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Que Nietzsche ait été une référence majeure de Simmel ne surprend pas, puisque le thème du conflit entre la « vie » et la « forme » développé par le sociologue peut s’interpréter comme celui de la dialectique du « dionysiaque » et de l’« apollinien ». Mais comme le résuma bien Rickert, le problème avec le concept de « vie » de la Lebensphilosophie en général et celui de Simmel en particulier, était qu’il était au fond celui de l’absence de « forme » : comme tout concept présuppose une forme, ce concept de « vie » s’identifiait paradoxalement à celui de l’absence de concept en général5, tel un flux rétif à toute tentative de le contenir. Simmel s’aventura effectivement à écrire :

Le terme de vie […] ne doit pas être dégagé d’une certaine absence de netteté, d’une certaine imprécision logique. Car l’essence de la vie établie avant toute forme ou au-delà serait manquée si l’on voulait en former une définition conceptuelle6.

C’est dans la philosophie biologique de Bergson que ce thème s’épanouit pleinement, et d’une manière d’autant plus significative pour mon propos qu’il le fit en étroite liaison avec une attaque radicale de l’approche réductionniste-méristique du vivant. Bergson jugeait la pensée purement logique « incapable de se représenter la vraie nature de la vie »7. Et la raison en était à ses yeux, dans une perspective qui anticipait partiellement l’épistémologie « génétique » de Jean Piaget, qu’elle serait dérivée du « schéma de notre action sur les choses ». Un schéma qui serait essentiellement

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Rickert H. (1920, 1922), pp. 174-175. Voir aussi Troletsch E. (1921), in Forman P. (1971), p. 17.

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Voir à ce sujet Sontheimer K. (1962, 1964), p. 43 et p. 45, ainsi que Geuter U. (1994), p. 203 et Marcuse H. (1934, 1970), p. 63, dont la dernière expression, qui ne réfère toutefois qu’à la Lebensphilosophie, est tirée.

3

Voir à ce sujet Kraus K. (1933, 2005), pp. 239-243 et Sontheimer K. (1962, 1964), p. 48.

4

Nietzsche F. (2000), p. 157. Voir aussi p. 69, pp. 98-99 et pp. 165-175, dans La naissance de la tragédie, Autour de la naissance de la tragédie et La vision dionysiaque du monde.

5 Rickert H. (1920, 1922), p. 35, p. 41 et p. 63. 6 Simmel G. (1918, 2004), p. 403. 7 Bergson H. (1907, 2003), p. VI.

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« analytique », fondé sur des procédures de « décomposition » et de « recomposition » de la matière « inerte » selon des lois déterminées. De sorte que l’intelligence ne saurait se représenter l’organisation que comme une « fabrication » et l’organisme que comme une « machine », incapable qu’elle serait de ne pas « résoudre l’organisé en inorganisé », c’est-à-dire d’appliquer aux formes de la vie celles de la matière « brute » sur la base desquelles elle s’est elle-même développée ; et donc incapable de saisir la « mobilité réelle » de la vie, sa « continuité vraie » et sa « créativité » perpétuelle. D’où une doctrine prêchant en fin de compte l’irrationalité irréductible de la vie :

De la mobilité même notre intelligence se détourne […] C’est de l’immobilité qu’elle part toujours, comme si c’était la réalité ultime ou l’élément ; quand elle veut se représenter le mouvement, elle le reconstruit avec des immobilités qu’elle juxtapose […] Notre intelligence ne se représente

clairement que l’immobilité […Elle] n’est point faite pour penser l’évolution, au sens propre du

mot, c’est-à-dire la continuité d’un changement qui serait mobilité pure [… Elle] n’arrive pas à saisir [l’invention] dans son jaillissement, c’est-à-dire dans ce qu’elle a d’indivisible, ni dans sa

génialité, c’est-à-dire dans ce qu’elle a de créateur […] Nous ne sommes à notre aise que dans le

discontinu, dans l’immobile, dans le mort. L’intelligence est caractérisée par une incompréhension

naturelle de la vie [… Elle] traite toutes choses mécaniquement […] Quand elle aborde l’étude de la

vie, nécessairement elle traite le vivant comme l’inerte, appliquant à ce nouvel objet les mêmes formes, transportant dans ce nouveau domaine les mêmes habitudes qui lui ont si bien réussi dans l’ancien1.

Notons que Goethe, s’il était loin de prêcher un irrationalisme, s’était déjà opposé en des termes analogues à toute approche mécaniciste du monde de la vie :

Les formules mécaniques transforment ce qui est vivant en quelque chose de mort ; elles tuent la vie intérieure pour lui substituer depuis l’extérieur un principe insuffisant2.

