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DES EFFETS OBTENUS PAR LES ACTIONS D’INFLUENCE DU RENLAC

Analyse des études de cas : résultats et discussions

4.7. DES EFFETS OBTENUS PAR LES ACTIONS D’INFLUENCE DU RENLAC

Des éléments objectivement vérifiables permettent d’affirmer que les actions diverses entreprises par le RENLAC avec ses associés de la société civile ont produit des résultats positifs, notamment du côté des autorités officielles. La corruption est davantage abordée dans le discours politique et celui de de la haute administration publique (1), tandis que le RENLAC est dorénavant intégré dans des structures publiques en charge du contrôle des opérations publiques (2) ; il est même arrivé que l’Etat mette en place des organismes spécialement chargés de lutter contre la corruption (3) avant de poser, ici et là des actes concrets de résolution de problèmes indexés par l’ONG en lutte contre la corruption (4) ; enfin, le projet d’une loi spécifique contre la corruption a finalement été voté (5).

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NATIONS UNIES (Page consultée le 22/10/2015). Journée internationale de lutte contre la corruption, 9 décembre, [en ligne], http://www.un.org/fr/events/anticorruptionday/resources.shtml

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Mais aussi égyptienne et tunisienne, à la faveur de l’édition 2014

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Les 1ères journées avaient, par exemple, proposé quatre axes d’intervention comprenant, entre autres, la présentation d’un mémorandum sur la corruption qui sera transmise au gouvernement. Pour plus de détails, Voir :

KARAMA, Alassane (Sidwaya). « REN-LAC : Des journées spéciales contre la corruption » dans lefaso.net, 14 janvier 2014, http://lefaso.net/spip.php?article1052 (Page consultée le 23/10/2015)

4.7.1. Dans le discours politique

Alors que l’opinion nationale et surtout les autorités nationales et politiques ont pendant longtemps refusé d’admettre des faits de corruption, elles commencent de plus à reconnaître qu’elle existe161

.

GERDESS : « Au départ, quand on avait commencé à parler de la corruption, les gens

disaient de nous que nous étions aigris, des gens qui n’avaient pas les moyens, etc. On refusait même d’en parler, il ne fallait même pas en parler. Et puis petit à petit, à force d’en parler, les gens ont fini par reconnaître qu’il y avait la corruption […] En tout cas, ça, on peut attribuer à l’action du RENLAC. Le fait que les gens acceptent maintenant d’en parler d’abord, d’accepter le fait ensuite, surtout par les autorités que la corruption existe au Burkina, ça c’est déjà une bonne chose. »

Interviewé 2, RENLAC : « Au départ de la création du RENLAC, tous ceux qui osaient parler de la corruption étaient taxés de jaloux, d’aigris, etc. Surtout les responsables. Ils sont jaloux des biens des autres, etc. Le RENLAC a insisté. En son temps, au niveau de l’Etat, ils n’acceptaient même pas la corruption. Mais au fur et à mesure que le RENLAC insistait, lentement on acceptait [...] »

Interviewé 1, RENLAC : « […] Il faut dire que la question de la corruption n’avait pas été prise en compte par les gouvernants. Mais grâce à l’action du RENLAC, c’est maintenant devenu une affaire du politique, du gouvernant. Et cela se manifeste par des discours. »

On voit bien que l’effet « priming » des pratiques de plaidoyer ou d’éclairage par la connaissance, comme nous écrivions plus haut, a fait de la corruption un sujet incontournable des discours politiques.

4.7.2. Le RENLAC davantage intégré dans des structures publiques de contrôle de l’Etat Le contexte ou l’environnement ayant maintenant été rendu favorable, le RENLAC est davantage accepté par l’Etat qui l’intègre de plus en plus dans des dispositifs de contrôle de la dépense publique.

