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2. Effets bénéfiques du thé sur la NAFLD

2.1. Effets hépatiques

2.1.1. Diminution de la stéatose hépatique

De nombreuses études animales attribuent aux différents types de thé (vert, noir, oolong, pu-erh) et à leurs molécules majoritaires, les catéchines et les théaflavines, des effets lipotropes (favorisant la mobilisation ou la dégradation des lipides du foie) (Tableau 4). D’une manière plus globale, les flavonoïdes et les acides phénoliques contenus dans le thé sont mis en avant pour leur propriété lipotrope (Fardet and Chardigny, 2013). Cependant, les études sur le thé sont très hétérogènes de par le choix du modèle animal (espèce étudiée, sain ou porteur de pathologie), la durée de l’étude (24h à plusieurs mois), le régime (riche en lipides (de 15 à 60 % de l’apport énergétique), en glucides ou standard), le type de thé (non-fermenté, fermenté), la méthode d’administration du thé (infusion ou feuilles, liquide ou nourriture) et la dose administrée (jusqu’à un facteur 1000 d’une étude à l’autre) (Tableau 5).

Certaines études réalisées chez le rongeur ont mis en évidence une diminution du taux hépatique de TG et de cholestérol suite à la consommation d'extrait aqueux de thé vert mélangé à la nourriture (0,5 à 4 g d’extrait aqueux de thé vert/100 g nourriture) (Axling et al., 2012; Bruno et al., 2008; Heber et al., 2014; Kuo et al., 2005; Li et al., 2006; Park et al., 2012, 2011). D'autres études réalisées avec des extraits aqueux de thés fermentés (thé noir, oolong et pu-erh) mélangés à la nourriture (0,5 à 4 g d’extrait aqueux de thé fermenté/100 g nourriture) mettent également en évidence une diminution de la stéatose hépatique chez le rat (Kuo et al., 2005; Lin et al., 2007; Liu et al., 2015; Uchiyama et al., 2011) et chez la souris (Heber et al., 2014).

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En revanche, les études animales évaluant les effets lipotropes des infusions de thé en boisson (correspondant d’avantage à la consommation humaine) sont plus rares (ici 9 études sur 30) et les résultats plus hétérogènes (seulement 22% de résultats positifs pour l’administration de thé en boisson contre 66% pour l’administration de thé via la nourriture). En effet, seules deux études sur sept (deux études sur les neuf ne présentent pas de résultat sur le foie) montrent une atténuation de la stéatose hépatique suite à la consommation d’un extrait aqueux de thé vert (0,05 ou 0,25 g d’extrait aqueux dans 1L eau) (Lin et al., 2009) ou d’extraits éthanoliques de thé vert ou de thé oolong ou de thé noir mélangés à l’eau de boisson (1g d’extrait éthanolique dans 1L d’eau) (Yang et al., 2001). Au contraire, une étude réalisée chez le rat ne montre aucune diminution significative des TG hépatiques suite à la consommation d’infusions de thé vert ou de thé noir (20g feuilles de thé dans 1L d'eau bouillante pendant 3 minutes) durant 27 semaines (Chen et al., 2009). De même, aucune diminution de la masse du foie n’a été trouvée suite à la consommation de thé vert en boisson (bouteille commerciale, consommation ≈ 50 mL/jour/rat) (Abe et al., 2009; Ashida et al., 2004) ou de poudre de feuilles de thé vert ou noir mélangé à l’eau (Ramadan et al., 2009). A noter que les lipides hépatiques n’ont pas été dosés dans ces trois dernières études. Enfin, une étude réalisée chez la souris n’a pas démontré de diminution de la masse du foie ni du taux de cholestérol hépatique suite à la consommation d'une infusion de thé pu-erh (0,225 et 0,45 % d'extrait aqueux de thé pu-erh dans l'eau de boisson) durant 70 jours (Shimamura et al., 2013).

Sachant que la consommation moyenne de nourriture est de 30 g pour un rat de 500 g et de 5 g pour une souris de 30 g, on peut estimer que la consommation de thé mélangé à la nourriture est comprise entre 0,1 et 6,7 mg d’extrait sec de thé par jour et par gramme de masse corporelle d’animal avec une moyenne de 1,5 mg dans l’ensemble des études analysées (Tableau 5). Pour la consommation sous forme de boisson, elle est estimée à environ 50 mL par jour chez le rat. D’après les études animales analysées, la quantité d’extrait de thé variant de 2,5 à 500 mg dans 50 mL d’eau, la consommation de thé en boisson est donc comprise entre 0,005 et 1 mg de molécules de thé par jour et par gramme de masse corporelle avec une moyenne de 0,2 mg. Ces données mettent en évidence que la consommation de thé via la nourriture permet un apport en molécules bioactives plus important (1,5 mg/g/j) en comparaison à la consommation via la boisson (0,2 mg/g/j) et pourrait expliquer la plus forte hétérogénéité quant à l’observation d’effets lipotropes du thé administré sous forme de boisson.

