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1. Informer et former l’opinion : une question de genre

1.1. Les héritières d’un journalisme au féminin

1.2.1. Un engagement personnel

Une approche théorique, livresque et intime caractérise l’engagement féministe des auteures qui s’est nourri également de situations injustes vécues au sein de la famille, au moins pour Esperanza Brito et Elena Urrutia.

Mère de famille traditionnelle, issue d’une famille privilégiée, Esperanza Brito se lance, à quarante ans, et avec succès dans le monde éditorial et le militantisme. Ses motifs sont d’ordre

personnel : tout d’abord, son agacement face aux injustices dont sont victimes les femmes devient vite une colère (enojo) qui ne cesse de s’amplifier. Esperanza Brito se définit comme une femme en colère (enojada) qui est en proie à des questionnements, « une inquiétude », face à la situation réservée aux femmes, injuste, inégalitaire dont elle sera le porte-parole : « ma voix porte les sentiments d’un grand nombre de femmes mexicaines 63« (n°5,

Siempre !, 4/04/1973). Ce sentiment intime d’irritation mêlé d’indignation, toutefois contenu,

parcourt, comme un leitmotiv, ses écrits et ses déclarations, et a impulsé ses actions en faveur des femmes (n°3, Siempre!,14/02/1973; n°19, Siempre!, 16/01/1974; n°23, Siempre!, 21/05/1975) : « Les femmes mexicaines – celles qui s’intéressent au progrès et au développement du pays – ressentent, comme moi, une grande inquiétude (…). » 64 ( n°3,

Siempre !, 14/02/73). Même si elle n’a pas souffert d’injustice, personnellement, elle

s’implique dans la lutte pour la cause des femmes, mue par un élan humaniste et solidaire dont la teneur prend sa source dans une éducation judéo-chrétienne dont l’une des vocations est de soulager la souffrance d’autrui : « Ce qu’il faut absolument, c’est que les femmes du monde entier soutiennent cette cause, même si elles ne souffrent pas personnellement de discrimination65. » (n°85, Novedades, 18/01/1974). Un devoir citoyen doublé d’une mission envers la société motive son engagement féministe :

J’appartiens à la minorité privilégiée, je le sais, et c’est pourquoi je suis doublement obligée de consacrer une grande partie de mes efforts à lutter pour celles qui ont manqué de tout et à qui la société patriarcale tourne le dos avec une absolue cruauté66 . (n°13, Siempre !, 17/10/1973)

Pour Esperanza Brito et Elena Urrutia, épouses et mères de famille, leur origine sociale, ainsi que leur éducation et leurs études, sont les ressorts d’un cheminement vers l’adhésion au féminisme et non pas a priori vers une position politique, comme le déclare Elena Urrutia :

La plupart des femmes que rapidement j’ai cotoyées et qui, à la fin des années 1960 et au début des années 1970 ont commencé à former ce qui serait la nouvelle vague du féminisme au Mexique, provenaient du

63 « mi voz representa el sentir de un núcleo importante de mujeres mexicanas. »

64 « Las mujeres mexicanas – las que estamos interesadas en el progreso y desarrollo del país – sentimos mucha inquietud (...). »

65 « Lo que es indispensable es que las mujeres del mundo entero apoyen esa causa, aún cuando en lo personal no sufran discriminación alguna. »

66 «Yo pertenezco a las minorías privilegiadas, lo sé, y es por esto que estoy doblemente obligada a dedicar gran parte de mi esfuerzo, a luchar por aquellas que han carecido de todo y a quienes la sociedad patriarcal vuelve la espalda con absoluta crueldad. »

militantisme de gauche, selon différents degrés. Plusieurs d’entre elles avaient participé de façon active au mouvement étudiant de 1968. Le passage d’un militantisme à un autre s’avérait naturel : la politique les portait vers des problématiques féministes. Mais ce ne fut pas mon cas67. (Urrutia, 2003: 92 )

En 1968, Elena Urrutia collabore à l’organisation du Programme culturel des jeux olympiques, à Mexico, la Olimpiada Cultural. L’engagement féministe d’Elena Urrutia, qui provient également d’un milieu social conservateur et religieux, prend sa source dans un profond sentiment d’injustice qu’elle vit au sein de sa propre famille :

