fiction », etc.

Par ailleurs, les enseignants acquièrent cette faculté en induisant le degré de compréhension des apprenants au cours de l’histoire de la classe, lui-même fondé sur les connaissances antérieures individuelles de chaque apprenant. Ainsi, l’enseignant établit une échelle de valeur de degré de difficulté aux items lexicaux. Bogaards (1994 : 151-153) préfère se positionner différemment par rapport à la difficulté intrinsèque d’une lexie. Il estime que certains facteurs dépendent directement de la méthode d’apprentissage et non de la simple valeur de la lexie. Il ne s’agirait pas seulement d’une interaction entre les unités lexicales et les apprenants mais plutôt de facteurs extérieurs qui conditionneraient l’apprentissage comme le critère de fréquence. Une lexie est-elle difficile à comprendre parce que cette lexie est peu fréquente, c’est-à-dire

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108 rencontrée peu de fois dans les textes littéraires et donc peu familière pour l’apprenant1 ?

2.1.3.1. Critère de fréquence

Pour répondre à cette question, nous comparons les lexies de notre corpus2 avec l’outil BRULEX mis en place par le Laboratoire de Psychologie Expérimentale CP 191 de Bruxelles (Belgique). Il confirme ou infirme le caractère familier (toujours au sens d’usuel) des lexies et expressions lexicales sélectionnées. Nous pensons que plus une lexie a une fréquence élevée dans les livres (et donc familière), moins elle posera des difficultés de compréhension dans le sens où elle aura été vue plusieurs fois par l’apprenant et de ce fait, peut-être reconnue.

BRULEX est un outil développé pour la recherche en psycholinguistique. Il donne l'orthographe, la prononciation, la classe grammaticale, le genre, le nombre et la fréquence d'usage pour environ 36.000 mots de la langue française. C’est ce dernier point qui nous intéresse particulièrement. Il se scinde en deux types de classement différents : la fréquence d'usage des formes (FRFRM) et la fréquence lexicale (FRLEX).

Le premier champ reprend la fréquence relative associée aux formes orthographiques, c'est-à-dire, aux séquences de caractères, sans distinction syntaxique ni sémantique. La fréquence introduite est reprise des tables publiées par le Centre de recherche pour un Trésor de la Langue Française (désormais TLF) (Imbs, 1971). Elle représente le nombre d'occurrences d'une chaîne de caractères rapporté à un total de 100 millions, pour un échantillonnage de textes de la seconde moitié du XXème siècle. Le corpus (23,5 millions de mots) est constitué de textes littéraires (romans, essais, recueils de poèmes, œuvres dramatiques) publiés entre 1919 et 1964.

FRLEX, quant à lui, aide à fournir une information sur la fréquence d'usage associée à chaque entrée lexicale. Comme pour FRFRM, l'information est la fréquence relative tirée de TLF (2ème moitié du XXème siècle). La valeur -1 est affectée aux mots

1 Cf. PARTIE 1, Chapitre 2, 2.1.3.2.

2 Cf. Annexe 3 : Distribution des lexies simples, complexes et propositions lexicales & Annexes 18 à 24 : Corpus : transcription des séquences explicatives des enseignants en classe de langue

109 absents de TLF et les noms propres ne sont pas comptabilisés dans cette base de données.

Nous avons quelques remarques à émettre sur l’organisation des lexies selon la base de données BRULEX1. Chaque lexie est classée par colonne en fonction de son type (lexie simple, lexie complexe et proposition lexicale), par ordre décroissant de fréquence d’usage. Nous avons aussi rangé dans la même case les lexies qui composent les propositions lexicales retenues pour notre corpus (ex : « femme » et « monde » pour « une femme du monde »). Nous pensons que si une des lexies n’est pas usuelle, alors elle affectera le sens de la proposition toute entière. C’est pour cela que nous avons tenu compte de la lexie la moins fréquente pour ordonner le classement du taux de fréquence.

Pour quatre lexies dont le taux de fréquence est très important (« porter », « ami », « beau » et « noir »), les auteurs de BRULEX ont remarqué que leur entrée dans le TLF était assez ambigüe. Il n’est donc pas possible de compter le nombre d’occurrences lexicales correspondant.