Dans les années 1920 surtout, l’irrationalisme « lebensphilosophisch » se déclinait bien souvent sur le mode particulier de la critique non seulement du déterminisme, mais plus radicalement encore du principe même de causalité. Dans la lignée des complaintes de Troeltsch contre un « déterminisme suffocant »3, Spengler, dont la double filiation nietzschéenne et goethéenne était explicite, interprétait ainsi la causalité comme une construction artificielle et pathologique érigée par réaction d’effroi face au devenir, au flux incessant de la « vie », à cette puissance ultime et irrationnelle qu’est le « destin » :

Nous avons d’abord l’idée du destin, et seulement ensuite celle de son contraire, enfant de la peur, tentative de l’être éveillé pour bannir et vaincre l’inévitable fin et la mort au sein de l’univers sensible, le principe de causalité, par lequel la peur de la vie cherche à se défendre contre le destin en fondant un autre univers envers et contre lui […] Le savant abstrait, naturaliste, penseur en systèmes, dont l’existence spirituelle entière est fondée sur le principe de causalité, est un phénomène tardif de la haine inconsciente contre les puissances du destin, de l’Inintelligible4.

Spengler effectuait en fait explicitement « la relation du destin avec la vie, de la causalité avec la mort », exaltant la première en ces termes caractéristiques :

Vivre, c’est réaliser le possible, le pur cerveau ne connaît que des possibilités extensives5.

C’est toutefois chez Klages que le moment irrationaliste de la Lebensphilosophie atteignit vraiment son apogée. Prolongeant Spengler, Klages n’hésitait pas, en effet, à parler de « l’esprit comme ennemi de l’âme », titre d’une trilogie qu’il publia entre 1929 et 1932. Il dénonçait la rationalité, toute connaissance conceptuelle, et en fin de compte l’esprit lui-même, comme des parasites asphyxiant l’âme6. Et c’est en résonance avec cet irrationalisme que se développa en parallèle en Allemagne une vague de mysticismes prétendant remédier au « déclin de l’Occident » qu’aurait induit une hypertrophie de la raison, par une plongée dans la « force vitale » obscure opérant dans la

1

op. cit., p. 156, pp. 164-166 et p. 197. Voir aussi pp. 93-94, p. 158 et pp. 161-162.

2

Gœthe J.W., in Callot E. (1971), p. 66.

3

Voir Forman P. (1971), p. 17.

4

Spengler O. (1923, 1976), I, pp. 123-124. Sur l’affiliation explicite à Nietzsche et Goethe, voir p. 13.

5

op. cit., p. 49 et p. 121.

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nature, dont les mystères, inaccessibles à la science, étaient sensés pouvoir être percés par des initiés aux techniques de l’occultisme. Des mysticismes divers qui s’adressaient tour à tour, pour se justifier, aux sagesses orientales et à des chrétiens tels que Maître Eckhart (dont Bertalanffy remarqua en 1923 l’interprétation originale de Dieu comme « nature naturante » et du Fils comme « nature naturée »1) ; mysticismes que certains voyaient comme des moyens de convertir la science en un regard artistique sur le monde et que d’autres assimilaient à une « religion du sang », identifié au « jus sacré de la vie », à la « force vitale » cosmique dont l’Aryen serait le seul dépositaire authentique2.

1-3-4-3 – La position de Bertalanffy face à l’irrationalisme « lebensphilosophisch »

Dans quelle position Bertalanffy se tint-il par rapport au moment irrationaliste des « philosophies de la vie » ? La question est d’importance pour situer sa pensée. Tirant hors du contexte global de cette pensée certaines de ses réflexions critiques précoces sur les « révolutions en physique », en particulier sur l’émergence d’une pensée a-causale dans cette science, un historien des sciences tel que Paul Forman a ainsi laissé accroire qu’il pourrait être compté parmi les « philosophes de la vie » prêchant un irrationalisme3. En réalité, la position de Bertalanffy sur celui-ci et sur la résurgence du mysticisme était parfaitement claire, et elle s’oppose de la manière la plus nette à une telle vision. Que Bertalanffy ait parlé en 1932, dans l’introduction à l’un de ses essais majeurs, des « philosophies de la vie pas toujours réjouissantes » qui se sont édifiées sur le concept de « vie »4, en est un indice. Sa position se dessina surtout dans des publications « mineures » des années 1920, dont plusieurs furent consacrées au mysticisme et à la pensée « mythique ». Bien que s’appropriant certaines de leurs conceptions, Bertalanffy critiqua en fait sans ambage les « philosophes de la vie », particulièrement Hölderlin et Nietzsche, comme les représentants d’une « utopie classique » incarnant plus le « déclin de l’Occident » que sa renaissance :

Ce qui rend l’utopie classique douteuse, c’est la confusion de ses solutions. Aussi profondément qu’ils ressentent toutes les insuffisances de notre époque et aussi grands soient-ils comme critiques, aussi faibles sont tous les utopistes dans le positif, à commencer par Nietzsche. Ils attendent tous une renaissance spirituelle, mais aucun d’entre eux n’a encore su dire ce que cette renaissance signifierait en définitive concrètement5.