Si on veut parler d’éveil, dans mon cas le détonateur fut un sentiment d’injustice qui entraîna automatiquement de l’insatisfaction. Pourquoi n’étais-je pas traitée de la même manière que mes frères ? Pourquoi jouissaient-ils de plus de liberté ? Pourquoi ont-ils pu eux choisir leur université [la UNAM] mais moi par contre j’ai dû m’inscrire dans une université confessionnelle [Université ibéro-américaine, en psychologie]? Pourquoi ce qu’on acceptait chez eux nous était interdit à nous leurs sœurs ? Pourquoi étions-nous soumis à un double code moral ? Toutes ces questions accumulées qui n’avaient aucune explication satisfaisante te faisaient penser que tu étais la cause de tout cela , de ton malaise, à un moment où tu ne pouvais pas encore comprendre ce à quoi ensuite le féminisme répondrait clairement : les problèmes que tu croyais être des problèmes personnels en fait sont communs à toutes les femmes puisque tu les partageais avec tes congénères ; plus tard tu comprendrais que ce qui est personnel était – est– politique68. (Urrutia, 2003 : 92)

Elena Urrutia entre dans le féminisme par les lettres, la culture, mexicaine et étrangère :

Ça devait être dans la seconde moitié des années 1960, quand j’ai entendu une phrase qui m’a paru révélatrice : le docteur Santiago Ramírez69, dont j’avais lu quelques essais sur « le Mexicain », au cours d’une conférence a fait référence à ses consultations psychanalytiques, en grande partie constituées par des juifs et des femmes « des minorités – disait-il- à la recherche d’une identité ». Cette phrase fut pour moi un révélateur. En

67 « La mayor parte de las mujeres con las que pronto me relacioné y que hacia finales de la década de los 60 y principios de los 70 empezaron a formar ésta que sería la nueva ola del fno en México, venía de la militancia de izquierda, en mayor o menor grado. Varias de entre ellas tuvieron una participación activa en el movimiento estudiantil del 68. El tránsito de una militancia a otra les resultaba natural: la política las llevaba de la mano a cuestionamientos feministas. En mi caso no fui así. »

68 « Si se quiere hablar de despertar, mi detonador fue un sentimiento de injusticia que generaba necesariamente insatisfacción. ¿Por qué el trato y consideración que se me daba era diferente al que recibían mis hermanos varones?, ¿por qué ellos gozaban de mayor libertad de movimiento, de acción?, ¿por qué ellos pudieron elegir la universidad que desearon y yo, en cambio, tuve que acogerme a una universidad confesional?, ¿por qué lo que en ellos se aceptaba, era inaceptable en nosotras, sus hermanas?, ¿por qué nos regía un doble código moral? La acumulación de interrogantes que no tenían una clara explicación hacía que te adjudicaras la causa de tu malestar cuando todavía no podías entender lo que pronto el feminismo te aclararía: que tus problemas no eran de tu exclusividad, que no eran problemas personales sino comunes a todas las mujeres, ya que los compartías con tus congéneres; más tarde entenderías que lo personal era –es– político. »

effet, on sentait « dans l’air » cette inquiétude, ce mal-être que beaucoup de femmes éprouvaient. C’était cela : ce moteur dans la recherche d’une identité au sein d’une société patriarcale oppressive et marginalisante. On est amené là, de façon spontanée, à se placer dans la ligne du féminisme. Et ce sentiment spontané te pousse à rechercher ton identité comme femme, à travers des lectures, des observations, des réflexions70. (Urrutia, 1999 : 428)

Pour Esperanza Brito et Elena Urrutia, le milieu familial a été un terreau favorable à l’émergence d’une prise de conscience progressive, voire difficile, face à leur propre situation et par extension face à celle des femmes en général. Cela signifiait la remise en question de toute une éducation, qui n’allait pas de soi et qui explique les choix de l’une et de l’autre : « J’ai été éduquée pour être une femme soumise71 », affirme Esperanza Brito (Entr. E. Brito, 2005), qui définit la lutte féministe ainsi :