Concernant les lexies simples, de la lexie « office » à « bénir », les constituants des textes sont assez usuels, excepté pour « égards »2. Ensuite, le taux de fréquence diminue jusqu’à « boni » qui recueille la plus faible fréquence lexicale. Nous pouvons ainsi considérer que tous ces constituants de texte sont peu usuels et risquent fort d’être difficilement compréhensibles pour les apprenants de FLM et de FLES.

Cependant, nous sommes assez surprise de remarquer que « collation » n’obtient qu’un petit résultat alors que nous pensions que ce terme était assez usuel. Instinctivement, notre classement n’aurait pas été opéré de la même manière. En effet, le lexique utilisé en classe est nettement moins littéraire. Il était donc primordial d’établir cette liste objective afin de nous rendre mieux compte de la fréquence de chaque lexie et de son importance dans les textes français.

A la lecture du début du tableau, l’analyse se complique. Les propositions lexicales contiennent des lexies dont le taux de fréquence est élevé. Mais cela ne veut

1 Cf. Annexe 13 : Classification des lexies selon la base de données BRULEX

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110 pas dire que les apprenants sauront comprendre la signification de la proposition dans son intégralité surtout si le sens ne correspond pas exactement à l’addition des sens des lexies comme dans « il portait beau ». Cette expression assez vieillotte ne signifie pas que le personnage porte de jolis vêtements, ni même qu’il les porte bien mais rend compte de la façon dont il se comporte ; il a une certaine prestance, une élégance particulière. C’est un sens difficilement compréhensible au premier abord sans être une lexie complexe. Nous rappelons que même s’il n’est pas possible de dire « *elle portait belle », la variation syntagmatique est possible ; « il portait de vieux godillots », « il était beau ». Il ne s’agit donc pas de lexie complexe. Il en est de même pour « coulait comme un fleuve ».

Les lexies complexes, quant à elles, ont des taux de fréquences très élevés. Nous pourrions donc penser que cette non-difficulté à comprendre la signification des lexies au premier abord permettrait d’arriver assez rapidement à la compréhension du sens second. C’est une hypothèse qui est à confirmer1. « Rôdeuse » est la seule lexie à ne pas obtenir de fréquence élevée. Cependant, en décomposant morphologiquement la lexie, il est assez aisé de retrouver son sens premier. Encore une fois, il s’agira pour l’apprenant d’arriver à décoder le sens second de cette lexie par rapport à son contexte textuel.

Pour conclure notre analyse à la lueur de la base BRULEX, nous pouvons dire que la notion de fréquence est un élément important à prendre en considération mais qu’il n’est véritablement utile que pour les lexies simples. Les lexies complexes et les propositions lexicales, de par les structures syntaxiques obtenues et les associations sémantiques développées, ne rendent pas compte de leur degré de difficulté dans la phase de décodage du sens par l’apprenant.

Ces résultats concernent un paramètre extrinsèque à la lexie. Bogaards (1994) cite, quant à lui, trois facteurs internes qui pourraient aider à classifier les lexies : la familiarité, la contrastivité et le degré de concrétude pour établir une échelle de valeur entre ce qui peut être facile/difficile pour un apprenant.

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111 2.1.3.2. Critère de familiarité

En ce qui concerne la familiarité, une lexie raccrochée à des connaissances déjà existantes, est certainement plus facile à retenir qu’une unité lexicale peu commune. Pour les apprenants étrangers, les mots nouveaux doivent être portés à la lumière de connaissances déjà présentes en langue étrangère. Si c’est le cas, la lexie apparaitra comme familière (au sens d’usuelle) et l’apprentissage en sera facilité. Ebbinghaus (1964) avait découvert, au niveau sémantique, qu’un long poème pouvait être plus facile à apprendre, s’il se rapportait à des événements connus qu’un petit poème dépourvu de sens. Et Groot (in Bogaards, 1994 : 151) a confirmé également que si l’apprentissage du vocabulaire n’impliquait pas une réorganisation sémantique du lexique mental, il s’intégrait plus rapidement dans la mémoire à long terme. Les deux expériences démontrent que l’apprenant ne peut intégrer facilement des connaissances nouvelles qu’à partir de ce qu’il sait déjà. Higa (1965 : 170-171) ajoute que « les mots difficiles [en L2] semblent être ceux dont le sens n’est pas codé dans le lexique de la L1 de l’apprenant ». Les lexies ininterprétables sont alors plus difficiles à retenir et à comprendre que celles qui ont une quelconque signification pour l’apprenant.