Le Viennois reconnaissait certes, faisant ici allusion à la mécanique quantique, que « l’irrationalité de l’Être se met toujours plus en avant au fur et à mesure des progrès de l’analyse scientifique »6. Pour autant, ceci ne justifiait pas à ses yeux un quelconque irrationalisme : la découverte du « noyau irrationnel de l’Être » n’était jamais pour lui que celle de l’incomplétude fondamentale de toute connaissance, de son caractère nécessairement « perspectiviste » ; et son intérêt profond pour Nicolas de Cues, auquel son premier livre fut entièrement consacré, tient justement en grande partie au fait que ce théologien avait montré, dans sa doctrine de la « docte ignorance », que l’ignorance de l’Être dans laquelle se trouve irrémédiablement cette créature finie qu’est l’Homme est compatible avec la possibilité d’accéder rationnellement à certains aspects de ses manifestations et d’en acquérir une authentique connaissance7. En d’autres termes, l’« irrationalité de l’Être » était pour Bertalanffy un argument justifiant non pas l’irrationalisme, mais la modestie du scientifique. Il s’aligna en fait explicitement sur la position de Rickert. Tout en accordant aux « philosophies de la vie » le mérite d’insister sur les limites de la pensée rationnelle et de la domination conceptuelle du monde dans sa profusion et sa multiplicité, il s’agissait de souligner que vouloir connaître la réalité seulement en tant que réalité dans sa « vitalité » ne peut en aucun cas être un idéal scientifique tenable. En effet, il ne saurait y avoir de science sans pensée conceptuelle et c’est précisément le sens de tout concept d’instaurer une distance par rapport au « vécu » immédiat. Pour Rickert, et pour Bertalanffy à sa suite, le dualisme de la réalité et du concept ne saurait donc être dépassé sans renoncer à la science. Ils

1

Bertalanffy L. von (1923), II.

2

Mosse G.L. (1961). Voir aussi Jankélévitch V., in Simmel G. (1988), p. 83 et Sontheimer K. (1962, 1964), pp. 67-68.

3 Forman P. (1971), p. 111. 4 Bertalanffy L. von (1932b), p. 4. 5 Bertalanffy L. von (1927b), pp. 353-354. 6

Bertalanffy L. von (1930a), p. 46.

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estimaient que les « philosophies de la vie », en visant une connaissance du « vécu » immédiat qui prétendait atteindre l’essence de toute réalité, « poursuiv[ai]ent un fantôme dépourvu de signification théorique », quand bien même il serait accessible. Et que dénier ainsi toute permanence, même conceptuelle, conduit immanquablement au relativisme, au scepticisme, et en définitive au nihilisme1.

La ligne de Bertalanffy fut formulée dès ses premiers écrits, de manière non systématique toutefois. Ses raisons profondes apparaîtront aux 2-1 et 2-2, dans le contexte d’une étude globale de sa théorie de la connaissance prenant en compte ses publications ultérieures. Se lit principalement dans cette ligne de pensée l’influence (d’ailleurs souvent explicite) de la « philosophie du ‘comme si’ » de Vaihinger2, une influence que je discuterai plus en détails dans ma seconde partie. Bertalanffy admettait en premier lieu que toute connaissance a d’irréductibles fondements mythiques et métaphysiques, voire éventuellement une inspiration mystique. La mystique et le mythe étaient selon lui des « composantes fondamentales de l’esprit » d’une valeur précieuse et devant donc en tout état de cause être préservées. Il considérait toutefois que si, y puisant une part de sa fécondité, la science s’en nourrit, elle ne progresse qu’en se dépouillant progressivement de l’« intuition mythique » et de ses éventuelles rationalisations métaphysiques, par un processus de « dé-anthropomorphisation » qui les réduit à des fictions heuristiques. La mystique, la pensée mythique et la métaphysique d’une part, et la science d’autre part, auraient en fait « chacune leurs droits » dès lors qu’elles sont « strictement séparées » dans leurs fonctions, une séparation qui ne signifiait pas pour lui, bien au contraire, l’absence de fécondation mutuelle. Bertalanffy jugeait notamment que les premières avaient un rôle essentiel à jouer, en tant que moments d’un « ré-enchantement » du monde nécessaire à la santé spirituelle et culturelle d’une époque par définition « désenchantée » par la science. Mais il estimait aussi que la domination exclusive de l’intuition mythique et de la mystique est toujours létale pour une culture, exactement au même titre que l’est la domination exclusive d’une perspective scientifique. Et que le rejet des prétentions hégémoniques de l’intellect rationalisant ne saurait être un prétexte pour dévaluer la qualité et la valeur inestimables de ses réalisations tout au long de l’époque moderne. Tous ces moments de sa position, que j’ai ici synthétisée, apparaissent dans les quelques passages suivants, dispersés dans ses premières publications :

Le sentiment mythique n’est pas seulement un premier degré de la connaissance scientifique, car la pensée scientifique elle-même reste aussi liée à des mythes, particulièrement à des personnifications. Mais de la sorte s’exprime bien sûr le grand dualisme de notre connaissance ; car d’un autre côté l’esprit scientifique tend à éliminer toujours plus ce sentiment mythique3.