[N]on pas contre les hommes mais contre le système oppressif et discriminatoire qui convertit les femmes en êtres inférieurs à tous les hommes, et pour la première fois dans ma vie [affirme-t-elle] je me suis rendue compte que moi aussi j’avais été victime de discrimination, de la part de mon père, de mes frères Rodulfo et Manuel, de mes oncles et aussi de quelques professeurs72. (Scholtys, 1998)

Par expérience personnelle, je sais combien il est difficile de faire table rase de toute une éducation traditionnelle, et combien il faut s’impliquer dans la lutte pour l’équité, avant de pouvoir accepter ce que l’on nous a toujours présenté comme un crime [l’avortement]73. (Siempre, 16/01/74)

La dépénalisation de l’avortement sera son cheval de bataille, au sein du Mouvement National des femmes (MNM). D’autre part, elle lutte pour la parole ouverte car parler de soi, de sa vie privée, ne se fait pas :

70 « Debe haber sido por la segunda mitad de los años 60 cuando oí una frase que me pareció reveladora : el doctor Santiago Ramírez, de quien había yo leído algunos ensayos sobre “el mexicano”, en medio de una conferencia se refirió a la composición de su consulta psicoanalítica, en gran parte formada por judíos y mujeres “minorías – decía- que buscan una identidad”: frase que fue para mí reveladora. En efecto, esa inquietud, ese malestar que experimentábamos muchas mujeres, que se percibía “en el aire”, era eso: el motor en la búsqueda de identidad en medio de una sociedad patriarcal opresora y marginadora. Se está, por así decirlo, de una manera espontánea en la línea del feminismo. Y ese estar espontáneo te lleva a buscar definir tu identidad como mujer, a irla armando con lecturas, observaciones, reflexiones, opciones. »

71 « A mí me educaron para ser una abnegada mujer mexicana. »

72 « no era contra los hombres, sino contra el sistema opresivo y discriminatorio que convierte a todas las mujeres en seres inferiores a todos los hombres; y por primera vez en mi vida me di cuenta que yo también había sido discriminada, por mi padre, por mis hermanos Rodulfo y Manuel, por mis tíos y por algunos maestros. » 73 « Por experiencia propia sé lo difícil que es desechar toda la formación tradicionalista, y lo involucrado que se debe estar en la lucha por la equidad, antes de poder aceptar lo que siempre nos plantearon como un crimen.»

Les femmes de mon groupe ne voulaient pas rendre publics leurs problèmes. On ne parlait pas encore de violence intrafamiliale, mais toutes en ont souffert d’une façon ou d’une autre, elles ne savaient pas que la violence prend plusieurs formes, la violence verbale, la violence économique, psychologique74. (Entr. E. Brito, 2005)

Malgré un milieu familial éclairé, les préjugés face au féminisme sont tenaces. Son père, Rodulfo Brito Foucher, qui fut Recteur de l’Université Nationale Autonome de Mexico (Universidad Nacional Autónoma de México, UNAM), en 1942, « […] fut tout un personnage, aux idées avancées, il disait que les femmes devaient étudier, faire des études, mais en même temps très conservateur dans le cadre familial75. » (Scholtys, 1998). Esperanza Brito raconte comment son père s’est emporté quand son épouse s’est déclarée ouvertement féministe dans un article intitulé « Je suis féministe » (« Yo soy feminista ») et publié dans El

Universal : « mais tu es folle, comment ça tu es une féministe, une virago76.» (Entr. E. Brito:

2005). L’anecdote suivante traduit la vision caricaturale que certains dirigeants pouvaient avoir des féministes et éclaire les difficultés à venir pour défendre les luttes féministes :

Je me rappelle qu’un jour, une femme du PRI [Parti révolutionnaire institutionnel] est passée nous voir, nous avions une réunion avec mon groupe auquel appartenait aussi maman et alors cette femme nous a mis en garde en disant que nous devions faire très attention parce qu’elles [les féministes] pouvaient nous faire des choses horribles… mais que pouvaient-elles bien nous faire ? Après quelques hésitations, elle nous dit qu’il y avait beaucoup de lesbiennes… C’était donc cela ! Mais mon Dieu, ça n’a aucune importance77. (Entr . E.Brito: 1996)