Dans notre étude, les lexies choisies ne sont pas familières mais au contraire peu courantes dans le langage de la vie quotidienne. Elles appartiennent à un registre littéraire spécifique, difficile à comprendre au premier abord et permettent de pallier la variable « mot connu » des publics observés. Ainsi, les lexies retenues dans notre protocole ne sont usuelles ni aux yeux des apprenants de FLES ni aux yeux des FLM. Pour preuve, un élève français de lycée qui n’avait assisté à aucune des leçons sur Bel-Ami et désireux de remplir notre questionnaire sur le degré de rétention du lexique n’a pu répondre à aucune des questions. Sans avoir lu le texte ni entendu les explications de l’enseignante, les lexies apparaissaient trop complexes. Nous mesurerons la fréquence des lexies expliquées par les enseignants car elle désignera les lexies susceptibles d’avoir été les mieux intégrées en mémoire par les apprenants1. Nous supposons en effet que plus une lexie est expliquée longtemps et souvent en classe, plus elle est susceptible d’être retenue et comprise par les apprenants.

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112 2.1.3.3. Critère de contrastivité

Le deuxième critère de difficulté de l’apprentissage d’une lexie est appelé contrastivité. Higa (1963, in Bogaards, 1994 : 153) montre que des items dont les rapports sémantiques sont bien établis (rapports de synonymie etc.) sont des items plus difficiles à retenir que s’ils avaient été étudiés séparément. Lors d’une tâche de reconnaissance, les apprenants confondent plus facilement les termes synonymiques que les termes entretenant des relations d’opposition sémantique. Plus claire serait la contrastivité, plus aisée serait la rétention des items lexicaux proposés à l’apprentissage (Bogaards, 1994 : 153). En outre, Higa (idem) met en exergue un point important dans l’enseignement-apprentissage d’une langue. Il conseille de considérer avec suffisamment d’attention la lexie pour qu’elle soit intégrée à long terme en mémoire et pour qu’il n’y ait pas de confusion d’identification. De ce point de vue l’apprenant doit, par exemple, faire attention à ne pas confondre « des égards » avec « des regards », comme nous avons pu le constater dans les tests de connaissances proposés aux apprenants.

L’avis des pédagogues rejoint les propos de Higa même si ces derniers redéfinissent plus précisément ses observations. Ils ont observé des effets négatifs lors de la présentation synonymique de lexies surtout si elle est combinée à une homophonie ou homographie. « Une plaquette de beurre » et « une tablette de chocolat » sont tous les deux des contenants mais ne s’utilisent pas de la même façon1. En outre, les pédagogues ont constaté qu’il y avait des effets bénéfiques sur la mémorisation lors de la présentation de rapports d’opposition. En somme, les rapports d’opposition ont pour conséquence une réactivation conjointe de rappel des items. Ainsi, lors d’une tâche de rappel différé de plusieurs jours, l’accès à la signification de ces items (ou à l’un des deux) est facilité.

1 Etude linguistique menée par nos soins suite à des observations de classes de CE2 en avril 2003. La leçon de vocabulaire consistait en la discrimination de différents contenants (bouteille d’eau, canette de soda, paquet de sucre, etc.).

113 2.1.3.4. Degré de concrétude/abstraction des lexies

Le troisième critère de difficulté de l’apprentissage est défini par le degré de concrétude/d’abstraction d’une lexie. Il se caractérise par le fait qu’une lexie est plus ou moins représentable par une image concrète, définie et structurée. Il semble plus facile de se représenter un objet qu’un concept, « un arbre » plutôt que « l’immatériel ». Weis (1986 : 178, in Bogaards, 1994 : 152) montre que le problème de concrétude ne s’arrête pas à l’apprentissage d’items nominaux. Il explique premièrement que les mots abstraits sont plus difficiles à comprendre que les mots concrets et insiste sur le fait que les verbes, les adverbes et les adjectifs sont plus difficilement retenus que les noms abstraits. Il prétend que ces classes de mots seraient « moins rebelles à l’illustration visuelle », or lorsque l’on consulte un dictionnaire imagé, seuls des substantifs renvoyant à des objets concrets sont présents. Cependant, nous pouvons dire que les actions représentées en langue française par des verbes sont « figurables » par le mime, ou l’image animée. Il en va de même pour certains adverbes mais les adjectifs sont souvent dépendants d’un jugement de valeur de celui qui s’exprime à propos de quelque chose ou quelqu’un. Nous allons revenir sur le critère de concrétude des lexies