Le mythe ne doit en aucune manière disparaître de la pensée contemporaine. L’erreur du passé le plus récent semble précisément tenir à ce que l’on a étendu à tous les autres domaines de la culture l’élimination du mythique qui se justifie en science. En a résulté la perte d’âme tant évoquée de notre civilisation de la machine. La solution correcte du conflit entre l’intuition mythique et l’entendement scientifique est que l’on élimine certes la possibilité de l’anthropomorphisme en science, mais que d’un autre côté on reconquiert le mythe en philosophie et en religion4.

Sans contenir la moindre connaissance, les idées mythiques et religieuses constituent une fiction précieuse, un symbole poétique de l’ineffable qui nous enrichit sans fin intérieurement et a fait ses preuves éthiquement. Mythe et science ont chacun leurs droits lorsqu’ils sont strictement séparés – mais il faut d’un autre côté que chacun puisse se développer dans son domaine propre et non rester atrophié. Et qu’il en soit ainsi dépend la santé intellectuelle de notre temps, lequel ne doit pas plus se réifier dans un intellectualisme unilatéral que s’évanouir dans un mysticisme sentimental5. On a déjà souvent parlé du fait que la crise culturelle présente signifie un revirement par rapport au matérialisme mondain du tournant du siècle, en direction d’une nouvelle disposition mystique. Tandis que ce mouvement dégénère à l’occasion sous une forme affadie et boursouflée comme théosophie ou mysticisme littéraire, nous ne devons pas ignorer que, par-delà la robe bariolée avec laquelle ces charlatans [et faux prophètes] la déguisent, se dissimule une âme très profonde et belle6.

1

Rickert H. (1920, 1922), p. 176, pp. 110-111 et p. 63. Bertalanffy acquiesca à ces critiques (sans les préciser) dans (1930a), p. 47.

2

Vaihinger H. (1911, 1965).

3

Bertalanffy L. von (1929f), p. 330 et (1932a), pp. 67-68.

4

Bertalanffy L. von (1929f), p. 332 et (1930a), p. 49.

5

Bertalanffy L. von (1929f), p. 333 ; voir aussi (1932a), p. 73.

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Tout en reconnaissant pleinement dans la mystique moderne, en dépit de ses égarements […], une véritable force culturelle en tant que dépassement nécessaire d’un matérialisme et d’un mécanicisme techniques et dépourvus d’âme, nous n’avons aucune envie de jeter par-dessus bord notre civilisation occidentale, même si elle est désormais vieille et fatiguée, ni de mettre entre parenthèses le développement intellectuel de l’Occident qui a eu cours pendant huit siècles1.

1-3-5 – Sciences de la « vie culturelle » contre sciences de la « nature »

Un autre aspect important de certaines « philosophies de la vie » doit être ici examiné : leur tendance vers un dualisme ontologique et logique radical entre « nature » et sciences de la « nature » d’une part, et « vie culturelle » et « sciences de l’esprit » (ou de la « culture ») d’autre part. Un dualisme en opposition auquel se développa une bonne partie des travaux de Bertalanffy. Il faut toutefois noter que ce dualisme avait deux origines qui, bien qu’ayant interagi, étaient distinctes. La première était une composante de « philosophie de la vie » particulière (au sens attaché à cette expression dans ce chapitre) : c’était l’œuvre de Dilthey. C’est d’ailleurs ce dernier qui forgea l’expression Geisteswissenschaften [« sciences de l’esprit »] en 1883 à la suite de John Stuart Mill, référant avec elle à « l’ensemble des sciences qui ont pour objet la réalité historique et sociale »2. La seconde était représentée par les néo-kantiens Wilhelm Windelband et son élève Rickert ; et, bien que l’on puisse en un sens dire que ce dernier développa lui-même une « philosophie de la vie », ce fut comme nous l’avons vu en opposition à la survalorisation du « vécu » des Lebensphilosophen à proprement parler3. Même si cette seconde origine ne s’inscrivait donc pas dans la tendance intellectuelle examinée dans cette section, son importance est telle pour l’approche systémique de l’histoire de Bertalanffy que commencer ici par quelques mots à son sujet se révélera utile par la suite.

1-3-5-1 – Les oppositions entre sciences « nomothétiques » et « idiographiques »,

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