Ces préjugés, d’une classe sociale, sont aussi ceux des lecteurs qu’il s’agit donc d’éclairer. Esperanza Brito a mis fin à sa vie tranquille de femme aisée, d’épouse, de mère et de femme au foyer en optant pour le travail journalistique et l’action politique, à une époque où le

74 « Las mujeres en mi grupo no querían hacer públicos sus problemas. Entonces todavía no hablábamos de violencia interfamiliar; todas la sufrieron, y ellas no sabían que la violencia tiene muchos aspectos, la violencia verbal, la violencia económica, sicológica. »

75 « […] fue un personaje, avanzado en sus ideas que las mujeres debían prepararse y estudiar una carrera, pero muy conservador dentro del núcleo familiar. »

76 « Mi mamá escribió un artículo y puso el título: “ Yo sí soy feminista”. Y mi papá se enojó mucho: ¡estás loca! Como vas a ser feminista, eres marimacho. »

77 « Me acuerdo un día que una mujer del PRI [ Partido Revolucionario Institucional ] nos visitó, tenemos una reunión de mi grupo y mi mamá estaba ahí, mi mamá pertenecía al grupo y entonces nos dijo que, la mujer del PRI, tenemos que tener mucho cuidado porque nos podían hacer cosas horribles... pero ¿qué pueden hacernos? Después de dar unas vueltas, dijo que ahí había muchas lesbianas... ¡Eso es todo! Por dios, no tiene importancia.»

féminisme était perçu comme un choix étrange pour une femme de sa condition : « le mot féministe faisait peur [...]78 ” (Entr. E. Brito: 2005).

Ce sont les lectures qui structurent les inquiétudes d’Esperanza Brito et d’Elena Urrutia, en leur apportant des réponses et une réflexion sur le féminisme. Esperanza Brito a bénéficié de l’intelligence et de l’expérience de sa mère, féministe de la première heure : Esperanza Moreno Terán, qui avait lu Simone de Beauvoir, était journaliste, à El Universal, mais signait Esperanza Moreno de Brito Fouchard. Elle disposait d’une très bonne bibliothèque, remplie de références étrangères sur le féminisme :

J’ai lu ainsi plusieurs livres : La condition de la femme, du Dr Havel79, donne un panorama historique de la femme à différentes époques, sans droits, soumise à son mari. Pour moi, ce fut une révélation, parce que, dans ce petit livre, je me suis rendue compte que notre situation n’avait pas changé, que nous continuions à dépendre du mari, sans droits, bien sûr nous pouvions voter [depuis 1953] mais bon, cela ne suffisait pas… J’ai lu le livre de Betty Friedan [La mística de la feminidad, 196380], qui fut aussi un détonateur, je me comparais à la femme américaine qu’elle décrivait, avec ses limites, son malaise … C’est ce livre qui a fait de moi une féministe81. (Entr. E. Brito : 2005)

Ses lectures, comme le livre de Betty Friedan, alimentent ses premiers articles. Dans le premier qu’elle écrit dans Novedades para el Hogar, le 6 février 1963, elle rend compte précisément du mal être de la femme au foyer dans l’expression « Ah si j’avais pu… », chargée de « désirs frustrés »82, qui peuvent être comblés par une activité à l’extérieur du foyer. Esperanza Brito raconte : « Beaucoup de gens me demandaient : ‘Pourquoi veux-tu travailler ? Pourquoi veux-tu faire des choses ?’ Je suis passée par ce processus, parce que je voulais faire des choses. Je l’ai écrit83. » (Entr. E. Brito : 2005)

78 « La palabra feminista daba miedo…»

79 Havel, Jean Eugene, La condition de la femme , Paris, A.Colin, 1961, 223 p. Trad. En espagnol : La condición de la mujer, Eudeba, Buenos Aires, 1961, 191 p.

80 Titre original en anglais : The Feminine Mystique.

81 « Leí libros: La condición de la mujer, del Dr Habel,hace un recorrido histórico de la mujer en las diferentes épocas y habla de que no tenían derechos, todas están sometidas al marido, para mí, fue una revelación, porque con este librito me di cuenta de que seguíamos igual, de que seguíamos sujetas al marido, sin derechos, bueno sí podíamos votar en esa época, … pero no era suficiente…Leí el de Betty Friedan que también es un detonador y yo me comparé con la mujer americana que ella describía y todas las limitaciones que tenía... todo el rollo de Friedan. Y con este libro me acabó de pescar el feminismo. »

82 « Y todos los sueños, los deseos de realizar grandes proyectos que tuvo al contraer matrimonio, se han perdido en la rutina de la vida diaria y han quedado en la superficie de la mente como otros tantos deseos frustrados. Si yo hubiera…» (n°1, E. Brito, Novedades, 6/02/1963)

Esperanza Brito et Elena Urrutia lisent les auteures féministes européennes et américaines, dont elles partagent les analyses sur la situation des femmes.

