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La construction d’une relation de soin intègre le soignant et le soigné dans une dynamique d’interaction complexe et soumise à des dynamiques interpersonnelles subtiles. Permettant au patient d’acquérir une compréhension de lui-même et de le conduire à prendre ses propres décisions, la relation empathique consiste pour le praticien à percevoir les réactions et les sentiments personnels du patient et à lui communiquer cette compréhension. Dans son ouvrage, Vannotti mentionne la définition de l’empathie donnée par Cosnier en 1994, comme une « capacité à se mettre à la place

d’autrui et à percevoir ses affects (empathie d’affects), à partager ses représentations (empathie de pensée) ou à partager ses actions et réactions (empathie d’action) » (31).

Portés par une démarche d’amélioration de la qualité des soins induite par une relation médecin- patient de qualité, de nombreux chercheurs se sont penchés au cours des dernières années sur les effets de la communication verbale et non verbale au cours de l’interaction soignant-soigné. Deux conceptions du rôle du médecin s’imposent ainsi dans la littérature : d’un côté, l’image d’un médecin imperturbable proposant une prise en charge efficace en tant qu’expert du soin, et de l’autre, celle d’un médecin « humain et empathique », considérant la maladie mais s’attachant également à comprendre

fait de la charge émotionnelle induite. Au contraire, les défenseurs d’une approche considérée comme plus humaniste estiment que sans empathie, le praticien méconnaît son patient, et ne peut donc lui proposer une prise en charge adaptée. Pour Rey-Vicky et Vanotti, « le dialogue entre soignant et

soigné devrait éviter à la fois de tomber dans la rationalisation techniciste au nom de l’efficacité, et dans la psychologisation excessive où l’on croit, à tort, assumer une attitude empathique ». (31)

Du fait de la diversité des opinions concernant l’adéquation entre attitude soignant et qualité des soins, il semble judicieux de s’intéresser au point de vue des patients, afin de faire émerger de leur parole leurs attentes et besoins en matière de santé. En effet, la satisfaction du patient par rapport à l’attitude du médecin conditionne leur implication dans la démarche de soin et donc dans l’évolution de leur maladie (32-36). La qualité de la relation médecin-patient et l’attitude du praticien conditionneraient en effet la fidélisation du patient à la pratique du médecin et à l’adhésion au suivi (37, 38, 39).

Depuis la fin du XXème siècle, des chercheurs se sont intéressés à la notion de satisfaction dans le processus de soin. Plusieurs questionnaires ont ainsi vu le jour, construits à partir de revues de la littérature.

En 1987, JE Ware et ses associés publient le « Patient Satisfaction Questionnaire » (Annexe 4) utilisable dans la population générale, et ayant pour finalité de mesurer le taux de satisfaction du patient, d’évaluer les sources de satisfaction et d’insatisfaction et de comprendre le comportement du patient (34, 35, 36, 39). Cet outil permet d’explorer 7 dimensions de la relation thérapeutique au travers de 51 items, pouvant avoir une influence sur la satisfaction du patient (34).

- Relation interpersonnelle : caractéristiques de la façon dont les prestataires interagissent personnellement avec les patients (par exemple, inquiétude, convivialité, courtoisie, manque de respect, grossièreté).

- Qualité technique : compétence des prestataires et respect de normes élevées de diagnostic et de traitement (par exemple, rigueur, exactitude, risques inutiles, erreurs).

- Accessibilité / commodité : facteurs impliqués dans l'organisation pour recevoir des soins médicaux (par exemple, temps et efforts requis pour obtenir un rendez-vous, temps d'attente au bureau, facilité d'accès au lieu de soins).

- Finances : facteurs impliqués dans le paiement des services médicaux (par exemple, coûts raisonnables, autres modes de paiement, exhaustivité de la couverture d'assurance).

- Déficit / résultats : les résultats des soins médicaux et l'utilité des soignants pour améliorer ou maintenir la santé.

- Continuité : similitude du prestataire et / ou du lieu des soins (par exemple, voir le même médecin).

- Environnement physique : caractéristiques du milieu dans lequel les soins sont prodigués (par exemple : installations et équipement ordonnés, atmosphère agréable, clarté des panneaux et des directions).

- Disponibilité : présence de ressources de soins médicaux.

Le médical Interview Satisfaction Scale (MISS) est une échelle anglo-saxonne développée dans le même objectif d’évaluation de la satisfaction du patient lors d’une consultation médicale et fondée sur les données de la littérature et les entretiens auprès des patients (40). La première version de ce questionnaire, le MISS-26, a été publiée en 1978, et comporte 26 items explorant 3 dimensions de la relation de soins : cognitive (explications et informations données par le médecin, compréhension par le patient de la démarche de soin et du pronostic) , affective (perception du patient de la relation médecin-patient, sentiment de confiance, de sécurité et de prise en considération) et comportementale (évaluation par le patient du comportement du médecin et de sa démarche clinique). Du fait d’un manque de validité, ce questionnaire a été modifié avec la publication du MISS-29, comportant quatre dimensions : « Communication et réconfort », « Soulagement de la détresse », « Intention de conformité », « Relation interpersonnelle » (31, 34).

Devant l’absence de données émanant de la littérature française et considérant avec prudence l’extrapolation de ces questionnaires au système de santé français, une thèse de médecine générale a été menée en 2001 par Marie-Cécile Dedianne portant sur l’évaluation des attentes et perceptions de la qualité de la relation médecin-patient par les patients en médecine générale. Ce travail de recherche a permis de mettre en évidence des déterminants de la satisfaction du patient en soins primaires non énoncés dans les questionnaires sus cités. Si les notions de compétences techniques et biomédicales, relationnelles et communicationnelles, et de commodité / accessibilité du médecin étaient retrouvées, cette étude révélait l’importance de la temporalité de la consultation avec un médecin prenant le temps et réalisant une écoute active (33).

Nous voyons ainsi au travers de ces travaux se dessiner l’importance pour le patient de la construction d’une relation interpersonnelle basée sur une humanité et une « considération empathique » telle que décrite par les scientifiques s’étant penchés sur l’approche centrée sur le patient.

C. Relation médecin-patient en soins primaires et compétences du médecin