Interviewé 3, RENLAC: « […] Aujourd'hui le gouvernement est obligé de nous impliquer dans un certain nombre de ses structures. Par exemple, la structure sur les marchés publics : nous y avons un représentant […] C'est l'Etat qui attribue ses marchés publics. Maintenant, dans la structure de contrôle, qui regarde comment on attribue ces marchés publics, nous nous souhaitions être dans cette structure, et nous y sommes ! En fait, cela fait cinq ans que nous y sommes. »

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« La corruption comme système de gouvernance : l’aveu du Parti au pouvoir, le CDP selon le REN-LAC » dans

4.7.3. Organismes anti-corruption spécialement créés par l’Etat

Avant la création du RENLAC, il existait des structures gouvernementales dont notamment l’Inspection générale d’Etat mais sans grande visibilité médiatique et surtout dont les investigations sur les fraudes commises par les agents de l’Etat n’aboutissaient pas162

. Du fait, entre autres, de la présence du RENLAC et de ses actions multiformes, l’Etat s’est pratiquement vu obligé de répondre à un vide institutionnel par la création d’organismes chargés de lutter officiellement163 contre les faits de corruption.

Interviewé 2, RENLAC : « […] Et même au niveau étatique des structures étatiques ont été créées […] Il y avait la Haute autorité de lutte contre la corruption, dont le responsable était, je crois, Molobari Traoré. Et après Molobari il y a eu un autre. Et c’est suite aux différentes critiques du RENLAC qu’ils ont été obligés de dissoudre la Haute autorité pour créer l’ASCE, parce qu’on disait qu’elle n’avait pas d’indépendance, etc. »

4.7.4. Des actes concrets de résolution de cas identifiés de corruption

En témoignage de l’ouverture de l’Etat aux débats et aux interpellations faites par l’ONG, des actes sont quelquefois posés allant dans le sens de la résolution des problèmes soulevés. Des exemples peuvent être cités, parmi lesquels nous choisissons celui lié au ministère de l’éducation nationale.

Le fait relevé par le RENLAC est le suivant : des enseignants cumulaient plusieurs avantages à la fois, celui de bénéficier d’un logement administratif et de se faire payer des indemnités de logement dans le même temps. Quand le ministère de tutelle s’est résolu à résoudre le problème, voici ce que cela a donné :

Interviewé 2, RENLAC : « Oui, une mission du ministère est venue auprès de nous pour comprendre les contours du problème et pour pouvoir réagir de façon efficace. Et c'est là – comme mon collègue disait – qu’eux-mêmes ont fait une mission sur le terrain. Et ce qu'ils ont découvert a montré que ce que nous avions trouvé était petit. Et donc ça a aujourd’hui permis de prendre des décisions fortes.

Il faut dire que les logements étaient gérés de façon anarchique mais aujourd’hui tous les logements des enseignants sont transférés au niveau des mairies et ce sont elles qui gèrent cela avec les enseignants. Et en ce moment on verse les indemnités à tout le monde. Si vous voulez louer des locaux qui se trouvent sur votre site de travail, alors vous louez avec la mairie. Ça c'est une action où il y a eu des échanges et à la fin il y a eu une amélioration. »

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Entretien avec le GERDESS le 09/01/2014, à Ouagadougou (Burkina Faso).

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Création en 2001 de la Haute Autorité de Coordination de la Lutte contre la Corruption (HACLC). En 2007, création de

l’Autorité Supérieure du Contrôle de l’Etat (ASCE) qui connaît une mutation qualitative importante pendant la Transition, en

novembre 2014. En effet, l’ASCE se fait désormais appeler ASCE/LC, pour Autorité Supérieure de Contrôle d’Etat et de la

4.7.5. Du sort réservé au projet de loi spécifique sur la corruption

Porté par l’ONG avec le soutien de ses partenaires, le projet de loi spécifique sur la prévention et la répression des faits de corruption a finalement été voté par le gouvernement de Transition164. En rappel, il avait été endossé par le gouvernement du Président Compaoré – aujourd’hui en fuite, à la suite d’une insurrection populaire165

. En son temps, ce projet de loi avait même été transmis au Parlement pour adoption, lequel l’avait retourné au Gouvernement car le contenu en avait été si élagué que même les députés l’avaient trouvé inopérant166

. Ce parcours chaotique était suivi de près par le RENLAC :

Interviewé 3, RENLAC: « La vision du monde du parti-majoritaire est là : c'est elle qui est dans le projet de loi. Et voilà ce que nous, nous disons : il y a des articles où il n'y a pas de problème, ils ont vraiment repris nos articles. Mais il y a des articles où ils ont modifié pour que ça les arrange, mais on est vigilant. On essaye d'être en veille, c'est-à-dire qu’on essaye de veiller pour que ce que nous nous voulons y soit. C'est ça le gros challenge. Il ne faut pas dormir ! »