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1.5.1 Sources à cascades quantiques pour le domaine THz

Dans ce paragraphe on va discuter brièvement le fonctionnement des dispositifs qu’on utilise pour générer du rayonnement THz. Plus de détails seront donnés dans la partie II de ce manuscrit.

La première structure électroluminescente dans le domaine THz (λ ≈ 100 µm) à été démontrée par Manfred Helm en 1988 [53], [52]. La structure était un super-réseau à base de sémiconducteur ternaire AlGaAs. Les transitions entre les différents niveaux du super-réseau, appelées encore des "sous-bandes" [54], sont induites par l’application d’un champ électrique le long de la structure (voir figure 1.6(a)). Les règles de sélection pour les transitions entre les niveaux (transitions "inter-sous-bandes") font qu’on peut modéliser ces transitions par un dipôle vertical, i.e. parallèle à l’axe de la structure, ou encore perpendiculaire aux couches épitaxiales.

Le dispositif expérimental est montré à la figure 1.6(b). Des électrodes métalliques sont déposées sur la structure pour permettre d’appliquer un champ électrique et faire passer du courant. Un réseau métallique en or est également déposé sur la surface pour coupler le rayonnement vers l’extérieur.

Grâce à l’introduction du concept de "cascade quantique", qui sera détaillé dans la se-conde partie de ce manuscrit, des sources de rayonnement plus performantes ont apparues ces dernières années, dans le domaine de l’infrarouge lointain. Dans nos expériences, on a couramment utilisé les sources décrites dans [55], [56], émettant à une longueur d’onde

7Du point de vue mathématique, cette compensation est liée à la conservation des relations de com-mutation des variables conjuguées.

de λ = 88 µm. Pour les modélisations qui vont suivre, il faut retenir qu’une cascade quantique est un ensemble de N couches fines équivalentes (qui sont des séquences de puits quantiques). L’épaisseur d’une couche D, appelée "période de la cascade", est de l’ordre de quelques dizaines de nanomètres. Chacune des couches peut être modélisée par un ensemble des dipôles verticaux (perpendiculaires à la couche), répartis de manière ho-mogène à l’intérieur de la couche. Le nombre de dipôles excités par unité de temps est proportionnel au courant électrique traversant la couche de la cascade.

1.5.2 Ordres de grandeur

Le taux d’émission spontanée associé à la transition inter-sous-bande peut être estimé à partir de l’expression (1.34) et en utilisant le résultat (1.69). Avec l’élément de moment dipolaire hpzi de la transition hpzi = −ehzi, on obtient après quelques réarrangements :

Γ0 = 16n1e

2hzi2π3

03 (1.78)

La valeur moyenne hzi s’obtient à partir d’une résolution numérique de l’équation de Schrödinger pour la structure. Typiquement on obtient hzi ≈ 10 nm. Avec une longueur d’onde λ = 100 µm on estime le temps caractéristique τ0 de l’émission spontanée :

τ0 = 1/Γ0 ≈ 14µs (1.79)

Dans la gamme de fréquences THz l’émission spontanée s’effectue alors à l’échelle de quelques dizaines de micro-secondes.

L’autre grandeur pertinente pour les transitions inter-sous-bandes est le taux des tran-sitions non-radiatifs Γnr. Deux mécanismes non-radiatifs sont à prendre en compte : les collisions électron-électron et l’émission des phonons optiques [57]. Les deux mécanismes ont des temps caractéristiques τnr à l’échelle de la picoseconde :

τnr = 1/Γnr = (0.1 − 10)ps (1.80)

Ce temps est beaucoup plus court que le temps caractéristique de l’émission spontanée. Cherchons maintenant à évaluer l’ampleur des effets de modification de l’émission dans le domaine THz. La quantité pertinente ici est le rapport entre la longueur d’onde rayonnée λ et l’épaisseur du dispositif L. Pour un dispositif typique la période de la cascade est de D ≈ 0.1 µm [55]. La longueur d’onde étant λ ≈ 100 µm, on obtient, pour un dispositif à une seule période (épaisseur minimale) :

λ L T Hz ≈ 103 (1.81)

Par comparaison, pour la même expérience dans le domaine optique [58], l’épaisseur typique de la cavité est 30 nm, la longueur d’onde étant 950 nm on obtient pour le rapport : λ L optique ≈ 30 (1.82)

Ainsi, dans le domaine THz, les effets qu’on cherchera à mettre en évidence sont favorisés par plus de deux ordres de grandeur. Cette estimation ne doit servir qu’à titre indicatif ; une analyse plus ample mettrait en jeu l’orientation du dipôle dans la cavité. Des estimations quantitatives font l’objet du chapitre 2.

Remarquons à la fin qu’avec une extension typique de dipôle de l’ordre de ≈ 10 nm pour la gamme des longueurs d’onde qui nous intéressent l’approximation des grandes longueurs d’onde est évidemment satisfaite.