Dans les années 1960, commence à pointer ce malaise ressenti par les femmes, tantôt appelé « Le problème sans nom », tantôt défini comme « Syndrome de la femme au foyer », par Betty Friedan. On peut lire dans la presse étrangère des articles, et certains livres fondamentaux sont traduits en espagnol et en anglais: « El Segundo sexo de Simone de Beauvoir, La condición de la mujer de Juliet Mitchell [1971], La mística femenina de Betty Friedan », les livres de Kate Millet [La política sexual, 1971], Germaine Greer [El Eunuco femenino, 1970], Shulamith Firestone [La Dialéctica del Sexo, 1970] o Sheila Rowbotham. En Amérique latine, en 1970, Margarett Randall publie aux Editions Siglo XXI Las mujeres, et Isabel Larguía84 nous fait découvrir « Le travail invisible »85. (Urrutia, 1999: 427)

Esperanza Brito et Elena Urrutia se sont approprié ce sentiment de malaise et d’insatisfaction qui a mobilisé les Américaines et les Européennes mais qui prend une tout autre signification dans le contexte latino-américain :

À quel moment se dit-on féministe ? Que se passe-t-il ? À quel moment tu te découvres féministe ? À partir d’un sentiment d’insatisfaction, d’un malaise très grand, un peu diffus, dont on ne sait pas quoi faire, comment l’appeler ? Ce que tu sais, c’est que tu ne te sens pas bien, alors tu te mets à lire, à observer autour de toi et voir ce qui se passe ailleurs, et tu te rends alors compte d’une chose : si je suis comme ça, ce n’est pas parce que je suis folle et que c’est mon problème personnel mais c’est parce que la société où je vis, m’opprime, me marginalise, que je suis une citoyenne de seconde catégorie. Bien sûr, pour en arriver là, il faut avoir réglé les questions liées à la subsistance, aux besoins fondamentaux, c’est-à-dire, avoir de quoi te nourrir toi et tes enfants, avoir un toit qui te protège, une école pour tes enfants, une fois ces aspects réglés, c’est alors que tu peux commencer à penser, à réfléchir…86 (Entr E.Urrutia : 2005)

porque yo quería hacer cosas. Lo escribí. »

84 Isabel Larguía, La liberacón de la mujer, Año Cero. « Contra el trabajo invisible ». Ed. Granica, Buenos Ares, 1973.

85 « En los años sesenta se empieza a difundir, aunque pálidamente, ese malestar resentido por las mujeres. […].« El problema sin nombre » se le llamaría; « Síndrome del ama de casa » lo bautizaría Betty Friedan. De modo particular están algunos artículos leídos principalmente en la prensa extranjera, y ciertos libros fundamentales. Se traduce al inglés y al español El segundo sexo de Simone de Beauvoir. Aparecen La condición de la mujer de Kate Millet, Germaine Greer, Shulamith Firestone o Sheila Rowbotham. En América Latina, en 1970, Margaret Randall publica en la Editorial Siglo XXI Las mujeres, e Isabel Arguía nos descubre « El trabajo invisible ».»

86 « ¿Cuándo una se define como feminista ? ¿Qué pasa ? ¿Cuál es el momento en qué tú te descubres feminista ? Bueno, estás viviendo una insatisfacción, un malestar muy grande, un poco difuso, que no sabes bien dónde ponerlo, dónde colocarlo, cómo llamarlo, lo que sí sabes es que estás sintiéndote mal, entonces vas leyendo, vas observando, vas sabiendo lo que hay en otras partes y caes en la cuenta, claro, de que estoy así no porque estoy loca, no porque es mi problema personal, sino porque me estoy dando cuenta de que estoy viviendo