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Par ailleurs, il a été rapporté divers mécanismes de diminution des taux de lipides hépatiques suite à la consommation de thé. Une étude a mis en évidence une diminution de l'expression des gènes des enzymes clés de la lipogenèse SREBP1c (-40%) et ACC (-30%) suite à la consommation de thé vert chez la souris (Axling et al., 2012) pouvant expliquer la diminution du taux de TG hépatiques. Une autre étude réalisée sur le thé pu-erh a également montré une diminution de l’expression des gènes SREBP1c (-10%) et FAS (-8%) chez la souris (Shimamura et al., 2013). Les mécanismes d'action mis en jeu dans la diminution de l'expression des gènes de la lipogenèse n'ont pas encore été totalement élucidés cependant, il a été montré que les polyphénols de thé augmentaient le processus de phosphorylation de l'AMPK et de l'ACC via l'activation de l'enzyme LKB1 (Liver kinase B1) favorisant l'inhibition de l’expression des gènes FAS et l'ACC (Way et al., 2009; Lin et al., 2007). De récentes études ont également mis en évidence que le mécanisme de phosphorylation de l’AMPK était favorisé par les polyphénols de thé induisait en cascade la phosphorylation du facteur de transcription SREBP empêchant ainsi la transcription des gènes de FAS et d’ACC (Huang and Lin, 2012; Li et al., 2011). Il a également été montré que les polyphénols de thé entrainaient la diminution de l’expression du facteur de transcription LXR-α (Axling et al., 2012) pouvant également expliquer la diminution de transcription de SREBP1c, FAS et ACC sous le contrôle de ce facteur. La diminution des TG dans le foie peut également s'expliquer par l'augmentation de la β-oxydation induite par le consommation de thé observée chez la souris (Murase et al., 2002), chez le rat (Chen et al., 2009; Liu et al., 2015) et chez le poulet (Huang et al., 2013). En effet, ces études mettent en évidence l'augmentation des gènes impliqués dans la β-oxydation tels que PPar-α, CPT-1 et ACOX. En outre, des études réalisées chez la souris ont montré que la consommation de thé vert et de thé pu-erh entrainait une diminution des taux d’ARNm du facteur de transcription SREBP2 (-60%) (Kim et al., 2012) et de l'enzyme clé de la synthèse de cholestérol, HMGR (-10%) (Shimamura et al., 2013) permettant d’expliquer la diminution du taux de cholestérol hépatique. Enfin, ce dernier point peut également être expliqué par le fait que la consommation de thé augmente l’expression de CYP7A1 qui favorise l’excrétion du cholestérol via la synthèse de sels biliaires dans des hépatocytes in vitro (Lee et al., 2008).

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2.1.2. Diminution du processus de stress oxydant et des lésions hépatiques

En plus de la diminution de la stéatose hépatique (entre 10-30% de baisse de la masse du foie, entre 17-77% de diminution des TG hépatiques, entre 12-44% de diminution du cholestérol total hépatique, Tableau 5), il a été montré que la consommation de thé favorisait la diminution du stress oxydant dans le foie (Figure 15).

Le thé contient de nombreuses molécules capables de piéger les ROS telles que les catéchines notamment EGCG et les théaflavines (Frei and Higdon, 2003; Leung et al., 2001) mais également ses acides phénoliques tel que l'acide gallique (Zuo et al., 2002). Ces molécules sont des piégeurs efficaces de ROS notamment grâce à leur capacité à se comporter en donneur d'hydrogène ou d'électron (Higdon and Frei, 2003). Les ROS peuvent entrainer des dommages cellulaires notamment au niveau des lipides membranaires en induisant la peroxydation des acides gras polyinsaturés. Des études réalisées chez des souris obèses montrent que le thé vert diminue la peroxydation lipidique hépatique et notamment les taux de 4-HNE (Chung et al., 2012) et de MDA (Park et al., 2011). Dans cette dernière étude, le thé diminue également le taux de TNF-α dans le foie favorisant l’atténuation des lésions hépatiques. La diminution de TNF-α a également été observé dans d'autres études chez la souris (B.-T. Chen et al., 2012) et chez le rat (Abe et al., 2005). Dans ces deux études, le thé vert attenue également l'augmentation de IL-1β provoquée par un traitement à la D-galactosamine chez les animaux NAFLD.

Il a par ailleurs été rapporté que le thé vert augmentait les défenses antioxydantes hépatiques, en particulier l’activité et la synthèse protéique de la SOD, de la catalase, de la GPx, du GSSH et du GSH (Y.-L. Lin et al., 1998; Park et al., 2012, 2011) et diminuait les enzymes pro-oxydantes telles que la NADPH oxydase (NOX) et la myélopéroxydase (MPO) (Chung et al., 2012) favorisant la diminution du stress oxydant global.

De plus, il a été montré que le thé permettait d'atténuer les dysfonctions mitochondriales in

vitro (Bhattacharya et al., 2011) et in vivo (Lin et al., 2009). Dans ces deux études, l'atténuation des dysfonctions mitochondriales se traduit par une amélioration du potentiel membranaire mitochondrial, d'une diminution du taux cytosolique de cytochrome c et d'une diminution du rapport Bax/Bcl2, Bax étant une protéine apoptotique pouvant être inhibée par la protéine anti-apoptotique Bcl2 (Vander Heiden et al., 1997). Comme nous l'avons décrit dans le chapitre précédent, les dysfonctions mitochondriales représentent une source majeure de production de ROS et l'atténuation de ses dysfonctions favorise fortement la diminution du stress oxydant.

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Enfin, le thé diminue l'infiltration monocytaire en diminuant l'expression du facteur chémotractant MCP-1 (Bose et al., 2008; Heber et al., 2014).

L'ensemble de ces effets atténue les lésions hépatiques marquées par la diminution des taux d'ALT et AST plasmatiques chez le rat et la souris (Axling et al., 2012; Bruno et al., 2008; Kim et al., 2008; Liu et al., 2015).