Chapitre 2

Source dans une microcavité planaire

2.1 Généralités

2.1.1 Cavité planaire dans le domaine THz

Ce chapitre est consacré à l’étude des modes et de l’émission spontanée d’une source ponctuelle dans une cavité planaire. Bien que ce problème ait été déjà traité dans la littérature de manière générale, l’analyse qui est fournie ici est spécifique au domaine THz.

On commence en introduisant le dispositif à modéliser dans le paragraphe suivant. Ensuite, dans la section 2.2 les modes d’une cavité "vide" (sans source) sont passés en revue. La spécificité ici provient de la présence dans la cavité des couches semi-conductrices fortement dopées, ce qui détermine l’existence des excitations électromagnétiques de type plasmon de surface qui influent fortement sur la morphologie des modes de la cavité et donc sur le rayonnement de la source. L’analyse du système multi-couche est la première étape de l’étude des systèmes plus compliqués, comme les cavités avec un réseau métallique qui sont étudiées dans les chapitres 3 et 4.

Le modèle théorique présenté dans cette partie pourrait aussi servir, dans un cadre plus général, pour l’étude des dispositifs lasers ou d’autres dispositifs optiques multi-couches. Dans la section 2.3, on étudie l’émission spontanée d’une source dipolaire placée à l’intérieur de la cavité THz planaire. Cette étude a trois aspects, qui sont encore dictés par la particularité de domaine de fréquences :

- le développement des outils analytiques et numériques pour la mise en oeuvre des idées générales présentées dans le chapitre 1. L’aspect multi-couche de la cavité et en parti-culier la présence des couches dopées est explicitement pris en compte. Le taux d’émission dans les modes guidés de la cavité est calculé par la règle d’or de Fermi. On l’appellera "taux d’émission spontanée modal". On calcule aussi le taux d’émission classique par le champ rétro-réfléchi sur le site du dipôle.

- ensuite on donne une analyse quantitative de la désexcitation du dipôle dans les différentes voies. D’une part, on confirme que le taux d’émission dans le mode fondamental croît comme l’inverse de l’épaisseur la cavité, ce qui est la conclusion importante du paragraphe 1.4.1. D’autre part, la voie non-radiative, due à la présence des couches dopées est étudiée en détail à partir du champ-rétro-réfléchi.

- enfin, partant des analyses théoriques, on prédit le comportement de la puissance extraite par la facette de la cavité lorsqu’on fait varier l’épaisseur de la cavité. La modi-fication de l’émission spontanée peut être ainsi mise en evidence expérimentalement.

L’accent de cette étude est porté sur les cavités qui confinent complètement les modes optiques par deux miroirs métalliques. Dans ce cas les effets de modification de l’émission sont maximaux. Des systèmes sans confinement fort sont aussi discutés par comparaison avec les premiers.

2.1.2 Dispositif étudié : modèle

Le dispositif planaire est décrit à la figure 2.1. Il est constitué de la cascade quantique GaAs/AlGaAs, brièvement décrite dans la section 1.5, mise dans la cavité optique qui est formée par les deux miroirs indiqués sur la figure. Passons alors en revue les différents éléments.

La couche métallique supérieure est un élément indispensable : elle sert à guider le mode optique, et d’électrode pour le pompage électrique de la cascade. Cette couche d’épaisseur typique de quelques centaines de nanomètres contient principalement de l’or. Dans le domaine THz la longueur de pénétration du champ électromagnétique dans les métaux est typiquement de quelques dizaines de nanomètres, ce qui justifie de modéliser cette couche par un miroir métallique en or infini. Cependant, avec le formalisme qu’on va développer dans le paragraphe 2.2.2 on peut prendre en compte explicitement l’épaisseur finie du métal.

La cascade quantique GaAs/AlGaAs, d’épaisseur L, est épitaxiée entre deux couches de contact de GaAs avec un fort niveau du dopage de type n+ pour l’injection du courant dans la cascade. Les propriétés optiques des couches de contact sont bien décrites par le modèle de Drude et seront discutées dans le paragraphe suivant. Du point de vue optique les couches de contact introduisent de l’absorption, mais peuvent aussi servir, dans cette gamme de fréquences, pour le confinement optique du mode à cause de leur forte réflectivité. Les épaisseurs des deux couches de contact seront notées par La et Lb. Les concentrations des dopants seront respectivement notées par Ca et Cb.

Dans la modélisation, la nature du miroir inférieur n’est pas fixée. S’il s’agit d’une couche métallique, alors le champ électromagnétique est entièrement confiné dans la ca-vité ; on parlera d’une "caca-vité confinée". En revanche s’il s’agit, par exemple, d’un substrat GaAs infini le mode optique guidé pénètre en large partie dans le substrat (un confine-ment partiel se fait alors par la couche de contact inférieure) ; on parlera d’une "structure sans confinement".